Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
10 février 2011 4 10 /02 /février /2011 10:53
LE DISCOURS D'UN ROI de TOM HOOPER

     
Grande-Bretagne, Londres, les années 30, l'entre deux-guerres. Albert, alias Bertie, coule des jours heureux dans sa modeste demeure de Picadilly entre sa femme Elisabeth, princesse écossaise, et ses deux filles Elisabeth et Margaret. Fils du populaire Georges V, frère du charismatique Édouard VIII, timide et bègue, l'homme ne semble pas taillé pour le pouvoir. Mais l'histoire en décide autrement. Contraint et forcé de prendre la couronne des mains d'un aîné préférant l'amour d'une aventurière américaine, le jeune roi se heurte à la tendance du moment bien difficile à assumer pour un bègue : la radiophonie. A l'heure des discours de dictateurs galvanisant les foules, façon Hitler, poser et imposer une voix au rayonnement mondial, fait plus que loi, nécessité. Prêt à tout pour surmonter son handicap, Bertie entame un traitement orthophoniste, proche de la thérapie, avec un certain Lionel Logue, praticien aux méthodes originales et parfois même, peu orthodoxes, sans diplôme et sans référence honorifique. Le défi de ce dernier, qui n'est pas des moindres : redonner force et intransigeance à la voix de l'Angleterre.

 

Sujet difficile s'il en est, le réalisateur Tom Hooper, peu connu de nos concitoyens, s'y est attaqué avec un réalisme, une justesse de ton, une simplicité tellement éloquente, que les deux heures de projection procurent une émotion dont j'étais loin de me douter, avant d'en être pleinement victime... Oui, ce film est tout simplement, et avant tout, bouleversant. Il montre, ou plutôt démontre, comment un homme ordinaire, pas particulièrement doué, peut arriver, par sa volonté et son courage, à surmonter ses appréhensions et à accepter d'endosser et d'assumer un destin extraordinaire. Ce destin est celui du prince Bertie que l'abdication de son aîné va obliger à prendre la lourde succession de son père, le très aimé roi Georges V, en des temps plus que difficiles, dramatiques, ceux de la guerre de 39/45 et comment, par la suite, lui et son épouse seront aux côtés de leur peuple à tous moments, accompagnés de l'homme providentiel que sera le premier ministre Winston Churchill. 

 

Film événement de par la qualité de sa mise en scène,  l'évocation d'un épisode historique méconnu, ce long métrage est d'ores et déjà nominé douze fois pour les Oscars et Colin Firth vient de recevoir, pour son rôle du roi Georges VI,  un Golden Globe, ce qui laisse supposer que la suite va encore réserver quelques bonnes surprises. Car le public est là. Hier après-midi, à Deauville, il n'y avait pas un strapontin de libre, ce qui est rare à cette heure de la journée. Et le public est resté longtemps assis après que la lumière soit revenue, aux prises avec une indiscutable émotion, celle que suscite cette formidable démonstration où nous assistons à l'accouchement douloureux d'un homme qui accepte, malgré ses craintes et ce qu'il croit être une indignité physique, la charge écrasante de roi. D'autant que l'époque, et les progrès de la technique, obligent désormais les chefs d'état à être, non seulement les garants du pouvoir, mais des orateurs. D'où la toujours grande actualité du sujet.

 

Aux dialogues irrésistibles, à la construction théâtrale parfaitement maîtrisée, aux symboles attachés à la figure du monarque, aux saynètes intimes et charmantes où l'on entre dans la vie familiale du prince puis du roi, aux paysages de la campagne anglaise baignés de brume, il faut s'émerveiller du choix des acteurs tous époustouflants dans leurs rôles et tellement convaincants, que l'on voit s'ouvrir, devant nos yeux, un pan de l'histoire contemporaine de la Grande-Bretagne, dont on ne sait que trop qu'elle a traversé les situations les plus graves et rebondi avec dignité. Après avoir tourné dans Bridget Jones, l'acteur Colin Firth entre pleinement dans la peau de Georges VI et, grâce aux conseils de David Seidler, le scénariste, bègue lui aussi,  nous convainc sans peine, tant il met d'intelligence et de sensibilité, de certitude et de doute, dans son personnage. Il avoue lui-même que ce ne fut pas facile et qu'il a surtout cherché à jouer l'angoisse que peut générer une telle difficulté à s'exprimer, ce blocage qui survenait, chez le monarque, dès qu'il  était tenu à prendre la parole. Face à lui, magistral, nous trouvons un autre acteur Geoffrey Rush, lui aussi peu familier du public français, qui endosse avec force et humour, insolence et humanisme, un acteur raté, australien d'origine, devenu orthophoniste à la suite des difficultés d'élocution d'hommes et de femmes qu'il a croisés dans son existence et dont le nom est resté longtemps secret : Lionel Logue. Soigner un membre de la famille royale ne l'impressionne nullement et, dès le premier contact, il va imposer ses exigences et la discipline qu'il entend faire respecter par son client. L'amitié qui s'installe entre ces deux hommes ne faiblira jamais et ne subira aucune  éclipse. Leur face à face est un grand moment de cinéma et une réussite rare, un vrai régal pour les spectateurs. N'oublions pas les autres rôles admirablement assumés : celui de l'épouse de Georges VI, la délicieuse reine Elisabeth, joué avec charme et sobriété par Helena Bonham et celui d' Edouard VIII, au règne si bref, par le sémillant  Guy Pearce. Une seule erreur de casting dans cet opus brillantissime : un Churchill trop caricatural, grimé en cabot à la lèvre pendante et aux clins d'oeil ironiques vraiment trop forcés.

 

Pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL

 

LE DISCOURS D'UN ROI de TOM HOOPER
LE DISCOURS D'UN ROI de TOM HOOPER
LE DISCOURS D'UN ROI de TOM HOOPER
Partager cet article
Repost0

commentaires

S
Bon film, très "éloquent" si je puis dire sur les coulisses méconnues de cette partie de l'histoire britannique. Les acteurs sont excellents et le personnage du Roi est remarquablement interprété. Homme touchant, déterminé, assumant dignement sa charge malgré son handicap.
Répondre
A
Oui, Sandrine, une belle réussite que ce film qui m'avait infiniment émue lorsque je l'ai vu la première fois, car ce roi a su surmonter son handicap et se conduire, ainsi que sa femme, de façon admirable pendant la guerre. Sa fille Elisabeth II a hérité de beaucoup de ses qualités.
W
Trop sage et académique, mais un bon film porté par un casting excellent.
Répondre
A
Comme vous, j’ai beaucoup aimé « Le discours d’un roi ». Toute la distribution est éclatante et Colin Firth tout à fait remarquable. Vous me parliez de « Black Swan » dont vous attendez la sortie près de chez vous et de la violence que votre amie a retenue, quand elle l’a vu à Paris. En ce qui me concerne j’ai eu beaucoup de mal à me détacher de ce film … Je suis resté scotché à la fin de la séance et l’ai revu une seconde fois. Tout l’univers de la danse est parfaitement filmé, le travail acharné, la peur qui oppresse et qui va bien au-delà du fameux trac. Les auditions, les premières répétitions. L’acharnement du chorégraphe. Les rivalités aussi. Tout ce qui se trame back stage avec en prime l’éviction d’une « trop vieille » danseuse, et un clin d’œil à Margot Fonteyn, au travers d’une rapide réplique. Le rideau se lève … et j’ai la chair de poule, comme dans toutes les représentations auxquelles j’ai eu la chance d’assister à Garnier ou ailleurs. Natalie Portman porte son rôle avec un talent immense. Elle a su capter toutes ces expressions de joie, de désir ou de mort aussi, qui marquent les visages, et que j’ai souvent vues sur scène chez les plus grandes étoiles. J’ai hâte que vous puissiez le voir pour lire ce que vous en aurez pensé. Bonne soirée.
Répondre
A
Moi non plus Dasola.
Répondre
D
Bonsoir Armelle, d'accord avec cette critique sur un film qui rallie pas mal de suffrages, mais c'est mérité. A la différence de ffred, je n'ai pas oublié le film une heure après l'avoir vu. Bonne soirée.
Répondre
P
mais c'est pas tant le discours que le proposje trouve que c'est incroyable que ce soit vrai et qu'il arrive à parler normalement malgré tout quand il faut. Et puis je ne m'attendais pas à ce qu'on appelle David et Bertie Edouard et George.. y a plein de trucs comme ça comme l'acteur qui joue Lionel Logue qui est le meilleur de tous à mes yeux.<br /> Pour Churchill Armelle... quand tu as vu l'acteur dans Harry Potter jouer Peter Pettigrew alias Queudver... tu ne peux pas l'imaginer un seul instant dans le rôle de Churchill à qui il ne ressemble pas du tout.<br /> Mais c'est un bon film à mes yeux
Répondre
T
Même chose pour moi : la mollesse du Discours d'un roi, balourdement humaniste et biographisto-réaliste, est incroyablement moins passionnant et artiste que Black Swan. C'est vraiment l'opposition du plat et du relief... Mais enfin...
Répondre
F
J'ai bien rigolé et j'ai trouvé que c'était un bon film. Les interprètes sont formidables. Mais cela me semble trop formaté et académique, cela aurait pu être encore plus fort...Black Swan m'a, par contre, bouleversé et j'ai du mal à me l'enlever de la tête alors que Le discours était oublié une heure après la sortie de la salle...
Répondre

Présentation

  • : LA PLUME ET L'IMAGE
  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
  • Contact

Profil

  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.

Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


Charlie Chaplin

 

"Innover, c'est aller de l'avant sans abandonner le passé."

 

Stanley Kubrick

 

 

ET SI VOUS PREFEREZ L'EVASION PAR LES MOTS, LA LITTERATURE ET LES VOYAGES, RENDEZ-VOUS SUR MON AUTRE BLOG :  INTERLIGNE

 

poesie-est-lendroit-silence-michel-camus-L-1 

 

Les derniers films vus et critiqués : 
 
  yves-saint-laurent-le-film-de-jalil-lespert (1) PHILOMENA UK POSTER STEVE COOGAN JUDI DENCH (1) un-max-boublil-pret-a-tout-dans-la-comedie-romantique-de-ni

Mes coups de coeur    

 

4-e-toiles


affiche-I-Wish-225x300

   

 

The-Artist-MIchel-Hazanavicius

 

Million Dollar Baby French front 

 

5-etoiles

 

critique-la-grande-illusion-renoir4

 

claudiaotguepard 

 

affiche-pouses-et-concubines 

 

 

MES FESTIVALS

 


12e-festival-film-asiatique-deauville-L-1

 

 13e-FFA-20111

 

deauville-copie-1 


15-festival-du-film-asiatique-de-deauville

 

 

Recherche