Fondateur de la World Cinema Foundation, Martin Scorsese, né aux Etats-Unis le 17 novembre 1942, est considéré comme l'un des plus talentueux cinéastes de sa génération, en même temps que l'un des plus controversés. Ses préoccupations marquées par son éducation religieuse se retrouvent dans la notion de culpabilité et de rachat qui font partie de son questionnement et ne peuvent laisser personne indifférent. Soucieux de célébrer l'homme dans sa noblesse et son obscurité, ce fils d'émigrés italiens ne cesse de puiser, dans son enfance, une inspiration partagée entre le pire et le meilleur, la violence et le lyrisme. Etudiant, puis enseignant à la Colombia University de New-York, Scorsese attire l'attention dès ses premiers courts métrages et ses documentaires autobiographiques. Son premier film, en 1970, "Bertha Boxcar" avec Barbara Hershey et David Carradine impose son style et suscite les encouragements de John Cassavetes. En 1973, "Mean Streets", son oeuvre suivante, est acclamée par la critique et lui permet de faire une rencontre décisive avec l'acteur Robert de Niro qui deviendra son alter ego. Cette chronique violente de deux petits malfrats sans envergure résume la vision en clair-obscur et le ressenti d'un réalisateur qu'interpelle en tout premier lieu notre condition humaine. Mais c'est avec "Taxi Driver" qu'il connaît la consécration, recevant la Palme d'or à Cannes en 1976.
L'impact de ses films, le cinéaste le doit principalement à l'image, à cette façon très particulière qu'il a de créer une mythologie urbaine qui déforme les corps et les esprits, meurtri les coeurs et qu'il sature de couleurs volontairement agressives. Au centre de ce chaos, un être progressera lentement vers la lumière ou s'abîmera définitivement dans les ténèbres. Ce sera le cas de l'une ou l'autre de ces finalités dans "New-York, New-York", "Raging Bull", "Affranchis", "A tombeau ouvert", "Casino". Le monde du crime, la mafia, les mégapoles déshumanisées forgent un enfer dans cette approche mystique qui caractérise l'univers du cinéaste. Parfois, au coeur de ce déferlement brutal, des rituels raffinés d'une société privilégiée illustrent comme dans "Le temps de l'innocence" un enfer tout aussi dangereux car trompeur. Robert de Niro prêtera ses traits à plusieurs de ces héros. Selon les voeux du metteur en scène, cet immense acteur saura modeler son corps, tantôt musclé et aminci, tantôt bouffi et vieilli, afin de signifier l'évolution de l'être en proie à une possession diabolique ou aux prises avec une possible rédemption. Lorsque Scorsese aborde le Messie dans "La dernière tentation du Christ", c'est à travers les corps des uns et des autres chargés de symboliser les déchirements des âmes. Par des moyens physiques, une imagerie obsédante, l'oeuvre de Scorsese ne se contente pas de peindre l'homme de son temps et ses malaises sociétaux, il l'inscrit dans une perspective où l'idée de la grâce n'est pas absente et lui accorde des prolongements culturels et historiques, un sens et un rayonnement universel. Ainsi nous invite-t-il en permanence à la réflexion. Leonardo Di Caprio reprendra le flambeau dans des films plus récents comme "Shutter island" et "Aviator". Avec son dernier film, "Silence", Scorsese amorçait, davantage encore, un retour vers le spirituel après plusieurs films davantage grand public où, dans le Japon médiéval, le croyant délivre une profonde réflexion sur la foi dans un désert d'ignorance et de brutalité. Cette oeuvre est celle d'un visionnaire qui ne s'est pas contenté de saisir l'homme de son temps, le plus souvent dans ce qu'il a de pire, il l'a inscrit dans une perspective culturelle et historique afin de lui conférer un statut universel.
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