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2 juin 2007 6 02 /06 /juin /2007 08:26
LE GRAND BLEU de LUC BESSON

                              

En un quart de siècle, l'art et l'industrie du film ont considérablement évolué ; la meilleure part revenant aux grosses productions qui savent séduire le public par un langage visuel simplifié à l'extrême, qui sacrifie la signification à l'effet, l'expression esthétique à l'image factice. Dans le même temps, le statut des auteurs s'est affermi, les oeuvres de recherche ont proliféré et, ce, au-delà de ce qu'avaient pu rêver les premiers adeptes de la caméra-stylo. Il nous faut donc tenir compte, lors d'une série d'articles sur la production cinématographique couvrant une ou plusieurs décennies, de cette double et paradoxale évolution, en incluant auprès des chefs-d'oeuvre, des produits de plus grande consommation, ce qu'il est convenu d'appeler des films-cultes, sur lesquels nous nous devons d'émettre les réserves qui s'imposent. Cela est justement le cas pour Le grand bleu (1988), un film qui sut ensorceler une jeunesse et transformer le spectateur en dauphin, le plongeant dans un monde de rêve et de bonheur d'où il ne voudrait jamais plus revenir. Rêve, bonheur, poésie, innocence, évasion, ne sont-ils pas l'apanage de cette réalisation parfaitement réussie sur le plan esthétique et qui rend le rôle du détracteur d'autant plus malaisé et ingrat ?

 


Oubliez tout ce que vous savez.. Plongez ! conseillait le metteur en scène Luc Besson. Or, c'est justement ce que refusait ceux qui répugnaient à s'anéantir comme le faisaient à l'écran Enzo et Jacques. Ces deux copains partageaient la même passion pour la plongée sous-marine et, à l'occasion d'un championnat du monde, se retrouvaient à Taormina en Sicile, bientôt rejoints par Johana, une jeune américaine follement éprise de Jacques. Ce dernier paraissait lui rendre son amour mais, en réalité, n'aspirait qu'à une chose : plonger et se mesurer, lors des compétitions, à son concurrent Enzo. Un jour, celui-ci descendit trop profond et mourut dans les bras de son ami qui, au lieu de remonter son cadavre dans le monde des hommes, préféra le confier au silence des profondeurs, avant d'aller le rejoindre peu de temps après, sourd à l'amour de Johana enceinte.




Terrible histoire que celle de ces deux sportifs qui optent pour la mort plutôt que pour la vie, car de quoi s'agit-il sinon d'un anéantissement dont le réalisateur n'hésite pas à nous fournir la clé. Et quelle est-elle ? Je résume : puisque la vie ordinaire n'est pas à la mesure de l'héroïsme auquel aspirent les jeunes gens, épris l'un et l'autre d'idéal et de fraternité virile, et puisque la femme, selon eux, signifie l'assurance d'une existence stéréotypée qui, peu ou prou, les contraindra à la stabilité : foyer, enfants, maison, automobile et, par conséquent, à une existence castratrice, mieux vaut une mort désirée que cette vie mutilée. Si bien que l'on peut aborder le film sous l'angle d'une exaltation au dépassement de soi, ce que firent de nombreux jeunes spectateurs, qui adhérèrent d'autant plus facilement à cette intrigue, qu'elle fait la part belle à la fascination que le néant exerce sur eux. La beauté esthétique du film donne incontestablement de la mort une image sublimée : mort proclamée comme refus de la médiocrité, de l'ordinaire de la vie, et comme possibilité de s'octroyer un destin. En somme, proposer en échange d'une vie aseptisée et d'une désolante platitude, une mort exaltante. Le film provoqua la controverse que l'on imagine sans qu'elle fût toujours bien comprise, ce qui est regrettable, car, à la suite de cette projection, des adolescents fragiles pouvaient être enclins à se laisser prendre dans cette nasse  qui les entraînait irrémédiablement dans des profondeurs insondables. L'image fascinait, mais n'en était pas moins fausse ; on sait depuis Cousteau que les grands fonds océaniques sont, dans la réalité, ténébreux et inhospitaliers. On y devient sourd et aveugle et on s'y engloutit dans un univers pour le moins terrifiant. Si la plongée sous-marine est un sport enthousiasmant, il ne l'est que dans la mesure où chacun en envisage les risques et périls. Ce film eut donc, entre autre privilège, celui de faire couler beaucoup d'encre et de susciter des discussions sans fin. Aujourd'hui, il me vient à l'idée de le comparer à un film plus récent, qui a obtenu le prix de la mise en scène au Festival de Cannes : Le scaphandre et le papillon.  Alors que le premier est un chant funèbre bellement orchestré, le second est un hymne à la vie de la part d'un homme prisonnier d'un scaphandre, immergé dans les profondeurs douloureuses de la maladie mais, tellement épris de la beauté du monde, que d'un battement de paupière il parvient à faire de sa pensée et de ce qui lui reste de vie...un papillon. A la pesanteur de l'eau s'oppose l'air libérateur, au refus, l'acceptation, à l'abandon, la confiance. A méditer. 

 

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23 mai 2007 3 23 /05 /mai /2007 09:17
Les vacances de Mr Hulot de Jacques TATI

Les vacances ne sont pas faites pour s’amuser. Tout le monde le sait, sauf Monsieur Hulot qui, pipe en l’air et silhouette chaloupée, prend la vie comme elle vient, bouleversant scandaleusement, au volant de sa pétaradante voiture, la quiétude estivale des vacanciers qui s’installent avec leurs habitudes citadines dans cette station balnéaire de la côte atlantique. Hulot va, dès lors, promener dans l’ennui balnéaire le plaisir émerveillé de ses découvertes successives. D’un seul coup, l’ennui vole en éclats, tandis que les châteaux de sable s’ouvrent sur la belle au bois dormant et qu’aux cris des enfants, la petite plage  prend en permanence les couleurs d’un jour de fête. Mais voilà septembre. Monsieur Hulot, inconscient du climat facétieux qu’il a suscité durant cet entracte estival, rentre. Et où rentre-t-il ? Dans les nuages sans doute, dont il n’était, d’ailleurs, jamais sorti. Si bien que les enfants du pays, après qu’il ait disparu, interrogeront le ciel pendant longtemps. Fort du succès remporté par « Jour de fête », Jacques Tati , dans les années 1952, crée le personnage de Monsieur Hulot, autre silhouette dégingandée mais, cette fois, sans moustache, personnage qui pourrait être le cousin citadin du facteur François, figure qui deviendra familière avec son pantalon de toile blanche, son chapeau cabossé, ses chaussettes rayées et ses chaussures de tennis auxquelles s'ajoutera assez fréquemment une pipe. Monsieur Hulot est entré dans le paysage cinéphile à bord de sa voiture et n'en sortira plus. Dans ce second film  Les Vacances de monsieur Hulot (1953), on partage avec cet ami extravagant deux semaines de vacances sur une plage bretonne proche de Saint-Nazaire. Pendant plus d'une heure, nous allons le voir semer le trouble parmi la clientèle de l’hôtel, où il séjourne, par ses maladresses, ses fantaisies et ses manières d'hurluberlu. Une suite de gags qui provoque le rire du public. Tati a su saisir le rituel des vacanciers et les attitudes estivales de la classe moyenne à l'heure où notre société entre dans l'ère de la consommation de masse. De cette observation aiguë va naître une poésie du quotidien profondément intelligente, servie par une grande liberté d'écriture qui préfigure déjà ce que sera, quelques années plus tard, la Nouvelle Vague, soucieuse de filmer en temps réel et sur le vif le monde contemporain. Hulot, l'innocent, l'optimiste, le fantaisiste, l'incorrigible gaffeur affirme son individualité à l'égard d'une société dont le conformisme est décapé sans méchanceté par des situations burlesques inénarrables.

 

Pour prendre connaissance de l'article consacré à Jacques TATI, cliquer   ICI

 

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Les vacances de Mr Hulot de Jacques TATI
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19 mai 2007 6 19 /05 /mai /2007 08:59
LA FAILLE de GREGORY HOBLIT

                     

Plus théâtrale que cinématographique, "La Faille" de Grégory Hoblit vaut principalement pour le jeu des acteurs Anthony Hopkins et Ryan Gosling et le suspense efficace qui maintient - sans faiblir - l'intérêt et la curiosité du spectateur jusqu'au final, ce qui est la preuve d'un scénario bien ficelé, dans la plus pure tradition du thriller hollywoodien. Dans le personnage de Ted Crawford,  ingénieur aéronautique riche et vicelard, Hopkins est retors à souhait. Il semble sortir, avec ses cheveux gris rasés court, du "Silence des agneaux". Comme sa femme le trompe deux fois par semaine dans un hôtel avec piscine, il commet le crime parfait, mais, ensuite, avoue sa culpabilité, afin de mettre au défi la police et un jeune procureur aux dents longues, que l'on a jeté dans ses pattes afin de le pousser jusque dans ses retranchements, de prouver qu'il est bien le coupable. Jeu pervers et machiavélique que cet homme inquiétant va mener de main de maître au point que les enquêteurs vont y perdre leur latin. Problème : c'est l'amant qui a été chargé de mener l'instruction sur la tentative d'assassinat de l'épouse infidèle et c'est un jeune procureur, pressé d'en finir, qui va jouer face à lui à qui perd gagne. Ce trio-là vaut son pesant d'or et Hopkins avec ses airs narquois, ses sourires entendus et ses silences, qui en disent long, nous la joue sur le mode tantôt insolent, tantôt cynique, en manipulateur avisé qui sait user habilement de sang-froid et de ruse.

                         

Le bras de fer qui s'en suit est habilement conduit entre faux-semblants et ambition, mensonge et orgueil, moment que l'on savoure avec un certain plaisir. Reste ici et là des clichés dont on se serait bien passé et qui n'apportent rien au film. Dommage, car celui-ci aurait mérité mieux sur le plan du rythme et du découpage, ainsi que de la mise en scène vraiment trop convenue. Mais le film s'en sort grâce à ce duel qui nous met les nerfs à vif. L'accusé et l'accusateur, étant aussi mégalo l'un que l'autre, nous font leur cinéma avec un talent qui, à certains instants, m'a semblé un peu forcé. A voir si l'on aime les parties de poker jouées avec maestria.

 

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4 mai 2007 5 04 /05 /mai /2007 10:37
LOIN D'ELLE de SARAH POLLEY

                                                               

Le film  Loin d'elle, d'une jeune réalisatrice canadienne, nous révèle un talent prometteur qui mérite de retenir l'attention des cinéphiles, tant ce premier essai, sur un sujet pourtant difficile, est un coup de maître. Sarah Polley, tel est son nom, y démontre une maîtrise époustouflante pour une si jeune femme (28 ans). Car, bigre ! que le thème choisi est délicat ! Traiter de la maladie d'Alzheimer sans sombrer dans le mélo et sans frôler l'impudeur est suffisamment remarquable pour être souligné. Ce film est certes mélancolique, mais jamais désespéré, tant l'amour et le respect prennent sans cesse le pas sur les conséquences inéluctables de la maladie. L'héroïne s'éloigne à jamais dans les brumes de l'absence et un environnement d'une beauté poignante que la blancheur immaculée de la neige garde intact dans son profond et admirable silence. La jeune cinéaste ne s'est pas cachée d'être fascinée par l'exploration de la mémoire, par les règles de ce "je" aux multiples facettes, par les longues relations entre deux personnes lorsqu'elles s'effilochent, et comment les choses dont on se souvient peuvent être aussi douloureuses que celles que l'on oublie. Et je désirais tellement, a-t-elle dit lors d'une interview, que Julie Christie tienne ce rôle, que j'ai commencé à écrire en pensant à elle. Ce scénario s'inspire d'une nouvelle d'Alice Munro qui bouleversa à tel point la jeune femme qu'elle eût aussitôt le désir de la porter à l'écran et, par la même occasion, de se lancer dans la mise en scène.



L'histoire est celle de Fiona et Grant (Gordon Pinsent), mariés depuis 45 ans, et dont l'existence va être totalement déstabilisée lorqu'ils apprennent que Fiona est atteinte de la maladie d'Alzheimer. A cette annonce, la malade accepte d'entrer dans une maison de santé spécialisée, ce qui va profondément perturber son époux, rongé par la culpabilité et torturé par sa mémoire qui ne cessera plus, dès lors, de lui rappeler les heures de bonheur d'antan, alors même que son épouse prend ses distances avec un passé qui les avait vus si proches. Et cette douleur s'aggravera encore lorsque Fiona s'éprendra d'un des pensionnaires de la maison de santé. La mémoire s'est retirée de l'esprit de cette femme, laissant derrière elle une page vierge, comme le sable à marée basse, comme la neige qui a recouvert le paysage environnant en le faisant apparaître différent. Fiona est soudain livrée à la vie, sans plus de racines, sans plus de souvenirs, avec une sensibilité intacte mais pas d'amarres pour la fixer au quai, pas de barre pour la gouverner. Ainsi est-elle pareille à une jonque égarée dans l'immensité inconnue, ainsi les sentiments se fracassent-ils comme une banquise, car bientôt Fiona ne reconnaîtra plus son compagnon de vie. La tendresse et la force s'allient dans ce film qui sait montrer,  juste comme il faut, la fragilité des êtres et la persistance des liens.
 


Dans le rôle de Fiona, composé en pensant à elle, Julie Christie, qui fut l'inoubliable Lara du Docteur Jivago,nous bouleverse une fois encore par l'intensité qu'elle  insuffle à son personnage. Elle joue de cette fragilité qui émane d'elle, de cette ferveur des yeux qui la caractérise, de cet effacement qu'elle sait nuancer selon les scènes, de ses étonnements, ses étourderies et elle est tout simplement admirable. Elle ajoute au film, aux côtés d'un Gordon Pinsent également émouvant, une dimension quasi spirituelle, comme une lumière qui irradie ainsi que la neige d'alentour.  Le non-dit de ce film est plus important que le dit, car l'essentiel est suspendu dans les regards qui s'échangent, les chagrins qui se voilent, les tendresses qui s'avouent. Si la nostalgie est bien présente, Sarah Polley ne s'en contente pas et ose aborder d'autres thèmes que celui de la maladie dévastatrice. Elle évoque avec tact la sexualité des seniors, la mort "sociale", sans perdre son fil conducteur : celui de cet amour évanescent. Film grave d'une jeune actrice talentueuse passée derrière la caméra, il porte en germe toutes les promesses et prouve, une fois encore, que la valeur n'attend pas le nombre des années.

Julie Christie a reçu un Golden Globe en 2008 pour son interprétation dans ce film.


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28 avril 2007 6 28 /04 /avril /2007 10:37
LES BRONZES de PATRICE LECONTE

   

Rien de plus éloigné d'India Song de Marguerite Duras que le film Les Bronzés (1978) de Patrice Leconte. Le premier se situe dans le cercle étroit du cinéma expérimental jugé parfois trop cérébral et ennuyeux, l'autre est un divertissement hilarant qui n'a pour ambition que de distraire et d'amuser, mais n'en reste pas moins une critique savoureuse et cruelle d'une tranche de la société de consommation des années 70. Pourquoi en parler ? Parce que ce film, et ceux qui suivirent, dont Les Bronzés font du ski, Le Père Noël est une ordure, furent des succès tels qu'ils méritent de retenir l'attention et parce que l'équipe du Splendid, cette troupe de joyeux drilles, qui avait fait ses classes auprès de Tsilla Chelton, imposa avec talent un cinéma proche de la formule café-théâtre, à base d'improvisations collectives et d'humour franchouillard.

                        

Le film réunissait l'équipe au complet, tandis que la réalisation était confiée à un transfuge de la bande dessinée, ayant travaillé au journal Pilote et déjà signataire d'une comédie grinçante qui révélait Coluche : Les vécés étaient fermés de l'intérieur (1975). La comédie m'a enseigné les constructions au millimètre... La publicité m'a appris l'économie du récit : en quarante-cinq secondes, il faut aller à l'essentiel . Ces propos du metteur en scène expliquaient sa réussite dans un genre mineur : minutieux réglage des gags, rapidité d'exécution, refus du comique de grimace à la de Funès au profit d'une franche gaieté à l'italienne. Autre originalité : le comique n'était plus l'affaire d'un seul à la façon d'un Buster Keaton ou d'un Jacques Tati, mais d'une troupe d'acteurs où chacun figurait un personnage bien ciblé de l'échantillonnage humain : le malchanceux, l'arriviste, le paumé, le dragueur, le parvenu, la snobinarde, l'écervelée... Le tout pimenté d'une bonne dose d'observation sociologique qui raillait le comportement du touriste moyen en mal de potion miracle contre la solitude et nous dévoilait un échiquier farfelu où les uns et les autres poussaient leur pion à l'aveuglette. Il en résultait un comique insolite, amer et pittoresque, que le cinéaste affinera par la suite dans des réalisations plus ambitieuses telles que Tandem (1986), Le mari de la coiffeuse (1990) et Le parfum d'Yvonne (1994).

                               

Avec Les Bronzés, Leconte et la troupe du Splendid se trouvaient en phase avec la réalité de l'époque, si bien que le film est un documentaire inénarrable de ce que fut alors l'homo vacancus, en même temps qu'une peinture réjouissante de quelques inclassables énergumènes ne parvenant à s'intégrer nulle part. Les gags s'enchaînaient avec brio et le rythme ne se relâchait à aucun moment. C'était un feu d'artifice de scènes mémorables menées à un train d'enfer par de jeunes acteurs talentueux qui, visiblement, s'amusaient autant que nous.  Il est vrai aussi que nous avions dans ces années-là un Président de la République qui se souciait beaucoup du bonheur des Français et que le club Med sut profiter à fond de cette formidable aubaine des séjours "clé en main" et dépaysants qui assuraient à ses gentils membres, grâce à la présence de ses gentils organisateurs, des semaines de rêve au long de plages bordées de cocotiers, où leurs loisirs, leur habitat, leur couvert, leurs flirts, leurs souhaits, leurs fantasmes étaient aimablement satisfaits. Ils n'avaient plus qu'à se laisser porter par cette vague euphorisante et se couler dans le moule que l'on proposait à leur psychisme stressé. Le sujet était trop beau pour ne pas être exploité avec toute la dérision requise et l'humour adéquate.

 

La production cinématographique des années 70/80, éclectique à souhait, manifestait ainsi sa bonne santé, puisqu'elle pouvait offrir des longs métrages aussi différents que Le chagrin et la pitié de Marcel Ophuls (1970), La maman et la putain de Jean Eustache (1973) et ces bronzés  qui recensaient les ridicules d'une société de consommation n'aspirant qu'à jouir, sans trop se poser de questions, des opportunités qui s'offraient à elle. Le film, sous ses dehors simplistes, était une charge impitoyable contre les dangers du décervelage qui guettait chacun de nous, pris que nous étions dans l'engrenage du plaisir à tout prix et de la satisfaction immédiate. Dans ce sens, Les Bronzés ont été salutaires. Les Français acceptèrent avec bonne humeur cette parodie d'eux-mêmes, mais nombreux furent ceux qui en tirèrent la leçon et organisèrent leurs vacances de manière plus personnelle. Le Club Med eut aussi à en pâtir et dut réviser ses formules de vacances en les déclinant  sur un mode plus raffiné, plus élaboré, ajoutant au potage quelques ingrédients soft.



En conclusion, ce film aura été un triomphe et se voit rediffusé presque chaque année sur une chaîne de télévision avec le même succès d'audience. C'est dire que la troupe et son cinéaste avaient visé juste. Les Français ont une qualité qu'il faut leur reconnaître : ils se plaisent à rire à leurs dépens. C'est bon signe. L'auto-critique est excellente pour la santé morale. Bien entendu, la tentation était grande de rééditer l'exploit. Il y eut, en effet l'année suivante Les Bronzés font du ski qui était encore de bonne facture, mais, hélas ! le dernier en date, ces bronzés number 3 fut un four total...Les miracles n'ont lieu qu'une fois.

 


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18 avril 2007 3 18 /04 /avril /2007 13:49
UNE HISTOIRE SIMPLE de CLAUDE SAUTET

                           

"Mes films ne sont pas déprimants et ne débouchent pas sur le désespoir. (...) J'essaie toujours de trouver dans les personnages que je décris cette vitalité biologique qui les amène à s'en sortir".  Comme Doillon,  Claude Sautet est le cinéaste de la vie des autres, de ces gens simples que l'on croise, rencontre, oublie. Il aime surprendre sur les visages les expressions familières, les regards fugitifs, les interrogations inquiètes. Dans la foule anonyme des grandes villes, son objectif semble isoler, par hasard, seuls ou en groupe, César et Rosalie (1972), Vincent, François, Paul et les autres (1974), Anna, Gabrielle, Marie ( Une histoire simple ), échantillons humains qui illustrent si bien les élans du coeur et les blessures de l'âme et nuancent à l'infini la perception des choses de la vie. Tel un sculpteur, Sautet travaille cette matière brute du réel, ces êtres dont il tente de saisir, d'approcher l'identité, de sonder les coeurs et les reins. Qui sont-ils ? Les maîtres de leur avenir ou les esclaves de mille contraintes ? Ainsi, au fil des bobines, le cinéaste brosse-t-il le tableau impressionniste d'une société qui, dix ans après mai 68, est en pleine mutation, destin particulier des individus inséparable de celui de la collectivité. Rien n'échappe à son oeil attentif et scrutateur : ni le spectacle de la rue colorée, ni celui du cercle familial en fête ou dans la peine, ni le monde du travail entre éclatement et solidarité, ni la fratrie angoissée des hommes, ni l'univers féminin  autour duquel tout gravite. Histoires simples que celles de ces vies que l'on surprend dans leur décor journalier, autour des tables festives, dans le brouhaha des bistrots ou encore dans leur univers professionnel, là où se tissent les ambitions, les jalousies, les suspicions.  
  
                        

Une histoire simple (1978) est celle de Marie qui rompt avec Serge et décide de ne pas garder l'enfant qu'elle attend de lui, le cinéaste abordant ici le délicat et douloureux problème de l'avortement qui après la promulgation de la loi Veil commençait à se banaliser et prouvait l'évolution rapide d'une société qui n'entendait plus supporter d'entraves à sa liberté. Sautet donne à voir mais ne juge pas ; il se tient en retrait, se contente d'être un peintre des moeurs, un témoin. Cinéaste, c'est-à-dire homme de l'image, il se garde de se montrer partisan. Et on doit l'en remercier, car son cinéma, de belle facture, dans la lignée d'un Renoir et d'un Becker, ne retient sur sa pellicule ultra sensible que les expressions fugitives, les douleurs soudaines, les chuchotements de l'indicible, les aveux susurrés au creux des longs silences, les amours qui se nouent et se dénouent, de ceux qui ne savent pas attendre ou ne peuvent pas finir.

                  

Marie, l'héroïne d'une histoire simple, interprétée par la merveilleuse Romy Schneider, après avoir quitté Serge, son amant (Claude Brasseur), renoue avec Georges son ex-mari (Bruno Cremer) et retrouve en maintes occasions la bande d'amis avec laquelle elle partage ses loisirs, ses soucis et ses joies. Chacun, à l'intérieur de l'histoire, vit son histoire propre, les unes et les autres se mêlant et s'entremêlant dans ce microcosme qui montre combien la solitude peut être plus grande encore au milieu des autres. Familles recomposées, divorces, tentatives de suicide, amours déclinantes, notre lot quotidien est dépeint en une fresque intimiste, sans agressivité, dans les dégradés pastels, avec une humanité empreinte de tendresse. C'est l'art de Sautet d'être ainsi proche de ses personnages, au point de nous les rendre incroyablement accessibles. Celui-ci n'est-il pas notre voisin, celui-là notre confrère, notre associé, voire notre parent ? Cette proximité, par ailleurs, n'est pas dépourvue de piquant et de piment, ce, grâce aux dialogues aimablement ciselés par Jean-Loup Dabadie. Et puis Claude Sautet sait tirer le meilleur de ses interprètes. S'il donne beaucoup, il reçoit en retour. On sait que Romy Schneider fut l'une de ses actrices fétiche et travailla avec lui dans Les choses de la vie, César et Rosalie, Max et les Ferrailleurs, Mado et cette histoire simple où elle est la femme icône d'une modernité encore hésitante. "Romy est une actrice qui dépasse le quotidien, qui prend une dimension solaire. Elle est la synthèse de toutes les femmes, leur chant profond qui donne un sens à leur vie. Elle a une sorte de propreté morale qui irradie d'elle-même et la rend absolue" - écrivait le cinéaste de son actrice. C'est dire combien il la comprenait et, à travers elle, toutes les femmes. Car ce cinéaste sut toujours rester à hauteur d'homme et poser sur ses semblables un regard fraternel.  

 

Pour lire les articles consacrés à Claude Sautet, Romy Schneider et Bruno Cremer, cliquer sur leurs titres :

 

CLAUDE SAUTET OU LES CHOSES DE LA VIE      

ROMY SCHNEIDER - PORTRAIT      

BRUNO CREMER  

 

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UNE HISTOIRE SIMPLE de CLAUDE SAUTET
UNE HISTOIRE SIMPLE de CLAUDE SAUTET
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7 avril 2007 6 07 /04 /avril /2007 11:54
NE TOUCHEZ PAS LA HACHE de JACQUES RIVETTE

                    

"Histoire des Treize ", ce titre regroupe trois romans d'Honoré de Balzac : Ferragus, La duchesse de Langeais et La fille aux yeux d'or. Une première version avait été publiée dans " L'écho de la Jeune France " sous le titre : "Ne touchez pas la hache", qui le resta jusqu'en 1839. Les Treize sont, selon Balzac lui-même, les membres d'une étrange franc-maçonnerie assez forts pour se mettre au-dessus des lois, assez hardis pour tout risquer et entreprendre et assez heureux pour avoir presque toujours réussi dans leurs desseins. La duchesse de Langeais, dédiée à Franz Liszt met en scène le général de Montriveau et la duchesse, née Antoinette de Novarreins, jeune femme adulée du faubourg Saint-Germain, à laquelle l'ombrageux et conquérant militaire, follement épris, va faire une cour assidue sans parvenir à la séduire. Elle l'enflammera sans lui céder. Balzac s'inspirait là de la marquise de Castries qu'il avait désespérément aimée et qui l'avait fait beaucoup souffrir. Ce roman était la revanche de l'écrivain sur la femme du monde insoucieuse et coquette. Dans le roman, la jeune femme va toucher la hache, c'est-à-dire se prêter au châtiment qui interviendra et la conduira à se retirer dans un couvent et à y mourir.

                       

Jacques Rivette, cinéaste bien connu de la Nouvelle Vague, auquel nous devons entre autres La belle noiseuse, a choisi, pour son dernier long métrage, de faire cette adaptation du roman balzacien selon une trame quasi linéaire et en respectant scrupuleusement le texte de l'auteur, les dialogues étant principalement ceux du livre. Cela nous vaut un film intéressant, un peu long, parfois un rien scolaire, mais éclairé de lueurs brillantes, de moments privilégiés et surtout valorisé par le découpage subtil et ludique du temps, grâce au savoir-faire de Nicole Lubtchansky. En ne cessant d'attiser son désir tout en se refusant à lui, au prétexte de la bienséance et de la vertu, Antoinette de Langeais pousse Armand de Montriveau à contester la supériorité morale de l'autorité aristocratique et à bouleverser l'ordre en place. Il faut donc voir le film sous son angle subversif, la fracture que la confrérie secrète des Treize voudrait infliger à la société d'alors - et sous celui de la hantise d'un amour toujours remis en cause. C'est d'ailleurs cet amour malheureux qui conduit Montriveau à agir, comme un conquérant assuré de son impunité, depuis sa première visite à la duchesse s'apprêtant à rejoindre Dieu, jusqu'au constat de sa mort.
 


Jeanne Balibar, assez peu convaincante dans le premier tiers du film, finit peu à peu par s'imposer par sa grâce, sa fragilité et cette fêlure que la vie lui inflige et qu'elle laisse sourdre avec sensibilité, face à un Guillaume Depardieu, dont le jeu manque de sobriété parfois ou qui agace par une tendance au cabotinage. Par contre, les seconds rôles tenus par Bulle Ogier et Piccoli sont savoureux et tous deux s'en donnent à coeur joie avec autant de drôlerie que d'insolence. Un film qui n'emporte pas totalement l'adhésion, mais vous donne envie de replonger dans le chef-d'oeuvre balzacien.

 

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31 mars 2007 6 31 /03 /mars /2007 17:54
GETTING HOME de ZHANG YANG

                                 

Zhang Yang, né en Chine en 1965, prend une place de plus en plus importante parmi les metteurs en scène chinois et a déjà obtenu un nombre important de prix dans les festivals internationaux. Entre autres : le Prix de la Critique à Toronto, celui du Meilleur Réalisateur à San Sebastian, le Prix du Public à Thessalonique en 1999 et, ce, pour Shower, un film qui rendait avec humour et tendresse un hommage aux coutumes ancestrales de la Chine, particulièrement à celles qui entourent le rituel du bain. Enfin le cinéaste fut récompensé du Prix du Meilleur Réalisateur à Seattle et du Prix du Public à Rotterdam en 2000. Zhang Yang débuta avec Aiqing mala tang (Spicy Love Soup) qui sera un immense succès et lui permettra de produire ensuite un second film Shower, qui en sera un plus grand encore, puis en 2004 Xiangrikui  (Sunflower). Avec Shower, il nous narrait l'histoire d'un des derniers établissements de bains de Pékin avec la nostalgie que l'on devine et que l'on retrouve dans sa dernière production présentée à Deauville cet après-midi en sa présence : Getting home. Ce film retrace l'histoire de deux copains de chantier qui travaillent l'un près de l'autre depuis des années et aiment prendre une bonne cuite en fin de journée. Mais Liu va mourir soudainement usé par l'alcool et  Zhao, qui pensait mourir avant lui, fera ce qu'il avait demandé à son ami de faire pour lui, au cas où il décéderait sur les lieux de leur travail : le ramener dans sa terre natale pour y être inhumé et ne pas devenir, pour l'éternité, un fantôme errant. Ce retour va l'obliger à parcourir, le plus souvent à pied, des milliers de kilomètres à travers la Chine et revêtir le caractère d'une épopée pleine d'émotion, de drôlerie et de rebondissements, qui nous brosse, par la même occasion, un portrait subtil et savoureux de la Chine d'aujourd'hui. Il faut souligner que ce film plein de qualité, sait admirablement doser le pittoresque et le sensible, le tendre et l'ironique et bénéficie du jeu touchant d'un merveilleux acteur Zhao Benshan dans le rôle de Zhao. Il n'a pas cessé de me faire penser à Marcello Mastroianni par son naturel, son épaisseur humaine, la finesse de son jeu tout en demi-teinte. Cet acteur est infiniment bouleversant, sincère, chaleureux dans ce rôle d'un homme bon plongé dans un monde qui ne l'est pas, car qu'est-ce que ce film, sinon un regard nostalgique adressé à une humanité en train de s'anéantir dans le bruit, la confusion d'une société moderne prise dans une accélération un peu folle et qui ne sait plus guère respecter ses traditions, ses usages, ses valeurs et ses devoirs à l'égard des autres ? On pourrait rapprocher Getting home du  Mariage de Tuya, tant la vision de ces deux auteurs est proche et respectueuse de la sagesse, de la droiture de nos anciens, ce quelque chose qui n'est déjà plus que de l'ordre de la mémoire. A entendre les applaudissements et les bravos du public lorsque la lumière est revenue dans la salle, je crois ne pas avoir été la seule à être touchée par ce beau film.

 

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30 mars 2007 5 30 /03 /mars /2007 22:31
LE MARIAGE DE TUYA de WANG QUAN'AN

Avec ce troisième film, Wang Quan'an s'attache à dépeindre la réalité sociale dans la Chine contemporaine, particulièrement en Mongolie, d'où sa mère est originaire. On sait que cette région est menacée par l'expansion industrielle et que, pour s'approprier les terres, l'administration locale oblige les bergers à les quitter en les persécutant de toutes les façons possibles. Aussi, avant qu'il ne soit trop tard, le réalisateur a-t-il souhaité leur consacrer ce long poème silencieux dans lequel il rend hommage à un style de vie en voie de disparition. L'opus se déroule ainsi au coeur de la Mongolie dans un paysage aride, un plateau entouré d'âpres montagnes. Là, vit, du produit de son troupeau de moutons, une famille dont le mari est devenu impotent à la suite d'un grave accident. Alors qu'il tentait de creuser un puits, il a perdu l'usage d'une de ses jambes, ce qui le prive de participer aux innombrables taches que sa jeune femme Tuya se doit d'accomplir seule : garder les moutons, subvenir aux besoins d'eau qu'elle va chercher trois fois par jour à des kilomètres de son domicile, se consacrer à l'éducation de ses deux enfants, au bon état de la maison etc. Aussi son mari, affecté par l'état de fatigue de sa femme, lui propose-t-il de divorcer, de façon à ce qu'elle puisse refaire sa vie avec un homme jeune, capable de faire face à ses besoins. Celle-ci finit par accepter, à la condition que son vieux mari Bater reste vivre auprès d'eux. Ce qui va compliquer la situation et décourager quelques-uns des prétendants. La vie de cette famille pauvre, isolée, au bord de la misère, nous est contée avec beaucoup de poésie, sans céder au mélodrame, car l'humour, la tendresse sont toujours présents. On partage, dans les moindres détails, cette existence fruste, ces rapports humains dignes et empreints d'une sagesse millénaire. Ainsi, lorsque Bater se retrouve seul dans un foyer et s'ouvre les veines, sa femme, revenue d'urgence auprès de lui, le chapitre à ce propos en lui disant que la vie est un bien trop précieux pour que l'on puisse en user selon son humeur, en cédant à la tentation d'en faire une sorte de chantage. Le dépaysement est également total pour les spectateurs que nous sommes : ces vies sont si loin des nôtres, si lentes et austères que nous sommes subjugués par un récit sans complaisance, éclairé par la sobriété du jeu des interprètes, dont l'émouvante Yu Nan dans le rôle de Tuya. Elle est belle, d'une beauté sans artifice qui lui sied, touchante par sa force, sa fierté, son désir de rester elle-même envers et contre tout, sa noblesse naturelle. Les sentiments qui animent ce film sont profondément authentiques et sincères : ils nous réconcilient avec la nature humaine qui trouve ici, dans cette solitude, une grandeur poignante. Un très beau film qui démontre la diversité du cinéma chinois et nous prend à témoin de l'inexorable évolution de notre société qui semble trop vite oublier d'où elle vient, à défaut de savoir où elle va.

 

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30 mars 2007 5 30 /03 /mars /2007 11:11

  Before-We-Fall-in-Love-Again-_-affiche.jpg


Hier, 29 mars 2007, à 19 heures, le Festival du Film Asiatique de Deauville posait un regard admiratif sur un jeune metteur en scène malais, déjà connu des spectateurs deauvillais, pour avoir présenté en 2003 son second film Room to let. Né en 1973, James Lee a d'abord étudié les arts graphiques avant de devenir comédien et se consacrer ensuite à la mise en scène de théâtre. Cinéaste autodidacte, James Lee a réalisé en 2001 son premier long métrage Snipers, un thriller. Il tourne l'année suivante Room to let et en 2004 The Beautiful Washing Machine en Mini DV qui remportera de nombreuses récompenses dont le Prix du Meilleur film et le Prix de la Critique du Festival de Bangkok 2005. Avec Before We Fall in Love Again, il affirme avec éclat son talent et permet au cinéma malais de prendre une place désormais indiscutable au sein du cinéma asiatique, qui était jusqu'alors quasi réservé à la Chine et à la Corée du Sud. Mais voilà qu'apparaissent maintenant le Japon, la Thaïlande et la Malaisie, véritable enrichissement pour le cinéma international.

 

Avec Before We Fall in Love Again, James Lee se propose d'évoquer la disparition comme thème de réflexion. Ce sera, en l'occurrence, celle d'une femme qui quitte son mari non pour rejoindre un amant mais provoque, de ce fait, une rencontre étrange entre deux hommes. Exploration minimaliste d'un amour par son double. James Lee se livre ici à une relecture frondeuse de Wong Kar-Wai (ne faut-il pas tuer le père pour s'affranchir et exister ?), en plaçant la notion du double au coeur de son film, en un puzzle étonnant qui fait un curieux usage du temps, grâce à un montage savant et judicieux. Chacun , à leur manière, Chang et Tong explorent l'absence de la femme qu'ils aiment l'un et l'autre et qu'ils ont déçue. Curieux clin d'oeil aux problèmes que pourraient poser le clonage. Usant de l'épure, James Lee surprend par un final plein d'un humour grinçant. S'il filme la transparence de l'adultère face aux conventions du mariage avec une grâce certaine, il n'en fait pas moins l'allégorie de la désillusion. Satire virulente à l'adresse d'une société vouée toute entière à la contrition et à l'obligeance, hommage en forme de pied de nez à Wong Kar-Wai - le grand cinéaste chinois, auteur entre autres chefs-d'oeuvre de Les Cendres du Temps, Chungking Express et  In The Mood for Love, ce qui lui valut d'être surnommé le Tarantino chinois - et critique tout aussi virulente à l'égard des hommes qui ne savent plus assumer leur rôle d'homme, inversion d'un monde en plein désarroi. Un film subtil et surprenant, d'une tonalité très personnelle, qui laisse présager un bel avenir à cet auteur.

                 


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  • : LA PLUME ET L'IMAGE
  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


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