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2 juin 2007 6 02 /06 /juin /2007 09:15
JEAN-CLAUDE BRIALY - PORTRAIT
JEAN-CLAUDE BRIALY - PORTRAIT

                                                                     
Né en 1933, il était un maître de cérémonie toujours élégant, empressé, ayant le mot aimable à l'intention de chacun. Mais derrière l'apparence policée du parfait dandy, sorti tout droit de La Recherche du temps perdu, derrière le savoir-faire et le savoir-vivre, se cachait un homme plus profond, amoureux de la belle ouvrage, de la langue française, du théâtre et du spectacle en général, à la seule condition qu'ils fussent de qualité. Les Français le connaissaient peu et l'aimaient  bien, parce qu'il avait le don rare de réussir ce qu'il entreprenait : ses rôles, ses maisons, ses restaurants, ses théâtres...Cette facilité apparente n'en cachait pas moins un travail acharné qui ne laissait aucun détail au hasard. Comme les danseurs, il exécutait ses entrechats comme si c'était la chose la plus naturelle du monde.

 

Il était méticuleux et précis sans être ennuyeux, ironique et critique, sans être méchant. Pour lui existait une hiérarchie des valeurs à laquelle il se conformait scrupuleusement. C'était un amateur de livres et d'objets rares, un connaisseur à n'en pas douter. Ce qu'il exécrait le plus était la vulgarité et comme on le comprend ! Nous n'avions qu'à l'écouter parler pour savoir quel amour il avait de l'excellence dans tous les domaines.

 

Acteur fétiche de la Nouvelle Vague, il s'était trompé d'époque. Il eut mieux valu pour lui naître vingt ans plus tôt et faire carrière dans le cinéma français des années 30 et 40 où il aurait porté l'habit comme André Luguet ou Fernand Gravey, joué les jeunes premiers fantaisistes et donné la réplique à des actrices magnifiques  habillées en Lanvin ou Schiaparelli. Son raffinement, sa classe auraient fait merveille. Mais la vie en a décidé autrement et ce séduisant amphitryon, plein de prévenance et de magnificence, fit ses véritables débuts auprès de Bernadette Lafont dans Le beau Serge (1958) avant de poursuivre son parcours cinématographique avec Les cousins (1959). Le voilà lancé, car il joue juste et a de la présence, même si ses rôles ne correspondent pas toujours à sa nature de Rastignac flamboyant, beau, et bien disant. Il tournera successivement avec Rivette, Godard, Astruc, Vadim, de Broca, Aurel, Truffaut et Rohmer, mais également Malle, Bunuel, Téchiné, Scola et Miller. Lui-même, avec beaucoup de joliesse, comme on peint une aquarelle, réalisera plusieurs films dont Eglantine (1971) et Un bon petit diable en 1983.


Des Godelureaux (1960) à Les lions sont lâchés (1961), l'acteur ne manque aucun rendez-vous des nouveaux conquérants, ce qui ne l'empêche nullement d'aller faire quelques détours chez des metteurs en scène qui correspondent mieux à ses aspirations secrètes, tels que Duvivier, Cayatte et Verneuil, afin de retrouver quelque chose du mythique écran noir d'avant-guerre. Passé la trentaine, les remous de la Nouvelle Vague calmés, Brialy va changer insensiblement de registre. Au jeune premier un peu fou, qui se cherche, succèdent des compositions plus sages, plus ironiques et narquoises d'un homme mûri avant l'âge. On se souviendra de lui dans Le genou de Claire de Rohmer, l'un de ses meilleurs rôles, et on peut regretter que Marc Allégret, trop âgé, ait manqué Le Bal du comte d'Orgel ( 1970), dont il était si parfaitement le personnage.
                  

 

Au théâtre, le rythme de ses apparitions est également soutenu, car Brialy est un avide, un curieux, un homme généreux qui aime la scène et le contact direct avec le public. C'est un être solaire qui  se plait à séduire et à être séduit. Ses auteurs seront Krasna, Félicien Marceau, Feydeau, Hartog adapté par Colette, Françoise Dorin, Sacha Guitry, Didier Van Cauwelaert dont il jouera Le Nègre en 1987. Cette dernière comédie inaugure la première saison de Brialy en tant que directeur des Bouffes-Parisiennes, responsabilité qu'il avait accepté d'endosser avec les risques que cela comporte. Dans le même temps, il n'arrête pas de présenter des émissions de télévision, de radio, des festivals, des galas. On le réclame partout, parce qu'il sait tout faire avec panache et aisance. Il est, à n'en pas douter, le plus fastueux des présentateurs. Cet aspect extraverti de sa personnalité est d'autant plus surprenant qu'il se révèle, dans le privé,  pudique et secret. Jamais d'étalage, aucune forfanterie, selon les modalités d'une exubérance bien tempérée, d'une retenue de bon aloi. Peu importe si sa filmographie- fleuve (une centaine de longs métrage) ne comporte pas que des chefs-d'oeuvre, si tout n'est pas d'égale qualité, si certains choix nous paraissent aujourd'hui regrettables. Il nous faut bien admettre que le raffinement n'a pas cours tous les jours, que nombre de metteurs en scène ne surent deviner les ressources d'un acteur, tout en finesse, qui se plaisait dans les nuances, les subtilités, les paradoxes. D'autant qu'il refusa de se laisser déborder par des excès qui, assurément, caractérisent les monstres sacrés dont il ne fut pas par modestie et réserve, quelle chance ! Il nous a quittés en 2007 à l'âge de 74 ans et ne fut jamais remplacé.


Pour consulter les articles des films où figure l'acteur, dont Le beau Serge et Le genoux de Claire, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA FRANCAIS

 

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JEAN-CLAUDE BRIALY - PORTRAIT
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commentaires

A
à Dasola<br /> <br /> Oui, je me souviens très bien de ce film sur les liens d'une grand-mère et de son petit-fils. C'était un film plein d'émotion et de tendresse.
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D
Bonjour Armelle, merci pour le portrait de ce comédien qui le mérite bien. J'avais aimé dans mes toutes jeunes années son film Eglantine avec Valentine Teissier. Un film que je n'ai jamais revu (et<br /> je le regrette).
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E
ton portrait de Brialy a l'air juste d'après ce qui s'en dit<br /> 1 dandy sorti de l'oeuvre de Proust : bien vu !<br /> je ne pense pas qu'il ait eu 1 premier rôle ? confirmes-tu ? (ça n'est pas 1 critique, je ne suis pas sûr qu'1 géant du cinéma comme Blier en ait eu ?)<br /> ta façon de conclure sur Brialy me fait penser à 1 phrase d'Oscar Wilde sur lui-même :"je n'ai mis que mon talent dans mon oeuvre, j'ai mis mon génie dans ma vie" (de mémoire, pas sûr de l'exactitude à la virgule près)
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


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