Distribuée aux Etats-Unis quinze jours avant l'attaque de Pearl Harbour, La charge fantastique (1941) de Raoul Walsh est le symbole d'une Amérique qui croit encore en ses héros. Contrairement à Arthur Penn, qui a présenté l'homme de l'Ouest comme un tueur d'indiens mégalomane, Raoul Walsh fait du général George Armstrong Custer un cavalier intrépide, forgé dans la plus pure légende westernienne et persuadé qu'il travaille pour une noble cause : celle de conquérir des terres immenses et inutilisées pour les donner à des peuples qui sauront les cultiver et les exploiter. Custer va trouver en Errol Flynn un interprète idéal, dont la fougue, la prestance et l'indéniable séduction feront merveille à l'écran. Celui qui avait déjà été Robin des Bois et le capitaine Blood était dirigé ici pour la première fois par un metteur en scène avec lequel il tournerait encore sept autres films, tant le courant passait bien entre eux deux. Revue par Walsh, l'histoire du général Custer va devenir une suite de pages glorieuses et particulièrement photogéniques depuis West Point, où le héros apparaît sanglé dans son uniforme comme un héros de légende, jusqu'à Little Big Horn où il trouvera la mort, sans oublier les charges de cavalerie qu'il mène avec audace et brio en jeune officier auquel rien ne semble devoir résister.
" Je suis prêt à jouer s'il le faut mon argent, mon épée et même ma vie, mais jamais le nom que je porte " - déclarera-t-il fièrement aux politiciens et aux affairistes qui tenteront de l'associer à leurs louches combines. Par ailleurs, Walsh aura le mérite de dénoncer avec lucidité le drame des guerres indiennes et de nous montrer, à travers le personnage du chef indien Crazy Horse, une figure pleine de noblesse, victime des trafiquants blancs et de l'Histoire. Crazy Horse n'y apparaît pas comme un sauvage à peau rouge mais comme un homme d'un immense courage qui défend son territoire au prix de sa vie. L'ultime rencontre de Custer et de Crazy Horse à Little Big Horn se révèle être davantage une étape irréversible qu'un affrontement personnel. D'ailleurs, bien que vainqueurs, le chef indien et ses guerriers ne sont jamais que des morts en sursis. Ce rôle est admirablement campé par le formidable acteur qu'était Anthony Quinn, dur, intraitable, vaillant, d'un courage égal à celui du chef qui lui fait face dans une charge lyrique qui est un très grand moment de cinéma.
Evitant tout ce qui aurait pu faire de son film une parabole belliciste, Walsh s'attache à décrire la personnalité de ses héros, principalement celle de général Custer, bien sûr, dont on suit le parcours avec un intérêt croissant. " La gloire - disait-il - a un avantage sur l'argent. On l'emporte avec soi en mourant ". D'autre part, ce film ajoute à l'épopée héroïque, des scènes plus sentimentales d'une grande tendresse, où Olivia de Havilland est l'épouse du général et forme avec Errol Flynn un couple inoubliable, déjà réuni en 1939 dans Les conquérants de Michael Curtiz. La scène des adieux, filmée de façon juste et sobre, est parmi les plus émouvantes et donne à ce long métrage une touche sensible, sans mièvrerie aucune. Enfin, il serait regrettable de ne pas mentionner la chanson irlandaise qui devint l'hymne du 7th Cavalry et l'évocation réussie de l'Amérique de la seconde moitié du XIXe siècle, bouleversée par la guerre de Sécession, les guerres indiennes, la ruée vers l'or dans les Black Hills, ce qui contribue à faire de ce film une fresque passionnante et grandiose de l'histoire du Nouveau Monde.
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