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20 janvier 2011 4 20 /01 /janvier /2011 10:45
AU-DELA de CLINT EASTWOOD

               
Au-delà est l'histoire de trois personnages hantés par la mort et les interrogations qu'elle soulève. George est un Américain d'origine modeste, affecté d'un "don" de voyance qui pèse sur lui comme une malédiction. Marie, journaliste française, est confrontée à une expérience de mort imminente, et en a été durablement bouleversée, quant à Marcus, un jeune garçon de Londres, il perd l'être qui lui était le plus cher et le plus indispensable, son jumeau, et se met désespérément en quête de réponses à ses interrogations. George, Marie et Marcus sont guidés par le même besoin de savoir et la même quête, si bien que leurs destinées vont finir par se croiser dans cette tentative qui les anime de répondre, autant que faire se peut, au mystère de l'Au-delà.



Nous aurions tant aimé nous enthousiasmer de l'audace de Clint à s'aventurer dans un nouvelle voie, mais voilà c'est raté, le film se perdant dans les méandres d'une quête ésotérique insuffisamment crédible et un narratif flou qui perd pied et finit, comme le tsunami, magnifiquement filmé au tout début, par noyer les personnages, leurs propos et, par voie de conséquence, le spectateur. Nous sommes loin de ces opus si réussis que furent Sur la route de Madison ou Gran Torino, où Clint, très à l'aise à traiter des sujets qui lui correspondaient, et pour lesquels il avait longuement mûri sa réflexion, nous avait offert des opus cousus main et d'une grande force suggestive. Là, il semble bien qu'il se soit attaqué à gravir une montagne dont il ignorait les secrets et dont les sommets inaccessibles restent cachés dans les brumes. Oui, Eastwood a surestimé ses capacités et ne nous offre qu'un film long, ennuyeux, et aussi peu convaincant que possible. Tout le monde ne s'appelle pas Carl Dreyer, Ingmar Bergman ou Robert Bresson qui savaient, avec un art consommé de la suggestion, aborder les conflits de l'âme face aux questions primordiales : d'où venons-nous et où allons-nous ?  Il faut, pour ce faire, user des moyens minimums, du plus grand dépouillement et de la plus extrême simplicité, afin de parvenir à exprimer le maximum de choses et atteindre l'essentiel. Le contraire des effets recherchés ici par le réalisateur qui emploie les techniques les plus pointues et les ressources les plus sophistiquées de la cinématographie. Oui, les thèmes qui touchent de près ou de loin au monde invisible doivent être abordés avec infiniment de prudence, de façon à éviter d'argumenter dans le vide et de tenter de démontrer ce qui est indémontrable, en se limitant à approcher le mystère et à poser l'interrogation. Cela ne relève que de la foi ou de l'espérance intérieure, démarche totalement opposée à celle de Clint qui s'échine à réduire à quelques arguments pseudo-scientifiques une vie après la mort, supposée inscrite d'ores et déjà dans nos gênes. Dommage ! Il y a de sa part  une tentation d'orgueil et une maladresse à employer les moyens les plus contraires à ce genre de sujet et à s'embourber dans un démonstratif qui va à l'encontre de ce que l'on s'emploie à démontrer.

 


Preuve en est que les personnages ne parviennent pas à être le moins du monde crédibles. Même Matt Damon, pourtant excellent acteur, et Cécile de France semblent se demander ce qu'ils ont à prouver et bavardent là où il serait infiniment préférable de se taire. C'est par l'image que le 7e Art se doit de convaincre, non par les mots qui eux relèvent de la littérature ou de l'art dramatique. Et c'est d'autant plus fâcheux, que Clint connait parfaitement l'art de la mise en scène, que son ouverture avec l'irruption du tsunami est parfaitement réussie ; de même qu'il sait mieux que quiconque brosser des tableaux évocateurs et qu'il lui aurait été plus facile de convaincre s'il s'était contenté de suggérer au lieu de dogmatiser un tant soit peu sur ce qui n'est pas vérifiable. On ne peut néanmoins en vouloir à un homme aussi talentueux de se tromper. Ce film a le mérite de nous rassurer sur sa curiosité d'esprit, son souci de s'engager sur les pistes les plus hasardeuses, de sonder la mort avec les yeux d'un vivant et de fouiller avec sa caméra au-delà du dicible.

 

Pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA AMERICAIN ET CANADIEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA AMERICAIN ET CANADIEN

 

Et pour consulter l'article consacré à Clint Eastwood, cliquer également sur le lien ci-dessous :
 

CLINT EASTWOOD - PORTRAIT

 

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AU-DELA de CLINT EASTWOOD
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commentaires

E
Clint n'a pas très bien choisi ses épouses non plus, ce qui au fond est rassurant : il est comme tout le monde,capable du meilleur et du médiocre :)
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A
Tout le monde a ses faiblesses ... Edmée.
A
Tout à fait d'accord avec vous, Edmée, ce n'est nullement un navet mais on pouvait s'attendre à mieux d'un grand professionnel comme Clint. Moi aussi, j'ai tenu jusqu'au bout mais je regrette qu'il<br /> n'ait pas pris la bonne orientation pour aborder un tel sujet. Il a trop voulu démontrer et c'est là son erreur. Mais on lui pardonne volontiers : il a fait de tellement beaux films. Je crois que<br /> ce n'était pas un sujet pour lui, tout simplement.
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E
Voilà, je l'ai regardé et ai tenu jusqu'au bout. Mon avantage fut certainement de savoir que je ne devais pas m'attendre à ce que Clint offre d'habitude.<br /> <br /> Vrai que c'est différent et inférieur. Mais - et peut-être parce que mon père est décédé il y a peu, mais je ne suis pas excessivement intéressée par l'au-delà malgré tout - j'ai accroché. C à d<br /> j'ai décidé de "marcher" avec le film, de ne pas lutter. Généralement je n'aime pas trop ces sujets new age, mais il est traité avec un peu moins de spectaculaire ici, il me semble.<br /> <br /> Je ne le reverrai pas, mais n'ai pas passé un mauvais moment. Cependant j'admets que ce n'est pas ce qu'on attend de Clint!
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E
Je ne sais pas trop... Je suis tentée de le regarder malgré tout, quitte à l'abandonner en cours de route pour cause de déception cuisante. Je sais déjà que je devrais faire abstraction de Clint,<br /> faire semblant qu'il n'a rien à y voir pour éliminer un motif de déception :-) Je me tâte! Merci Armelle, d'habitude je suis d'accord avec vos conclusions...
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B
Ce n'est pas le meilleur Eastwood mais ce film est quand même sous éstimé. Une oeuvre mineure dans la filmo de Clint mais un film assez bien construit. 3 étoiles.
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A
Oui, Armelle... c’est sa subjectivité qui fait sa beauté et sa puissance de vérité. Avec l’art on se "pose" dans l’inconnu... ce qui est peut-être la seule façon de se poser vraiment.
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A
@ Alain Michel Robert<br /> <br /> Votre commentaire est très intéressant et d’une grande sensibilité et j’en ai pris connaissance avec plaisir. Comme vous, j’admire beaucoup Clint Eastwood et, sans doute, attendais-je trop du magnifique réalisateur de "Sur la route de Madison" et de "Gran Torino". Dans "Au-delà", j’ai trouvé qu’il n’avait pas traité son sujet avec les moyens adéquates et qu’il s’était éloigné du mystère au lieu de s’en approcher. Mais c’est là mon point de vue, le vôtre est tout aussi valable et nos opinions différentes prouvent à quel point le 7e Art, comme les autres arts d’ailleurs, parle à chacun de nous de façon personnelle.
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A
Je suis allé le voir hier après midi... <br /> Certes, ce que vous dites n’est pas tout à fait faux... cinématographiquement parlant. Tout dépend du point de vue où on se place. Mais, ma femme et moi-même, avons tout de même passé un très bon moment. Rien que pour la scène du tsunami au début, ça vaut le coup d’aller voir ça ! Avant, je m’étais souvent demandé comment une petite vague de 2m de haut avait pu faire autant de dégât... moi qui, dans ma jeunesse, avait surfé sur des vagues beaucoup plus hautes. Je manquais de perspective ! Cette scène m’a remis d’équerre !<br /> <br /> Pour ce qui est du film, on n’apprend pas grand chose de nouveau sur les NDE, mais il ne faut pas aller voir ce film pour apprendre quelque chose de nouveau sur le sujet, Viko nous avait prévenu. Et puis, de toutes façons, rien n’a vraiment été dit et écrit de plus sur la question depuis le livre de Van Eersel "La source noire". <br /> <br /> Moi, j’ai aimé le film à cause de son rythme lent, avec les plans si typiques du Clint Eastwood qu’on aime, sensible, interrogeant sobrement le mystère de sa mort prochaine sans faire d’esbroufe. Pas de plans tonitruants sur l’après-vie, pas de "tunnel", pas "d’êtres de lumière", pas de grandes certitudes... juste une petite NDE du 1er stade (sur 5). Sobre, honnête, simple... un questionnement en suspend... pas de réponse... : "Je ne sais pas..." c’est tout ce que dira le médium quand l’enfant l’interrogera sur l’après vie.<br /> <br /> Sur le coup, on peut peut-être s’ennuyer si on refuse d’approcher le "vide" que ce film creuse inévitablement en nous. C’est possible. Mais "quelque chose" nous reste, après. Quelque chose de pauvre qu’on n’oublie pas parce ça s’est subrepticement déposé en nous... quelque part en nous, là où un certain silence demeure. Un rien... un vide, oui... mal filmé, mal dit, mal tout ce qu’on veut... mais là, présent derrière le bruit du monde... il faut l’entendre...<br /> <br /> Vraiment, j’aime ce Clint Eastwood tel qu’il chemine depuis quelques années vers son Tao à lui. Il se dépouille... et il nous le partage avec ce qu’il sait faire de mieux : du cinéma. D’autres tentent le même partage avec des mots, des musiques ou des peintures... ils ne disent pas ce qu’ils savent ou ce qu’ils font, ils disent ce qu’ils voient ou tente de voir. <br /> Cette inaliénable égalité de tout Homme devant le vide n’est jamais facile à partager... artistiquement et humainement parlant. Il faut cesser de se regarder... mourir à soi-même... un peu... quand même...<br /> <br /> Alors, rien que par respect pour ces tentatives sincères qui seront de toutes façons toujours lamentables (la sincérité est toujours lamentable), il faut aller voir le film... Ça n’est pas un film philosophique... c’est un film plus complet (dans le sens de complétude) : c’est le film d’un homme qui va mourir, qui le pressent, qui le pense, qui certainement à peur... et qui tente de nous le dire...
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T
J'aurais du lire votre critique avant car je suis allée voir ce film hier soir et j'ai été très déçue. Là Eastwood est passé à côté de la plaque.
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F
Bonjour, Armelle, et merci pour cet éclairage.<br /> <br /> Clint Eastwood n’a pas réalisé que des chefs d’oeuvre, loin de là, et si "Gran Torino" ou "Sur la route de Madison" sont d’excellents opus, d’autres films sont de purs navets, à l’image de "La sanction".<br /> <br /> Personnellement, j’ai bien aimé deux films actuellement sur les écrans : "Poupoupidou", polar (et réflexion sur l’humain) sur fond de paysages hivernaux jurassiens, et Soud of Noise, un déjanté film musical par l’équipe qui avait réalisé l’extraordinaire court-métrage "Six drummers for one appartment".
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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