Plusieurs décades que ce trublion agité de tics nous a quittés. Mais il n'est mort que pour l'état civil car il reste l'un des acteurs préférés des Français. Grâce aux nombreux films qu'il a tournés et que la télévision nous rediffuse régulièrement, Louis de Funès n'a jamais cessé d'être présent et de nous faire rire aux larmes dans des oeuvres cultes d'un comique inépuisable.
Carlos Luis de Funès de Galarza, né le 31 juillet 1914 à Courbevoie, appartenait à la noblesse sévillane et fit ses études au lycée Condorcet à Paris. Après avoir été dessinateur, pianiste dans des boîtes de nuit, il s'oriente vers une carrière de comédien, mais le succès mettra beaucoup de temps à le rattraper. Petit, 1m64, malingre, il dut se contenter durant de nombreuses années de rôles peu gratifiants, voire d'une simple figuration, aussi bien au théâtre qu'au cinéma, avant que la chance ne commence à lui sourire avec La traversée de Paris de Claude Autant-Lara en 1956, où il joue aux côtés de Gabin et de Bourvil. On était loin alors de se douter qu'il deviendrait l'une des vedettes européennes les plus populaires des années 60 à 80 et que les producteurs lui feraient des ponts d'or pour qu'il figure dans leur production. Bien qu'à la fin des années 50, il ait pu se targuer d'avoir une centaine de films à son actif, il n'a pas trouvé le rôle déterminant qui en fera une tête d'affiche. Le phénomène de Funès reste le privilège de quelques initiés, dont Eddy Barclay qu'il amusait tellement lorsque, dans les boîtes de nuit, il se trémoussait derrière son clavier. Ce sera la pièce Oscar dans laquelle ses mimiques font merveille, et qu'il interprétera pendant des mois à guichets fermés, qui sera à l'origine de sa formidable carrière et l'installera définitivement dans le succès. Après Oscar, Pouic Pouic en 1963 confirmera sa renommée, si bien que désormais les producteurs, qui l'avaient tant boudé, vont en délégation venir lui faire leur cour.
A partir de là, sa carrière va s'articuler en deux axes : l'axe Gérard Oury et celui de Jean Girault. Ce dernier lui offre un rôle d'anthologie dans la peau de l'inspecteur Cruchot. Entre temps, Gérard Oury le confirme dans ses trois plus grands succès. Ses duos avec Bourvil, dans Le corniaud d'abord (1964) et La grande vadrouille (1966) ensuite, passeront à la postérité et rempliront les salles comme rarement, avec des répliques et des séquences inoubliables. Le personnage irascible qu'il campe face à un Bourvil débonnaire et bon gars est irrésistible. Ce sera une réussite également avec Yves Montand dans La folie des grandeurs, un petit chef d'oeuvre de cocasserie. Avec Les aventures de Rabbi Jacob en 1973, il réussit l'exploit de faire rire ensemble musulmans, juifs et catholiques. Et pourtant, il disait qu'on aurait pu l'appeler Monsieur Inquiétude, tant il avait un tempérament anxieux et timide. Oui - poursuivait-il, je trimbale cela avec moi. Et pourtant, j'ai tout pour être heureux, une femme charmante (il avait épousé en seconde noce Jeanne Barthélémy de Maupassant, la nièce de l'écrivain), des enfants charmants (l'un de ses fils jouera auprès de lui dans Le grand restaurant et Sur un arbre perché) et un métier que j'aime. Mais c'est ainsi et mon tempérament me désole. Chez moi, je ne suis pas drôle du tout.
Mais deux infarctus successifs l'obligent à s'éloigner momentanément des studios et des planches et les metteurs en scène ne cherchent pas à lui proposer des rôles différents de ceux habituels, se contentant d'exploiter le filon. Il y eut bien une exception pour l'Harpagon de Molière, où son interprétation n'aurait probablement pas déplu à l'illustre comédien. Ce qui prouve qu'il était en mesure d'assumer des rôles plus tragiques, des personnages extrêmes. Après cette obligation de repos, il revient avec La soupe aux choux en 1981 qui sera un ultime succès. Il s'éclipsera le 27 janvier 1983 à Nantes d'une crise cardiaque. Il avait toujours été dans l'accélération, le mouvement. Il meurt de la même façon, d'un coup, en pleine action. Il repose désormais au cimetière de Cellier, non loin de son château de Clermont que ses cachets lui permettaient de remettre en état. Mais cela lui va si mal de se reposer et il savait si peu le faire, que je me plais davantage à l'imaginer faisant le clown au Paradis pour le plus grand plaisir de nos chers disparus.
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