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13 décembre 2007 4 13 /12 /décembre /2007 10:12
LE RENARD ET L'ENFANT DE LUC JACQUET

            
Auteur d'un film admirable  La marche de l'empereur, Luc Jacquet revient au cinéma avec un long métrage dont l'inspiration est antérieure au précédent, car tiré d'un souvenir d'enfance, quand il demeurait avec sa famille sur le plateau du Jura et se plaisait à vagabonder dans la nature et à y faire d'extraordinaires découvertes. Ces souvenirs l'ont si fort imprégné qu'il décida de commencer des études de biologie avant de changer son fusil d'épaule et de se consacrer à une activité plus esthétisante : le documentaire. Pour autant, il ne se considère pas comme un écologue qui serait venu à la nature par une fibre sensorielle, atavique ou affective. Je ne pense pas avoir de message à transmettre - s'empresse-t-il de dire - mais il reconnaît éprouver une empathie spontanée pour tout ce qui concerne l'environnement. Avant d'expliquer une situation - poursuit-il - d'ériger des lois ou de se montrer pédagogue, il faut aimer, en vertu d'un principe élémentaire : on protège en priorité ce qui nous touche. Et c'est bien ce qui nous charme dans ce film :  le regard d'enfant émerveillé que le réalisateur pose en permanence sur cette nature : une forêt des Abruzes qui ressemble furieusement à celle dans laquelle il a grandi. Au final - avoue-t-il - je me suis retrouvé dans l'Ain que je connais par coeur.  Et puis, ne nous y trompons pas : si l'auteur a choisi pour héroïne une petite fille, elle n'est guère différente de l'enfant qu'il était lui-même à cet âge. Il n'a fait que transposer en prêtant à la fillette ses yeux, ses émerveillements, ses découvertes, ses émotions devant un monde que l'homme semble incapable d'apprivoiser.  Nous appartenons à une société supra-rationnelle qui veut tout comprendre, tout expliquer. Or si le savoir permet d'éliminer l'obscurantisme et les délires, il ne doit pas empêcher l'imagination et l'émerveillement - précise-t-il en des termes qui ne sont autres que ceux d'une profession de foi.            


 

Pour élaborer son scénario et cette histoire de renard, Luc Jacquet n'a eu qu'à se remémorer, d'autant que le renard a une portée symbolique et que le metteur en scène a été un fervent lecteur d'Antoine de Saint-Exupéry et de son Petit Prince ; ainsi s'est précisé ce rapport si idéalement poétique entre l'animal et l'enfant. Esope le mettait déjà en scène dans ses fables et, en 1150, il était pour Pierre Nivard, la projection du vulgum pecus dont on ne voulait pas dire le nom. N'oublions pas que le renard ne se contente pas d'être rusé, mais qu'il a du tempérament, de la suite dans les idées et un fichu sale caractère. C'est donc une star en puissance. Le tournage n'a pas demandé moins de 122 jours sur trois périodes avec pour objectif de mêler l'exigence qualitative de la fiction à la souplesse et au pragmatisme du documentaire. La direction d'acteurs était également nouvelle pour Jacquet et il reconnait volontiers que les débuts ne furent pas faciles. L'adorable petite Bertille Noël-Bruneau, qui fait beaucoup penser, par sa rousseur, à la fillette qui donnait la réplique à Michel Serrault dans  Le Papillon, étant une enfant réservée, il a fallu la conquérir et la rassurer. Par la suite, tout s'est passé au mieux, car elle s'est laissée emporter par l'histoire. Mais cette histoire, quelle est-elle ?


 

Celle d'une enfant qui préfère les randonnées aux consoles de jeux et surprend un jour une renarde qu'elle va apprivoiser et qui deviendra, au fil du temps, son amie secrète. Il lui faudra bien sûr déployer beaucoup de patience et endurer pas mal de déboires avant d'arriver à transformer cette petite bête sauvage en un animal de compagnie. De superbes prises de vue nous font assister à cette lente et irrésistible conquête et  nous prennent à témoin des espoirs, des victoires, mais aussi des peurs de la petite fille, tout en nous plongeant dans un univers animalier qui ressemble à un conte de Noël. Mais c'est justement là que le bât blesse et que réside la faiblesse du film. Ni tout à fait un documentaire puisqu'on sait que la renarde est apprivoisée ( je crois que six renardes ont été utilisées à tour de rôle ), ni tout à fait un conte, l'angle choisi par l'auteur étant trop anthropomorphique pour convaincre, il se trouve ainsi condamné à n'être ni l'un, ni l'autre et en pâtit malgré tout. Il y a bien entendu des scènes délicieuses comme la poursuite de la renarde par un lynx, des instants de découvertes authentiques dans la forêt crépusculaire où le monde animal prend pour l'homme, si éloigné de lui, un caractère effrayant, mais l'ensemble du film comprend quelques lenteurs qui affaiblissent un peu le récit. D'où une émotion parfois évacuée, alors qu'elle était  présente en permanence dans La marche de l'empereur. Néanmoins, tel qu'il est, avec ses temps forts et ses faiblesses, ce film plaira aux enfants petits et grands et les sensibilisera à la nature, ce qui est positif. S'il n'emporte pas ma totale adhésion, reconnaissons à l'objet d'être bien empaqueté et d'offrir de la nature une vision ravissante. Et ce duo enfant et renard a tout de même une saveur exquise.

 

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commentaires

A
Oui, je vais le revoir ce soir et je suis sûre qu'il va me séduire davantage. Car ce genre de film est rare.
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N
je viens de me le commander :)<br /> malgré le bémol, je pense que j'aimerai la lenteur de ces images
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K
J'ai lu ta critique, je la trouve un peu sévère :D<br /> <br /> Pour ma part, j'ai bien aimé ce film, c'est vrai que ça peut paraître lent par moment mais bon...
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  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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