Steve a encore fait des siennes en tentant de mettre le feu à son internat et partiellement à l’un de ses camarades, aussi sa mère est-elle invitée à récupérer son rejeton de l’établissement qui avait accepté de l’accueillir. Bien que la relation mère/fils soit particulièrement intense, l’amour ne suffit pas toujours à canaliser les débordements de ce jeune garçon hyperactif et ingérable. L’irruption dans leur quotidien de l’énigmatique voisine va leur permettre de trouver une forme de stabilité et d’équilibre. Le prodige Xavier Dolan dresse ici le portrait d’une mère "en amour" avec son fils à travers un tourbillon de cris, de rires, de chansons et un style qui peut déstabiliser certains spectateurs.
Xavier Dolan a conservé de l’adolescence une forme d’intensité qui irrigue chacune de ses oeuvres et cette dernière, en particulier, qui raconte l’histoire d’un amour fusionnel entre un ado à la violence pathologique difficilement contrôlable et sa mère, Die, une célibataire au look flashy et au langage fleuri qui est prête à tout endurer pour parvenir à lui assurer un avenir normal et à juguler sa violence. Dans cet opus débordant de créativité, le jeune Québécois dirige de nouveau Anne Dorval et Suzanne Clément, les deux comédiennes qui l’accompagnent depuis ses débuts et confirme son extrême maturité cinéphile et sa sensibilité : « Le cinéma, ce n’est pas la vie, c’est l’occasion de se rattraper sur la vie « - déclare-t-il. Et il poursuit : « La mère est toujours au centre de ma démarche, c’est la figure qui m’inspire inconditionnellement. J’ai besoin d’avoir un rapport viscéral avec ce que j’écris, je dois sentir que je maîtrise la matière de mes films, et c’est le cas avec la figure de la mère. J’ai tellement observé la mienne, je l’ai tellement écoutée parler : je la connais par cœur et, à travers elle, j’ai l’impression que j’ai appris à connaître les femmes. »
Le jeune phénomène ne cache pas non plus ce qu’il doit à Jane Campion, à Gus Van Sant et à Paul Thomas Anderson. J’ai besoins de films qui m’émeuvent, qui changent ma vie et ma façon de voir le monde – avoue-t-il. De même, que je ne conçois pas un film sans m’y investir totalement. On me reproche parfois de ne pas déléguer, mais j’aime créer les costumes, je suis passionné de mode et j’ai une vision très précise de ce que je veux, dans le moindre détail. Si je ne fais pas de cinéma, je pense que je meurs.
A 19 ans, Xavier Dolan utilise les gains obtenus en tant qu’acteur enfant pour réaliser son premier film "J’ai tué ma mère", récit autobiographique et fiévreux dans lequel il prête ses traits à un adolescent en rupture. Le film constitue le premier volet d’une trilogie sur l’amour impossible, complétée par "Laurence Anyways" qui affirment son style sensoriel entre pur romantisme et esthétisme débridé. Depuis, le jeune homme a signé dans l’urgence un thriller psychologique "Tom à la ferme" avant de gagner sa place dans la sélection officielle du Festival de Cannes grâce à "Mommy". Une consécration pour un réalisateur de 25 ans.
Avec "Mommy", Xavier Dolan confirme un talent d’une réelle puissance, d’une créativité époustouflante, d’une poignante vérité, parfois gâté par trop d’hystérie et quelques tics agaçants qu'il devra corriger s'il veut atteindre l'excellence à laquelle, visiblement, il aspire.
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