Coincé sur son lit d'hôpital, la jambe dans le plâtre et le bassin en miettes, Pierre (Gérard Lanvin) râle en permanence, peste contre la nourriture infâme, l'interdiction de fumer, le désagrément des soins, la visite du "patron" et de sa cour d'internes qui lui donnent l'impression d'être "une grenouille sur la table de dissection"..."Bon rétablissement, quelle formule à la con!" - s'exclame le sexagénaire bougon. Puis, peu à peu, ce vieux ronchon s'ouvre aux autres et à la vie, au fil des rencontres avec Myriam, une infirmière attachante au rire communicatif (Claudia Tagbo), les autres malades, une adolescente boulotte qui l'insupporte d’abord en lui empruntant sans cesse son ordinateur portable, puis l'attendrit en mettant au monde à 15 ans un petit garçon, enfin le retour inespéré d'un ancien amour, celui d’une pianiste interprété par Anne-Sophie Lapix qui passe ainsi du petit au grand écran. Et, contre toute attente, ce séjour à l'hôpital signe sa renaissance.
Dans le rôle du grincheux au grand cœur et capable de susciter l’empathie, Gérard Lanvin excelle une fois encore et concoure à rendre encore plus sympathique et attachante cette comédie revigorante de Jean Becker aux dialogues incisifs et bourrés d'humour concoctés par Jean-Loup Dabadie : un remède sans effets secondaires contre la morosité.
"Bon rétablissement" est l'adaptation du roman éponyme de Marie-Sabine Roger publié en 2012 aux éditions du Rouergue. En 2010, le réalisateur de "L'Eté meurtrier", "Elisa" ou encore "Les Enfants du marais" et « Dialogue avec mon jardinier » avait déjà porté avec succès à l'écran l'un des précédents livres de cette romancière, "La tête en friche", avec Gérard Depardieu et l’irrésistible Gisèle Casadesus. Chacun de ces films porte la marque d’un humanisme sans mièvrerie, d’une incontestable finesse d’analyse et, dans ce nouvel opus, rendu plus percutant encore par les dialogues ciselés et truculents de Jean-Loup Dabadie.
Aucun autre acteur que Gérard Lanvin ne pouvait donner cette épaisseur et cette conviction à ce personnage de râleur, mal dégrossi. "Cela a été le rôle le plus reposant de ma carrière ! – avouait-il l’autre jour à des journalistes venus l’interviewer. « Le matin, je sortais de mon lit pour me recoucher sur le tournage. Le soir, je quittais le lit sur le plateau pour retrouver le mien" - plaisantait-il avec une bonne humeur communicative. L'acteur de 64 ans, couché effectivement une grande partie du film, incarne à merveille le personnage de Pierre, veuf misanthrope rongé par la culpabilité, hospitalisé à Paris après un accident dont il ne garde aucun souvenir. Renversé par une voiture et projeté dans la Seine, il a été sauvé de la noyade par un jeune prostitué, Camille (touchant Swann Arlaud), qui fait le tapin pour payer ses études. Finalement nous découvrirons dans les toutes dernières minutes de la projection le fin mot de l’histoire qui ne manque pas de sel. Comédie de caractère, charmante et pleine de tendresse, son auteur touche sa cible une fois encore et nous donne de la société une vision sans méchanceté, sans violence ni sexe, sans affrontement ni condamnation, au long d'un narratif doux-amer, bien amené, bien conduit et bien joué. Ne boudons pas notre plaisir.
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