Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
4 mars 2013 1 04 /03 /mars /2013 10:24

raisonetsentiments.jpg  affiche-raison-et-sentiments.jpg 

 

                         

Dans l’Angleterre du début du XIXe siècle, voici le récit des destinées sentimentales de trois soeurs qui vont vivre des amours contrariées dont certaines finiront bien, dans une campagne solitaire où elles demeurent avec leur mère Madame Dashwood après la mort de leur père, dont l'entière fortune est revenue à son fils, né d’un précédent mariage. A la suite de ce douloureux événement et à la conduite de la belle fille, une peste qui leur rend la vie dure, mère et filles décident de partir poursuivre une existence plus digne, mais fatalement plus restreinte financièrement, dans une demeure du Devonshire. Mais l’éloignement de la ville et leur modeste train de vie font craindre à la mère que ses filles ne puissent trouver un mari digne de leur rang social. S’inspirant du roman éponyme de Jane Austen,  Emma Thompson a bâti un scénario solide, admirablement mis en scène par  Ang Lee,  qui a ciselé un film délicat, servi par des décors et costumes raffinés. On assiste, tout au long de cet ouvrage, cousu à petits points, au duo formé par les deux soeurs aînées, Elinor interprétée par la merveilleuse Emma Thompson qui n’est jamais si belle que lorsqu’elle cherche à s’enlaidir, et Marianne, la cadette, campée par Kate Winsle  tout aussi juste, la première privilégiant la raison, la seconde se laissant emporter par son romantisme passionné.

 

raison-sentiments-ang-lee-L-2.jpg

 

Adaptation si réussie du roman de Jane Austen qu’elle a collectionné les récompenses en 1996, au moment de sa sortie en salles, notamment l’Ours d’Or de Berlin, le Golden Globe du meilleur scénario et l’Oscar de la meilleure adaptation. Ces prix mettent l’accent sur le remarquable travail d’Emma Thompson qui a su adapter le roman en trouvant le bon équilibre entre texte et transposition cinématographique. On perçoit le regard ironique que la romancière posait sur ses contemporains, la vivacité et la fraîcheur des sentiments exprimés admirablement par le jeu des acteurs.  Hugh Grant trouve dans le personnage d’Edouard, soupirant maladroit et confiné dans une position difficile, l’un de ses plus beaux rôles. D’autre part, l’élégance très classique de la mise en scène et la subtilité des situations nous assurent un plaisant moment de cinéma.

 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

 

 raison-et-sentiments-02-g-e1287566759243.jpg

 

Partager cet article
Repost0
5 février 2013 2 05 /02 /février /2013 10:09

affiche-1-2.jpg  

 

 

Deux aristocrates brillants et spirituels, la marquise de Merteuil et le séduisant Vicomte de Valmont, signent un pacte d'inviolable amitié à la fin de leur liaison. C'est au nom de celui-ci que la marquise demande à Valmont de séduire la candide Cecile de Volanges qui doit prochainement épouser son ex-favori, M. de Bastide. Mais Valmont a entrepris de séduire la vertueuse Mme de Tourvel. Adapter un chef-d'oeuvre de la littérature en film projeté sur grand écran, soit transposer en images la beauté des phrases, est toujours un pari dangereux, mais il faut reconnaître à Stephen Frears de l'avoir accompli brillamment et d'offrir au 7e Art un bijou facetté avec virtuosité et délicatesse, donnant aux images la fraîcheur et la grâce des merveilleuses toiles d'un Boucher, d'un Fragonard ou d'un Watteau. Christopher Hampton, qui a conçu l'adaptation, a su conserver l'essentiel du texte, sans que la transposition ait trop à souffrir de passer des propos épistolaires aux dialogues. " Ce qui m'intéresse chez les personnages de Laclos, c'est la vérité des sentiments et leur actualité. Et puis resserrer les images sur les couples, c'est privilégier la spontanéité. Les plans larges donnent un effet guindé, culturel, historique, que je veux absolument éviter. Pour la même raison, j'ai préféré des comédiens américains aux comédiens anglais. Les Anglais ont un jeu formel, les Américains, émotionnel. " - disait Frears au moment de la sortie du film en 1989.

 


17380.jpg

 

Tourné au château de Neuville, dans un décor digne des plus belles pages du XVIIIe siècle, ce long métrage ne laisse rien au hasard  : mise en scène soignée et élégante où tout est voué au culte du raffinement et de la beauté et, ce,  au service d'une société privilégiée qui a fait du désir et du plaisir l'essentiel de sa vie. Mais dans cette fable cruelle où la séduction se pratique comme l'art de la guerre, les illusions des sens vont bientôt laisser place aux désillusions des sentiments, si bien que le vicomte finira par céder à l'amour et la marquise de Merteuil à la jalousie et au déshonneur. Les deux principaux personnages sont interprétés par des acteurs de premier plan : Glenn Close, magnifique marquise qui semble invulnérable tant elle exerce sur elle-même une maîtrise qui semble ne jamais pouvoir être ébranlée et qui, néanmoins, le sera. Quant à John Malkovitch, en prince des alcôves et démon de la stratégie, il est tout simplement terrifiant de perversité  et trouve là un de ses meilleurs rôles. Le film doit beaucoup à leur présence maléfique et à leur beauté hautaine. A leurs côtés, l'adorable Michelle Pfeiffer est une Madame de Tourvel fragile et délicate, un véritable petit Saxe que le vicomte va se plaire à briser entre ses doigts et dont la douleur est rendue de façon bouleversante par la jeune actrice. Victime consentante de ce jeu élaboré cyniquement par le couple maudit Merteuil/Valmont, elle sera toutefois celle qui sauvera la morale : la marquise tombera enfin de son piédestal et Valmont se laissera tuer en duel.

 

liaisons-dangereuses-88-03-g.jpg

 

Réussite indiscutable, ce film d'époque n'en reste pas moins d'actualité. Il y a aujourd'hui encore dans notre société permissive des Valmont qui savent user et abuser des autres afin d'assouvir leur volonté de puissance et de séduction, et des Madame de Merteuil prêtes à toutes les compromissions pour parvenir à leurs fins et satisfaire leurs vanités. Oui, le monde n'a guère changé, sinon que le décor et les toilettes, le raffinement des objets, la grâce des coloris sont rarement à ce niveau d'élégance. Et surtout que la belle langue française n'est plus parlée et écrite  à ce degré de perfection. Il y  a eu depuis lors beaucoup de relâchement ... Au final, nous n'avons conservé au XXIe siècle que le plus mauvais : la privauté des moeurs.

 


Pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

 

les_liaisons_dangereuses_dangerous_liaisons_1988_reference.jpg

 

Partager cet article
Repost0
17 décembre 2012 1 17 /12 /décembre /2012 11:47
ROYAL AFFAIR de NIKOLAJ ARCEL

Au royaume de Danemark, en ce XVIIIe siècle plein de bruit et de fureur, règne le roi Christian VII (1749 - 1808), intelligent mais immature, que son éducation brutale a fait sombrer dans la paranoïa et qui vient d'épouser Caroline-Mathilde de Hanovre, une princesse anglaise de 15 ans, qu'il délaissera le mariage tout juste consommé, pour batifoler avec des putains et partir faire un tour d'Europe de deux années. La jeune reine enceinte va mettre au monde un garçon et bientôt tomber sous le charme du médecin de son royal époux Johann Struensee qui, ayant gagné la confiance du souverain et inspiré les philosophes des lumières, entend jouer de son influence et mener des réformes humanistes dans un royaume corseté dans des principes d'un autre âge.

 

L'histoire est réelle mais le scénario trop lâche et les dialogues trop vagues pour rendre crédible la face psychologique et la vraisemblance historique qui feront que le docteur Struensee, après le coup d'état fomenté par lui, va régner à la place d'un roi qui a horreur d'être roi et conduire des réformes audacieuses comme la suppression de la torture,  avec l'appui de la jeune reine qui est devenue sa maîtresse. Il y avait pourtant matière à composer un film passionnant, à sonder les coeurs et les esprits, à expliciter les situations, à argumenter de façon à mieux éclairer les réformes en cours et les  personnages, mais Nikolaj Arcel s'est contenté de faire défiler sous nos yeux, durant 2h15, un très beau livre d'images et des héros inconsistants et terriblement ennuyeux qui semblent figés dans une posture beaucoup trop manichéenne à mon goût : il y a la reine ravissante et malheureuse, le roi  déséquilibré, sujet à des hallucinations et qui finira fou, l'éminence grise d'une gravité inaltérable qui terminera ses jours sur l'échafaud devant la foule compacte d'un peuple qu'il a tenté bien en vain de libérer, enfin les bons et les méchants qui ne sont autres que le clergé et la noblesse bien entendu. Mais ce film a du moins  le mérite de nous montrer que peu de choses ont changé en ce monde depuis le XVIIIe siècle et que les privilégiés sont toujours récalcitrants dès qu'il s'agit de céder, ne serait-ce qu'une part de leurs privilèges... Malheureusement, pas une once d'humour ne vient égayer cet opus qui se focalise exclusivement sur les noirceurs du pouvoir, les petites  trahisons, les jeux d'influence, tout cela survolé et sans épaisseur, hélas !

 

09ROYAL SPAN-articleLarge 

 

Oui, un film décevant par manque d'ambition et d'ampleur et une direction d'acteurs aussi languissante et pusillanime que le scénario. Mikkel Boe Folsgaard, dans le rôle du roi Christian VII, est le seul vraiment crédible de par sa ressemblance avec le personnage et son interprétation fantasque. La charmante Alicia Vikander, qui était une délicieuse Kitty dans Anna Karénine, traverse le film avec grâce et élégance mais sans ferveur et sans minauderies d'ailleurs, quant à Mads Mikkelsen, dans le rôle de Johann Struensee, il nous accable pendant plus de deux heures d'une moue désabusée et irritante et se glisse dans la peau du célèbre médecin sans lui insuffler un soupçon de passion et un brin  de subtilité. Reste des prises de vue qui sont belles, des robes, des éclairages, des paysages de neige qui composent un fort joli décor et tentent de subvenir aux insuffisances d'un film sans inspiration.

 

 Pour consulter les articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

ROYAL AFFAIR de NIKOLAJ ARCEL
ROYAL AFFAIR de NIKOLAJ ARCEL
Partager cet article
Repost0
7 décembre 2012 5 07 /12 /décembre /2012 11:28
ANNA KARENINE de JOE WRIGHT

   

Russie, 1874, la belle et ardente Anna Karénine jouit de tout ce à quoi ses contemporains aspirent : mariée à Karénine, un haut fonc­tionnaire du gouvernement à qui elle a donné un fils, elle a atteint un éminent statut social à Saint-­Pétersbourg. À la réception d’une lettre de son incorrigible séducteur de frère Oblonski, la suppliant de venir l’aider à sauver son mariage avec Dolly, elle se rend à Moscou. Au cours de son voyage, elle rencontre la comtesse Vronski que son fils, un charmant officier de la cavalerie, vient accueillir à la gare. Quelques brefs échanges suffisent pour éveiller en Anna et Vronski une attirance mutuelle. C'est ainsi que commence l'un des plus beaux romans de la littérature russe, maintes fois porté à l'écran sous les traits de Greta Garbo, de Vivien Leigh ou de Sophie Marceau. Aussi cette nouvelle version était-elle attendue avec perplexité. Comment Joe Wright, metteur en scène des plus classiques, envisageait-il cette oeuvre immense et de quelle façon allait-il nous la servir ? En recourant à l'artifice osa-t-il proclamer ! Et le pari est gagné, car le metteur en scène offre à notre gourmandise visuelle un plat de choix, une transposition en images qui ne se contente pas d'être, comme les précédentes, une jolie mise en scène mais reconsidère l'oeuvre différemment, selon les ressources du 7e Art qui sont autres que celles de la littérature. Nous sommes là en présence d'une véritable...recréation.

 

imagesCAZTI6WP.jpg Anna-Karenine-.jpg

 

Ce n'était certes pas facile. Il fallait de l'audace et de l'imagination et Joe Wright, l'auteur d'Orgueil et préjugés et de Reviens-moi, en a eues et vient de signer son film le plus ambitieux et le plus abouti. Parmi les différents personnages se détache Anna, une jeune femme de la haute société, mariée sans amour à un homme irréprochable et qui va, à la suite d'un coup de foudre, céder à la passion la plus folle et la plus aveugle avec un jeune officier brillant et superficiel. La lutte d'Anna pour ne pas se laisser entraîner par ses sentiments est le thème central du roman et du film mais ne s'arrête pas là. En effet, Anna est parfaitement consciente de la fausseté de la situation qui va la conduire à tromper son mari, à abandonner son fils et à fuir avec son amant dont elle attend un enfant, si bien que l'angoisse et le remords ne vont pas tarder à susciter en elle et Vronski une incompréhension réciproque qui aura raison de leur passion, si bien qu'Anna, en proie à une renonciation désespérée et ne voyant plus d'issue à son existence, finira par se jeter sous un train. En parallèle à cet amour malheureux, il y a celui heureux de Kitty et de Lévine qui est essentiel à l'équilibre du roman et du film, car il permet un jeu alterné de rapprochements et d'oppositions et sera merveilleusement stylisé par le recours au lac des cygnes dans la chorégraphie savante et plus grave que légère de Sidi Larbi Cherkaoui où s'affrontent le cygne blanc (la ravissante Kitty interprétée par Alicia Vikander) et le cygne noir (la touchante et émouvante Anna, habitée et interprétée par Keira Knightley).

 

 

1799039_3_5d12_jude-law-et-keira-knightley-dans-le-film_bf2.jpg

 

La stylisation est la grande réussite du film. Elle fait merveille en englobant le sujet du roman-fleuve dans les arcanes d'une vision grandiose, celle de la quête désespérée de l'inaccessible, de la représentation d'une perpétuelle comédie humaine, d'un impressionnant opéra baroque ou faiblesse et grandeur sont intimement liées et où les dilemmes restent bien présents qu'ils soient d'ordre moral, affectif ou social. L'esprit de Tolstoï veille et Wright n'a pas oublié de rappeler  que les défaites morales ne sont jamais que provisoires, que la nécessité d'un changement est dans l'ordre des choses et que le retour à la vie simple est le meilleur des ressourcements. Servi par des images d'une extrême beauté où un décor s'ouvre comme une porte sur un autre plus beau encore, le film de Wright joue de l'artifice le plus subtil pour revisiter Tolstoï selon un rythme nouveau, une esthétique qui use d'un phrasé différent de celui des mots, mais n'en est pas moins fort et persuasif. Keira  Knightley nous donne une version non seulement touchante de par sa beauté et sa vulnérabilité d'Anna, mais elle en rend la sensualité plus prégnante sans qu'il y ait besoin de scènes érotiques - et on s'en félicite - ce qui en décevra plus d'un - tandis que Karénine est campé par un Jude Law tout en retenue qui exprime parfaitement la complexité d'un personnage partagé entre froideur et bonté, ambition et générosité. Quant à Vronsky joué par l'acteur Aaron Taylor-Johnson, il est probablement le seul point faible du film et la seule erreur de casting : trop inconsistant, trop falot, on a quelque peine à croire que sa suffisance et sa superficialité aient pu subjuguer la délicieuse Anna au point de ruiner sa vie. Pour moi, incontestablement, le meilleur film de l'année car le plus innovant sur le plan esthétique.

 

 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

 

anna-keiranina-L-hWSYDG.jpg anna-karenine-de-joe-wright-10786540rjugg_2587.jpg

 

Partager cet article
Repost0
10 novembre 2012 6 10 /11 /novembre /2012 14:43

Il-etait-une-fois-en-Amerique.jpg   

    

Le 3 décembre 1933, aux Etats-Unis, la prohibition vit ses dernières heures. Noodles et ses amis d'enfance, des truands enrichis grâce à la contrebande d'alcool, doivent effectuer une dernière livraison. Pour les sauver d'eux-mêmes, Noodles a donné ses amis. Mais l'arrestation tourne à la boucherie et tous sont tués. Anéanti, Noodles s'installe dans une fumerie d'opium du quartier chinois et laisse les souvenirs remonter à la surface. Quarante ans plus tôt, dans le quartier de Lower East Side, peuplé d'émigrants et de crève-la-faim, ils formaient une bande de gamins débrouillards déjà prêts à affronter tous les dangers pour sortir de la misère. Lui était séduit par l'inaccessible Deborah. De menus larcins en coups de plus grande ampleur, la bande de compères s'était peu à peu introduite dans le milieu de la criminalité, tout en cultivant une profonde amitié. Mais avec le temps, ces amitiés vont être mises à rude épreuve et Noodles sera trahi par Max,  celui avec lequel il avait passé, depuis l'adolescence, un pacte indéfectible.

 

Ainsi le film se déroule-t-il à New-York, à trois périodes différentes : les années 1920 dans un quartier juif populaire où nous assistons aux premiers faits d'arme de cette bande tumultueuse, à leurs premières amours et à  la naissance de leur amitié, principalement entre Noodles et Max ; puis les années 30 qui correspondent à leur ascension criminelle dans l'Amérique de la prohibition ; enfin les années 60 où, après les années vécues en prison, Noodles revient sur les lieux de sa jeunesse, retrouve sa bande et se confronte à son passé. Cela grâce à un montage complexe et savamment dosé qui joue avec les fondus enchaînés, les lumières nocturnes, les brumes opaques et rend plus nostalgiques les réminiscences, par exemple un tableau ou une fenêtre qui sert subitement de prolongement à un événement ancien. C'est le cas lorsque Noodles, après avoir aperçu une photo de Deborah, son amour, la revoit enfant dansant dans un dépôt encombré d'objets hétéroclites. Lors de cette scène, l'une des plus belles du film, la jeune Jennifer Connelly fait preuve d'une grâce miraculeuse sur la musique tout aussi miraculeuse de Morricone.

 

article-once-upon-a-time-in-america.jpg

 

Tout cela présenté avec un art accompli qui me rappelle Visconti dans un tout autre registre, mais avec le même souci du détail et le soin extrême porté à la reconstitution. Sergio Leone a alors 54 ans et, derrière lui, huit chefs-d'oeuvre. Celui-ci sera donc le dernier puisqu'il meurt prématurément six ans plus tard, alors qu'il travaillait à un projet ambitieux sur le siège de Léningrad. Ce film ultime fait figure de testament et il y a de cela dans sa composition en forme d'opéra crépusculaire ou de symphonie pathétique sur des vies irrémédiablement gâchées et sur la chute inéluctable des personnages, petits caïds qui ne respecteront même pas leur pacte d'amitié. On constate à quel point le réalisateur avait sur l'humanité une vision désenchantée. C'est d'ailleurs une oeuvre sur le désenchantement, celui de l'amitié d'abord et de l'amour ensuite, les femmes ayant un rôle peu glorieux dans cet opus consacré à la virilité. Elles ne sont là que comme objets sexuels ou victimes, victimes des hommes et d'elles-mêmes dans une perspective très sombre de la réalité amoureuse et de la féminité. On sait que, lors de sa sortie, le film a profondément heurté les ligues féministes de l'époque et on le comprend. Les scènes des deux viols sont pénibles et auraient pu être écourtées sans dommage.

 

il-etait-une-fois-en-amerique-1984-02-g.jpg

 

  

Pour consulter l'article consacré à Sergio Leone, cliquer sur son titre :

 

SERGIO LEONE OU LE CINEMA COMME OPERA BAROQUE

 

Et pour prendre connaissance des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer  ICI

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

 32703.jpg

 

Partager cet article
Repost0
27 août 2012 1 27 /08 /août /2012 11:09

barbara.jpg  

 

Eté 1980. Barbara est chirurgien-pédiatre dans un hôpital de Berlin-Est. Soupçonnée de vouloir passer à l’Ouest, elle est mutée par les autorités dans une clinique de province, au milieu de nulle part. Tandis que son amant Jörg, qui vit à l’Ouest, prépare son évasion, Barbara est troublée par l’attention que lui porte André, le médecin-chef de l’hôpital. La confiance professionnelle qu’il lui accorde, ses attentions, son sourire... Est-il amoureux d’elle ? Est-il chargé de l’espionner ? D'autre part, le malheur de la population ne peut en aucun cas la laisser indifférente. Dans ce monde clos où chacun espionne chacun, quelle place va-t-elle parvenir à trouver pour survivre ? Ce n'est pas sans raison, que l'affiche nous la montre de dos, car véritablement Barbara se trouve, dès le début de l'histoire, le dos au mur. Cette nouvelle vie, au fin fond d'une sinistre province, est-elle ou non acceptable ? Emmurée dans son silence et son opposition, comment parviendra-t-elle à conserver sa dignité , comment échappera-t-elle à la lente érosion de l'ennui et de la solitude ?

 

images-copie-1.jpg  


 

Sobre, dépouillé à l'extrême, ce quatuor à cordes, où chacun des personnages joue en permanence sur la plus sensible, est un moment à part dans la production actuelle. Centré sur le personnage de Barbara, admirablement campé par Nina Hoss impénétrable à souhait, cet opus montre, à travers les faits et gestes de l'héroïne, le lent cheminement qui va la conduire à renoncer à son projet initial pour emprunter une tout autre voie. Celle-ci se révèlera plus conforme aux convictions intérieures que cette expérience douloureuse n'a pu manquer de lui inspirer. Ainsi le malheur des autres peut-il engendrer une forme de résistance et d'apaisement intérieur. En offrant sa compassion généreuse à des êtres en proie au désespoir, Barbara fait basculer sa propre existence et s'engage sur le chemin inverse de celui prévu avec son amant. La désespérance, que ne cesse de générer un régime totalitaire pervers et inhumain, provoque en elle un sursaut d'humanité. C'est le mal environnant qui lui fait choisir le bien qu'elle dispensera en soignant, en étant présente, et c'est ce désert  de l'âme qui parvient à lui inspirer des actes de pur désintéressement et de fraternité profonde. Un film original de par son thème, sa mise en scène ponctuelle, sa lenteur calculée, sa réflexion entre la fuite et la résistance, entre le désir de vivre et celui de s'accomplir. A noter également la présence physique très forte de l'acteur Ronald Zehrfeld, formidable dans le rôle du médecin-chef André qui conserve jusqu'à la fin son mystère et son ambiguïté.

 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN & MEDITERRANEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN  

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

 

 barbara-8.jpg

 3792.jpg

 

Partager cet article
Repost0
26 août 2012 7 26 /08 /août /2012 08:40
PORTRAIT DE FEMME de JANE CAMPION

En 1872, Isabel Archer, une jeune Américaine, va rendre visite à ses cousins anglais, les Touchett. Elle les surprend par sa liberté de ton et, surtout, par son esprit  indépendant. C'est ainsi qu'elle refuse successivement les propositions de mariage pourtant financièrement fort avantageuses de lord Warburton et de Caspar Goodwood, un richissime admirateur qui a traversé l'Atlantique pour déposer son amour et sa fortune à ses pieds. Isabel a d'autres centres d'intérêt. Elle ne comprend pas très bien Serena Merle, une belle compatriote qu'elle a rencontrée chez monsieur Touchett, mais tombe sous le charme de sa grâce et de son élégance. A la mort de monsieur Touchett, le fils du défunt, Ralph, a soin de léguer à Isabel une confortable rente...Devenue riche, la jeune femme commence par voyager afin de mettre un peu d’ordre, croit-elle, dans son esprit exigeant, épris d’indépendance, mais se fourvoyer gravement, dès son retour, en cédant aux avances d’un dilettante peu soucieux d’éthique amoureuse qui ne l’épousera que pour sa fortune et surtout pour que celle-ci revienne plus tard à sa fille Pansy, qu’il a eue de sa longue liaison avec Serena Merle.

 

Histoire d’une vie ratée, Portrait de femme (1996) est une jolie variation sur les méprises de l’intelligence et des sentiments, en un narratif un peu longuet qui, malgré sa subtilité, ne parvient pas à convaincre pleinement.  Sans doute parce que le personnage de Osmond, interprété par  John Malkovitch, très peu convaincant et aussi peu habité que possible, détruit passablement  cette composition centrée autour d’une femme qui ne cesse de se refuser et finit par devenir la prisonnière de sa propre défiance. Manœuvrée par un  mari sans scrupules qui se joue d’elle, Isabel est aveuglée par une coupable indifférence et se mure dans une froideur et une fierté blessée qui n’arrangent en rien son existence. Malheureusement, il manque à cette étude féminine, librement inspirée d’une œuvre de Henry James, une approche plus réaliste du quotidien, l’opus se plaisant à rester dans le registre d’une esthétique rigoureuse et savamment orchestrée, grâce à une mise en scène somptueuse et une  reconstitution sublime de la fin du XIXe siècle. Jane Campion, ayant un goût prononcé pour tout ce qui touche aux objets, aux toilettes, aux jardins, à  la campagne, aux bouquets de fleurs, travaille davantage en peintre qu'en réalisatrice. De plus, la musique est toujours un enchantement, si bien que ce  film, malgré ses faiblesses, se laisse regarder avec plaisir, tant il est esthétiquement beau.

 

J’ai déjà dit ce que je pensais de l’interprétation décevante de John Malkovitch dans le personnage égoïste et dominateur de Osmond qui n’est pas loin de celui qu’il campait dans  Les liaisons dangereuses, mais alors avec quel panache, tandis que les femmes sont magnifiques. En premier lieu Nicole Kidman, belle, distante, tourmentée, figée dans une solitude et un enfermement volontaire qui la coupent du monde extérieur, face à une Serena Merle jouée par la belle Barbara Hershey, maillon fort de ce trio et manœuvrière dépassée par ses propres intrigues, donnant la réplique à son âme damnée Gilbert Osmond. A travers de longues pages de silence, Jane Campion nous invite à introduire notre propre interprétation des faits. Elle n’impose rien, elle se contente de dévoiler, de suggérer, de placer ses personnages dans une dualité permanente, nous incitant à entrer dans le mystère de leur conscience et de leurs sentiments.  Le personnage de Ralph (Martin Donovan), le cousin d’Isabel, qui se meurt lentement de phtisie, est la note la plus touchante de cet opus qui souffre d’un scénario un peu trop éthéré.

 

 

Pour prendre connaissance de l'article consacré à Jane Campion, cliquer sur son titre :

 

JANE CAMPION, UN CINEMA AU FEMININ

 

Et pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :
 

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

PORTRAIT DE FEMME de JANE CAMPION
Partager cet article
Repost0
13 juin 2012 3 13 /06 /juin /2012 11:59
VIOLENCE ET PASSION de LUCHINO VISCONTI

 

Avant-dernier film de Luchino Visconti,  ce huis clos mélancolique jette une lumière aveuglante sur la vanité de notre condition.

Un vieux professeur, vivant seul dans sa maison romaine remplie de livres d’art, de tableaux et de souvenirs, est dérangé par l’intrusion de Bianca Brumonti, une comtesse qui insiste pour louer le deuxième étage de sa maison, afin d’y loger son étrange tribu : sa fille Lietta, Stefano, le fiancé de cette dernière ainsi qu’un gigolo, Konrad. A titre de loyer, elle lui offre un tableau, une pièce unique qui manque à sa collection. Dès lors, sa vie se trouve bouleversée par l'irruption de cette famille extravagante dont tous les codes moraux sont renversés. Le professeur est ulcéré par la vulgarité de ce monde aristocratique en voie d’embourgeoisement, dépourvu de culture et d’éducation. Mais il est aussi fasciné par l’intelligence de Konrad, cachée sous son cynisme de prostitué, et se lie d’amitié avec le jeune homme, qui devient pendant une courte période le fils qu’il n’a jamais eu. Œuvre testamentaire de Visconti déjà miné par la maladie – il mourra deux ans plus tard - Violence et passion, tourné en 1974, est un huis clos où évolue, dans l’ambiance feutrée d’un appartement cossu de Rome, un professeur (magnifique Burt Lancaster) collectionneur de portraits de famille anglais du XVIIIe siècle – des conversation  pieces –, attaché à ses habitudes au point qu’il ne peut envisager de changer quoi que ce soit dans l’ordonnance de sa vie et celle de ses collections. Jusqu’à ce que déboule subrepticement dans son existence la marquise Brumonti, interprétée par une Silvana Mangano aussi souveraine que dans Mort à Venise, épouse d’un riche industriel sans doute fasciste, qui entend bien s’installer dans sa demeure. Pour parvenir à ses fins, elle va utiliser toutes les ressources de sa séduction avec, pour seul objectif, celui de vaincre ses dernières réticences. Si bien que le vieil homme va bientôt voir son univers basculer dans un désordre cynique à souhait et cette famille prendre avec impertinence possession des lieux et mettre à mal ses habitudes. Mais, au fil des jours, ce dérangement va le distraire et l’amuser, d’autant que l’amant de la marquise, le séduisant Konrad (Helmut Berger irrésistible) détient un lourd secret.

 

27712__1v.jpg

 

Admirablement interprété par des acteurs au faîte de leur talent, filmé dans des décors d’une beauté décadente et précieuse et d’une mélancolie profonde, ce film est un hommage à l’art, à un passé soudain vulnérable que la modernité ne cesse plus de désenchanter. Un chant d’adieu bouleversant.

 

 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN & MEDITERRANEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

VIOLENCE ET PASSION de LUCHINO VISCONTI
VIOLENCE ET PASSION de LUCHINO VISCONTI
Partager cet article
Repost0
21 mars 2012 3 21 /03 /mars /2012 15:57

Iron_lady_film_poster.jpg    

 


Plus qu'un film sur le destin d'une figure incontournable de la vie politique européenne de la seconde moitié du XXe siècle, La dame de fer est une réflexion sensible sur une femme vieillissante, dont la vie a été, certes, exceptionnelle mais qui se trouve confrontée - comme toutes les autres - à la maladie, la vieillesse et la solitude. L'accent est mis ainsi sur la condition humaine d'un être perdant peu à peu ses ressources et son autonomie, cela grâce à un scénario qui s'est refusé à se focaliser sur les grandes heures de ce destin hors normes et lui a préféré les pages plus discrètes et méconnues de cette fille d'épicier qui, à force de volonté et de détermination, a réussi à démanteler les barrières peu poreuses  liées au sexe et au milieu social. C'est également un film sur le pouvoir et le prix à payer pour y parvenir, d'autant plus si on est une femme venue de nulle part. Aussi ce portrait imaginé est-il troublant, car il confère à celle que l'on reléguait dans le seul et unique rôle de dame de fer requise par la grandeur de l'Angleterre, une vision autrement plus humaine servie, il est vrai, par le charisme d'une actrice de l'envergure de Meryl Streep, qui n'aura pas usurpé son Oscar.   

  

Tout a déjà été écrit de quelques-unes des pages essentielles des deux mandats de ce premier ministre de Sa majesté pour que je n'en rajoute pas inutilement, mais l'opus est néanmoins un formidable portrait de femme en proie à ses obsessions, à ses chagrins, à ses convictions, dont le combat principal a  été celui qu'elle s'est livrée à elle-même pour atteindre ses objectifs et écrire une page de l'histoire de la Grande-Bretagne dans un souci constant de grandeur et de puissance. Réalisé par une femme Phyllida Lloyd d'après le scénario d'une autre femme Abi Morgan, ce portrait est beau et émouvant mais n'échappe pas à quelques fautes de goût, principalement dans les apparitions soudaines du mari disparu dont on sait qu'il formait avec Margaret un couple uni. C'est sans doute cette solidité de sa vie maritale qui a permis à madame Thatcher de consolider le socle sur lequel reposait sa carrière de chef de gouvernement. Privilégiant la petite histoire aux dépens de la grande, on comprend que le film ait déçu, bien qu'il ait  le mérite - et non des moindres - de nous montrer à quel point chacun, à un moment donné de sa vie, aussi illustre ou modeste soit-elle, est confronté aux mêmes détresses et aux mêmes abandons. Aussi, pour conclure, citerai-je cette réplique mise dans la bouche de l'actrice et sensée avoir été prononcée par le premier ministre lors d'une visite à son médecin : " De nos jours, les gens ne pensent plus : ils ressentent ! "Comment vous sentez-vous ?", "Je ne me sens pas à l'aise"...Vous savez quel est l'un des grands problèmes de notre époque ? C'est que nous sommes gouvernés par des gens qui se soucient plus de sentiments que de pensées ou d'idées. Moi, c'est cela qui m'intéresse. Demandez-moi ce que je pense, pas comment je me sens !

 

Le must du film en quelque sorte, un must qui permet d'oublier le recours trop permanent à des connotations inutilement sentimentales.

 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

 

201203062128_zoom.jpg

 

Partager cet article
Repost0
13 février 2012 1 13 /02 /février /2012 09:43

Affiche-la-taupe.jpg   

 

1973. La guerre froide empoisonne toujours les relations internationales. Les services secrets britanniques sont, comme ceux des autres pays, en alerte maximum. Suite à une mission ratée en Hongrie, le patron du MI6 se retrouve sur la touche avec son fidèle lieutenant, George Smiley. Pourtant, Smiley est bientôt secrètement réengagé sur l’injonction du gouvernement, qui craint que le service n’ait été infiltré par un agent double soviétique. Epaulé par le jeune agent Peter Guillam, Smiley tente de débusquer la taupe, mais il est bientôt rattrapé par ses anciens liens avec un redoutable espion russe, Karla. Alors que l’identité de la taupe reste une énigme, Ricki Tarr, un agent de terrain en mission d’infiltration en Turquie, tombe amoureux d’une femme mariée, Irina, qui prétend posséder des informations cruciales. Parallèlement, Smiley apprend que son ancien chef a réduit la liste des suspects à cinq noms : l’ambitieux Percy Alleline, Bill Haydon, le charmeur, Roy Bland, qui jusqu’ici, a toujours fait preuve de loyauté, le très zélé Toby Esterhase… et Smiley lui-même. Dans un climat de suspicion, de manipulation et de chasse à l’homme, tous se retrouvent à jouer un jeu dangereux qui peut leur coûter la vie et précipiter le monde dans le chaos. Les réponses se cachent au-delà des limites de chacun…


"La Taupe", mis en scène par le Suédois Tomas Alfredson, nous prend à témoin de la lutte feutrée en apparence et impitoyable en réalité que se livrent l'Occident et l'URSS. Le scénario de Bridget O'Connor et Peter Straughan compresse, il est vrai, en 2 heures de projection, les innombrables méandres du roman de John Le Carré et les inépuisables démêlés des agences du système des renseignements britanniques après une opération ratée derrière le rideau de fer, afin de tenter de découvrir l'identité de l'agent double infiltré au coeur du quartier général du M16. Il est plus que probable que John Le Carré s'est inspiré alors des légendaires "Cinq de Cambridge" qui officièrent durant les années 37/47, sans doute les indicateurs les plus efficaces de l'Occident au service des Soviets. Le plus connu était Harold Adrian Russel Philby. On sait qu'à l'époque Cambridge était truffé de sympathisants communistes. Le second du groupe n'était-il pas le fils d'un ancien ministre, haut dignitaire de l'Empire britannique, Donald MacLean, qui incarnait par son affabilité l'agent secret idéal, à la façon dont l'acteur Colin Firth compose le personnage de Bill Haydon ? Alors que "Les cinq de Cambridge" opéraient lors de la lutte clandestine contre le fascisme, "La Taupe" se situe durant la guerre froide des années 70. Tomas Alfredson excelle dans la restitution d'une atmosphère trouble à souhait grâce à sa collaboration avec le plus dandy des couturiers : Paul Smith. Tout est conçu pour composer des images qui nous replongent dans le décor d'une Angleterre qui sortait difficilement de l'austérité héritée de la guerre. On y perçoit la touche de rouge des cabines téléphoniques, des autobus à impériale, des boîtes aux lettres, couleur qui contraste savamment avec la tonalité sombre et sévère des images, le vestiaire des costumes au charme rétro très british porté par les protagonistes, les pièces d'échecs qui font partie intégrante de l'intrigue, puisqu'elles servent à fixer notre attention sur les personnages suspectés d'être la taupe, puis la théière, le mobilier et autres objets qui renvoient en permanence à l'époque par petites touches, chacune ayant son importance et son subtil écho. Et enfin, il y a les acteurs et leur remarquable interprétation, dont celle centrale et captivante de George Smiley prêt à sacrifier sa moralité sur l'autel des exigences de la nation. L'anti James Bond, aussi discret que l'autre était brillant, et dans la peau duquel se glisse de façon magistrale Gary Oldman, dont c'est là l'un des grands rôles. Après des années difficiles, il revient sur le devant de l'écran dans une composition complexe, riche de mille nuances, celle d'un agent solitaire assumant ses paradoxes dans l'intérêt d'un bien supérieur. En définitive, il est celui à qui incombe les basses besognes, de façon à ce que les citoyens ordinaires, forcément honnêtes et ignorants de ces choses, puissent dormir tranquilles dans leur lit.

 

Ceux qui l'entourent sont au diapason, que ce soit Colin Firth, le joli coeur doué pour séduire les hommes comme les femmes, toujours vêtu de costumes élégants, un sourire ironique au coin des lèvres, ou Toby Jones dans celui de l'ambitieux Sir Percy Alleline qui tente de tenir les rênes en ces temps troublés et joue avec le feu, ou encore Ciaran Hinds dans la peau de Roy Bland, agent virtuose et polyglotte, très introduit à l'Est. Il se ralliera bientôt à Alleline dans l'espoir d'une promotion rapide. Le film rend admirablement le climat délétère et malsain de ce milieu, où le soupçon est devenu leitmotiv, les trahisons et les retournements fréquents, où chacun a ses fêlures que les autres s'emploient à exploiter et où l'on joue constamment aux échecs dans un monde où deux blocs s'affrontent sans merci, au prix des coups les plus tordus et les plus sordides. Si l'intrigue est parfois un peu difficile à suivre, elle ne se relâche pas un instant et se décline avec une rare intelligence, tant dans le déroulé des images que dans les dialogues percutants, les flash-backs qui donnent une tonalité étrange et subtile au film. La bande sonore, oeuvre du jeune Alberto Iglesias, colle parfaitement au sujet et a le mérite de se fondre dans l'action en la rehaussant, sans la gêner. A coup sûr, l'un des films les plus aboutis sur l'espionnage qu'il nous a été donné de voir.

 


Pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 


255aa36b.jpg

 

 

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : LA PLUME ET L'IMAGE
  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
  • Contact

Profil

  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.

Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


Charlie Chaplin

 

"Innover, c'est aller de l'avant sans abandonner le passé."

 

Stanley Kubrick

 

 

ET SI VOUS PREFEREZ L'EVASION PAR LES MOTS, LA LITTERATURE ET LES VOYAGES, RENDEZ-VOUS SUR MON AUTRE BLOG :  INTERLIGNE

 

poesie-est-lendroit-silence-michel-camus-L-1 

 

Les derniers films vus et critiqués : 
 
  yves-saint-laurent-le-film-de-jalil-lespert (1) PHILOMENA UK POSTER STEVE COOGAN JUDI DENCH (1) un-max-boublil-pret-a-tout-dans-la-comedie-romantique-de-ni

Mes coups de coeur    

 

4-e-toiles


affiche-I-Wish-225x300

   

 

The-Artist-MIchel-Hazanavicius

 

Million Dollar Baby French front 

 

5-etoiles

 

critique-la-grande-illusion-renoir4

 

claudiaotguepard 

 

affiche-pouses-et-concubines 

 

 

MES FESTIVALS

 


12e-festival-film-asiatique-deauville-L-1

 

 13e-FFA-20111

 

deauville-copie-1 


15-festival-du-film-asiatique-de-deauville

 

 

Recherche