Gros effets d'un côté et caméra légère de l'autre, l'intrusion du numérique dans le 7e Art est universelle. Mais qu'apportent-elles de vraiment nouveau ces techniques de pointe à l'industrie du 7e Art, question que nous sommes en droit de nous poser ? En un siècle d'histoire du cinéma, la boucle semble bouclée. Si tout a commencé avec les truquages astucieux d'un Georges Méliès, cela se poursuit de nos jours avec la surenchère des effets spéciaux de Matrix ou d'Inception ou encore de Harry Potter pour les plus jeunes. Mais si Méliès revenait parmi nous serait-il véritablement étonné ? Cent ans, n'est-ce pas beaucoup de temps pour obtenir des machines et ordinateurs ce que les équipes Méliès parvenaient à produire avec minutie et enthousiasme en explorateurs d'un nouveau monde qu'ils étaient alors ? Car les illusionnistes d'hier ne sont autres que les techniciens d'aujourd'hui, la poésie en moins, tant il est vrai que l'on ne sait plus où la surenchère s'arrêtera et où le bon goût saura subvenir aux excès de la virtualité. Certains personnages, comme celui du film Simone d'Andrew Niccol ne rêve-t-il pas de remplacer les acteurs par des androïdes, répliques parfaites mais si peu satisfaisantes de nos stars actuelles ? Jusqu'où irons-nous dans ces excès imagiers où la réalité est constamment dépassée et détrônée par le fictif ?
Hier encore, le scénariste avait l'avantage sur le caméraman. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Ce qui compte est la quête insatiable de la nouveauté, de l'effet bleufant, du mélo numérisé au service d'un concepteur qui veut être partout, tout voir à la fois et franchir une étape supplémentaire dans le dévoilement des constructions imaginaires. C'est donc l'illusion qui prime. Est-ce là, pour autant, le meilleur des mondes ? Alors que tout devient possible dans l'imaginaire, tout risque de devenir admissible dans notre vie quotidienne et le danger est que le 7e Art, oubliant d'élever l'homme par sa quête de la beauté et de l'universalité, ne le rabaisse en ne lui offrant qu'une simple exploitation d'une science-fiction au service de trucages technologiques. Mais à côté de ces effets spéciaux si vite ennuyeux, des progrès ont été faits grâce au numérique avec l'arrivée des petites caméras qui mettent fin au monopole coûteux et forcément discriminatoire des superproductions. Désormais, n'importe qui peut saisir la vie dans son déroulement temporel une caméra sur l'épaule, ainsi que l'inaugurait Jean-Luc Godard dans "A bout de souffle". C'est la raison pour laquelle nous voyons proliférer les films d'auteur à petits budgets, ce qui est une évolution notable, surtout pour des pays où réaliser un film relève du parcours du combattant. Pensons à l'Afrique et à l'Iran. En ce domaine, les progrès de la technique ne peuvent que nous réjouir. Au final, si ces progrès ont leurs avantages, ils ont leurs inévitables inconvénients. Aux hommes, et principalement aux cinéastes, de garder la tête froide et le sens de la mesure. Le cinéma dispose d'un panel de moyens inouïs qu'il serait dommage de gâcher en truquant la réalité de manière caricaturale et en privilégiant la machine au dépens de l'art.
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