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10 juillet 2006 1 10 /07 /juillet /2006 10:33
PANDORA d'ALBERT LEWIN

    

L'histoire que nous raconte le film Pandora, inspiré de la légende du Hollandais volant et du mythe grec de Pandore - cette femme que le dieu Héphaïstos façonna avec de la terre et de l'eau pour qu'elle devienne l'instrument de la vengeance divine - se situe en Espagne, dans un petit port de la Costa Brava, Esperanza. Des pêcheurs viennent de ramener dans leurs filets deux corps, celui du peintre Hendrick Van Der Zee et d'une femme nommée Pandora Reynolds, selon les dires de l'archéologue britannique Geoffrey Fielding qui les identifie. C'est d'ailleurs grâce à lui, successivement acteur et spectateur de ce drame, que celui-ci va être reconstitué pour les besoins du film. Il nous apprend, par exemple, que Pandora Reynolds se serait sentie irrésistiblement attirée vers un yacht, ancré dans la baie.

 

Ce yacht appartient à un peintre hollandais que nous découvrons, au tout début du film, en train de peindre un tableau consacré à l'irréelle Pandore, alors qu'une femme s'approche à la nage et débarque à son bord. Curieusement, cette femme, Pandora Reynolds, ressemble à la mythique héroïne et va connaître un destin assez semblable au sien. Pour elle, des hommes vont sacrifier leur vie : le poète Reggie Demarest s'empoisonnera lorsqu'elle se refusera à lui ; le pilote Stephen Cameron renoncera  à la course automobile et ira jusqu'à précipiter sa voiture du haut d'une falaise et le matador Juan Montalvo, après avoir poignardé son rival le peintre Hendrick Van Der Zee, mourra dans l'arène. Alors que la tempête se lève, Pandora comprenant que le peintre, dont elle s'était éprise et qui vient d'être assassiné par sa faute, se croyait chargé du destin du Hollandais volant, condamné à errer, se sacrifiera à son tour et le rejoindra dans la mort, afin qu'il puisse goûter au repos éternel.

 

 

" Percer les mystères d'une âme est aussi vain que de tenter de vider l'océan avec une coupe " - dit Geoffrey Fielding lorsque les pêcheurs remontent les corps des deux amants. Ainsi Pandora, admirablement interprétée par la splendide Ava Gardner, fascine-t-elle au point de détruire ceux qui ont le bonheur d'abord, puis très vite le malheur de croiser sa route, selon le mythe antique qui disait que malgré sa belle apparence, cette déesse était à l'origine de bien des maux... "Quand nous voyons pour la première fois le Hollandais volant, écrivait le cinéaste, il est occupé à peindre le portrait d'une femme qu'il n'a jamais vue. Voilà un aspect purement surréaliste de ce personnage. Il était donc naturel pour moi d'essayer de faire un film délibérément surréaliste. Ce désir prit forme pour Pandora. L'habitude qu'avaient les surréalistes de juxtaposer des images anciennes et modernes, qui est particulièrement remarquable dans l'oeuvre de Chirico et de Paul Delvaux, m'a surtout troublé. J'ai trouvé dans le personnage du Hollandais volant, qui avait été condamné à vivre pendant plusieurs siècles, un symbole de cette juxtaposition des époques."
 

 

Que l'intrigue, située en 1930, ait son équivalence avec un drame qui se passait, selon la légende, au XVIIe siècle trouve ainsi sa justification. Hendrick Van Der Zee, campé par un James Mason très convaincant dans le rôle de l'artiste en proie à un dilemme intérieur et en quête d'un amour impossible, ajoute sa part d'étrangeté et de fantastique. Tout est fait pour surprendre, troubler, fasciner. Un orchestre joue " you're driving me crazy ", tandis que des hommes en habit dansent avec des jeunes filles dénudées sous le regard des statues antiques. Le mélange des styles est savamment dosé et pratiqué avec un évident plaisir esthétique. Amoureux des peintres, Lewin a su utiliser au mieux les ressources du technicolor de l'époque. Ava Gardner y est magnifique et inaccessible à souhait, sorte de divinité qui semble n'avoir pris que momentanément l'apparence d'une femme. Venue d'une autre planète comme pour séduire et détruire les êtres réduits à leur éphémère condition humaine. Ce n'est pas sans raison qu'Albert Lewin ouvre l'opus sur cette citation d'Omar Khayyam : "La main mouvante écrit. Et va, ayant écrit. Ni ta piété ne la saura, ni ton esprit fléchir pour qu'elle remonte à la ligne et l'efface. Ni tes pleurs d'un seul mot n'en laveront la trace."
 

 

Un film (1951) rare de par son thème - le mythe de la séduction destructrice et de l'éternelle errance - son atmosphère sulfureuse parfois, et sa splendeur esthétique. Inutile de répéter que les acteurs sont parfaits et nous font vivre un grand moment de cinéma. D'ailleurs le couple Gardner/Mason n'est-il pas entré, avec quelques autres, dans la légende d'Hollywood ?

 


Pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA AMERICAIN, cliquer sur le lien ci-dessous :


LISTE DES FILMS DU CINEMA AMERICAIN ET CANADIEN

 

Et pour prendre connaissance de l'article consacré à Ava Gardner, cliquer sur son titre :

 

AVA GARDNER, LA FLAMBOYANTE

 

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PANDORA d'ALBERT LEWIN
PANDORA d'ALBERT LEWIN
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commentaires

A
James Mason "L'amour se mesure à ce que l'on sacrifie pour lui". Quand j'ai fait l'article sur ce film je venais de revoir Pandora pour la énième fois. Je découvre votre page qui me fait penser<br /> qu'il serait bon que je m'y "replonge" ! Merci Armelle et bon week-end !
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N
je l'avais apprécié celui-ci - revu l'an dernier, avec plaisir
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N
je l'ai découvert l'an dernier, avec la magnifique ava gardner - j'ai beaucoup apprécié
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P
PandoraCe très excellent résumé du film Pandora, m’a incité à puiser dans mes très anciennes réminiscences scolaires en ce qui concerne Pandore, cette Ève des Grecs. Sur la demande de Zeus, qui désirait se venger de Prométhée (qui avait dérobé le feu à l’usage des hommes) et des hommes eux-mêmes, elle fut forgée par Héphaïstos (Vulcain), douée de la vie par Athéna, et parée par les dieux de l’Olympe de toutes les grâces et de tous les attraits. Elle fut programmée pour être une calamité à l’homme sous l’apparence d’une créature douce et ravissante, ayant l’apparence d’une vierge timide. Elle portait une robe d’une blancheur éblouissante, un voile brodé, des guirlandes de fleurs, le tout surmonté d’une couronne d’or, bref une apparition de toute beauté. Enfin lui ayant fait de présents, ils l’appelèrent Pandore, ce qui signifie « don de tout ». Zeus la présenta aux dieux et aux hommes qui furent saisis d’admiration à sa vue. De cette première femme naquit l’espèce féminine, qui, selon cette légende, est néfaste à l’homme et dont la nature est portée au mal.<br /> Selon une autre légende, la source de tous les maux de l’humanité serait non pas la mauvaise nature de Pandore, mais sa seule curiosité. Les dieux lui ayant offert une boîte dans laquelle chacun d’eux avait mis une chose nuisible. Ils lui recommandèrent de ne l’ouvrir sous aucun prétexte. Puis ils envoyèrent Pandore à Épiméthée qui l’accueillit avec joie bien que Prométhée lui eût conseillé de ne jamais rien accepter de Zeus. Épiméthée reçut donc Pandore et lorsque cette chose dangereuse — une femme — fut devenue sienne, il comprit, mais trop tard, toute la valeur du conseil que lui avait donné son frère. Car Pandore, comme toutes femmes qui lui succédèrent, était dévorée par la curiosité. Il fallait qu’elle sût ce que contenait la boîte. Un jour, n’y tenant plus, elle souleva le couvercle et tous les maux, crimes et chagrins, qui depuis affligent l’humanité s’en échappèrent. Terrorisée, Pandore rabattit le couvercle. Hélas, tous les maux s’étaient envolés. Seule restait — unique don parmi tant d’autres néfastes — l’Espérance, qui demeure jusqu’à ce jour le seul réconfort de l’humanité en détresse. Et les mortels apprirent ainsi qu’il est impossible de vaincre Zeus et même de le tromper.
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E
j'ai lu avec plaisir tes analyses sur allociné, elles sont concices mais très fines & rendent justice au talent des artistes
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  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
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