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12 mai 2021 3 12 /05 /mai /2021 10:51
THE ROAD MOVIE OU LES CARNETS de VOYAGE du 7e ART

 

La pellicule aime le voyage et il n'y a pour s'en convaincre qu'à considérer le nombre de films que le départ, la route, l'évasion ont inspiré aux cinéastes du monde entier. Je n'en veux pour preuve que le dernier Sur la route de Wim Wenders qui reprend un thème souvent traité et passe, à cette occasion, de la plume à l'image. Et comment ne pas être inspiré par un sujet aussi envoûtant, la quête permanente de l'ailleurs qui sollicite constamment l'homme et le jette dans des aventures sans cesse recommencées. En 1960, le film de voyage s'impose aux Etats-Unis comme un genre nouveau après le western et la comédie musicale. Les héros sont le plus souvent des contestataires qui soignent leur mal de vivre en prenant la route. Il est vrai qu'il y a au voyage de sérieux antécédents littéraires, L'Odyssée et Don Quichotte pour ne citer que les plus emblématiques. Le cinéma ne pouvait pas ignorer longtemps un genre aussi riche et si l'errance a si profondément inspiré les Américains, n'est-ce pas parce que leur pays est issu d'une longue épopée : la conquête de l'Ouest. Charlie Chaplin était déjà ce vagabond en quête d'un paradis imaginaire et Les raisins de la colère de John Ford ne raconte-t-il pas l'histoire de paysans chassés de leur terre  par la crise qui fuient vers la Californie afin d'y trouver du travail ? Dans les années 60, alors que le pays s'embourbe au Viêt Nam, la jeunesse cherche un exutoire et beaucoup de jeunes partent sur les routes, le voyage apparaissant comme une solution en mesure d'apaiser leur mal de vivre. Les routes symbolisent la liberté, l'insoumission et a le mérite de vous faire faire des rencontres et voir du pays. C'est au jour le jour une constante improvisation qui n'a plus rien à voir avec la monotonie habituelle du quotidien. Coppola illustrera le thème avec Les Gens de la pluie en 1969 et Denis Hopper avec Easy rider, la même année. 

 

David Lynch, jamais en panne d'imagination, poussera très loin son goût de malmener le spectateur à coups de sensations fortes, à travers l'équipée sauvage de Sailor et Lula, Palme d'or à Cannes en 1990. Ce road movie mène ni plus, ni moins au pays du cauchemar. Avec son conducteur poursuivi par un camion fou, Duel de Steven Spielberg (1971) est plus proche du thriller et du fantastique, alors qu'avec Honkytonk Man, Clint Eastwood nous invite à une escapade cocasse avec un musicien, sorte de road movie nonchalant qui est dans l'esprit d'un réalisateur qui aime faire cavalier seul. Avec Thelma et Louise en 1991, Ridley Scott nous propose une randonnée à haut risque avec deux héroïnes qui ont décidé de s'offrir un week-end entre filles, le temps d'une virée sur la route. Quand un macho tente de violer Thelma, Louise fait feu et les voilà obligées de fuir vers le Mexique. De meurtrières, elles deviendront braqueuses avant de finir cernées de toutes parts, au-dessus du Grand Canyon du Colorado, cavale jubilatoire magnifiée par des paysages grandioses. Avec ce film, Ridley Scott dénonce la brutalité de l'Amérique profonde où il n'est pas facile pour une femme d'être considérée à l'égal de l'homme. Les actrices Susan Sarandon et Geena Davis donnent un relief très convaincant à leurs rôles. Mais pour moi le plus accompli du genre est sans nul doute Into the Wild de Sean Penn, petit chef-d'oeuvre où un jeune homme trouvera la mort seul dans une caravane après une épopée personnelle d'une rare intensité. Un film dont je fais l'éloge dans l'article suivant. Cliquer sur le titre pour en prendre connaissance :   INTO THE WILD de SEAN PENN

 

 

img950.jpg

 

Les Européens ont également un style qui leur est propre et en 1974 avec Alice dans les villes, Wim Wenders commence une trilogie du voyage, en suivant un journaliste et une petite fille dans l'Europe des années 70. Traité par sa caméra, le film se teintera volontiers de métaphysique.  Faux mouvement adaptera les tribulations du Wilhelm Meister de Goethe et dans Au fil du temps (1976) un projectionniste itinérant sillonnera l'Allemagne en quête de sa vision très personnelle des choses. En France, dans Sans toit ni loi (1985), Agnès Varda met en scène une jeune vagabonde qui marche sans but et finira dans un fossé, le road movie s'avérant sans issue, alors qu'avec Tandem (1987), Patrice Leconte s'amuse des étapes successives de deux animateurs de jeux radiophoniques, un road movie quasi professionnel. Et n'oublions pas de citer la virée bretonne de Paco l'Espagnol et de Nino le Russe dans Western (1997) de Manuel Poirier. Le plus frappant reste Paris,Texas, toujours de Wim Wenders en 1984 où, sortant du désert, un homme épuisé s'effondre. Transporté à l'hôpital, il reste muet mais son frère l'identifie - il s'appelle Travis - et le ramène à Los Angeles. Palme d'or au Festival de Cannes 1984, Paris, Texas est d'abord la rencontre de plusieurs talents : celui de Wenders, qui a rarement été aussi sensible, de Sam Shepard pour un scénario qui tient vraiment la route, de Ry Cooder pour la musique, sans oublier les superbes images de Roby Müller et la performance de l'acteur Harry Dean Stanton, bouleversant Travis, qui renaît lentement au monde. La scène où il retrouve sa femme (Nastassja Kinski) est restée mythique.

 

 

paris texas Paris, Texas

 

En l'an 2000, s'il a perdu beaucoup de son esprit contestataire, le road movie n'a jamais quitté les écrans, comme en témoignent des films aussi différents et originaux que Une histoire vraie (1999), où David Lynch suit un vieil américain parcourant des kilomètres sur une tondeuse à gazon. Il fallait être Lynch pour trouver cela. Inspiré lointainement  de l'Odyssée d'Homère, O Brother de Joel Coen (2000) montre trois bagnards en cavale lancés à la recherche d'un trésor dans l'Amérique de la Grande Dépression, alors que dans Twentynine (2003), Bruno Dumont prend pour décor les amples espaces désertiques qu'affectionnait tant John Ford et nous fait participer à un voyage érotico-horrifique que l'on peut oublier de voir. Enfin dans Sideways (2005) d'Alexander Payne, nous voyons deux amis qui choisissent de parcourir la route des vins californiens pour faire le point de leur existence. Les voyages continuent et ont encore un bel avenir devant eux.

 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique MES BILANS, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DE MES BILANS CINEMATOGRAPHIQUES

 

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Sailor_et_Lula_front.jpg 

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commentaires

A
Into the wild est, pour ma part, un film que je n'oublierai jamais. Vu à plusieurs reprises. L'émotion reste toujours forte et envahissante. Si vous en avez la possibilité je vous conseille très vivement No land's song. Un documentaire qui m'a bouleversé. Je pense que le sujet, les principales protagonistes et leurs voix, le tout, associé au courage nécessaire pour voir ce projet aboutir, vous combleraient. Bonne journée. À bientôt
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M
Une mise en perspective très intéressante.Je crois que moi aussi mon film le plus culte du genre est Into the wild.
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  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


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