Meryl Streep est certainement l'une des tout première actrice actuelle par la diversité et la qualité de son jeu, ce qui lui permet d'aborder des personnages très différents et de transmettre l'émotion avec la même maîtrise et la même sensibilité. Née le 22 juin 1949 dans une famille aisée - son père était pharmacien - elle étudie à Dartmouth l'écriture scénariste, la décoration et la création de costumes et entre ensuite à la Yale Drama School. Elle est si douée qu'elle figure dans les six des sept pièces présentées annuellement par la Yale Repertory Company et obtient sa maîtrise en 1975. Alors qu'elle est encore étudiante à Vassar, dont elle est diplômée, elle obtient le rôle-titre du spectacle dès sa première édition.
Durant sa première saison à New-York, où elle est venue faire carrière, elle joue de nouveau dans sept pièces, parfois deux rôles aux antipodes l'un de l'autre dans la même journée, avant de devenir la vedette d'une comédie musicale à Broadway "Happy End" et de remporter un Obie Award pour sa performance dans la production off-Broadway de "Alice at the palace".
Elle doit ses débuts dans le 7e Art à Fred Zinnemann, qui la dirige dans "Julia", puis tourne dans "Voyage au bout de l'enfer" auprès de Robert de Niro et, après un retour à la scène dans "La mégère apprivoisée", interprète l'épouse bisexuelle de Woody Allen dans "Manhattan" et la maîtresse d'Alan Alda dans "La vie privée d'un sénateur". Elle sera également l'épouse de Dustin Hoffman dans "Kramer contre Kramer" pour lequel elle recevra son premier Oscar. Pourtant ses débuts devant la caméra en 1976 s'accompagnent d'un souvenir cuisant, l'exclamation de Dino de Laurentis, qui l'avait convoquée pour un essai, et s'écria en la voyant : quelle mocheté ! Ce n'était guère galant mais il en fallait davantage pour décourager cette toute nouvelle diplômée de Yale.
Meryl Streep sera citée trois fois à l'Oscar, une seconde fois en 1981 pour "La maîtresse du lieutenant français" où je l'ai découverte personnellement avec autant de curiosité que d'enthousiasme, tant elle interprétait finement cette femme abandonnée dans un décor de falaises romantiques, au temps du puritanisme victorien et l'obtient l'année suivante pour sa formidable prestation dans "Le choix de Sophie" de Alan J. Pakula, d'après le roman de William Stiron. Puis elle retrouve Robert de Niro dans "Falling in love" ( 1984 ) et remporte, pour ce film, l'équivalent italien de l'Oscar, le prix David Di Donatello, ce qui confirme le retentissement de sa carrière internationale.
En 1985, elle est dirigée par Sydney Pollack dans un film qui cristallise davantage encore son aura d'actrice : "Out of Africa". C'est avec "Le choix de Sophie" et "La route de Madison", l'interprétation où elle apparaît la plus émouvante, la plus intériorisée. Elle y est dans tout l'éclat de sa féminité, humaine et néanmoins évanescente et inaccessible, à cause de cette magie qu'elle dégage, ce charme puissant, celui qui devait habiter le personnage qu'elle est chargée de représenter : la femme de lettres Karen Blixen. Viendront "La brûlure" avec Jack Nicholson et "Un cri dans la nuit" où elle est gratifiée du Prix d'interprétation féminine au Festival de Cannes 1989.
En 1992, Meryl Streep est de nouveau nominée au Golden Globe dans la comédie noire "La mort vous va si bien" de Robert Zemeckis qui n'est qu'un aimable divertissement et enchaîne en 1993 avec "La maison aux esprits" de Bille August, tiré du roman d'Isabelle Allende, une de ses seules erreurs - le film se révélant être un navet - dans une carrière conduite avec beaucoup de discernement. La suite sera éblouissante avec "Sur la route de Madison" auprès de Clint Eastwood, où elle triomphe dans le rôle de Francesca, une femme qui découvre tardivement le grand amour dans les bras d'un photographe-reporter venu prendre des clichés des vieux ponts couverts de l'Iowa, avant qu'on ne l'apprécie en 2001 dans l'adaptation de "The Hours" de Michael Cunningham. Pour elle, pas de temps mort, un film chasse l'autre, et dans chacun d'eux, elle se montre parfaite, en osmose avec les personnages qu'elle a à charge de faire vivre pour nous. On l'a vue dans "Le diable s'habille en Prada", qu'elle présenta en personne au Festival du film américain de Deauville en 2006 et dans "Lions et agneaux" de Robert Redford, son partenaire dans "Out of Africa", avant de se glisser dans la peau de Martha Mitchell, celle qui alerta la presse lors du scandale du Watergate dans "Dirty tricks", puis dans celle de Margaret Thatcher dans "La dame de fer" de Phyllida Lloyd. Lorsqu'elle ne tourne pas, l'actrice habite dans sa propriété du Connecticut auprès de son mari Don Gummer et de ses quatre enfants. Elle se plaît à mener une existence paisible loin de la vie agitée et de la presse à scandale de Hollywood. Ce qui ne peut étonner de la part d'une personnalité qui n'a jamais défrayé la chronique, ni galvaudé son image. Incroyablement malléable, elle sait se fondre dans les personnages les plus divers et inattendus, parvenant à ne jamais céder à la facilité ou à la démesure.
Avec 19 sélections, dont 15 dans la catégorie "meilleure actrice", c'est la comédienne la plus nommée de l'histoire des Oscars. Même performance pour les Golden Globes. Meryl Streep cumule aujourd'hui 29 nominations. Autant de statuettes saluant sa capacité à prendre les visages les plus divers, tous les accents, à se fondre dans n'importe quel décor, ainsi que d'entrer dans la peau des personnages les plus divers et parfois les plus opposés. Eclectique et appliquée, elle su enrichir son registre avec des héroïnes inoubliables, des scénariis captivants et des metteurs en scène de grand talent. Aussi est-elle de nos jours un modèle pour les comédiennes en herbe qui rêvent de faire une carrière aussi prestigieuse. D'autant que les comédies récentes, qu'elle a tournées, l'ont rapprochée d'un public plus jeune. Dans "Florence Foster Jenkins" du cinéaste Stephen Frears, qui est sorti il n'y a pas très longtemps dans les salles, elle est une femme touchante et irrésistible qui se croit à tort douée d'un don pour l'opéra, sujet déjà abordé dans "Marguerite" mais qu'elle endosse avec son naturel et sa finesse habituelle. Elle est désormais considérée comme la "Queen" du 7e Art américain et rayonne en star mondiale incontournable. Et avec "Pentagon Papers" de Steven Spielberg, elle nous éblouit une fois encore par son jeu d'une force et d'une grâce étonnantes et dans ce rôle de femme qui ne veut pas céder aux sirènes du découragement.
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