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19 octobre 2007 5 19 /10 /octobre /2007 08:22
MICHAEL CLAYTON de TONY GILROY

                                                                               
En l'espace d'une dizaine d'années, George Clooney a orienté sa carrière d'une façon inattendue et déroutante au regard du cinéphile landa pour qui il représentait la séduction à l'état pur. Mais le favori de ses dames avait d'autres ambitions et a su métamorphoser son image d'acteur de charme pour aborder des sujets plus audacieux et plus conformes à ses aspirations. Avec son dernier film Michael Clayton présenté en avant-première à Deauville en septembre, il s'est lancé, avec son complice Tony Gilroy, scénariste de la saga Jason Bourne, dans un thriller psychologique sur les pratiques et l'absence d'éthique de certaines firmes américaines. De cette collaboration étroite est née un film sombre et pessimiste qui confirme le don de Clooney d'élargir le champ de ses interprétations et celui de Gilroy de se situer dans le panel des meilleurs scénaristes-réalisateurs actuels d'Hollywood. Le film fonctionne sur le mode classique du thriller mais ici l'idée d'une possible rédemption s'annule devant l'ampleur et la puissance des forces en présence : celles scandaleuses d'un noyau d'hommes sans scrupules prêts à tout pour étendre en permanence, et à n'importe quel prix, leur influence. Face à eux, un avocat chargé d'un dossier douteux et qui se voit dans l'obligation de faire un choix entre ses responsabilités professionnelles et sa morale personnelle et, ce, au risque de sa vie, puisqu'il entend dénoncer les agissements coupables d'une multinationale agro-chimique qui, pour s'enrichir, est disposée à faire des millions de victimes.

                  

Mais contrairement à d'autres thrillers, Michael Clayton nous montre à quel point les hommes ne sont jamais que des pions, des marionnettes, broyés par une machine corporatiste terriblement efficace. Pas une lueur d'espoir ne se profile à l'horizon d'un film ténébreux à souhait. D'autant que le metteur en scène a choisi volontairement de tourner à New-York, sa ville natale, parce qu'aucun lieu ne lui semblait mieux approprié pour dépeindre un monde colossal et écrasant gouverné par le profit et l'argent et dont la présence des gratte-ciel rend l'ambiance encore plus étouffante. L'exercice est réussi grâce à une mise en scène bien ficelée, une parfaite interprétation et un suspense maîtrisé qui nous tient en haleine, même s'il arrive que des flash-back trop systématiques nous fassent parfois perdre le fil de l'action. Il est certain que ce n'est pas le film qu'il faut aller voir si l'on a du vague à l'âme, car le monde brossé par la caméra de Gilroy est affligeant et que Clooney, lui-même, nous y apparaît ébranlé, fragilisé par l'ampleur d'une tâche qu'il sait perdue d'avance. D'où un sentiment de frustration et de défaite qui ne peut manquer d'étreindre le spectateur. Mais, n'importe, malgré sa silhouette fatiguée, ses soucis personnels sur lesquels le film s'attarde un peu trop longuement, Clooney nous campe un personnage sympathique et courageux, un Don Quichotte des temps modernes, oscillant entre foi et désespoir et qui a jeté dans la balance tout le poids de sa sincérité. Et puis voir des requins s'entre-tuer a quelque chose d'excitant qui rappelle les films du  Pollack des années 70. D'ailleurs Pollack est présent dans la distribution, endossant un rôle de parfait salaud de façon très convaincante. Un film à voir, ne serait-ce que parce qu'il serait dommage de bouder une oeuvre de cette qualité.



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17 octobre 2007 3 17 /10 /octobre /2007 08:51
LA RIVIERE ROUGE de HOWARD HAWKS


La rivière rouge (1948) est le premier western tourné par Howard Hawks, le premier film où il dirige John Wayne (avec lequel il travaillera à quatre reprises, entre autre pour Rio Bravo) et la première apparition à l'écran de Montgomery Clift que le cinéaste avait découvert au théâtre dans " You touched me ", adapté de D. H. Lawrence. Trois premières pour un film qui, davantage que la classique histoire d'un convoi de bétail, devient tout ensemble un voyage initiatique et l'affrontement de divers personnages que tout oppose et que l'on voit mûrir et évoluer au cours de l'action. Au commencement de l'histoire, Tom Dunson est en train de dire adieu à sa fiancée qui suit un convoi de pionniers. Mais ce convoi sera attaqué par des Indiens et Fen tuée lors de cette rixe. Pour tenter d'exorciser ce souvenir tragique, Tom va s'employer à construire un véritable empire et élever Matt, un enfant dont la mère a été tuée elle aussi au cours de cette attaque, comme le fils qu'il n'aura jamais de la femme aimée. A l'origine, le roman de Borden Chase se terminait par la mort de Tom qui, blessé par Cherry Valance, demandait à mourir au Texas, face à la Rivière rouge. Cette fin ayant été modifiée par le cinéaste, Chase reprochera à Hawks d'avoir considérablement diminué l'importance du personnage de Cherry, qui se situe psychologiquement à mi-chemin de Tom et de Matt, ce père et ce fils adoptif qui ne cesseront de se combattre tout au long du film. Mais Hawks tenait à faire vivre les personnages selon ses propres émotions et n'a pas souhaité suivre à la lettre le roman de Chase, dont le film n'est jamais qu'une libre adaptation.

                          
 

Ce qui importait à ce dernier était de rendre compte des relations de plus en plus dramatiques entre Tom et Matt sans jamais vouloir que l'un tue l'autre. "Je ne me suis pas fait à l'idée qu'il soit nécessaire de tuer les gens et d'achever un film sur la mort " - avait-il expliqué à l'époque. Par ailleurs, il désirait offrir à son interprète féminine Joanne Dru un rôle d'une vigueur et d'une insolence rares dans un western, où les femmes ont le plus souvent des rôles effacés. Comme Angie Dickinson dans "Rio Bravo", Joanne Dru est ici capable de tenir tête aux hommes et surtout de les ramener à la raison. Bien que film d'hommes, "La rivière rouge" nous propose ainsi un beau portrait de femme brossé d'une caméra attentive et complice. Par la même occasion, Hawks allait trouver en John Wayne l'interprète idéal, l'homme puissant, le Goliath que le jeune Clift affrontera en David audacieux, ce qui lui vaudra d'emblée la sympathie du public. A l'écran, Wayne apparaît comme invulnérable, inébranlable, l'homme des plaines immenses, le héros que rien ne saurait décourager ou abattre. Aussi la mort de Wayne paraissait-elle incongrue à Hawks et préféra-t-il substituer à cette mort la réconciliation du père et du fils adoptif que Tess Millay sépare, revolver au poing.

 


La personnalité de Hawks marque profondément cette oeuvre qui ne cède pas aux impératifs habituels des westerns. Plus que les cavalcades, c'est l'évolution psychologique des personnages et la rivalité entre un père et un fils qu'il se plait à décrire et exprime par des gestes symboliques : par exemple celui où Groot lance à Tom un poignard pour lui éviter d'être tué par un Indien ; les cris repris par les différents cow-boys au moment du départ du troupeau, ou encore le passage d'un nuage lors de l'enterrement de Dan Latimer qui plonge le paysage dans une troublante obscurité. Le film s'enrichit de ces touches poétiques et du documentaire très précis qu'il nous offre de la vie dangereuse, quotidienne et monotone de ces gardiens de troupeaux dont le bétail s'élevait parfois à plus de 10.000 têtes. Malgré les innombrables difficultés rencontrées lors du tournage et les tracasseries occasionnées par un important dépassement budgétaire, La rivière rouge n'en est pas moins un film d'une parfaite cohésion, dont les images frappent par leur beauté et où la tension dramatique ne faiblit pas. Martin Scorsese le considérait comme son western préféré, ce qui est une référence, et John Wayne disait que si La chevauchée fantastique  (1939) avait fait de lui une star, La rivière rouge avait fait de lui un acteur. Ce n'est pas un mince compliment.



                                                               
Pour lire l'articles consacré à John Wayne, cliquer sur leur lien ci-dessous :


 JOHN WAYNE                                                


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15 octobre 2007 1 15 /10 /octobre /2007 09:40
L'ASSASSINAT DE JESSE JAMES de ANDREW DOMINIK

               

Voilà un film dont on avait beaucoup parlé lors de sa présentation à Deauville et qui avait fait une forte impression sur le public, bien que, déjà, les avis aient été partagés. Il est vrai que "L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford" a peu à voir avec le western traditionnel et que certains spectateurs pourront trouver cette oeuvre trop longue et trop éloignée du portrait légendaire du hors-la-loi qui avait raison de tout et de tous. Ce film présente une intrigue peu habituelle.  Il ne s'agit pas seulement d'une histoire de gangster mais de l'itinéraire intérieur d'un jeune homme idéaliste qui s'est trompé de combat et que sa vie dissipée ne peut satisfaire, d'où un sentiment d'échec et de frustration qui ne cesse de saper son moral jusqu'à faire de lui un paranoïaque... si bien qu'il semble que, désormais, il n'aspire qu'à une mort libératrice et justificatrice qu'il rencontrera par procuration. Le film d'Andrew Dominik retrace les derniers mois de l'existence de Jesse James sous l'emprise de cette dépression grandissante. Nous ne sommes plus dans les grands espaces des westerns d'antan peuplés de chevauchées fantastiques, mais dans les décors enneigés du Wisconsin où la misère domine, tant matérielle que psychologique. Bien entendu, la légende du western est mise à rude épreuve, mais l'ambition de l'auteur n'était pas d'ajouter un film supplémentaire à une longue liste de bons et de moins bons films du genre, mais de réaliser une oeuvre singulière qui se déploie en empruntant des chemins de traverse, nous dépeint des scènes familiales et dont l'ascétisme prend peu à peu et, inéluctablement, un éclat funèbre et déchirant. Le metteur en scène s'attarde à creuser la psychologie des personnages et, même si la fin nous est connue, elle s'avance par des voies inattendues et mystérieuses. C'est également une ode à la solitude exprimée par la lenteur du rythme qui traduit la rencontre, comme désirée, d'une fin tragique qui  s'en vient sans bruit, à pas feutrés.

 

                       

Jesse James était le second fils d'un pasteur. Né en 1847, il mourra en 1882 à l'âge de 34 ans. En 1862, lors de la guerre de Sécession, la ferme où il demeure avec sa famille est saccagée par les nordistes et le jeune homme sauvagement battu, ce qui l'incitera à rejoindre son frère aîné dans l'armée sudiste. Mais il est jugé trop jeune (il n'a que 16 ans) pour cet engagement. Par dépit et pour venger la défaite de son camp, il rallie  la troupe du sanguinaire William Quantrill jusqu'à la capitulation des confédérés en 1865. Par la suite, il crée avec son frère sa propre bande et ensemble envisagent des attaques et des vols pour survivre en ces lendemains troublés. Mais une agence privée se lance à leurs basques et dix hommes cernent la maison familiale blessant le père, la mère et un jeune demi-frère. Cette opération  provoquera l'indignation d'une partie de l'opinion publique qui considère ces délinquants comme "des victimes de la guerre". En 1876, après l'échec d'une de leurs expéditions, Frank, l'aîné, décide de se retirer d'une actualité devenue trop dangereuse, mais Jesse ne l'entend pas de cette oreille. Il recrute de nouveaux compagnons et cette fratrie offensive va perpétrer d'innombrables forfaits, attaquant les trains, les convois, détroussant les voyageurs, si bien que les gazettes font de ces bandits de grands chemins une légende vivante...et terrifiante. Avec son caractère dur et implacable, Jesse est presque autant redouté de ses comparses que de ses victimes, si bien que l'un d'eux, qui l'admire tout autant qu'il le craint,  finira par l'abattre lâchement dans le dos, avide de renommée et appâté par la prime offerte pour la suppression de cet ennemi public. Tour à tour pitoyable, inquiétant et jovial, ce film, économe sur le plan des effets, nous sert un drame sombre et réaliste où les héros introvertis sont davantage préoccupés de leurs névroses que de leurs faits d'armes. Méditation lyrique sur un destin qui se fourvoie et se dérobe, il est interprété par un Brad Pitt tourmenté qui s'est totalement effacé derrière son personnage et réussit une performance remarquable. Maître de son jeu, il domine le film avec aisance, face à un Casey Affleck prometteur, parvenant à révéler, sous ses dehors juvéniles, une ambition qui fera de lui le bras armé de la loi. Ce duo explosif nous livre une épopée intime d'une belle et douloureuse  intensité. Original et ambitieux.

 

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14 octobre 2007 7 14 /10 /octobre /2007 09:27
LE CRIME ETAIT PRESQUE PARFAIT d'Alfred HITCHCOCK

                     

L'inconnu du nord-express ayant renfloué les finances défectueuses d'Hitchcock, celui-ci commence en 1953 un autre film qui fera parler de lui : Le crime était presque parfait (Dial M for Munder ). Curieusement le sujet avait déjà été celui d'une pièce de théâtre qui avait eu un grand succès à Broadway : Un joueur de tennis désargenté Tony, craignant que sa riche épouse Margot ne le quitte pour un romancier américain, projette de la tuer pour hériter. Usant de chantage, il persuade son ami Lesgate de se charger de la besogne, en l'assurant d'une gratification alléchante. Pour être sûr de jouir d'un alibi en béton, Tony, au même moment, s'affichera à son club de tennis en compagnie de son rival. Tandis qu'il téléphone à son épouse, Lesgate se jette sur Margot pour l'étrangler, mais elle se défend avec une telle énergie qu'elle finit par poignarder son agresseur avec des ciseaux. Margot est condamnée à mort, mais son amant Mark découvre la vérité et, avec l'aide de l'inspecteur Hubbard, tend un piège à Tony. Confondu parce qu'il avait donné ses clefs à Lesgate - raison pour laquelle il n'y avait pas eu d'effraction - il avoue sa morbide machination.

 

Ce film possède une originalité bien particulière qui nous montre à quel point le maître était intéressé par toutes les innovations : il utilisera pour le tournage un système binoculaire en relief, ce qui l'obligera à accentuer les couleurs et à les manier différemment. Pour donner au maximum l'impression du relief, des objets furent placés en premier plan de manière à accentuer la profondeur du champ. "L'impression du relief était donnée principalement lors des prises de vue en contre-plongée. J'avais fait aménager une fosse pour que la caméra soit souvent au niveau du plancher. A part cela, il y eut peu d'effets directement fondés sur le relief. Ce qui était surtout difficile dans le film était de concentrer l'action dans un seul lieu. C'est généralement ce qui arrive lorsque l'on transpose une pièce en film. On oublie que la qualité fondamentale de la pièce réside dans cette concentration. Et en intercalant des flash-backs, par exemple, on finit pas désintégrer l'intérêt de l'action. Et l'erreur est fréquente. Le film dure alors le temps de la pièce plus celui de quelques bobines qui n'ont aucun intérêt et y sont ajoutées superficiellement.


Donc, lorsque j'ai tourné  "Dial M for Munder", poursuivait Hitchcock,  je ne suis sorti du décor que deux ou trois fois et brièvement. J'avais même demandé un plancher authentique pour qu'on puisse bien entendre le bruit des pas, c'est-à-dire que j'ai souligné volontairement le côté théâtral. De même, au moment du procès de Margot, je n'ai pas désiré un décor de tribunal, mais j'ai joué avec des couleurs tournoyantes afin de préserver l'unité de l'émotion. C'était plus familier ainsi. Si j'avais fait construire une salle de tribunal, le public se serait mis à tousser et il aurait pensé : " Voilà un deuxième film qui commence." Pour la couleur, il y avait une recherche intéressante concernant l'habillement de Grace Kelly. Je l'ai habillée de couleurs vives et gaies au début du film et ses robes sont devenues de plus en plus foncées au fur et à mesure que l'intrigue devenait plus sombre. Ainsi toute l'intrigue du film se déroule-t-elle dans un living-room, mais cela n'a aucune importance. Je tournerais aussi volontiers un film dans une cabine téléphonique. Imaginons un couple d'amoureux dans une cabine. Leurs mains se touchent, leurs bouches se joignent et, accidentellement, la pression de leurs corps fait que le récepteur se soulève tout seul et décroche. Pour le public qui regarde ces images, c'est comme s'il lisait les premiers paragraphes d'un roman ou comme s'il écoutait l'exposition d'une pièce de théâtre. Donc, une scène de cabine téléphonique nous laisse, à nous cinéastes,  la même liberté que la page blanche au romancier."

 

Bien que fondé sur une intrigue théâtrale, le film d'Hitchcock est une réussite originale. Si le cinéaste fait la part belle aux dialogues, il n'en reste pas moins que la perfection du découpage, le rythme de l'action,  la direction des cinq acteurs nous assurent que nous sommes bien dans le mouvement cinématographique, que chaque prise de vue compte, chaque expression, chaque image. On regarde, on contemple, subjugué. Ce film était le quatrième que tournait Grace Kelly qui avait débuté à Broadway en 1949 dans une pièce de Strindberg, et au cinéma en 1951. Elle y avait pour partenaire l'excellent Ray Milland, à l'époque l'un des grands acteurs de Hollywood. Hitchcock aimait les professionnels. Certes, il lui arriva de jouer les Pygmalion avec des actrices inexpérimentées comme Joan Fontaine, qu'il fît débuter dans Rebecca, ou avec Tippi Hedren, mannequin et nullement actrice, mais, par goût, il aimait avoir affaire à des gens de la profession qui connaissaient les exigences du cinéma. Il ne voulait pas perdre de temps en d'épuisantes explications. Il aspirait à ce que l'acteur soit immédiatement opérationnel et travaille avec le même souci du public que lui. On se souvient de la tristesse qu'il éprouva lorsqu'Ingrid Bergman le quitta pour rejoindre en Italie le metteur en scène Rossellini qu'elle aimait, et ce qu'il ressentit lorsque le mariage monégasque le priva de sa chère Grace Kelly. Chez les hommes, il n'hésita jamais à choisir les plus professionnels, les plus élégants : les Cary Grant, Ray Milland, Laurence Olivier, James Stewart, Montgomery Clift. La fin du grand Hollywood correspondait à la sienne propre et il le savait. Reste que ce film est l'un de ceux que l'on voie et revoie avec un égal plaisir. L'intrigue est si bien menée, les dialogues si justes, les acteurs si convaincants, les images si ponctuelles, que la signature ne peut être autre que celle d'un maître du 7e Art.

 

Pour lire les articles consacrés aux acteurs et actrices de Hitchcock, à Grace Kelly et au réalisateur lui-même, cliquer sur leurs titres :

 

 GRACE KELLY  

     

ALFRED HITCHCOCK - UNE FILMOGRAPHIE DE L'ANXIETE

 

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LE CRIME ETAIT PRESQUE PARFAIT d'Alfred HITCHCOCKLE CRIME ETAIT PRESQUE PARFAIT d'Alfred HITCHCOCK
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11 octobre 2007 4 11 /10 /octobre /2007 09:09
SANS MOI d'OLIVIER PANCHOT

                                                                                              
Libre adaptation d'un roman de Marie Desplechin, Sans moi d'Olivier Panchot est un film maitrisé et sensible dans le meilleurs sens du terme. Sans jamais verser dans le mélodrame et sans maladresse, le cinéaste nous dresse le portrait de deux femmes à l'opposé l'une de l'autre que la vie va réunir dans une étonnante intimité psychologique. Alors qu'Anna est prête à aider Lise à stabiliser sa vie, les circonstances vont soudain la confronter à ses propres failles. Le choix des actrices a été particulièrement judicieux, tant elles parviennent à exprimer, avec justesse et finesse, ce qui les sépare. L'une est assurément une paumée, mais une paumée qui a de l'entregent et du panache et que la jeune Clémence Poésy interprète avec une vitalité débordante et une force de conviction qui l'imposent dès les premières scènes. Face à elle, Yaël Abecassis  joue le rôle d'Anna avec grâce et élégance. Cette jeune mère, qui semble parfaitement s'assumer, contrôler chaque aspect de son existence au point de se sentir en mesure d'aider sa jeune baby-sitter à consolider la sienne, va brusquement découvrir, comme si la jeune femme lui servait de miroir, ses  fragilités, ses zones d'ombre, ses faiblesses. Divorcée, Anna a engagé Lise pour s'occuper de ses deux enfants. Or, celle-ci, a un passé chargé et fait entrer, en même temps qu'elle, dans le monde bien organisé d'Anna, une part de violence et de corruption. Elle va, en quelque sorte, brouiller les repères de celle qui l'héberge. Ainsi le film, comme l'avait fait le livre, décrit-il la confrontation de deux modes de vie, de deux morales, entremêlant respect, apprentissage, entraide, dans un climat délicat de pudeur et de tendresse. Mais, contrairement au roman, le cinéaste s'est attaché davantage au personnage d'Anna, pour la raison qu'il souhaitait se décharger du poids de l'ouvrage littéraire et proposer une perspective radicalement différente. " J'ai décidé très vite - a-t-il dit - d'inverser la proposition du roman : il fallait réinventer la fiction secrète de cette femme. Libre à moi de m'approprier l'intimité du personnage et de la mettre en scène".

                       


Même si les personnages principaux sont des femmes, Olivier Panchot se défend d'avoir réalisé un film féministe ; ce qui comptait, selon lui, était l'authenticité des personnages, l'acuité du regard que l'on posait sur eux.  Je pense - a-t-il dit - aux films de Truffaut, en particulier  "L'histoire d'Adèle H " ou encore " Persona " de Bergman. Je pense aussi à " La leçon de piano " de Jane Campion. Voilà trois trajets de femme d'une force et d'une justesse incroyable. Parmi ces trois films, y aurait-il un film plus féminin ou plus masculin que les autres ?
 


L'action se situe au coeur d'un Paris que le réalisateur, là encore, a souhaité en symbiose avec ses personnages : " J'ai voulu recomposer un Paris singulier autour de l'appartement d'Anna. Il fallait que la perception des lieux soit en phase avec son état psychique. Nous avons fait en sorte de pouvoir tourner dans des rues étrangement désertées, comme en retrait du monde, tout en étant situées à proximité du parc. Il s'impose alors comme un élément perturbateur, un peu sauvage. Le parc des Buttes Chaumont échappe à la rigueur géométrique des jardins à la française, il est plus accidenté, la végétation semble ici plus libre, moins domestiquée".
Quant à la mise en scène, elle mérite tous nos éloges pour sa fluidité, sa luminosité, ses cadrages subtils, sa chorégraphie, nous offrant des images soignées sans jamais sombrer dans un esthétisme trop conventionnel. Le visage, les attitudes des actrices, quelles que soient les scènes douces ou violentes, sont sublimés et Olivier Panchot sait, à chaque instant, tirer le meilleur parti de leurs mouvements et de leurs expressions. Si bien que l'ensemble de ces qualités fait de ce long métrage une oeuvre attachante, un film ouvragé comme une dentelle, sans être précieux pour autant. 

 

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8 octobre 2007 1 08 /10 /octobre /2007 18:14
LA POURSUITE INFERNALE de JOHN FORD

          

La poursuite infernale ou My darling Clémentine (1946) de John Ford compte parmi les westerns les plus célèbres et, ce, à juste titre. Wyatt Earp (Henry Fonda) et ses trois frères Virgil, Morgan et James transhument avec leur troupeau dans les somptueux paysages de Monument Valley. Mais alors qu'ils font halte près de Tombstone, James est tué et le troupeau volé. Pour être sûr de venger son frère, Wyatt accepte le poste de shérif de Tombstone qu'on lui propose et choisit pour adjoints ses propres frères. Cette région vit sous la dictature que fait régner un certain Johnny Ringo, lui-même allié à la bande du vieux Clanton considéré par beaucoup comme l'assassin de James Earp. C'est d'ailleurs Virgil qui réglera son compte à Billy Clanton avant d'être lui même abattu par le vieux Clanton. Un ultime règlement de compte opposera Wyatt, Morgan et Doc Holliday (Victor Mature), le fiancé de Clémentine, au vieux Clanton et à ses fils où, au final, la bande des Clanton et Doc trouveront la mort. Wyatt repartira avec Morgan, mais reviendra peut-être à Tombstone pour épouser Clémentine dont il est tombé amoureux.

                      

Patriarche violent et intraitable, le vieux Clanton représente la dureté des premiers colons, prêts à se battre pour arracher et conserver le moindre lopin de terre. Son habitude de frapper ses fils avec le fouet dont il ne se sépare jamais ou d'abattre ses adversaires dans le dos traduisent bien ce comportement despotique, déjà anachronique et appartenant à un Far West révolu, où chacun dictait sa loi selon ses convenances. Doc Holliday incarne, au contraire, un style de vie plus moderne mais tout aussi dangereux. Un homme peut suivre la trace d'un autre homme de tombe en tombe - dit de lui Wyatt Earp. Toujours à la limite du crime et de la légitime défense, Doc, un ancien chirurgien déchu et alcoolique, qui a connu la vie tumultueuse de Denver et a renoncé à son cabinet pour se consacrer au jeu, n'a guère plus de scrupules qu'un Clanton, mais il y met plus de formes et vit sur le fil du rasoir avec une ambiguïté troublante ; ce personnage étant interprété par un Victor Mature impressionnant qui sait lui prêter toute l'équivoque nécessaire. Fiancé à Clémentine mais amant de la belle Chihuahua (Linda Darnell), il habite le film de son regard d'acier et de ses attitudes empreintes de défiance et de ruse. Face à lui et à Clanton,  Henry Fonda  (Wyatt) symbolise la loi et l'ordre. Choisi par Ford avec qui il était lié par une longue amitié et deux films Young Mr Lincoln et Les raisins de la colère, il est pleinement ce personnage soucieux de faire régner la justice et d'utiliser, à ces fins, des méthodes plus humaines. Ford aimait sa démarche. Il aurait pu regarder Fonda marcher pendant des heures. Le style de l'acteur s'accordait totalement au sien. La manière dont celui-ci se déplaçait avec une lenteur calculée, se balançait d'un pied sur l'autre et dansait nous propose quelques images inoubliables. Dès le début du film, Ford choisit de cadrer Wyatt en contre plongée pour renforcer l'importance qu'il entendait donner à son héros.

    

Bien entendu, Ford désirait rendre la bataille d'O.K. Corral telle qu'elle s'était déroulée dans la réalité, c'est la raison pour laquelle il avait soigné chaque détail et choisi, en conséquence, ses interprètes, tant il est vrai que ce règlement de compte qui date du 26 octobre 1881 appartient à l'histoire légendaire de l'Ouest américain. Malgré cela, La poursuite infernale n'est pas d'une rigueur absolue et quelques aspects du film s'éloignent de la réalité, ainsi le vieux Clanton était déjà mort lors de l'affrontement final. Mais, peu importe qu'il y ait ici ou là un léger décalage entre la vérité et sa représentation cinématographique, car le film est beaucoup plus qu'un banal documentaire sur un haut fait du Far West. Son ambition va au-delà d'un rendu romanesque : il décrit le passage de la nature à la civilisation. La première est évoquée par les paysages grandioses qui défilent devant nos yeux dans leur âpreté sauvage ; la seconde, par cette ville de Tombstone qui s'édifie peu à peu. L'un des plus beaux moments est l'inauguration de la cloche de l'église et la séquence de la danse qui témoigne de la transition entre l'Ouest primitif et une Amérique en mutation. Les personnages se chargeant, par ailleurs, d'incarner cette évolution. 

 

                  
Pour conclure, l'un des plus grands mérites de ce film est de balancer entre la légende, ses figures héroïques, sa violence, ses archétypes et la peinture de la vie quotidienne, ses lenteurs, sa banalité et sa poésie. John Ford anime son intrigue par la peinture de personnages secondaires, saisis sur le vif, qui procurent à l'oeuvre son identité propre. Initialement, le film devait durer plus de deux heures, mais Darryl F. Zanuck, le producteur, exigea les coupes qu'il jugeait indispensable pour clarifier la narration. On peut le regretter aujourd'hui, mais, à l'époque, les films n'outrepassaient que rarement l'heure et demie. Bien qu'il n'obtint pas, à sa sortie, la totale adhésion des critiques (par contre le public lui fera un triomphe), il apparait de nos jours comme l'une des oeuvres magistrales de John Ford et l'un des plus beaux rôles d'Henri Fonda, tandis qu'il force l'admiration par l'alliance de la puissance et de la subtilité.

 


Pour lire les articles consacrés aux grands maîtres du western et à Henry Fonda, cliquer sur leurs titres 

 

   HENRY FONDA - PORTRAIT

 

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LA POURSUITE INFERNALE de JOHN FORD
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6 octobre 2007 6 06 /10 /octobre /2007 09:42
LA VIE EST BELLE de ROBERTO BENIGNI

                     
 

QUAND LA TRAGEDIE RENCONTRE LE BURLESQUE ET LA POESIE.

 

Parmi les films qui continuent à attirer les Italiens dans les salles obscures, il faut signaler la survie d'un cinéma comique peu connu hors des frontières de la péninsule parce qu'il n'y obtient pas, transplanté à l'étranger, le même succès que dans son pays d'origine. Roberto Benigni est la personnalité la plus connue de cette tendance marquée, à la manière d'un Woody Allen, par la synthèse cinéaste-comédien. Révélé en 1977 avec Berlinguer ti voglio bene  de Bertolucci, Benigni passe à son tour à la réalisation et obtient un énorme succès avec Il piccolo diavolo (1988), Johnny Stecchino (1991) et Il mostro (1994) qui parviennent à dominer au box-office les produits hollywoodiens, tel que Le roi lion des studios Walt Disney. La mise en scène ne l'empêche nullement de poursuivre sa carrière d'acteur où son physique lunaire, son humour poético-burlesque lui confèrent des airs chaplinesques et concourent beaucoup à sa renommée. Mais il accède véritablement à la gloire internationale en 1997 avec un film qui va lui mériter, tout à la fois, le Grand prix du jury à Cannes ainsi que l'Oscar du Meilleur film étranger et du Meilleur acteur à Hollywood en 1998 : La vie est belle, l'histoire d'un père qui tente de protéger son fils de la réalité des camps de concentration nazis en lui faisant croire que tout cela n'est qu'un jeu. Derrière et devant la caméra, Benigni, qui n'est pas seulement le réalisateur et le scénariste mais l'interprète de ce film, réussit un doublé d'excellence stupéfiant, poignant, qui met en valeur les notions de courage, de liberté, d'amour, d'humanité en passant - comme le faisait Chaplin - de la tragédie à la comédie, du rire aux larmes.



On s'est demandé, à propos de ce film, contesté par certains, s'il était permis de rire de tout, c'est-à-dire des sujets les plus dramatiques comme celui de la Shoah et des camps d'extermination, mais Benigni n'a pas cherché à faire oeuvre sur la Shoah, ce que d'autres ont réalisé en respectant scrupuleusement l'Histoire ; non, il a tenté de montrer que la seule arme capable de venir à bout de l'horreur était l'amour.  Son mérite est de n'être tombé dans aucun des clichés qui le guettaient et de n'avoir eu recours à aucun artifice mélodramatique. Ce qui comptait pour lui - a-t-il dit - était de montrer le versant irréel et amusant des choses, car la vie conserve, en toutes circonstances, un prix inestimable, une saveur si forte qu'elle permet de résister aux pires sévices. Ce camp, ajoutait-il, qui a servi de décor au film, n'est pas une réplique de ceux de l'Allemagne nazie, ce n'est qu'une idée, au sens quasi platonicien, l'idée d'un antre du Mal, d'un antre de monstre, comme dans les contes pour enfants. Il n'y a rien de plus terrible à exprimer que la terreur, car l'horreur est en soi incommensurable. C'est même si inconcevable qu'il apparaît presque facile à Guido, le père, de laisser croire à l'enfant que cela est un jeu, car fuir le réalisme n'est pas trahir la réalité. L'artiste opère toujours une trahison quand il écrit ou filme. On pense à cette phrase de Keats : "quand une chose est belle, elle devient réelle". Alors, poursuit Bénigni, si mon film est réussi, et je l'espère, le camp que je dépeins devient vrai. Pour le personnage de Giosuè, j'ai choisi l'âge que l'écrivain Conrad définissait comme celui de la ligne d'ombre de l'enfance, l'âge où l'on comprend mais aussi celui on l'on peut croire qu'il s'agit d'un jeu. Et Giosuè a probablement tout compris.

       

Le film commence comme une comédie facétieuse, afin d'introduire un climat de conte de fées, où l'on voit un modeste serveur de restaurant employer toutes les ressources de son imagination pour conquérir la femme qu'il aime ( Nicoletta Braschi ) et l'enlever au nez et à la barbe de sa famille et de son fiancé, un fonctionnaire fasciste. De cette union va naître un enfant Giosuè que, cinq ans plus tard, deux policiers en civil vont enlever avec son père et envoyer dans un camp de concentration allemand. Dora, qui n'est pas juive, exigera de les accompagner. Mais elle est séparée de son mari et de son fils et le film devrait sombrer dans le pire cauchemar. Au contraire, le talent de conteur du père va  transformer cette réalité en rêve et persuader le petit garçon qu'il est au coeur d'un jeu gigantesque dont le trophée final, s'il suit bien les recommandations paternelles, sera un char d'assaut. Et, en effet, l'enfant aura son char d'assaut et retrouvera sa mère, mais le père sera tué alors qu'il tentait de rejoindre sa femme et lui criait son amour  à l'aide d'un haut-parleur du camp. Cette scène d'une beauté bouleversante introduit dans ce climat carcéral le sentiment le plus vif et le plus pur qui soit et, pour quelques instants, éclaire ces lieux sordides, d'une lumière surnaturelle, ce qui prouve que l'art peut être mieux que la vie et la réécrire en la transformant. Tout est dans le regard de l'artiste qui a en charge de rendre à cette inhumanité les couleurs de l'espérance. Mission accomplie par un Roberto Benigni inspiré, émouvant dans ce duo intemporel avec l'enfant où, grâce à son imagination, il réinvente un univers supportable, le fait exister et nous le donne à voir sans céder à des facilités narratives. Le cinéaste a réussi le pari difficile de transposer le rêve dans la réalité la plus abjecte. La qualité de son interprétation, qui oscille entre le grave et le loufoque, ainsi que celle admirable de l'enfant, et la poésie qui s'en dégage, y sont pour beaucoup. Cette fable est un chef-d'oeuvre qui prouve, si besoin était, que le cinéma italien a encore de beaux jours devant lui.
  

 

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3 octobre 2007 3 03 /10 /octobre /2007 10:02
LA CHARGE FANTASTIQUE de RAOUL WALSH

                       

Distribuée aux Etats-Unis quinze jours avant l'attaque de Pearl Harbour, La charge fantastique (1941) de Raoul Walsh est le symbole d'une Amérique qui croit encore en ses héros. Contrairement à Arthur Penn, qui a présenté l'homme de l'Ouest comme un tueur d'indiens mégalomane, Raoul Walsh fait du général George Armstrong Custer un cavalier intrépide, forgé dans la plus pure légende westernienne et persuadé qu'il travaille pour une noble cause : celle de conquérir des terres immenses et inutilisées pour les donner à des peuples qui sauront les cultiver et les exploiter. Custer va trouver en Errol Flynn un interprète idéal, dont la fougue, la prestance et l'indéniable séduction feront merveille à l'écran. Celui qui avait déjà été Robin des Bois et le capitaine Blood était dirigé ici pour la première fois par un metteur en scène avec lequel il tournerait encore sept autres films, tant le courant passait bien entre eux deux. Revue par Walsh, l'histoire du général Custer va devenir une suite de pages glorieuses et particulièrement photogéniques depuis West Point, où le héros apparaît sanglé dans son uniforme comme un héros de légende, jusqu'à Little Big Horn où il trouvera la mort, sans oublier les charges de cavalerie qu'il mène avec audace et brio en jeune officier auquel rien ne semble devoir résister.


                   

" Je suis prêt à jouer s'il le faut mon argent, mon épée et même ma vie, mais jamais le nom que je porte " - déclarera-t-il fièrement aux politiciens et aux affairistes qui tenteront de l'associer à leurs louches combines. Par ailleurs, Walsh aura le mérite de dénoncer avec lucidité le drame des guerres indiennes et de nous montrer, à travers le personnage du chef  indien Crazy Horse, une figure pleine de noblesse, victime des trafiquants blancs et de l'Histoire. Crazy Horse n'y apparaît pas comme un sauvage à peau rouge mais comme un homme d'un immense courage qui défend son territoire au prix de sa vie. L'ultime rencontre de Custer et de Crazy Horse à Little Big Horn se révèle être davantage une étape irréversible qu'un affrontement personnel. D'ailleurs, bien que vainqueurs, le chef indien et ses guerriers ne sont jamais que des morts en sursis. Ce rôle est admirablement campé par le formidable acteur qu'était Anthony Quinn, dur, intraitable, vaillant, d'un courage égal à celui du chef qui lui fait face dans une charge lyrique qui est un très grand moment de cinéma.



Evitant tout ce qui aurait pu faire de son film une parabole belliciste, Walsh s'attache à décrire la personnalité de ses héros, principalement celle de général Custer, bien sûr, dont on suit le parcours avec un intérêt croissant. " La gloire - disait-il - a un avantage sur l'argent. On l'emporte avec soi en mourant ". D'autre part, ce film ajoute à l'épopée héroïque, des scènes plus sentimentales d'une grande tendresse, où Olivia de Havilland est l'épouse du général et forme avec Errol Flynn un couple inoubliable, déjà réuni en 1939 dans Les conquérants de Michael Curtiz.  La scène des adieux, filmée de façon juste et sobre, est parmi les plus émouvantes et donne à ce long métrage une touche sensible, sans mièvrerie aucune. Enfin, il serait regrettable de ne pas mentionner la chanson irlandaise qui devint l'hymne du 7th Cavalry et l'évocation réussie de l'Amérique de la seconde moitié du XIXe siècle, bouleversée par la guerre de Sécession, les guerres indiennes, la ruée vers l'or dans les Black Hills, ce qui contribue à faire de ce film une fresque passionnante et grandiose de l'histoire du Nouveau Monde.

 

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27 septembre 2007 4 27 /09 /septembre /2007 09:36
JOYEUSES FUNERAILLES de FRANK OZ

                                                   

Le jour des funérailles du patriarche, la famille et les amis arrivent chacun avec son lot de problèmes. Le fils aîné Daniel va s'affronter à son frère rival, Robert, qui vit de sa plume aux Etats-Unis, Martha, sa cousine, chercher à faire accepter son nouveau fiancé à son père, ce qui sera chose rendue encore plus difficile que ce dernier a avalé, par inadvertance, une pilule hallucinogène. Mais les complications s'aggravent encore, quand débarque un curieux personnage, que nul ne connait, mais qui assure, quant à lui, avoir très intimement connu le défunt et être tout disposé à révéler des choses auxquelles personne ne s'attend. Tant et si bien que Daniel et sa famille, sentant poindre le danger, vont tout tenter pour enterrer ensemble les confidences ... et le patriarche.

 

                   

Anglais de naissance, Frank Oz est californien d'adoption depuis l'âge de cinq ans. En 1982, il co-réalise avec Jim Henson  Dark Cristal  qui sera un succès et lui ouvrira les portes des studios et de la réalisation en solo. Mais après deux échecs successifs The Score  en 2001  et Et l'homme créa la femme en 2002, il tourne le dos aux grosses productions et aux stars pour se contenter de films à plus petit budget comme celui-ci où il s'essaie, par la même occasion, à un nouveau registre : l'humour, sans parvenir totalement à nous convaincre. Je m'attendais à un film dans la veine de Quatre mariages et un enterrement, d'autant que la critique n'avait pas été mauvaise, mais l'humour de Frank Oz me reste sur l'estomac et j'avoue que ce long métrage sans finesse m'a beaucoup déçue. Non que les acteurs ne fassent pas tout leur possible pour nous faire rire, mais c'est si souvent décalé ou si prévisible que cela tombe le plus souvent à plat et que l'on finit par s'agacer de si peu de légèreté, de subtilité, de sagacité. Rien de nouveau sur l'écran. Le film reprend à son compte, sans innover, les vieilles recettes du comique, du burlesque, du rocambolesque qui ont servi et resservi mille fois, si bien que le cinéaste ne nous propose, en définitive, qu'une suite de mets réchauffés. Aussi se prend-t-on à rêver à des oeuvres comme Arsenic et vieilles dentelles et aux meilleurs crus de l'humour anglais que, Oz, installé depuis trop longtemps en Amérique, ne sait point distiller. Hélas !

 

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22 septembre 2007 6 22 /09 /septembre /2007 09:17

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Le grand passage qui date de 1940 est l'un des films qui a ouvert grandes les portes du 7e Art au western dans lequel s'étaient déjà illustrés des réalisateurs comme Cecil B. DeMille, Michael Curtiz, John Ford, Henry King, Raoul Walsh et King Vidor qui n'en était pas à son premier essai, puiqu'il avait déjà tourné en 1930 Billy le Kid dans un format exceptionnel le Realife Grandeur, alors qu'il n'y avait que douze salles aux Etats-Unis équipées pour le projeter. Cette production, faute d'assurer la notoriété du procédé, avait eu le mérite de contribuer à instituer le western comme un genre prestigieux et à part entière. Dix ans plus tard, King Vidor, ayant pris du galon, allait centrer son nouveau film sur le personnage du Major Roberts, pour lequel il éprouvait un intérêt particulier. Le film sera tourné en technicolor et dans des décors naturels. Le cinéaste avait d'ailleurs fixé son choix sur la région du lac Payette, mais découvert qu'elle était infestée de tiques et que ceux-ci provoquaient des fièvres. Acteurs et techniciens devront être vaccinés. D'autre part, le poids des caméra - plus de 300 kg - n'exigeait pas moins de cinq ou six hommes pour les transporter, si bien que les exploits des techniciens seront à peu de chose près comparables à ceux des Rangers du Major Robert Rogers. Le tournage sera très difficile car, commencé par la MGM avant que le scénario ne soit définitivement bouclé, la première partie - l'odyssée des Rangers - ne correspondra pas à la seconde, au point que le cinéaste découragé envisagera d'abandonner du fait que les plans ne se raccordaient pas les uns aux autres. Par ailleurs, Spencer Tracy était devenu, entre temps, une vedette suffisamment confirmée pour qu'il n'y ait nul besoin de l'épauler avec la présence de deux autres acteurs célèbres comme Robert Taylor et Wallace Beery que l'on remplacera l'un et l'autre par Robert Young dans le rôle de Langdon Towne et Walter Brennan dans celui de Hunk Marriner. Ainsi la dernière partie ne verra jamais le jour pour plusieurs raisons, en dehors des coordinations difficiles entre pellicules : le coût du tournage de la première (plus de 2.500.000 dollars), les difficultés rencontrées dans tous les domaines et un scénario particulièrement dispendieux. Le film se clôturera sur les adieux de Langdon Towne avec le Major Rogers.   

                               


L'histoire, comme je l'écrivais au début de cet article, est centrée sur le personnage de Robert Rogers auquel a été confié la mission de détruire le village indien de Saint Francis, afin d'ouvrir plus largement la voie à la conquête de l'Ouest. Ne parvenant pas à franchir le lac Champlain occupé par l'ennemi, Rogers et sa troupe escaladent les montagnes, traversent les marais, puis un fleuve et atteignent Saint Francis dont ils massacreront les habitants. Enfin, épuisés, affamés, malades, ils poursuivent leur route galvanisés par leur chef qui ne recule devant aucun obstacle, mais les difficultés ne cessant de s'accumuler, il aura bientôt du mal à maintenir le moral de ses hommes. L'un des plus beaux passages est celui au cours duquel les baroudeurs forment une chaîne humaine afin de franchir une rivière impétueuse ; ce film ne cesse, en effet, d'exalter le courage, la virilité, le goût de la conquête. On a très souvent accusé Vidor d'avoir réalisé avec Le grand passage une oeuvre raciste, à cause de la violence et de la sauvagerie avec laquelle la section attaque et massacre le village de Saint Francis. Mais plus que l'apologie belliqueuse d'un commando, le cinéaste s'est attaché à décrire le courage, la détermination, la bravoure de ces hommes qui avaient la charge de conquérir un continent qu'ils considéraient alors, avec le regard de leur époque, comme habité par des populations de sauvages qui n'avaient pas su tirer profit de ces terres magnifiques. Tourné dans l'Idaho, le film a déjà des qualités esthétiques remarquables et la couleur ajoute à la splendeur des paysages. Certains de ses plans furent réutilisés dans Last ofthe Buccaneers de Lew Landers en 1950. Quant à l'interprétation, elle mérite notre totale approbation. D'où que l'on se place, ce long métrage est parfaitement abouti et d'un réalisme qui ne s'est autorisé aucune complaisance. Il servira de référence à des productions ultérieures qui n'auront pas, toutes, les mêmes qualités.

 

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  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


Charlie Chaplin

 

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Stanley Kubrick

 

 

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