Voilà un film qui respire la bonne santé, de ces comédies bien ficelées, bien argumentées avec des dialogues qui font mouches et des interprètes très attachants menés par un Gérard Lanvin au sommet de sa forme, et qu'on ne regrette pas d'avoir vu pour la simple raison qu'il ne nous inflige pas une seconde d'ennui et n'est pas sans rappeler avec bonheur les comédies aigres-douces d'un Claude Sautet. Oui, c'est sain, probe, sympathique, sans prétention excessive, sinon celle de nous raconter une belle histoire d'amitié entre trois hommes qui, au final, ne partagent pas grand chose, sinon le plaisir de se retrouver, de partager une table bien garnie et des vins gouleyants aussi légers et agréables que l'opus qui nous est servi. Oui, un film qui vous met de bonne humeur, ne révolutionnera certes pas le 7e Art mais a le mérite de ne céder ni à la vulgarité, ni aux clichés racoleurs et vous délivre une bonne dose de sincérité et de tendresse, ce qui n'est déjà pas si mal. Dommage que le titre soit convenu et aussi plat, ce qui explique que j'ai mis trois semaines avant de me décider à entrer dans la salle. Oui, regrettable que sur ce plan-là les réalisateurs n'aient pas eu davantage d'inspiration. Le film aurait gagné à avoir un titre plus explicite sur le sujet qu'il aborde, soit la variation des humeurs, la pudeur des émotions, la difficulté des rapports humains, les aléas de l'amitié, enfin les heures de grâce et de disgrâce des sentiments. A part cette maladresse et une mise en scène trop conventionnelle, le film est une agréable bonne surprise.
Les réalisateurs Stéphane Archinard et François Prévôt-Leygonie ont tout simplement porté à l'écran la pièce de leur composition qui, voici une dizaine d'années, avait recueilli un vif succès sur la scène et qui, transposée sur pellicule, n'a rien perdu de sa saveur, surtout qu'elle bénéficie d'une interprétation de tout premier ordre avec un Gérard Lanvin en père poule divorcé particulièrement savoureux, fort en gueule et grand coeur aux prises avec les pieux mensonges de son entourage et dont les bons sentiments et les convictions sont mises à mal ; un Jean-Hugues Anglade, écrivain en panne d'inspiration qui va la retrouver en tombant amoureux de la fille de son meilleur ami, enfin un Wladimir Yourdannof libraire qui se replonge dans la politique à la faveur des législatives pour assouvir une vengeance sentimentale, enfin Ana Girardot séduisante jeune fille trop couvée par un père tendre et tyrannique qui, à la veille de son grand oral de normal-sup, découvre qu'elle est éprise d'un quinquagénaire qui a pour autre inconvénient majeur d'être un ami de trente ans de son père. Ces personnages vont nous entraîner dans un plaisant marivaudage viril ou, plus que l'amour, c'est l'amitié qui brise les coeurs et ouvre les esprits. Tout cela est bien conduit grâce à un scénario solide, des dialogues cousus main et tellement naturels dans la bouche des acteurs qu'on a l'impression qu'ils improvisent. Un travail très honnête qui semble avoir conquis un large public avec des moments touchants, des tendresses inattendues, quelques envolées à l'intention d'une gauche caviar volontiers moralisatrice, quelques lieux communs bien sûr mais qui ne parviennent pas à ternir un film d'excellente facture. Et cerise sur le gâteau, "Amitiés sincères " n'est pas sans évoquer les années 70-80 où il n'y avait pas de honte à avoir des principes, des convictions, un certain respect de l'ordre établi, un clin d'oeil que j'ai apprécié. Un film que l'on peut revoir sans ennui.
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