Avec The artist, vu mercredi dernier, et Polisse vu ce mercredi, il faut reconnaître à la production française d'être diversifiée, car voilà deux univers totalement opposés dont on aurait aimé que l'un fut presque aussi muet que l'autre, tant sa jactance est assez pénible à supporter pendant plus de deux heures. Merveille du cinéma muet qui exprime l'essentiel en silence ! Alors que penser de ce Polisse, prix du Jury 2011 du Festival de Cannes et film promu comme l'exception française dans sa plénitude, sinon que c'est là un documentaire plutôt réussi des graves bobos dont souffre notre société et un inventaire assez fastidieux des maux les plus affligeants de notre humanité : maltraitance, incestes, viols, fugues, rien ne sera oublié mais, curieusement, en dehors de quelques passages, sans susciter l'émotion que j'imaginais, car les scènes se succèdent en effleurant chacun des sujets sans aller jamais au fond des choses et, au final, ne nous apprenant rien de plus que ce que nous en disent quotidiennement les journaux télévisés et les téléfilms des chaînes publiques.
Si je ne me suis ennuyée à aucun moment car le film a du rythme et qu'il est interprété par des acteurs formidables ( inutile de les citer, ils le sont tous ), il ne me laissera pas un souvenir impérissable et ne révolutionnera en rien le 7e art, tant il est encombré de clichés et cède avec trop d'indulgence à la bien-pensance actuelle. Je sais, je vais m'attirer les foudres de quelques-uns, considérant que nous sommes en présence d'un film fort et pédagogique, mais voilà justement ce qui me déçoit le plus : ce film ne vous remue pas, il n'ajoute rien à ce que nous savions depuis belle lurette des problèmes inextricables qui se posent chaque jour aux brigades de protection des mineurs et, encore, le film de Maïwenn nous épargne-t-il les meurtres atroces et autres horreurs qui défraient la chronique presque chaque semaine. Plutôt qu'un coup de poing, je dirai qu'il s'agit d'un coup d'épée dans l'eau.
Là, où Polisse me semble le plus réussi, c'est dans le rendu du climat qui règne entre les membres de cette brigade parisienne, climat plus affectif et agressif que je ne le pensais, où hommes et femmes en présence, fratrie en quelque sorte, exercent un métier si difficile qu'il met fatalement leur propre équilibre en danger. Aussi le moindre incident peut-il tourner au drame. Ce sera le cas lorsque l'une des protagonistes, à bout de nerfs, agressera sa consoeur avec les mots qui tuent ... Carine Viard se révèle dans cette scène une actrice capable de péter les plombs avec panache. Quant à Maïwenn, on se demande ce qu'elle vient faire dans son film et pourquoi elle a choisi d'endosser, en plus de son rôle de réalisatrice, celui sans consistance de photographe qui se promène au long de la pellicule sans rien y ajouter, sans rien y soustraire, figurante auto-satisfaite qui n'a sans doute d'autre but que de signifier aux spectateurs que notre société de l'image souffre d'un mal-être profond.
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