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12 septembre 2016 1 12 /09 /septembre /2016 10:17
Frantz de François Ozon


1919 - le film s’ouvre sur le calme d’une bourgade allemande endeuillée par la guerre, où une jeune fille (Paula Beer) vient chaque jour fleurir la tombe de Frantz, son fiancé mort au front. Le reste de ses journées, elle les passe à consoler ceux qui auraient dû devenir ses beaux-parents et qui la considèrent comme leur fille. L’arrivée d’Adrien, soldat français tout juste démobilisé (Pierre Niney), va complètement bouleverser leurs vies. Cet opus de François Ozon s’inspire d’une pièce de Maurice Rostand, plaidoyer pacifiste rédigé peu après la fin des hostilités et le traité de Versailles, et qui fut porté à l’écran par Ernst Lubitsch en 1932 dans « L’homme que j’ai tué ». Ozon s’éloigne du canevas formel pour donner à son film une dimension autre et broder sur le sujet une page très personnelle, un mélodrame traité d’une façon classique et élégante, d’une belle rigueur où la philosophie s’imprègne de celle d’un Cioran, soit que la vie n’est jamais qu’une balade fébrile au bord d’un abîme.

 

Ozon a choisi le noir et blanc et la langue allemande pour nous conter l’histoire de ce soldat français venu se recueillir sur la tombe d’un soldat germanique qu’il aurait connu à Paris. Invité chez les parents de ce jeune Frantz, il raconte comment il a partagé avec lui des souvenirs de jeunesse, des cours de violon et des visites au musée du Louvre où une toile de Manet « Le suicidé » les interpellait l’un et l’autre. Bientôt les parents malheureux voient en lui un fils de substitution et, malgré les remous que provoquent sa présence dans la petite ville allemande mal remise de sa récente défaite et de ses nombreux morts, la sympathie qu’ils portent à cet ennemi d’hier redonne soudain un sens à leur vie. Je ne dévoilerai pas la suite du film qui tourne autour des thèmes admirablement traités du mensonge, de l’imposture, du remord et de la difficile réconciliation entre des peuples qui se sont déchirés avec une telle violence.

 

Ozon a su user, pour nous conter cette histoire sombre, d’une imagerie délicate, d’une reconstitution d’époque subtile et soignée et d’une mise en scène extrêmement fluide, juste éclairée, par moments, de quelques notes de couleurs chargées de nous prouver que l’espérance demeure. La jeune Paula Beer est délicieuse de fraîcheur dans le rôle d’Anna, meurtrie par son deuil récent mais animée d’une vie où se devine toute la grâce d’un amour renaissant, tandis que Pierre Niney est un Adrien Rivoire dont les séquelles de cette guerre ne parviennent pas à se cicatriser et qui traverse ces lendemains en état de choc permanent. Il donne à son personnage meurtri une dimension d’un tragique presque hallucinatoire et une ferveur qui ne se dément pas. Une prestation que certains jugeront peut-être excessive et que je considère personnellement comme une introversion remarquable de rigueur et de véracité. Malgré quelques faiblesses vers la fin ( mais il est vrai que Ozon a toujours des difficultés à conclure ses films ) où une certaine lenteur ou langueur nuit à la rigueur du narratif, Ozon réalise là son film le plus abouti.  

 

Pour consulter la liste des films de la rubrique CINEMA EUROPEEN, cliquer    ICI

 

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Frantz de François Ozon
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commentaires

D
Bonjour Armelle, je confirme que Frantz est un film réussi: l'image en noir et blanc est magnifique. J'ai été touché par l'histoire et la jeune actrice allemande est remarquable. J'espère qu'Ozon en retournera un où il sera aussi inspiré. Bonne après-midi.
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V
Bravo ! Votre blog est l'un des meilleurs que j'ai vu !
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A
Bonsoir Armelle. Je viens de relire votre critique pour la deuxième fois. C'est un grand plaisir de retrouver dans ce que vous en dites tout ce que j'ai ressenti. Edmée pareillement. J'ai eu du mal "à me sortir de ce film" et dans le même temps il m'a porté et enthousiasmé. Bonne fin de soirée. Ou bonne nuit plus exactement. Je viens de voir le dernier film de Xavier Dolan. Je suis K.O et bouleversé.
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E
Ha ha, je lis le commentaire précédent et moi aussi je pensais à une homosexualité... et me trompais en effet. J'ai beaucoup aimé le film, ainsi que le fait que "l'histoire est finie" mais qu'Anna continue, ressuscitée enfin. Convalescente mais ressuscitée. Mon père avait vu la pièce d'origine et m'en avait parlé...
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M
Je me trompe ou cela parle d'une homosexualité dissimulée?
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A
Pas d'homosexualité dans ce film consacré à la culpabilité et au remord.
N
j'ai mis ce titre dans la liste des films que je souhaite voir, armelle et votre chronique m'y incite encore plus
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
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