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27 mai 2008 2 27 /05 /mai /2008 12:43
SYDNEY POLLACK

 
Sydney Pollack, qui s'est éteint le 26 mai 2008 des suites d'un cancer, fut l'un des cinéastes les plus marquants de l'après-guerre, avec des films comme  "On achève bien les chevaux",  "Les trois jours du Condor". Amoureux des acteurs, des actrices, du jeu, le cinéma était sa vie et il sut l'aimer aussi bien devant que derrière la caméra, ne se contentant pas d'endosser la casquette de metteur en scène, mais y associant une carrière d'acteur et de producteur. Né aux Etats-Unis en 1934 de parents immigrés juifs, il s'était fait connaître du grand public grâce à son interprétation aux côtés de  Robert Redford  dans  "La guerre est aussi une chasse"  en 1962. Trois ans plus tard, il était devenu metteur en scène et signait  "Trente minutes de sursis", drame intimiste, avant de trouver définitivement son style avec  "Propriété interdite" (1966), élégie romantique inspirée d'une pièce de Tennessee Williams. Recherche du temps perdu et quête d'une Amérique disparue s'y confondent dans une égale nostalgie de l'innocence. Thème magnifique que l'on retrouvera dans "Jeremiah Johnson" (1971), où l'on voit un homme quitter la civilisation et tenter de revenir à la vie sauvage sans que son expérience soit concluante, car on ne fuit pas impunément la réalité.


Ce sera ensuite "On achève bien les chevaux", tiré d'un ouvrage de Horace McCoy où l'on assiste, durant la terrible dépression de 1932, à un marathon de danse mis sur pied par des organisateurs peu scrupuleux, à l'intention d'un public avide de voir des couples, en mal d'argent, entrer en compétition jusqu'à l'épuisement. Optant pour l'unité de lieu, Pollack choisit de circonscrire l'action sur la piste de danse et les vestiaires, afin de créer une atmosphère d'enfermement, particulièrement efficace. Par ailleurs, il enrichit son narratif d'un aspect métaphorique en ayant recours à des images pleines de symboles, comme ce cheval qui galope dans la plaine avant de s'abattre dans l'herbe. Enfin, il réussit parfaitement à rendre palpable l'épuisement des malheureux danseurs, les mâchoires crispées, ivres de fatigue et luttant désespérément contre le sommeil. Admirablement interprété par Jane Fonda et Michael Sarrazin, ce film eut un grand retentissement et prouve combien l'auteur sut jouer sur des registres divers et varier les thèmes de ses réalisations. C'est à l'âge d'or du cinéma romanesque que Pollack se réfère lorsqu'il constate que  "peu de choses expriment la vérité autant que les mensonges". Entendons-là, par mensonge, vérité seconde de l'artifice et de la stylisation, vérité supérieure de la métaphore et du symbole. Et il est vrai que la sympathie du cinéaste va spontanément à l'amateur qui méconnaît les règles du jeu, à l'ingénu pris au piège de machinations ténébreuses, à l'individu arraché à sa quiétude de rêveur. Humaniste libéral, il s'est attaché aux êtres plus qu'aux idées et aux sentiments davantage qu'aux idéologies. Dans "Tootsie" (1982), par exemple, il introduit une réflexion lucide sur l'identité et ses avatars dans les relations affectives et sociales. Dustin Hoffman y campe, de façon irrésistible, un comédien trop exigeant qui ne rencontre la gloire que grâce à la supercherie : il se travestit en femme et obtient aussitôt le rôle principal dans une série télévisée. Aussi ne peut-on reprocher à Pollack, en prenant connaissance de sa filmographie, d'avoir dévié de sa trajectoire, empreinte de mélancolie et d'un profond humanisme, faisant en sorte d'allier harmonieusement conscience et romanesque. Ce sera le cas avec  "Havana", où il se livre à une véritable réflexion politique sur la révolution cubaine. Plus tard,  il connaîtra la gloire avec "Out of Africa", le film aux sept Oscars, où il nous dépeint magnifiquement les paysages du Kenya. On retrouve dans cette oeuvre accomplie le charme suranné des vieux films africains, mais le cinéaste sut déjouer les pièges et introduire une incontestable modernité dans son histoire. En nous quittant, il laisse derrière lui une filmographie exemplaire, qui pose sur les hommes un regard aigu mais toujours empreint de compassion et de tendresse. Sans nul doute, il ne fut pas dupe des dangers et erreurs qui menacent notre époque, mais a contribué à hisser le 7e Art vers l'excellence.

 

Pour lire les articles de la rubrique consacrée aux réalisateurs, cliquer sur son titre :

 


LISTE DES ARTICLES - REALISATEURS du 7e ART

 

Et pour accéder aux critiques que j'ai consacrées aux films de Sydney Pollack, comme "Jeremiah Johnson", "Out of Africa" et "On achève bien les chevaux", cliquer sur le lien ci-dessous :  

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA AMERICAIN ET CANADIEN
 

 

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24 mai 2008 6 24 /05 /mai /2008 10:58
LA NUIT AMERICAINE de FRANCOIS TRUFFAUT

                              

En 1973, après "Une belle fille comme moi",  François Truffaut avait besoin de se ressaisir. Ce dernier film avait été un semi échec et il lui fallait absolument frapper  les esprits par une production forte, une oeuvre magistrale. Ce sera "La nuit américaine". Selon moi son plus beau film avec "Le dernier métro", celui d'où émane un charme envoûtant et qui a cette particularité d'être sans doute l'oeuvre la mieux construite du cinéaste et celle qui donne étrangement l'impression d'une improvisation permanente. Car qu'est-ce que La nuit américaine, sinon le récit d'un film dans le film, l'immersion dans l'intimité d'un tournage, en quelque sorte un documentaire sur une profession qui suscite curiosité et fascination et, pour finir, une chronique non dénuée d'humour d'une entreprise ensorcelante qui sait mieux qu'aucune autre inspirer petites et grandes passions et se révéler être un jeu de balancier entre fabrication d'un spectacle et confession secrète. En effet, "La nuit américaine" est une célébration lyrique de la création d'un film et s'élabore à partir de "Je vous présente Pamela", astuce habile qui permet à Truffaut de nous instruire sur l'art cinématographique et de nous montrer ce qui sépare la réalité fictive de la réalité vécue et, mieux encore, de nous apprendre comment l'une se nourrit de l'autre, tant la ligne de démarcation entre les deux est peu étanche. Nous sommes ainsi les témoins des constants aléas rencontrés par l'équipe et les situations rocambolesques qui en découlent : caprices de star, retards, contre-temps, surprise après surprise qui se vivent en général dans une louable bonne humeur, un zeste de flegme et de fatalisme, les intervenants étant conscients qu'ils ont embarqué sur le même navire pour se rendre à même destination. Au coeur de cette équipe domine la star, celle qui est chargée du rôle principal et dont chacun, c'est-à-dire le metteur en scène, les autres comédiens, la scripte, l'habilleuse, le preneur de son, dépendent plus ou moins. Aussi pour tenir tout son monde sous son charme et se faire accepter comme l'incomparable idole, lui faut-il faire preuve de magnétisme et de séduction, d'où ses angoisses perpétuelles. Le monstre sacré de La nuit américaine est Jacqueline Bisset au regard d'émeraude et à la beauté délicate, dont la vulnérabilité est évidente et les caprices fréquents.

 

Dès l'ouverture, Truffaut dédie le film aux grandes actrices du cinéma muet : Lilian et Dorothy Gish. Plus loin, il rend hommage à une autre grande actrice, française quant à elle, Jeanne Moreau, l'héroïne de Jules et Jim et, ce, au travers d'un jeu radiophonique. On saisit à quel point ce metteur en scène était sans cesse à l'écoute de ses acteurs et la sympathie fondamentale qu'il leur vouait. D'ailleurs Truffaut ne se cachait pas d'avoir réalisé La nuit américaine comme un documentaire. L'origine de ce film remonte à une observation de Hitchcock lors de son interview avec Truffaut : Toute l'action se déroulerait dans un studio, non pas sur le plateau devant la caméra, mais hors du plateau entre les prises de vue ; les vedettes du film seraient des personnages secondaires et les personnages principaux seraient certains figurants. On pourrait faire un contrepoint merveilleux entre l'histoire banale du film que l'on tourne et le drame qui se déroule à côté du travail. Et Truffaut, des années plus tard, devait se souvenir de cette suggestion géniale du maître du suspense. Je me suis imposé des limites très précises  - avait-il dit à ce propos - j'ai respecté l'unité de lieu, de temps et d'action. (...) Je n'ai pas cherché à détruire la mythologie du cinéma. Le cinéma français étant très peu mythologique, j'ai voulu que ce film porte l'empreinte d'Hollywood. Il est exact qu'en dehors de l'aspect anecdotique du tournage du film, auquel nous assistons en spectateurs privilégiés qui ont accès aux coulisses fascinantes du 7e Art, le cinéaste s'est surtout intéressé à la psychologie des personnages. Depuis le metteur en scène Ferrand qu'il interprète avec brio, en proie lui aussi à ses doutes et à ses appréhensions, poursuivi par l'image d'un petit garçon descendant une rue déserte, appuyé sur une canne. Il arrive dans un cinéma et vole des photographies  publicitaires : ce sont des clichés de "Citizen Kane", que Truffaut visionna trente fois et dont il disait que c'était le film qui avait poussé le plus grand nombre de gens à devenir cinéastes. Cette référence oedipienne n'est donc pas anodine et laisse entendre que tous les réalisateurs, un jour ou l'autre, ont volé leur père Orson Welles. Par ailleurs, au cours de cet opus, Truffaut brosse un tableau finement ciselé de la vie privée des uns et des autres en proie à leurs difficultés personnelles, insistant sur la complexité des rapports humains dans une création artistique où chacun a sa pierre à apporter, et pose habilement l'interrogation qui n'a cessé de le tarauder : le cinéma est-il plus important que la vie, rejoignant l'interrogation de Marcel Proust en littérature : le roman est-il plus vrai que la vie ? Ce film est donc rendu plus passionnant qu'il est l'oeuvre d'un passionné, une oeuvre où l'auteur lui-même se met en cause, cherchant des diversions à ses propres phobies. La nuit américaine fut un immense succès et contribua à asseoir la notoriété internationale de Truffaut qui  vit avec bonheur son long métrage couronné de l'Oscar du meilleur film étranger. 

 

Pour lire l'article consacré à François Truffaut, cliquer sur son titre :

 

FRANCOIS TRUFFAUT OU LE CINEMA AU COEUR

 

Et pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA FRANCAIS, dont les oeuvres de Truffaut, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA FRANCAIS

 

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LA NUIT AMERICAINE de FRANCOIS TRUFFAUT
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23 mai 2008 5 23 /05 /mai /2008 10:39
LES NUITS DE LA PLEINE LUNE d'ERIC ROHMER

                 

Louise, stagiaire dans une agence de décoration, occupe avec Rémi, urbaniste, un appartement à Marnes-la-Vallée. Mais Louise est coquette, aime sortir, s'amuser, alors que Rémi, casanier, préfère la tranquillité d'une vie un peu à l'écart des autres. Un soir Louise fait la connaissance de Bastien qu'elle invite dans le studio parisien qu'elle est en train d'aménager. C'est une nuit de pleine lune... Cependant cette existence dissipée commence à la lasser et elle décide de retourner vivre sagement auprès de Rémi. Mais il est trop tard, une autre femme a pris sa place.



Avec ce quatrième film de la série "Comédies et Proverbes", Eric Rohmer illustre la formule suivante : "Qui a deux femmes perd son âme, qui a deux maisons perd sa raison". Une fois encore, l'auteur fait preuve d'une grande liberté de ton et vise à saisir, en peintre autant qu'en moraliste, avec une attention minutieuse, les petits riens de la vie quotidienne qu'il considère comme significatifs de l'air du temps. Son art, comme on l'a dit, mêle une certaine forme de modernité picturale et de tradition classique qui s'applique à inscrire un itinéraire dans un périmètre délimité et ouvre, par la même occasion, une réflexion en profondeur sur l'architecture d'aujourd'hui, la tristesse des banlieues, la jungle des villes, les nuisances de tous ordres et le cocon familial sécuritaire. Cela témoigne d'une extrême sensibilité à l'environnement et nous convie dans des lieux précis qui s'inscrivent dans une chronologie rigoureuse : la gare de Marnes-la-Vallée, le parc du Mandinet, le carrefour Saint-Michel, la place des Victoires, la rue Poncelet... Cette attention portée au cadre de vie est inséparable d'un souci complémentaire de la décoration intérieure. Rohmer l'a confié à son interprète Pascale Ogier qui s'identifie idéalement au personnage de Louise, oiseau volage en quête d'un nid à ajuster à ses mesures. Comme toutes les créatures du cinéaste, elle entend marquer son territoire avec pour seul critère un certain goût de la beauté. Auprès d'elle, l'excellent Fabrice Luchini, qui apporte la seule note drôle et légère de ce film, sans doute le plus décalé, le plus abrupte de Rohmer, se fait le porte-parole du climat habituel rohmérien, lorsqu'il s'écrie : " J'ai besoin de me sentir au centre". Au centre d'un pays, d'une ville qui serait presque le centre du monde.

 

           

Faut-il pour autant considérer le metteur en scène comme un ironique ethnographe, un dilettante à l'affût des minauderies de  ses contemporains, ayant une prédilection pour les personnages exagérément nombrilistes. Il s'en défend et ne se veut que le peintre des moeurs de son époque comme son ami et confrère Claude Chabrol. C'est la raison pour laquelle il fascine et irrite à la fois,  ne laissant jamais indifférent, tant son public finit par se reconnaître dans ce tableau qu'il brosse d'eux avec une grâce et une habileté indiscutables. Il pratique un humour au second degré, pas toujours perceptible il est vrai. Si on le questionne sur ses préférences littéraires, le cinéaste cite aussi bien Balzac que la Comtesse de Ségur et se plait à brouiller les pistes. Dans l'entreprise que je fais - a-t-il coutume de dire - il est bon d'être secret. Son oeuvre est néanmoins d'une rare transparence. Elle s'ordonne, on le sait, en cycles : les contes moraux, les comédies et proverbes, dont le fleuron est sans nul doute "Les nuits de la pleine lune" ( 1984 ), où l'on voit l'importance de cet astre sur le comportement des personnages, sur leur humeur, leurs amours. Le sujet se focalise, comme beaucoup d'autres réalisations de Rohmer, autour des sentiments, des états d'âme de garçons et de filles qui échouent à accorder leurs actes et leurs désirs. D'un prétexte aussi ténu, Rohmer va broder tant et si bien qu'il réactualise le thème bien connu des deux pigeons dont l'un s'ennuyait tant au logis qu'il prît son envol jusqu'au jour où il le réintégrera, mais trop tard pour sauver la mise. Servi par des dialogues étincelants, le film nous renseigne avec brio sur les complications incertaines du coeur, le jeu des apparences, les rendez-vous manqués. Les acteurs servent cette intrigue avec finesse, par leur naturel et leur spontanéité . Et le revoir est d'autant plus émouvant que son interprète féminine Pascale Ogier ( la fille de Bulle Ogier ) devait mourir peu de temps après, des suites d'une attaque cérébrale. Elle reçut à titre posthume le prix d'interprétation au Festival de Venise 1984. Un film subtil et attachant qui nous restitue parfaitement le climat des années 80.

 

Pour lire l'article consacré à Eric Rohmer, cliquer sur son titre :

 

ERIC ROHMER OU UN CINEMA DE LA PAROLE
 

 

Et pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA FRANCAIS, dont Ma nuit chez Maud, Le genou de Claire, cliquer sur le lien ci-dessous :
 

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA FRANCAIS
 

 

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LES NUITS DE LA PLEINE LUNE d'ERIC ROHMER
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22 mai 2008 4 22 /05 /mai /2008 08:49
LE DERNIER EMPEREUR de BERTOLUCCI

    

Le Dernier Empereur, réalisé en 1987 par Bernardo Bertolucci, est une grande fresque historique qui relate la vie de l'empereur de Chine Pu Yi. A l'âge de trois ans, celui-ci avait été enlevé à sa mère et conduit dans la Cité Interdite pour succéder à l'impératrice douarière Ts'eu Hi, qui avait d'abord exercé la régence au nom de son fils Tong Zhi, puis de son neveu Guang Xu. Sa politique conservatrice et nationaliste, dans un état miné par la corruption et les conflits internes, avait favorisé la révolte des Boxers, vite matée par un corps expéditionnaire occidental.
 


Quand le petit empereur monte sur le trône, il devient entre les mains des régents, qui se chargent de le tenir écarté des tumultes de l'histoire, une sorte de marionnette qui n'est là que pour être en représentation lors des nombreuses et pompeuses cérémonies officielles, dont le but est d'impressionner la population. Servi par des centaines de domestiques, vivant parmi les eunuques et les courtisans, l'enfant s'ennuie dans son rôle de figurant, d'autant qu'il est chaque jour privé davantage de sa mère que les officiels s'emploient à éloigner. Alors que le Kuomintang s'est déjà emparé du pouvoir, rien ne parait avoir changé à l'intérieur de la Cité Interdite qui vit en autarcie comme une île coupée du monde. Jusqu'au jour où la révolution, ayant fait son oeuvre, l'empereur se voit contraint de quitter le palais envahi et saccagé par les insurgés et obligé à chercher refuge au Japon. Bien entendu, les Japonais sauront l'utiliser comme un pion sur l'échiquier de la politique internationale. Mais rien ne se passe comme il était prévu. L'axe  Allemagne-Italie-Japon ayant perdu la guerre de 39-45, les Soviétiques viennent prêter main forte aux Chinois pour chasser l'envahisseur japonais et l'empereur est naturellement livré aux autorités de son pays. Condamné à la prison à vie, il est, grâce à sa bonne conduite et à son changement idéologique qui en a fait semble-t-il un communiste pur teint, délivré par un responsable compréhensif. Il finira sa vie comme jardinier du parc botanique de Pékin, visitera, avec le flot des touristes, la Cité dont il avait été le prince et écrira ses mémoires qui seront publiées en 1965. Il meurt en 1967 dans l'indifférence générale. Ainsi assiste-t-on, la gorge nouée, à la transformation d'un homme-dieu en un personnage que la dictature de Mao aura réduit à n'être plus qu'un sous-homme dans un pays vitrifié par une nouvelle idéologie.

 

La critique fut excellente et le film salué à sa sortie comme un chef d'oeuvre. Hiromura ira jusqu'à écrire : " Tout simplement l'une des plus grandes fresques réalisée au cinéma. Un monument, un colosse, une merveille". Le film tourné dans la Cité Interdite - ce qui a causé d'innombrables difficultés à son metteur en scène - est dédié à l'empereur défunt qui fut la dernière figure impériale du XXe siècle. Il se base sur l'incroyable et tragique histoire de ce petit garçon arraché à sa mère, privé d'enfance, écrasé sous le poids des traditions, qui ne découvrira que tardivement, et au prix de quelles blessures et souffrances, les réalités du monde.

 

Les acteurs, tous parfaits dans leur interprétation, rendent crédibles leurs personnages et la mise en scène, précise et efficace, nous restitue l'époque et la vie dans la Cité interdite en ses moindres détails. Le film ne nécessita pas moins de 270 techniciens, 19.000 figurants, 9000 costumes et 2 ans de négociations avec les autorités chinoises pour obtenir le droit de tourner sur les lieux. Aussi est-il une prouesse dans tous les sens du terme. On sort de sa projection ébloui par l'ampleur des prises de vue, la qualité des restitutions historiques, la beauté des images, les scènes tout à la fois rigoureuses et fastueuses, le bouleversant destin de cet empereur que l'existence se plut à placer dans les situations les plus extrêmes et qui, ayant passé son existence à ne pas vivre, entre, grâce à ce film, dans la légende.
 

 

 Pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, dont 1900, cliquer sur le lien ci-dessous :  

 

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

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18 mai 2008 7 18 /05 /mai /2008 09:07
QUAND PASSENT LES CIGOGNES de MIKHAIL KALATOZOV

                                                                                      
Veronoka et son amoureux Boris tardent à se séparer. Au-dessus d'eux, dans la ville de Moscou, passe un vol de cigognes. La guerre est déclarée. Contre l'avis des siens, et malgré  la peine qu'il inflige à celle qu'il aime, Boris a décidé d'être volontaire et de rejoindre le front. Il mourra sans que ses proches en soient informés. Ayant perdu ses parents, au cours d'un bombardement, Veronika s'est installée dans la famille de Boris où elle finit par céder aux avances pressantes de Mark, le frère de ce dernier. Elle l'épouse, mais en conçoit immédiatement le plus vif remords. Arrive la victoire. Veronika est sur la quai avec un bouquet, mais Boris ne descendra pas du train, et la jeune femme, le coeur brisé, distribuera les fleurs destinées à son bien-aimé aux soldats de retour. 
Echevelé, pathétique, douloureux, Quand passent les cigognes (1957) est peut-être le film le plus romantique jamais tourné. Chose d'autant plus étonnante que cette merveille de sensibilité nous vient d'URSS, dont le cinéma d'alors était au service du pouvoir, niant l'individu, en tant que tel, au profit du groupe. Un film, comme celui-ci, rompait par conséquent avec l'art de la propagande qui avait été imposé par le régime et, bien entendu, le point de vue officiel était loin de concorder avec le vécu du peuple russe. Les metteurs en scène se voyaient dans l'obligation d'insister sur le rôle positif de la révolution d'octobre, de la collectivisation des terres et de la planification économique. Si bien que les scénarios avaient tous pour point commun de chanter les louanges du camarade Staline.

                   
Le tour de force de Mikhail Kalatozov sera de ne pas céder à ce chantage et de décrire le destin d'une femme complexe, renouant avec le concept de la personne humaine. Un souffle épique traverse son long métrage qui est d'autant plus exceptionnel que réalisé dans une période troublée et un contexte difficile pour les artistes. Mais le petit père Khrouchtchev était passé par là et ce film est le symbole du dégel qui régna un moment de l'autre côté du rideau de fer. L'auteur nous conte ainsi, et avec quel talent ! l'histoire d'une tragédie individuelle vécue sur  fond de convulsions historiques, histoire banale à prime abord, puisque celle d'un jeune soldat qui ne reviendra jamais au bercail, mais comme transfigurée par un mouvement de caméra irrésistible et une mise en scène efficace et dépouillée. On n'en finirait pas de citer les scènes marquantes qui rythment ce film et ne nous laissent pas un instant inattentifs ou distraits : les adieux manqués, les bombardements, la mort de Boris qui, dans une dernière vision, aperçoit Veronika en robe de mariée et, surtout, la poignante scène finale d'un lyrisme rarement égalé. 
Pour parvenir à cette perfection, Kalatozov a pris soin de réunir autour de lui une équipe performante : tout d'abord, un directeur de la photographie virtuose S. Ouroussevsky et une actrice idéale dans le rôle de Veronika, l'adorable et délicate Tatiana Samoïlova, d'un naturel plein de grâce et de sensibilité. Pour l'époque, les prouesses techniques laissent pantois. La caméra virevolte en des travellings inattendus, des cadrages savants, des profondeurs de champ subtils et ce déluge de technique, loin de nuire à l'émotion, ne fait que la renforcer. Un film qui fut salué à Cannes par la Palme d'Or en 1958 et que l'on ne peut oublier, parce qu'il a réussi ce petit miracle de savoir toucher et surprendre. On le revoit avec le même plaisir et le même pincement au coeur, tellement tout y vrai, universel, finement exprimé, et l'on se dit que, décidément, les chefs-d'oeuvre ont cela de particulier, d'inspirer, en permanence,  la surprise et l'étonnement.

 

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QUAND PASSENT LES CIGOGNES de MIKHAIL KALATOZOV
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15 mai 2008 4 15 /05 /mai /2008 13:50
SEAN PENN - PORTRAIT

                                                                                   
Auteur du film "Into the wild", (2006), ce comédien-réalisateur, fort en gueule, est de ceux qui ne cachent pas leurs convictions, au point que leur nom sonne moins comme l'incarnation du 7e Art que comme le symbole obligé d'un engagement politique. Son action contre la guerre en Irak a fait de lui une figure majeure des mouvements anti-Bush. Il s'est même rendu à plusieurs reprises à Bagdad, afin de dénoncer l'ingérence illégitime des Etats-Unis, qui, selon lui, a contribué à mettre à mal les libertés civiles et à plonger le pays dans le chaos. En-dehors de cela, Sean Penn , né le 17 août 1960, fils de l'acteur Léo Penn, frère de l'acteur Chris Penn et du compositeur Michael Penn, quelle famille ! est un comédien qui ne peut laisser personne indifférent, tant ses compositions sont fortes, comme celle de la "Dernière marche" (1995), où il jouait de façon bouleversante, à côté de Susan Sarandon, le rôle d'un condamné à mort, rôle qui lui vaudra d'être nommé pour l'Oscar du meilleur acteur. Dans  "She's so lovely" de Nick Cassavetes, il incarne un déséquilibré violent et se verra honoré par le prix d'interprétation au Festival de Cannes en 1997. Dans "Sam, je suis Sam" de Jessie Nelson, il campe un attardé mental tout aussi convaincant et semble abonné aux rôles difficiles qu'il intériorise avec sobriété et conviction. En 2003, il reçoit, pour la seconde fois, la coupe Volpi pour son rôle de cardiaque dans le film d'Alejandro Gonzalez Inarrita "21 Grammes"  et, la même année, se voit récompensé par l'Oscar du meilleur acteur pour sa formidable interprétation dans  "Mystic River" (2002) de Clint Eastwood.                       


Etre acteur ne suffisant pas à cette personnalité riche et remuante, Sean Penn passe très vite derrière la caméra pour des réalisations de qualité, où il peut s'abandonner à son inspiration, comme  "Into the Wild",  dont le projet a mûri pendant plusieurs années à la suite de la lecture du roman éponyme de  Jon Krakauer. Ce film réussi a valu à son auteur et à son équipe des mois de galères, tant l'acteur-metteur en scène avait tenu, par souci d'authenticité, à respecter, dans les moindres détails, le parcours quasi initiatique que son héros effectue à travers l'Amérique. Il fallut, par conséquent, affronter les rivières glacées, la neige, le verglas et des températures de 48°C. Des conditions certes contraignantes, mais qui ont participé à la beauté esthétique du film, tourné dans des décors naturels et dans les conditions météorologiques correspondantes. Les photos sont dues à l'objectif d'Eric Gautier ; quant à l'acteur principal, il perdra 18 kilos et apprendra à descendre les rapides du Colorado. Le résultat est un film hommage aux grands espaces américains et une mise en accusation  du capitalisme outrancier qui plombe les valeurs essentielles d'amitié et de respect de la nature. Ce dernier long métrage est le quatrième opus de l'acteur-réalisateur après "Indian Runner" (1990), "Crossing Guard" (1995), "The Pledge" (2001) et marque certainement l'accession à la maturité d'un homme déchiré entre ses aspirations et ses contradictions, dont la jeunesse a été faite de frasques et d'engagements passionnels. Son mariage avec Madonna en 1985 a défrayé la chronique de l'époque par son caractère violemment conflictuel. L'enfant terrible d'Hollywood a paru s'assagir depuis et présida même en 2007 le jury du 61e Festival de Cannes. Le talent et l'anticonformisme étaient à l'honneur.
 


Pour prendre connaissance des films où figure l'acteur, cliquer sur le lien ci-dessous :  
 

LISTE DES FILMS DU CINEMA AMERICAIN ET CANADIEN

 

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SEAN PENN - PORTRAIT
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9 mai 2008 5 09 /05 /mai /2008 08:55
BONNIE AND CLYDE d'ARTHUR PENN

                         

En 1967, Truffaut reçoit de deux scénaristes, David Newman et Robert Benton, un sujet de film qu'il refuse simplement parce qu'il s'est, à l'époque, entièrement investi dans Fahrenheit, si bien que ceux-ci se tournent vers Godard mais, entre-temps, l'acteur américain Warren Beatty, alerté par Truffaut, s'est porté acquéreur des droits du scénario. En effet, le frère de Shirley McLaine a des ambitions de producteur et entreprend aussitôt le siège de Jack Warner pour tenter d'associer la firme à son projet. Il emporte l'adhésion du bonhomme et choisira Arthur Penn comme réalisateur. Dès que ce dernier s'attaque au traitement du scénario, il l'infléchit vers ses thèmes de prédilection : la juvénilité, la recherche d'identité, la maturité violente, l'initiation douloureuse (et symboliquement mortelle) à la vie sociale. Bonnie and Clyde est une saga composée autour de la fameuse dépression des années 30, qui raconte le destin singulier de deux jeunes truands célèbres. Bien entendu, ce long métrage véhicule des éléments de réflexion liés à la nature des personnages, dont il nous relate la carrière criminelle, tout en faisant la part belle au contexte social de l'Amérique d'alors plongée dans cette dépression qui nous est décrite par touches indirectes, plus explicites que de longs discours.

 

Comme à son habitude, Arthur Penn ne se veut pas démonstratif dans son rapport avec l'histoire. L'air du temps l'intéresse plus que les paraphrases sur les événements en cours. S'il est vrai qu'un film comme celui-ci s'est construit autour de l'argent (élément de subsistance, puis de discorde, enfin de luxe relatif chez des êtres plus naïfs que vénaux), autour des lieux où on le trouve (les banques), il est, selon moi, davantage une réflexion sur la pauvreté qui lui donne un ton et une tonalité sombre, bien que la relation entre ces trois éléments ne soit jamais établie. Son illustration se veut primaire, au strict niveau des apparences, comme est primaire la conscience que peuvent en avoir  Bonnie et Clyde, qui, au fil de l'aventure dans laquelle ils se sont engagés avec une totale insouciance, seront obligés de devenir ce qu'ils ont affirmé être. Et ce qui participe à la recherche de leur identité frôlera sans cesse le pathétique.

 

                  
Au moment de la sortie du film, on a pu s'étonner de l'impact qu'il a eu sur la jeunesse, ce que certains déplorèrent, considérant que son influence ne pouvait être que néfaste. Mais il serait injuste de voir dans Bonnie and Clyde une apologie de la violence. Penn n'a jamais abondé dans cette problématique simpliste. Au contraire, ce qui frappe, c'est à quel point les protagonistes sont dépourvus de volonté de puissance. Ils ne partent pas en guerre contre la société, n'affirment aucun choix idéologique, pas plus qu'ils ne s'inscrivent dans un combat social ou politique quelconque. Ce sont des personnages qui évoluent selon les circonstances et les événements, suivent les voies que leur propose le hasard et leur dicte leur instinct, d'autant qu'Arthur Penn atténue sans cesse le tragique de la situation par un humour roboratif. L'incapacité de la bande à Burrow de contrôler le destin dans lequel les uns et les autres s'enlisent, par immaturité et imprévoyance, les rend plus pitoyables que condamnables. Il est probant que le metteur en scène les désigne davantage comme les victimes d'une époque, d'un contexte, d'un système, que comme totalement responsables de leurs actes.



Dans cette oeuvre, les individus découvrent l'humiliation économique, sociale, morale que leur fait subir une société implacable. Et n'est-ce pas afin de trouver leur identité qu'ils font la guerre à cet état de fait ? Le réalisateur s'en est clairement expliqué :
" Je ne veux pas du tout psychanaliser les Etats-Unis, mais disons qu'il y a l'aspect sociologique de cette époque de la dépression et que je montre deux jeunes gens qui en sont le produit. Je ne les approuve pas, ni ne les condamne. J'ai suivi leur histoire jusqu'à la fin où la police les a attirés dans un piège pour les massacrer. (...) Je crois que le succès du film, son audience auprès de la jeunesse américaine, provient de ce que les jeunes se retrouvent dans ce qui est, pour eux, peut-être, un retour à l'anarchie, mais surtout un film contre la guerre".

 

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La fin est connue, spectaculaire, et transforme cette matinée ensoleillées du 23 mai 1934 en un ballet macabre qui atteint une sorte de surréalité. Mille balles tirées en une minute dont 94 atteignirent leur cible - précision historiquement prouvée - n'était-ce pas une sorte de délire que rien ne justifiait sinon la peur du mythe et de sa force ? Faye Dunaway trouve là son plus grand rôle. Belle, tendue comme un arc, elle épouse au plus près ce riche personnage en traduisant, de façon aiguë, ses contradictions, auprès de Warren Beatty qui, à la suite de La fièvre dans le sang, a tout mis en oeuvre (achat des droits du scénario) pour s'attribuer cet autre rôle phare. Ce long métrage contribuera à asseoir sa notoriété et obtiendra en France un succès tel qu'il inspirera à Serge Gainsbourg une célèbre chanson.

 


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LISTE DES FILMS DU CINEMA AMERICAIN ET CANADIEN

 

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8 mai 2008 4 08 /05 /mai /2008 12:49

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Charles Chaplin est né à Londres le 16 avril 1889 de parents pauvres qui travaillaient dans le music-hall. La vie familiale fut pertubée par un père alcoolique et une mère sujette à de fréquentes crises de folie. L'enfance du petit Charles sera misérable, mais elle fit de lui un observateur attentif du monde grouillant des quartiers populaires de Londres. Après une tournée de music-hall, il va se fixer aux Etats-Unis, où il produira une soixantaine de films avec des firmes différentes, dont quelques inoubliables chefs-d'oeuvre. Il crée, avec d'autres grands noms, la compagnie United Artist ( artistes associés ), mais soupçonné de sympathie avec le parti communiste par la Commission des activités anti-américaines, Chaplin quitte les Etats-Unis en 1952 avec sa dernière épouse Oona O'Neill, fille du dramaturge américain Eugène O'Neill, et se fixe dans un superbe manoir en Suisse, sur les rives du lac Léman. Il tournera encore plusieurs films dont  Limelight en 1952 et  Un roi à New-York  en 1957. Il est fait Chevalier par la reine Elisabeth d'Angleterre et meurt à Vevey le 15 décembre 1977.

 

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Les Lumières de la ville  (1931) est son dernier film muet. S'il n'est pas le plus accompli, il est sûrement le plus touchant, un vrai miracle de fraîcheur et de nostalgie. Chaplin savait qu'ensuite il lui faudrait franchir le pas et entrer dans le mode  "parlant" qu'il redoutait, lui, qui, mieux que personne, savait utiliser les silences et se passer des mots, tout dire sans rien dire. Pour Chaplin, le seul intérêt du son était la musique qu'il composait lui-même, orchestrait et adaptait à l'image au millimètre près.


Dans le rôle de l'aveugle, la délicieuse Virginia Cherrill - dont ce fut le seul grand rôle - fut la partenaire idéale, bien que, dans le privé, Charlie et elle ne se supportaient pas et que le cinéaste fût tenté de prendre une autre partenaire. Conçu dans le doute et la douleur, ce film remporta un immense succès. La caméra est déjà habilement utilisée et le découpage des scènes envisagé avec une extrême rigueur pour mieux servir le scénario, qui sait faire mouche à tous moments, balance entre le drame et la farce, le rire et les larmes, le burlesque et l'émouvant. Chaplin nous donne ici un échantillonnage des travers de la société, sans oublier les incursions dans les profondeurs du coeur humain, et c'est tout bonnement stupéfiant.


Contrairement aux films précédents qui se déployaient dans le sens où la réalité décevante inspirait l'illusion, celui-ci part de l'illusion pour se heurter à la réalité, ce qui est chez Chaplin une étape innovante de son inspiration. De toute sa filmographie, Les lumières de la ville est sans doute sa réalisation la plus pure, faisant de son auteur un artiste à part, inclassable, insurpassable dans une forme de comique très personnelle qui permet aux personnages de passer d'un sentiment à l'autre instantanément. Grâce à ce long métrage, véritable chant d'adieu au muet, l'auteur atteint des sommets, tant il est persuadé de la pérennité d'une expression qu'il considère comme parfaite en soi, celle du geste, de la mimique, langage éloquent du silence. La plus belle scène d'une oeuvre, qui en contient beaucoup, est celle où la jeune fleuriste, ayant retrouvé la vue, reconnaît le vagabond qui l'a sauvée, en touchant ses mains. La retenue de Charlot, l'émotion qu'il exprime est un des instants les plus bouleversants du 7e Art.

 

 Pour lire l'article consacré à Charlie Chaplin, cliquer sur son titre :  

 
CHARLIE CHAPLIN, LE VAGABOND DE GENIE   

 

Et pour prendre connaissance de la critique des autres films de Chaplin, cliquer  ICI

 

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3 mai 2008 6 03 /05 /mai /2008 10:13
MERYL STREEP - PORTRAIT

                                                                             

Meryl Streep est certainement l'une des tout première actrice actuelle par la diversité et la qualité de son jeu, ce qui lui permet d'aborder des personnages très différents et de transmettre l'émotion avec la même maîtrise et la même sensibilité. Née le 22 juin 1949 dans une famille aisée - son père était pharmacien - elle étudie à Dartmouth l'écriture scénariste, la décoration et la création de costumes et entre ensuite à la Yale Drama School. Elle est si douée qu'elle figure dans les six des sept pièces présentées annuellement par la Yale Repertory Company et obtient sa maîtrise en 1975. Alors qu'elle est encore étudiante à Vassar, dont elle est diplômée, elle obtient le rôle-titre du spectacle dès sa première édition.
 


Durant sa première saison à New-York, où elle est venue faire carrière, elle joue de nouveau dans sept pièces, parfois deux rôles aux antipodes l'un de l'autre dans la même journée, avant de devenir la vedette d'une comédie musicale à Broadway "Happy End" et de remporter un Obie Award pour sa performance dans la production off-Broadway de "Alice at the palace"
 


Elle doit ses débuts dans le 7e Art à Fred Zinnemann, qui la dirige dans "Julia", puis tourne dans "Voyage au bout de l'enfer" auprès de Robert de Niro et, après un retour à la scène dans "La mégère apprivoisée", interprète l'épouse bisexuelle de Woody Allen dans "Manhattan" et la maîtresse d'Alan Alda dans "La vie privée d'un sénateur". Elle sera également  l'épouse de Dustin Hoffman dans "Kramer contre Kramer" pour lequel elle recevra son premier Oscar. Pourtant ses débuts devant la caméra en 1976 s'accompagnent d'un souvenir cuisant, l'exclamation de Dino de Laurentis, qui l'avait convoquée pour un essai, et  s'écria en la voyant : quelle mocheté ! Ce n'était guère galant mais il en fallait davantage pour décourager cette toute nouvelle diplômée de Yale. 

                        

Meryl Streep sera citée trois fois à l'Oscar, une seconde fois en 1981 pour "La maîtresse du lieutenant français" où je l'ai découverte personnellement avec autant de curiosité que d'enthousiasme, tant elle interprétait finement cette femme abandonnée dans un décor de falaises romantiques, au temps du puritanisme victorien et l'obtient l'année suivante pour sa formidable prestation dans "Le choix de Sophie" de Alan J. Pakula, d'après le roman de William Stiron. Puis elle retrouve Robert de Niro dans "Falling in love" ( 1984 ) et remporte, pour ce film, l'équivalent italien de l'Oscar, le prix David Di Donatello, ce qui confirme le retentissement de sa carrière internationale.


                        
En 1985, elle est dirigée par Sydney Pollack dans un film qui cristallise davantage encore son aura d'actrice : "Out of Africa". C'est avec "Le choix de Sophie" et "La route de Madison", l'interprétation où elle apparaît la plus émouvante, la plus intériorisée. Elle y est dans tout l'éclat de sa féminité, humaine et néanmoins évanescente et inaccessible, à cause de cette magie qu'elle dégage, ce charme puissant, celui qui devait habiter le personnage qu'elle est chargée de représenter : la femme de lettres Karen Blixen. Viendront "La brûlure" avec Jack Nicholson et "Un cri dans la nuit" où elle est gratifiée du Prix d'interprétation féminine au Festival de Cannes 1989.



En 1992, Meryl Streep est de nouveau nominée au Golden Globe dans la comédie noire "La mort vous va si bien" de Robert Zemeckis qui n'est qu'un aimable divertissement et enchaîne en 1993 avec "La maison aux esprits" de Bille August, tiré du roman d'Isabelle Allende, une de ses seules erreurs - le film se révélant être un navet - dans une carrière conduite avec beaucoup de discernement. La suite sera éblouissante avec "Sur la route de Madison" auprès de Clint Eastwood, où elle triomphe dans le rôle de Francesca, une femme qui découvre tardivement le grand amour dans les bras d'un photographe-reporter venu prendre des clichés des vieux ponts  couverts de l'Iowa, avant qu'on ne l'apprécie en 2001 dans l'adaptation de "The Hours" de Michael Cunningham. Pour elle, pas de temps mort, un film chasse l'autre, et dans chacun d'eux, elle se montre parfaite, en osmose avec les personnages qu'elle a à charge de faire vivre pour nous. On l'a vue dans "Le diable s'habille en Prada", qu'elle présenta en personne au Festival du film américain de Deauville en 2006 et dans "Lions et agneaux" de Robert Redford, son partenaire dans "Out of Africa", avant de se glisser dans la peau de Martha Mitchell, celle qui alerta la presse lors du scandale du Watergate dans "Dirty tricks", puis dans celle de Margaret Thatcher dans "La dame de fer" de Phyllida LloydLorsqu'elle ne tourne pas, l'actrice habite dans sa propriété du Connecticut auprès de son mari Don Gummer et de ses quatre enfants. Elle se plaît à mener une existence paisible loin de la vie agitée et de la presse à scandale de Hollywood. Ce qui ne peut étonner de la part d'une personnalité qui n'a jamais défrayé la chronique, ni galvaudé son image. Incroyablement malléable, elle sait se fondre dans les personnages les plus divers et inattendus, parvenant à ne jamais céder à la facilité ou à la démesure.


 

Avec 19 sélections, dont 15 dans la catégorie "meilleure actrice", c'est la comédienne la plus nommée de l'histoire des Oscars. Même performance pour les Golden Globes. Meryl Streep cumule aujourd'hui 29 nominations. Autant de statuettes saluant sa capacité à prendre les visages les plus divers, tous les accents, à se fondre dans n'importe quel décor, ainsi que d'entrer dans la peau des personnages les plus divers et parfois les plus opposés. Eclectique et appliquée, elle su enrichir son registre avec des héroïnes inoubliables, des scénariis captivants et des metteurs en scène de grand talent. Aussi est-elle de nos jours un modèle pour les comédiennes en herbe qui rêvent de faire une carrière aussi prestigieuse. D'autant que les comédies récentes, qu'elle a tournées, l'ont rapprochée d'un public plus jeune. Dans  "Florence Foster Jenkins" du cinéaste Stephen Frears, qui est sorti il n'y a pas très longtemps dans les salles, elle est une femme touchante et irrésistible qui se croit à tort douée d'un don pour l'opéra, sujet déjà abordé dans "Marguerite" mais qu'elle endosse avec son naturel et sa finesse habituelle. Elle est désormais considérée comme la "Queen" du 7e Art américain et rayonne en star mondiale  incontournable. Et avec "Pentagon Papers" de Steven Spielberg, elle nous éblouit une fois encore par son jeu d'une force et d'une grâce étonnantes et dans ce rôle de femme qui ne veut pas céder aux sirènes du découragement.

 
 

Pour consulter la liste des articles de la rubrique CINEMA AMERICAIN, où vous prendrez connaissance des critiques suivantes, Out of Africa, Sur la route de MadisonJulia & Julia, Pentagon Papers,  cliquer   ICI

 

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LISTE DES ARTICLES - acteurs du 7e Art

 

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MERYL STREEP - PORTRAIT
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3 mai 2008 6 03 /05 /mai /2008 09:45
LES FRAISES SAUVAGES d'INGMAR BERGMAN

                   
Pourvoyeur d'images de génie, Ingmar Bergman tient aujourd'hui, dans l'univers cinématographique, une des tout première place. La force de son oeuvre, ses réflexions graves mais d'une portée universelle, son originalité, son style, qui est celui d'un créateur à part entière, son écriture si personnelle ont fait de chacun de ses films un événement justifié. Aussi comment entrer dans cette vaste filmographie sans être désorienté ? Il me semble que "Les fraises sauvages" peuvent être une introduction valable à un cinéma dense et difficile qui se nourrit d'humanité, mais qui a souvent intimidé le néophyte. Bergman est le chantre de la solitude et ce long métrage aborde le sujet à travers le personnage d'un vieil homme qui vient de recevoir une distinction honorifique, couronnant sa carrière de médecin. A la suite d'un rêve, il bouscule ses plans et décide de se rendre en voiture à Lund avec sa belle-fille, ce qui lui permettra de revoir des lieux chargés d'évocations et de souvenirs. Ce sera également l'occasion de revivre certains d'entre eux et de faire le bilan de sa longue existence. Mais, heureusement, des personnes rencontrées vont l'aider à se réconcilier avec un passé chargé d'échecs sentimentaux et d'éclairer ses vieux jours d'une lueur de tendresse. En effet, une fois arrivé à Lund pour y recevoir sa récompense, le professeur Isaak Borg, ébranlé dans ses convictions, prend la résolution de tenter d'agir de façon à entretenir désormais des rapports moins formels avec son entourage. Un arrêt à la maison de son enfance le replonge au coeur de son passé, à la différence qu'il devient le témoin de scènes auxquelles il n'avait pas assisté à l'époque. C'est ainsi qu'il revoit sa fiancée d'alors, Sara, en train de se laisser séduire par son propre frère et qu'il la surprend plus tard se lamentant de ce que sa cour, érudite et compassée, l'avait contrainte à aller chercher ailleurs un peu plus de volupté. Se révèlent à lui l'étendue de son incompréhension à son égard et sa coupable négligence. Sa remise en cause, si elle est tardive, n'en est pas moins sincère. Si bien qu'au lieu d'une lente marche funèbre, "Les fraises sauvages" s'ouvre sur une allégorie qui n'est pas seulement pour le héros une sorte de politesse du désespoir, mais tend à conclure que l'existence se poursuit sous un éclairage autre, que le rêve est aussi une forme de vie, une vie transposée en une perspective conciliante, où la fiancée de jadis se remet en route avec vous vers un horizon apaisé. L'auteur parvient avec virtuosité à doser rêve et réalité sans jamais leur attribuer de frontières trop précises, cela en une orchestration d'une poignante beauté. On sait également que Bergman était très musicien et qu'il se dégage de ses films une musicalité étrange qui m'a toujours frappée. Dans "Les fraises sauvages", on voit Sara jeune suspendre le temps à l'aide d'un prélude, lent et nostalgique, du clavier bien tempéré. Bergman a toujours privilégié deux types dans le répertoire musical : celui des spiritualistes comme Bach et Mozart et celui des romantiques avec Chopin, Schumann, Schubert et Bruckner. Il a consacré un film à l'opéra de Mozart : "La flûte enchantée" qui est une réussite.
 


Par ailleurs, "Les fraises sauvages", comme l'ensemble de l'oeuvre bergmanienne, bénéficie d'une grande rigueur esthétique, rendue peut-être plus captivante que le film a été tourné en noir et blanc, de même qu'il jouit d'une interprétation hors pair - il n'est pas besoin de souligner que le réalisateur était un formidable et très exigeant directeur d'acteurs - avec une Ingrid Thulin et une Bibi Andersen merveilleuses et un Victor Sjöström d'un puritanisme et d'une misanthropie douloureuses qui n'étaient pas éloignés de ceux de son metteur en scène. Restent les souvenirs et la nostalgie d'un passé heureux que celui-ci sait si bien traiter avec l'austérité grandiose qui le caractérise. Si bien que ce film majeur porte à son sommet une inspiration jamais démentie par la poésie : la nature ne fait qu'un avec le vertige des sens et des souvenirs qui s'empare de cet homme sans repères temporels. Chacun, au final, trouvera ce qu'il cherche, car ici rien n'est imposé. Il y est moins question de la mort, des échecs ou des désillusions que de la continuation possible de la vie alors même qu'elle arrive à son terme. Ne nous y trompons pas, Bergman s'est profondément mis en scène dans cet opus pour la raison suivante : à l'âge de 15 ans, il avait assisté à la projection de "La charrette fantôme", le grand film réalisé par Victor Sjöström, dont il reconnut, par la suite, l'immense influence. Trente ans plus tard, en réalisant "Les fraises sauvages", Bergman, voulant interroger la figure de son père, fit appel, tout naturellement, au grand cinéaste pour l'interpréter. Mais il finit par se rendre compte que ce qu'il cherchait derrière la figure paternelle était son propre passé, sa propre enfance. De cette quête, de cet examen sans complaisance de lui-même, est né ce film lumineux, où la convocation des souvenirs et des rêves mêlés à la réalité produit une atmosphère inoubliable. " La vérité, c'est que je vis sans cesse dans mon enfance. Dans "Les fraises sauvages",  je me meus sans effort et assez naturellement entre des plans différents temps-espace, rêve-réalité - a  confié à un journaliste le cinéaste suédois. C'est probablement cette recherche du temps perdu qui a marqué d'un sceau inaltérable cette oeuvre prodigieuse.

 

Pour lire l'article consacré à Bergman, cliquer sur son titre :   

 
INGMAR BERGMAN OU UN CINEMA METAPHYSIQUE



Et pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA EUROPEEN, dont Le 7e sceau, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA EUROPEEN ET MEDITERRANEEN

 

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LES FRAISES SAUVAGES d'INGMAR BERGMAN
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Présentation

  • : LA PLUME ET L'IMAGE
  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.

Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


Charlie Chaplin

 

"Innover, c'est aller de l'avant sans abandonner le passé."

 

Stanley Kubrick

 

 

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