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6 juillet 2013 6 06 /07 /juillet /2013 10:19

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Evidemment, il était impensable, alors qu'il venait d'être couronné d'un oscar canin, de ne pas interviewer ce chien qui était devenu l'une des vedettes hollywoodiennes. Ce qui fut fait en 2013.

 

C'est comment de participer à un film multirécompensé comme The Artist 

 
Je dois dire que, depuis le jour où un cinéaste français est venu frapper à la porte de ma niche en 2010, j'ai vécu une aventure qui a vraiment du chien. Michel Hazanavicius (un nom qui sonne comme un éternuement !), le cinéaste, cherchait un Jack Russell ou un Fox pour son film muet en noir et blanc. Le reste, comme disent les humains, appartient à l'histoire.

 

Comment le succès a-t-il changé votre vie ? 

 
Omar, mon professeur d'art dramatique, m'a aidé à rester humble et en bien des aspects ma vie n'a pas changé d'un iota. Bien sûr, je voyage désormais en business, j'ai goûté au champagne, au caviar et au boeuf de Kobé (je préfère les saucisses), mais lorsque je ne me promène pas en limousine, je reste à la maison avec ma meute, à me lécher les bijoux de famille là où ils ont toujours eu coutume de l'être.

 

Parlez-nous de votre ascension vers le succès ? 

 

Comme tant d'autres acteurs, il ne s'est pas fait en un jour. Abandonné dès l'enfance, c'est Omar qui m'a secouru et enseigné les rudiments de l'art dramatique canin. (Qui va du skateboard au surf ou apprendre à faire le mort.) Après un début de carrière précoce en tant qu'artiste de rue, j'ai commencé la valse des auditions. Le rejet est une chose que connaissent tous les acteurs sans travail, et il n'était pas facile d'entendre que j'étais trop court sur pattes, inadéquat ou trop poilu. J'ai par la suite décroché quelques seconds rôles dans des films commerciaux et des séries B, avant ma véritable percée, alors que j'allais sur mes cinq ans, en années de chien. 

 

 

Et George Cloney, en vrai, comment est-il ? 
 

Mister C. Est mon idole, mais il est aussi malheureusement très attractif physiquement... Mon moi intime désespère d'être aussi "Clooney cool" que Clooney. Je veux être aussi beau que lui quand ma fourrure grisonnera. Et je voudrais qu'hommes et femmes me fassent la fête et soient suspendus à tous mes aboiements !
 

Avez-vous un flirt à Hollywood ? 

 

J'ai eu quelques liaisons fugaces, avec une charmante petite carlin appelée Chata et une caniche répondant au nom de Greta. Mais lorsque nous avons commencé ensemble le tournage du film  De l'eau pour les éléphants, ma vie n'a plus connu qu'un seul amour : Reese Witherspoon. Mademoiselle W. et moi-même sommes au-dessus de toute contingence, mais notre relation a dû être réévaluée dès lors qu'elle m'a laissé lui rouler un patin lors du dîner de gala de la Maison-Blanche à Washington.

 

Alors, êtes-vous plutôt un chien ou plutôt un acteur ? 

 
Les deux. Il n'y a rien dans les carnets du savoir-vivre à d'Hollywood qui dise qu'il me faille choisir. Ce choix peut trahir les gènes, mais mon travail trahit mon talent. Comme Elizabeth Taylor l'a admis naguère, "certains de (ses) meilleurs partenaires de scène furent des chiens ou des chevaux".

 

Quel est le secret pour être un bon acteur canin ? 

Les saucisses.

 

Quelle a été votre meilleure expérience professionnelle ? 

À part tomber queue par-dessus tête pour mademoiselle W., je dirais travailler auprès de Jean Dujardin. Bien qu'il parle assez peu l'américain-chien, il s'est montré très docile et enthousiaste à mon apprentissage. Particulièrement dans l'art de jouer sans parole. Comme il l'a dit plus tard : "Uggie est un chic type ! C'est un super acteur, travailler avec lui était vraiment facile... Le seul problème était qu'il me prenait certains jours pour une grosse saucisse." Comme si c'était quelque chose de mal !

 

Votre santé vous a contraint à vous retirer au faîte de votre gloire. Comment vivez-vous cela ? 

 
Si c'est ça, la retraite, alors à quoi ressemble le travail  ! Je voyage sans cesse de par le monde, j'ai été invité aux 90 ans de la grande actrice Betty White, je tiens un petit rôle dans le dernier film de Will Ferrell,  "Moi, député". Je suis la voix du jeu  "Nintendogs+cats" et je pose pour l'affiche de la campagne d'adoption de la SPA américaine. En juin dernier, j'ai été le premier chien de l'histoire appelé à immortaliser mon empreinte de coussinets sur Hollywood Boulevard. La ville de Los Angeles a même décrété ce 26 juin le "Uggie Day ". De surcroît, je viens de rencontrer mon public français lors d'une séance de dédicaces au Drugstore Publicis, sur les Champs-Élysées ! Alors, j'ai peut-être la tremblote, mais j'ai encore du chien au corps.

 

Quels sont vos projets d'avenir ? 

 
Hormis la publication de mes mémoires, Ma vie, mon oeuvre  chez Jean-Claude Lattès, je sors une appli qui m'est dédiée, "Uggie The Artist", et je prépare quelques bricoles à l'arrière de ma niche dont je ne peux pas encore parler.

 

Comment voudriez-vous que l'on se souvienne de vous ? 

Comme un petit artiste, mais avec un grand coeur.

 

UGGIE est mort en août 2015 d'un cancer.

 


Uggie, The Artist, ma vie, mon oeuvre de Wendy Holden, traduit de l'anglais par Perrine Chambon (éditions JC Lattès, 320 pages, 15 euros).
 

 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique ACTEURS DU 7e ART, cliquer   ICI
 

 

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27 juin 2013 4 27 /06 /juin /2013 09:24

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Après quatre années de séparation, Ahmad arrive à Paris depuis Téhéran, à la demande de Marie, son épouse française, pour procéder aux formalités de leur divorce. Lors de ce séjour, Ahmad découvre la relation conflictuelle que Marie entretient avec sa fille Lucie. De même qu'il apprend qu'elle vit avec un autre homme et désire se remarier, certaine, après trois expériences malheureuses, qu'elle fait enfin le bon choix. Replongé dans les conditions de vie qui furent les siennes autrefois, Ahmad, dans le souci de concilier l'inconciliable, va tenter de jouer les sages, tout en provoquant les confidences dont il s'aperçoit à quel point elles le font souffrir. Cela, au coeur d'un drame psychologique dont les enfants sont les principales victimes. D'autant que les efforts d'Ahmad lèveront le voile sur un lourd secret du passé.

 

En effet, la difficulté d'expulser du présent un passé trop lourd sur le plan affectif procure à ce film, comme aux précédents, sa densité humaine, sa dramaturgie et cette lenteur qui correspond au cheminement de la douleur, parfois compulsive, parfois culpabilisante, où chacun des personnages s'isole au milieu d'innombrables non-dits. Selon son habitude, Farhadi maîtrise parfaitement son récit, de même que sa direction d'acteurs qui sont d'une justesse bouleversante et, particulièrement, les enfants dont le jeu intériorisé et intense m'a émerveillée. Le scénario, aux développements multiples, offre à chacun d'eux la possibilité de donner la pleine mesure de la complexité des sentiments et de justifier l'interrogation permanente que suscite le thème de cette longue et irréversible déconstruction. Néanmoins, la dernière scène ouvre une lueur d'espérance. Entre un revenant interprété par Ali Mosaffa (Ahmad)  et une éternelle absente, la femme de Samir (Tahar Rahim ), le nouvel amour de Marie qui a tenté de se suicider et est désormais plongée dans le coma, le jeu des influences, les troubles de comportement, les interrogations déchirantes ne cessent pas de créer une atmosphère angoissante et un écheveau de probabilités qui tiennent le spectateur en haleine et en inquiétude. Car sans doute est-ce cette inquiétude ou cette incertitude qui est la plus prégnante, celle où le metteur en scène, expert en la matière, se plaît à nous immerger, sans doute pour mieux nous démontrer que si elle déconstruit, elle reconstruit aussi et appelle la bienveillance et le pardon.

 

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Les acteurs, remarquablement dirigés, sont parfaits : Bérénice Béjo, dans son rôle de femme partagée entre ses amours  - présent et passé - fiévreuse, ombrageuse, enceinte et ne souhaitant plus que se propulser dans l'avenir, est très convaincante, face à ses deux amours, l'ancien et le nouveau, tous deux portés à l'incandescence par le jeu subtil de Ali Mosaffa et de Tahar Rahim. Enfin les enfants sont profondément émouvants, victimes d'une actualité qui les dépasse et les meurtrit, chacun posant des questions sans réponse et cependant les seules vraies.

 

Pour consulter les articles de la rubrique CINEMA FRANCAIS, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN
 
 
Et pour lire la critique du film "UNE SEPARATION" du même cinéaste, cliquer  ICI

 

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LE PASSE de ASGHAR FARHADI
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29 mai 2013 3 29 /05 /mai /2013 09:17

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Dans la cour d’école d’un paisible village japonais, quatre fillettes sont témoins du meurtre d’Emili, leur camarade de classe nouvellement arrivée. Sous le choc, aucune n’est capable de se souvenir du visage du tueur et d’aider ainsi à son arrestation. Asako, la mère d’Emili, désespérée de le savoir en liberté, convie les quatre enfants chez elle pour les mettre en garde : si elles ne se rappellent pas, elles seront leur vie durant accablées par la culpabilité et contraintes à la pénitence. Quinze ans plus tard, que sont-elles devenues ? C’est ce que ces deux  films ( seconde partie : celles qui voulaient oublier ) nous content en cinq épisodes qui s’enchaînent les uns aux autres, sans omettre les moindres pistes, indices et conséquences et en s’attardant principalement sur le vécu de chacune des jeunes protagonistes marquée à jamais par ce drame.

 

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Le retour derrière la caméra de Kiyoshi Kurosawa, après plusieurs projets avortés, avec les deux volets de cet opus dont la seconde partie - à ne pas manquer - sortira en salles la semaine prochaine, prend la forme d’une frise criminelle doucement perverse, mais d’une délicatesse inouïe, en cinq tableaux  d’une cinquantaine de minutes, commandés par la télévision  nipponne d'après un roman à succès. Une histoire de petites filles qui, devenues adultes, restent, chacune à sa manière,  meurtries par la culpabilité de n’avoir pas identifié celui qui avait assassiné l’une d’entre elles sous leurs yeux.

Le film chemine à pas délicats dans l’imbroglio de ce réseau de névroses, jusqu’à ce que vérité éclate enfin lors d’un épilogue centré sur la figure vénéneuse et magnétique de la mère endeuillée que vous verrez en allant voir la seconde partie. Un polar doublé d'une fine analyse des comportements humains face à un drame qui marque la personnalité à tout jamais et une méditation subtile sur le pardon, la pénitence et la rédemption considérés dans leurs phases les plus divergentes. Passionnant.

 

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Alors qu’il aurait été tentant de relier et réunir, pour l'occasion, les quatre fillettes devenues adultes, Kiyoshi Kurosawa établit entre elles un réseau de solitudes conforme à sa vision atomisée de la société. Il y a celles qui voulaient se souvenir dont Sae interprétée par la très belle Yu Aoi qui se refuse à devenir femme et épouse un homme riche qui, allant au-devant de ses vœux, la transforme en une poupée intouchable jusqu’à la répudier quand surviennent ses menstrues ;  il y a Maki qui est institutrice et provoque le courroux des parents en se montrant trop exigeantes et voit partout des violeurs en puissance. Il y a également celles qui voulaient oublier, dont l'une qui se complait dans un état infantile et joue à la fille-ours, repoussant toute coquetterie qui  éveillerait le désir de l’homme ; enfin Yuka, jeune femme à la cuisse légère, qui sera la seule capable de mettre Asako sur la piste de l’assassin. Le cinquième épisode, assez laborieux, est consacré à la résolution du crime et se recentre sur la mère, douée d’une présence énigmatique, séductrice froidement déterminée et manipulatrice un brin démoniaque, campée par l’actrice Kyoko Koizumi, admirable d’inébranlable volonté et de beauté hiératique. Si le cinéaste n’atteint pas ici les sommets de son œuvre, il ne transige pas en matière d'une mise en scène nullement mécanique et d’une belle qualité atmosphérique.

 

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On retrouve également la qualité de cadreur de Kiyoshi Kurosawa au sein d’espaces et de plans scénographiques fort bien gérés et en adéquation avec la psychologie des personnages. C’est peut-être l’écriture qui est davantage marquée par une forme de répétitions inutilement insistantes sur les conséquences psychologiques des traumatismes et de la culpabilité. Il s’agit évidemment d’un film féminin – la maternité pour antienne, et autres questions liées à cet univers  – sans pour autant être féministe. Quoiqu'il en soit, malgré quelques longueurs, les deux volets n'en sont pas moins une étude élaborée et convaincante d'une survie à un traumatisme et, au final, un personnage coupable qui, bien que condamné à ne pas l’être par la justice des hommes, se doit de vivre avec une faute que, dans un premier temps, il avait voulu infliger à d'autres.

 

Pour prendre connaissance de l'article consacré à Kiyoshi KUROSAWA, cliquer sur son titre :

 

KIYOSHI KUROSAWA OU UN CINEMA DE LA DETRESSE

 

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20482678.jpg  KYOKO KOIZUMI

 


 

 

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27 mai 2013 1 27 /05 /mai /2013 08:46
GATSBY LE MAGNIFIQUE de BAZ LUHRMANN

                           

Printemps 1922. L'époque est propice au relâchement des mœurs, à l'essor du jazz et à l'enrichissement des contrebandiers d'alcool… Apprenti écrivain, Nick Carraway quitte la région du Middle-West pour s'installer à New York. Voulant sa part du rêve américain, il vit désormais entouré d'un mystérieux millionnaire, Jay Gatsby, qui s'étourdit en fêtes mondaines en compagnie de sa cousine Daisy et de son mari volage, Tom Buchanan, issu de sang noble. C'est ainsi que Nick se retrouve au cœur du monde fascinant des milliardaires, de leurs illusions, de leurs amours et de leurs mensonges. Témoin privilégié de son temps, il se met à écrire une histoire où se mêlent des amours impossibles, des rêves d'absolu et des tragédies ravageuses et, chemin faisant, nous tend un miroir où se reflètent notre époque moderne et ses combats.

 

Voilà une nouvelle variante du chef-d'oeuvre de Fitzgerald qui dispense le chaud et le froid, vous fait passer, surtout lors de la première demi-heure, de l'agacement à la complicité lorsque enfin vous quittez les excès d'une époque mouvementée et de scènes d'un goût douteux pour entrer dans le mystère qui, tout entier, reste celui du personnage de Gatsby et qu'on l'aperçoit seul, au bout d'une jetée, regardant clignoter une petite lumière verte. Oui, nous sommes bien dans le roman de Francis Scott Fitzgerald revisité par un metteur en scène qui a pour les effets spéciaux, les décors, les costumes, les couleurs, la main lourde, mais ne manque ni d'intelligence, ni de sensibilité malgré sa propension à l'outrance. Peut-être cette outrance est-elle la bienvenue ici, si l'on considère que  cette version de Gatsby n'appartient à aucune époque précise, peut-être même davantage à la nôtre qu'à celle des années folles...C'est ce qui, en quelque sorte, en fait l'intérêt et l'originalité, tant les facteurs de décadence sont proches : goût démesuré du plaisir, course irrépressible vers l'abîme, attrait pour l'argent et le luxe tapageur et déclin des valeurs essentielles. Installé à Long Island, Gatsby a fait construire un château baroque et démesuré - celui du film est particulièrement kitch - où il donne des fêtes fastueuses pour les gens chics et moins chics qui se pressent à venir boire ses cocktails, à danser sur ses pelouses et à plonger dans sa piscine. Mais lui n'a qu'une obsession : retrouver Daisy, son amour de jeunesse, dont la maison se trouve juste en face de la sienne, de l'autre côté du lac.

 

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Il est certain que les excès de décorum nuisent au personnage de Gatsby dont la fêlure secrète avait été si subtilement évoquée par l'écrivain et qui est ici absente, gâchée par une surcharge d'images et un style qui dispense plus de poudre aux yeux que de vérités. Mais, l'interprétation de Leonardo DiCaprio parvient à donner au héros sa stature et sa mélancolie et à faire basculer l'histoire dans la réalité du récit littéraire. Il y a même de très belles scènes dont celle de la visite de Daisy dans la demeure de son soupirant qui est probablement la plus réussie du film. Dans l'ensemble les acteurs s'en tirent bien : Nick Carraway est interprété par un Tobey Maguire assez effacé mais crédible, Daisy par Carey Mulligan, charmante, mais loin de valoir la délicieuse Mia Farrow dans la plus classique version de Jack Clayton, et Tom Buchanan par Joël Edgerton qui s'en tire plutôt bien. N'en reste pas moins que le film repose essentiellement sur les épaules de Leonardo DiCaprio dont la sensibilité à fleur de peau, de lèvre, de sourire et de regard fait merveille. Il est moins évanescent que Robert Redford,  solide et fragile en même temps, et je pense que sa prestation aurait touché Scott Fitzgerald tant elle est intériorisée. DiCaprio s'affirme une fois de plus comme l'un des grands du cinéma international, un acteur qui peut tout jouer. 

 

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Bien qu'elle pêche par manque de concision, de rigueur et de goût, cette version ne peut laisser personne indifférent. Ses défauts sont à la hauteur de ses qualités et imposent un style baroque d'une incontestable liberté de ton, d'audace et de fantaisie. Pour cela, il est intéressant de le voir, de même que pour DiCaprio bouleversant dans ce personnage partagé entre le meilleur et le pire et dont le rêve fracassé nous touche toujours autant.

 

Pour prendre connaissance de l'article consacré à Leonardo DiCaprio, cliquer sur son titre :

 

LEONARDO DICAPRIO - PORTRAIT

 

Et pour consulter les articles de la rubrique CINEMA AMERICAIN, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

CINEMA AMERICAIN & CANADIEN

 

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Festival-de-Cannes-une-competition-tres-ouverte_article_mai.jpg

 

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14 mai 2013 2 14 /05 /mai /2013 10:05
KATHARINE HEPBURN,L'INSOUMISE

                                     

Elle pouvait tout jouer, le comique comme le tragique, tellement sa présence avait quelque chose de magique, à cause de son allure peut-être, de son visage particulier qui ne ressemblait à aucun autre, ses taches de rousseur, sa crinière de lionne, sa présence impérieuse ou malicieuse, sa photogénie. Elle était la classe même avec une pointe d'ironie en permanence dans le regard, comme si, en définitive, rien n'était jamais ni si grave, ni si définitif. Intelligente et pragmatique, Katharine Hepburn aura mené sa carrière de façon instinctive, selon ses coups de coeur ou ses coups de tête, sachant figurer dans les meilleurs films avec, face à elle, quelques-uns des meilleurs acteurs. On relève peu de faux pas dans l'énoncé de sa filmographie mais un grand nombre de films remarquables. Elle a beaucoup tourné avec George Cukor mais également Capra, David Lean, Minelli, Kazan, Hawks. 

 

Née en 1907 à Hartford dans une famille cultivée du New-Jersey, elle est la seconde de six enfants, dotée dès l'âge le plus tendre d'un caractère déterminé et indépendant. Elle sait ce qu'elle veut et surtout ce qu'elle ne veut pas : la médiocrité. A 19 ans, elle abandonne ses études et entre dans une troupe théâtrale de Baltimore, puis sert de modèle à un peintre et épouse par commodité un riche homme d'affaires afin de se consacrer, sans souci pécunier, à ce qui sera toujours sa passion : le théâtre. Elle y est néanmoins mauvaise et le sait mais elle a un tempérament tel que l'obstacle l'excite. Cette pouliche n'a qu'une seule perspective : le franchir coûte que coûte. Elle obtiendra son premier vrai succès en 1932 (elle a 25 ans) dans "The warrior's husband" où, enfin, elle impressionne favorablement les critiques. C'est alors qu'elle décide de tenter sa chance à Hollywood qui traverse une période  faste. Lorsque Kate se présente aux nababs en place, son visage et sa forte personnalité séduisent le puissant David Selznick qui la fera tourner aussitôt dans un film de Cukor au côté de John Barrimore. Elle est lancée.

 

Désormais, grâce à son look garçonnier et son visage diaphane, elle incarnera des héroïnes indépendantes et actives qui affirment avec panache et autorité leur personnalité, rompant avec le style des stars à la Garbo ou à la Dietrich. Ainsi sera-t-elle aviatrice dans "Le phalène", écrivain dans "Les quatre filles du docteur March", garçon manqué dans "Sylvia Scarlett", reine dans "Marie Stuart", militante féministe dans "La rebelle", devenant une figure emblématique de Hollywood et du 7e Art. Très éprise de Spencer Tracy, qui ne divorcera jamais, elle connait auprès de lui une longue et passionnée liaison adultère et tous deux formeront l'un des couples mythiques du cinéma Outre-Atlantique, se retrouvant devant la caméra à plusieurs reprises. Ce sera entre autre dans deux brillantes comédies :  "Madame porte la culotte" et "Mademoiselle Gagne tout" qui révéleront , si besoin était, leur merveilleuse complicité d'amants et d'acteurs.

 

 

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Bien que le cinéma l'ait beaucoup gâtée, Katharine Hepburn reviendra au théâtre et interprétera tour à tour Shakespeare ou George Bernard Shaw puis, à partir des années 50, ses apparitions à l'écran, comme à la scène, se feront plus rares. Il y aura encore "Long voyage vers la nuit" qui lui vaudra le Prix d'interprétation à Cannes, "Devine qui vient dîner ?" de Stanley Kramer, son dernier film avec Spencer Tracy, et "La maison du lac" auprès d'Henri Fonda où tous deux campent un couple d'octogénaires. Elle mourra dans son sommeil à New-York le 29 juin 2003 à l'âge de 96 ans. Au 7e Art, elle aura su imposer son style, son franc-parler et son indépendance d'esprit. A ce jour, elle est irremplacée.

 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique ACTEURS DU 7e ART, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES ARTICLES - ACTEURS DU 7e ART

 

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KATHARINE HEPBURN,L'INSOUMISE
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2 mai 2013 4 02 /05 /mai /2013 08:38

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La trame du film prend place à la fin de la période des Royaumes Combattants (de 453 à 221 avant JC), quand le roi des Qin est sur le point d'unifier une Chine divisée en 7 royaumes se livrant à des guerres constantes. S'il est un danger que redoute le futur empereur, c'est le trio de guerriers de l'état rival de Zhao : Ciel Etoilé, Lame Brisée et Flocon de Neige. Ils ont déjà essayé de l'assassiner dans le passé, ce qui pousse le souverain à s'isoler dans son palais en portant continuellement son armure. Un jour, un combattant qui se fait appeler Sans Nom arrive au Palais du roi de Qin. Il prétend avoir vaincu les trois légendaires guerriers et, pour prouver ses dires, présente leurs armes respectives. Ce qui lui vaut une entrevue auprès de l'empereur, à qui il conte les faits, puis sacrifie sa vie pour sauver la sienne.

 

Ce film est assurément une célébration des arts martiaux envisagée à l’égal de ceux de la danse, transformant l’opus en une chorégraphie savante et d’une grande beauté gestuelle, de même que les costumes conçus de façon à amplifier encore la somptuosité des images. Par ailleurs, la beauté des paysages du nord de la Chine est magnifiée par les couleurs qui, chacune, correspond à une page théâtrale en adéquation avec l’histoire du film. Ainsi du rouge, couleur du feu et de la passion passe-t-on au bleu, couleur de l’eau et de la sérénité, au blanc aérien et léger, pur comme la loyauté des chevaliers à leur cause, puis au vert jade, couleur terrestre et boisée liée au passé, signe de la mort et de la fatalité du destin. Comme la calligraphie, l’un des thèmes du film, l’exercice de l’épée exige du pratiquant une parfaite maîtrise du geste suprême et suppose qu’il la porte dans son cœur  de façon à embrasser par la pensée l’univers entier. C’est ainsi que le roi Quin envisage son rôle et accepte le sacrifice de Sans Nom qu’il transformera en celui de Hero et auquel il réservera des funérailles grandioses, afin que le royaume connaisse enfin la paix et l’harmonie et s’unisse autour de figures légendaires.

 

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Surfant sur la vague du renouveau du wu xia  pian, initié par Tigre et Dragon, Zhang Yimou réalise Hero avec les stars les plus en vue du cinéma de Hong Kong et prend pour directeur de la photographie le très talentueux Christopher Doyle. Il n’échappera pas aux critiques, principalement occidentales, qui lui reprocheront son sous-texte idéologique, lequel justifierait le totalitarisme pour assurer la stabilité de l’empire. Mais tous les sous-entendus sont possibles et cela à l’encontre de bien des films…américains par exemple. Reste que l’œuvre est d’une grande élégance esthétique et d’un réel flamboiement, malgré quelques rares longueurs. Pour se défendre, Zhang Yimou a affirmé qu’il ne mélangeait jamais son travail avec la politique. Mais si on met de côté la suspicion, ce film est indiscutablement magnifique et sa réussite visuelle incontestable mériterait à chaque instant un arrêt sur image.

 

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Zhang Yimou a donc choisi ses interprètes parmi les plus prestigieux :  Jet Li  dans le rôle de Sans nom affirme sa présence et sa virtuosité à manier le sabre, Tony Leung est un Lame brisée émouvant, visionnaire pour qui l’amour et la droiture comptent plus que la mort, Maggie Cheung est un Flocon de Neige glacial et  aérien, belle comme la neige, alors que la ravissante Zhang Ziyi affiche  son ardeur habituelle et son étonnante photogénie. Ainsi Hero est-il entré définitivement dans le panthéon des films de sabre chinois, résumant les traditions artistiques chères au cœur des asiatiques, pour le plus grand plaisir du spectateur qui appréciera autant la beauté des images que la musique fort bien adaptée de Tan Dun.

 

Pour consulter l'article consacré au cinéaste, cliquer sur son titre : 

 

ZHANG YIMOU - PORTRAIT

 

Et pour prendre connaissance des articles de la rubrique CINEMA ASIATIQUE, cliquer    ICI

 

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21 avril 2013 7 21 /04 /avril /2013 09:01

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Gros effets d'un côté et caméra légère de l'autre, l'intrusion du numérique dans le 7e Art est universelle. Mais qu'apportent-elles de vraiment nouveau ces techniques de pointe à l'industrie du 7e Art, question que nous sommes en droit de nous poser ? En un siècle d'histoire du cinéma, la boucle semble bouclée. Si tout a commencé avec les truquages astucieux d'un Georges Méliès, cela se poursuit de nos jours avec la surenchère des effets spéciaux de Matrix ou d'Inception ou encore de Harry Potter pour les plus jeunes. Mais si Méliès revenait parmi nous serait-il véritablement étonné ? Cent ans, n'est-ce pas beaucoup de temps pour obtenir des machines et ordinateurs ce que les équipes Méliès parvenaient à produire avec minutie et enthousiasme en explorateurs d'un nouveau monde qu'ils étaient alors ? Car les illusionnistes d'hier ne sont autres que les techniciens d'aujourd'hui, la poésie en moins, tant il est vrai que l'on ne sait plus où la surenchère s'arrêtera et où le bon goût  saura subvenir aux  excès de la virtualité. Certains personnages, comme celui du film Simone d'Andrew Niccol ne rêve-t-il pas de remplacer les acteurs par des androïdes, répliques parfaites mais si peu satisfaisantes de nos stars actuelles ? Jusqu'où irons-nous dans ces excès imagiers où la réalité est constamment dépassée et détrônée par le fictif ?

 

Hier encore, le scénariste avait l'avantage sur le  caméraman. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Ce qui compte  est la quête insatiable de la nouveauté, de l'effet bleufant, du mélo numérisé au service d'un concepteur qui veut être partout, tout voir à la fois et franchir une étape supplémentaire dans le dévoilement  des constructions imaginaires. C'est donc l'illusion qui prime. Est-ce là, pour autant, le meilleur des mondes ?  Alors que tout devient possible dans l'imaginaire, tout risque de devenir admissible dans notre vie quotidienne et le danger est que le 7e Art, oubliant d'élever l'homme par sa quête de la beauté et de l'universalité, ne le rabaisse en ne lui offrant qu'une simple exploitation d'une science-fiction au service de trucages technologiques. Mais à côté de ces effets spéciaux si vite ennuyeux, des progrès ont été faits grâce au numérique avec l'arrivée des petites caméras qui mettent fin au monopole coûteux et forcément discriminatoire des superproductions. Désormais, n'importe qui peut saisir la vie dans son déroulement temporel une caméra sur l'épaule, ainsi que l'inaugurait Jean-Luc Godard dans "A bout de souffle". C'est la raison pour laquelle nous voyons proliférer les films d'auteur à petits budgets, ce qui est une évolution notable, surtout pour des pays où réaliser un film relève du parcours du combattant. Pensons à l'Afrique et à l'Iran. En ce domaine, les progrès de la technique ne peuvent que nous réjouir. Au final,  si ces progrès ont leurs avantages, ils ont leurs inévitables inconvénients. Aux hommes, et principalement aux cinéastes, de garder la tête froide et le sens de la mesure. Le cinéma dispose d'un panel de moyens inouïs qu'il serait dommage de gâcher en truquant la réalité de manière caricaturale et en privilégiant la machine au dépens de l'art.

 

Pour consulter la liste complète des articles de cette rubrique, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DE MES BILANS CINEMATOGRAPHIQUES

 

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16 avril 2013 2 16 /04 /avril /2013 08:18

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Chine, 1936. Ip Man, maître légendaire de Wing Chun (un des divers styles de kung-fu) et futur mentor de Bruce Lee, mène une vie prospère à Foshan où il partage son temps entre sa famille et les arts martiaux. C'est à ce moment que le Grand-maître Baosen, à la tête de l'Ordre des Arts Martiaux Chinois, cherche son successeur. Pour sa cérémonie d'adieux, il se rend à Foshan, avec sa fille Gong Er, elle-même maître du style Ba Gua et la seule à connaître la figure mortelle des 64 mains. Lors de cette cérémonie, Ip Man affronte les grands maîtres du Sud et fait alors la connaissance de Gong Er en qui il trouve son égal. Très vite l'admiration laisse place au désir et dévoile une histoire d'amour impossible. Peu de temps après, le Grand-maître Baosen est assassiné par l'un de ses disciples, puis, entre 1937 et 1945, l'occupation japonaise plonge le pays dans le chaos. Divisions et complots naissent alors au sein des différentes écoles d'arts martiaux, poussant Ip Man et Gong Er à prendre des décisions qui changeront leur vie à jamais.

 

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Au sommet de son art, Wong Kar-wai nous livre avec "The Grandmaster" une oeuvre d'une puissance et d'une séduction rares, où se mêlent une histoire d'amour impossible, un des thèmes privilégiés du cinéaste, liée à la notion d'héritage en tant que transmission d'un savoir et d'une philosophie qui contraint l'héritier à une forme d'ascèse solitaire. On peut écrire, sans craindre de se tromper, que "The Grandmaster" est le modèle parfait de la mise en scène fluide et élégante en fusion avec le récit, où la technique du nouveau chef opérateur de Wong Kar-wai fait merveille. Philippe Le Sourd signe en effet une photographie époustouflante de beauté, toujours en harmonie avec le sujet et rend ainsi le plus bel hommage qui soit à l'art du Wing Chun et autres arts martiaux. Difficile  aux autres productions de rivaliser avec ce film qui atteint en tous points la perfection et élève le 7e Art à un sommet où image, scénario, dialogue, interprétation, musique concourent à composer une oeuvre d'un style incomparable en ampleur et  pureté graphique.

 

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Longuement mûri, le film a demandé trois années de recherche et de travail pour atteindre sa plénitude et les acteurs eux-mêmes, tous excellents, ont été formés aux arts martiaux et, plus étonnant encore, la construction et le rythme des scènes s'emboîtent adroitement dans une réalité fantasmée avec des abstractions particulièrement habiles qui permettent à Wong Kar-wai de parvenir à un niveau de pureté cinématographique sans égal. A travers ce film, c'est la genèse d'une oeuvre qui s'accomplit, en même temps que se forge, en un narratif cohérent et multiple, l'identité de la Chine contemporaine. On ne peut que s'extasier à chacun des plans, que ce soit ceux des combats ou ceux qui s'attardent sur les visages, les décors précieux,  les effets empreints de raffinement, sans pour cela manquer ni de force, ni de sérénité, et sur les grandes constantes du maître : l'eau, les fleurs, le délicat profil des femmes, la neige, les clairs-obscurs reconnaissables entre tous.

 

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L'histoire est celle d'Ip Man que l'on suit à partir de l'âge de 40 ans. Après avoir vécu dans une certaine opulence et connu un bonheur qui était pour lui comme un éternel printemps, il va tout perdre en 1937, lorsque commence l'occupation japonaise : sa fortune, sa femme et ses enfants. Obligé d'émigrer à Hong-Kong, il ouvrira l'école de Wing Chun qui le fera entrer dans la légende. Une quête de perfection qui met en valeur les arts martiaux en une suite de chorégraphies spectaculaires qui toutes dégagent une intensité stupéfiante, malgré une grande économie gestuelle. Les racines philosophiques et culturelles de ces arts remontent à la nuit des temps - on dit au confucianisme - et ont l'ambition de concourir à l'amélioration de la société qui passe obligatoirement par l'amélioration de l'individu. C'est la raison pour laquelle le Kung Fu est avant tout une école de vertu, d'équilibre et d'harmonie et que le rôle du maître réside à perpétrer des secrets et à fédérer une communauté unie par la tradition. Le souci de Wong Kar-wai a donc été de relater cette quête de perfection au coeur d'une époque troublée avec, au final, la solitude et la mélancolie si chères au cinéaste et qui, dans cet opus magistral, atteint son expressions la plus dépouillée. Tony Leung est un Ip Man aussi noble que sage et élégant face à une Zhang Ziyi impressionnante de détermination et de passion contrôlée. Magnifique.

 

Pour consulter les articles que j'ai consacré à Wong Kar-wai et Tony Leung, cliquer sur leurs titres :

 

HOMMAGE DE DEAUVILLE A WONG KAR WAI           TONY LEUNG CHIU WAI

 

 

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5 avril 2013 5 05 /04 /avril /2013 10:44

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Pour être déjanté et loufoque, le dernier Almodovar l'est de bout en bout. Si le mécano Antonio Banderas, sur le tarmac de l'aéroport de Madrid, avait été un peu plus consciencieux alors qu'il vérifiait les trains d'atterrissage et s'était moins focalisé sur les charmes de Penélope Cruz, s'il n'avait pas coincé le train en y oubliant un outil, les passagers de la classe affaire du vol PE2549 n'auraient pas été soumis à une terreur collective, à une psychanalyse de cheval, à un atterrissage forcé, à une évacuation infernale sur les toboggans de la mort. Unité de lieu, de temps et d'action, les trois de la tragédie antique sont employés ici par Almodovar afin de rappeler que le monde, à l'image de son avion fou, est en train de sombrer corps et âme. Ce dernier opus résonne comme un conte moral, un rien scabreux dans le fond et vulgaire dans la forme, avec ses incohérences, ses exagérations, ses caricatures et ses personnages extrêmes qui, chacun à leur manière, sont sensés incarner un traumatisme de la société contemporaine : la corruption, la peur, la culpabilité, la superstition. Tout cela est tragique mais exprimé sur le ton de la farce et de la dérision, comme un éclat de rire provocateur face au gouffre. C'est un retour aux sources, dit Almodovar, un retour réclamé par mon public. En Espagne, dans la rue, les gens m'arrêtaient pour me supplier de refaire une comédie sur nos propres malheurs, afin de rire de ce qui nous fait tellement mal. C'est vrai que Le piel que habito, mon dernier film était particulièrement sombre. Mais, comme souvent, la conclusion se révélait optimiste. Quand le héros, transformé en jeune fille après de multiples manipulations chirurgicales, retournait chez sa mère, celle-ci reconnaissait son enfant. Pour elle, il n'avait pas changé. C'était cela la bonne nouvelle. Dans Les amants passagers, les trois stewards forment comme le choeur d'une tragédie antique. Ils incarnent la force du rituel. Sur un vol, tout est planifié. Chacun répète le même texte et exécute les mêmes gestes. Je pense que cela rassure les passagers.

 

 

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Je n'ai jamais eu de problème avec l'homosexualité et la bisexualité, cela apparait bien dans ce film où les stewards sont homos et le pilote bisexuel. Il se sent d'ailleurs extrêmement coupable. Dans le cockpit, il appelle sa femme pour lui dire qu'il l'aime. Elle est très étonnée, car ce qu'il ignore, c'est qu'elle sait tout et qu'elle s'en fiche. Moi, je considère que la sexualité est un cadeau et qu'il faut savoir la célébrer de façon extrêmement naturelle, comme une joie et non comme un fardeau. La société espagnole traverse une époque épouvantable, la pire depuis le retour à la démocratie. Cet avion qui tourne en rond au-dessus du même lieu est une métaphore de l'état de la société espagnole qui va complétement à vau-l'eau. Quand va-t-elle atterrir ? Avec qui aux commandes ? Personne ne le sait mais tout le monde y pense. Nous vivons dans une incertitude totale et dans un pays rongé par la corruption, l'insécurité et le doute. Comme mes semblables, je redoute un atterrissage forcé.

 

C'est là toute la morale de ce film qui déçoit parce que le scénario est trop lâche, mais qui en dit plus qu'il n'en a l'air, bien qu'il ne le dise pas toujours comme nous l'aurions souhaité. La dérision y est, la concision, non.

 

Pour consulter les articles consacrés à Almodovar et à ses films, cliquer sur leurs titres :
 

 

PEDRO ALMODOVAR OU UN CINEMA ANTICONFORMISTE

 

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LES AMANTS PASSAGERS de PEDRO ALMODOVAR
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23 mars 2013 6 23 /03 /mars /2013 09:29
JEAN COCTEAU ET LE 7e ART

 

Poète précieux et souvent hermétique, Cocteau fut très vite séduit par le potentiel d'images que lui offrait le 7e Art.  "Qu'est-ce qu'un poète ? C'est un homme qui change les règles du jeu" - se plaisait-il à dire. Toute image constituait pour lui un matériau concret, d'où l'appellation de "réalisme magique" qui qualifia, dès le début, sa création cinématographique, bien que la forme narrative ne cessa d'osciller du réalisme des "Parents terribles" au merveilleux de "La Belle et la Bête". Son premier essai "Le sang du poète", financé en 1931 par le vicomte de Noailles - Cocteau savait emprunter l'argent des autres, avec subtilité - révèle un goût prononcé pour le trucage et l'hybridation visuelle. Aussi les surréalistes ne manquèrent -ils pas de l'accuser d'emprunts illégitimes, ce qui ne semble pas l'avoir beaucoup ému, bien que ses films ne soient pas, à proprement parler, dominés par les tourments de l'inconscient. Il compose avec "Le testament d'Orphée", en 1960, son oeuvre ultime, où il se met lui-même en scène dans un festival de métaphores et d'autocitations comme une boucle englobant les objets et thèmes familiers, dans un flux d'images créatives et de rapprochements trop souvent abscons.  

 

Le goût de Cocteau pour les grands mythes ne se limite pas à celui d'Orphée. Une série de pièces de théâtre l'atteste, qui a conduit à deux films essentiels : "L'Aigle à deux têtes" en 1958, tragédie fondée sur le thème du double, et "La Belle et la Bête" en 1946, un conte dont les références picturales rehaussent un merveilleux éloigné de toute tradition cinématographique. Quel que soit le cadre de son récit, mythique, psychologique, théâtral, légendaire, Cocteau s'est appliqué à fuir le réalisme, trop banal à ses yeux, pour le remplacer par un réel constamment mystifié. Aussi a-t-il souvent commis le péché d'emphase et de préciosité, si bien qu'on ne parvient pas à entrer complètement dans un univers qu'il propose avec trop d'excès et de maniérisme. Il use néanmoins d'une science certaine de la beauté visuelle, privilégiant l'image au texte, ce qui est regrettable, et attachant une grande importance au montage, aux décors insolites qui servent parfaitement ses thèmes les plus chers : la drogue, les rituels d'initiés, l'homosexualité, tout cela dans une version quasi sacralisée et des images d'une indéniable poésie et d'une grande beauté esthétique. Il mourra le 11 octobre 1963, à l'âge de 74 ans, dans sa maison de Milly-La-Forêt à quelques heures de son amie Edith Piaf. Il repose dans la chapelle Saint-Blaise-des-Simple qu'il avait décorée, sous une dalle qui porte cette épitaphe  : "Je reste avec vous". Depuis lors, des articles, des livres, des rediffusions ont tenté de nous remettre en phase avec un créateur un peu oublié du public, dont la vie ne fut certes pas un long fleuve tranquille, mais qui sut, tout ensemble, nous surprendre par son originalité et sa légèreté et nous égarer par la diversité de ses dons.

 

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JEAN COCTEAU ET LE 7e ART
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Présentation

  • : LA PLUME ET L'IMAGE
  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.

Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


Charlie Chaplin

 

"Innover, c'est aller de l'avant sans abandonner le passé."

 

Stanley Kubrick

 

 

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