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22 mai 2014 4 22 /05 /mai /2014 09:21
LE DICTATEUR de CHARLIE CHAPLIN

 

Charlot, petit barbier juif du ghetto de Tomanie, ressemble à s’y méprendre à Hynkel le dictateur qui terrorise le pays et rêve d’annexer l’Austerlich. La charge contre Hitler est stupéfiante de réalisme et Chaplin ne se prive pas de faire feu de tout bois : la parodie, la caricature, le burlesque, mais également l’émotion pure, sont comme une véritable machine de guerre qui ont mis les nazis en furie et délivrent un message d’un humanisme bouleversant. Le rire est ici l’arme ultime contre la barbarie et la folie des hommes. Avec ce qui constitue alors son premier film parlant, Chaplin fait œuvre de pamphlétaire avec une intuition de visionnaire telle que faisant un pied de nez mémorable à toutes les dictatures, il octroie à son film une actualité permanente. Au cours de ses œuvres précédentes, Chaplin n’avait cessé de pourfendre avec un humour tendre et décapant les injustices qui atteignent l’homme dans son honneur et sa dignité. Ainsi a-t-il créé le personnage de Charlot, reconnaissable entre tous, et l’a-t-il imposé au monde entier avec un talent qui confère très souvent au sublime. Tour à tour, vagabond sans travail à l’heure des grandes dépressions économiques ou bien ouvrier écrasé par les machines de l’industrialisation forcée comme dans Les temps modernes, il tente à chaque fois de se rebeller contre l’ordre établi et les excès du capitalisme en une vision géniale qui lui assure aujourd’hui encore sa modernité. Jusqu’à son dernier souffle, Chaplin conservera intact son pouvoir d’indignation et de contestation envers des pouvoirs qui ne protègent qu'insuffisamment les plus faibles. Ayant connu la misère la plus totale, il savait de quoi il parlait. Il demandait seulement à la société de ne point céder à l'inhumanité pour cause de profit et de ne jamais dépasser la règle du jeu du maître et du valet, du bourreau et de la victime.

 

Avec Le dictateur, qu’il commence à écrire dès 1936 et qui sortira sur les écrans en 1940, il passe du muet au parlant et propose une œuvre d’une intelligence rare et d’une force qui stupéfie par l’acuité de la charge et l’incroyable perception de ce qui est en train de se préparer pour le plus grand malheur de l’humanité. Le personnage de Hynkel, enragé de vanité et d'autoritarisme, sosie du petit barbier juif, est une trouvaille qui permet au pamphlet de virer à la caricature la plus percutante du 7e Art. Le face à face de ces deux personnages donne au film, non seulement son originalité, mais son impact incroyable sur le spectateur. Par ailleurs, Chaplin évite les pièges du sentimentalisme en saisissant tous les grotesques du dictateur confronté à la simplicité du barbier, à sa naïveté même, et nous propose, grâce à ces deux rôles assumés pleinement, une formidable prouesse d’acteur.

 

Le "clou" du film reste, bien évidemment, l'improvisation finale du petit barbier que sa ressemblance a fait prendre pour le führer. S’il fut un succès en son temps (le plus grand succès public de Chaplin), l'ensemble de la critique de l'époque  lui reprochera ce final autant sur le fond (trop humaniste pour certains, trop "communiste" pour d'autres !) que sur la forme, à cause du radical changement de ton du film au moment du discours - et la soudaine intrusion d'un message politique qui ne relève plus du burlesque. A ce moment-là, le barbier laisse la place à Charles Chaplin lui-même. Cette scène est extrêmement puissante, pleine de courage et de lucidité : une véritable allocution politique engagée. Ainsi Le Dictateur aura-t-il permis à Chaplin de se surpasser dans la satire burlesque et de signer une oeuvre d'une réelle audace, un véritable témoignage d'amour pour l'homme et la liberté et un pamphlet exemplaire contre toute forme de fascisme.


"Je suis désolé, mais je ne veux pas être empereur, ce n'est pas mon affaire. Je ne veux ni conquérir, ni diriger personne. Je voudrais aider tout le monde dans la mesure du possible, juifs, chrétiens, païens, blancs et noirs. Nous voudrions tous nous aider si nous le pouvions, les êtres humains sont ainsi faits. Nous voulons donner le bonheur à notre prochain, pas lui donner le malheur. Nous ne voulons pas haïr ni humilier personne. Chacun de nous a sa place et notre terre est bien assez riche, elle peut nourrir tous les êtres humains. Nous pouvons tous avoir une vie belle et libre mais nous l'avons oublié.

L'envie a empoisonné l'esprit des hommes, a barricadé le monde avec la haine, nous a fait sombrer dans la misère et les effusions de sang. Nous avons développé la vitesse pour nous enfermer en nous-mêmes. Les machines qui nous apportent l'abondance nous laissent dans l'insatisfaction. Notre savoir nous a fait devenir cyniques. Nous sommes inhumains à force d'intelligence, nous ne ressentons pas assez et nous pensons beaucoup trop. Nous sommes trop mécanisés et nous manquons d'humanité.

Nous sommes trop cultivés et nous manquons de tendresse et de gentillesse. Sans ces qualités humaines, la vie n'est plus que violence et tout est perdu.

Les avions, la radio nous ont rapprochés les uns des autres, ces inventions ne trouveront leur vrai sens que dans la bonté de l'être humain, que dans la fraternité, l'amitié et l'unité de tous les hommes.

En ce moment même, ma voix atteint des millions de gens à travers le monde, des millions d'hommes, de femmes, d'enfants désespérés, victimes d'un système qui torture les faibles et emprisonne des innocents.

Je dis à tous ceux qui m'entendent : Ne désespérez pas ! Le malheur qui est sur nous n'est que le produit éphémère de l'habilité, de l'amertume de ceux qui ont peur des progrès qu'accomplit l'Humanité. Mais la haine finira par disparaître et les dictateurs mourront et le pouvoir qu'ils avaient pris aux peuples va retourner aux peuples. Et tant que des hommes mourront pour elle, la liberté ne pourra pas périr. Soldats, ne vous donnez pas à ces brutes, à une minorité qui vous méprise et qui fait de vous des esclaves, enrégimente toute votre vie et qui vous dit tout ce qu'il faut faire et ce qu'il faut penser, qui vous dirige, vous manœuvre, se sert de vous comme chair à canons et qui vous traite comme
du bétail.

Ne donnez pas votre vie à ces êtres inhumains, ces hommes machines avec une machine à la place de la tête et une machine dans le cœur.

Vous n'êtes pas des machines.

Vous n'êtes pas des esclaves.

Vous êtes des hommes, des hommes avec tout l'amour du monde dans le cœur.

Vous n'avez pas de haine, sinon pour ce qui est inhumain, ce qui n'est pas fait d'amour.

Soldats ne vous battez pas pour l'esclavage mais pour la liberté.

Il est écrit dans l'Evangile selon Saint Luc « Le Royaume de Dieu est dans l'être humain », pas dans un seul humain ni dans un groupe humain, mais dans tous les humains, mais en vous, en vous le peuple qui avez le pouvoir, le pouvoir decréer les machines, le pouvoir de créer le bonheur. Vous, le peuple, vous avez le pouvoir, le pouvoir de rendre la vie belle et libre, le pouvoir de faire de cette vie une merveilleuse aventure.

Alors au nom même de la Démocratie, utilisons ce pouvoir. Il faut tous nous unir, il faut tous nous battre pour un monde nouveau, un monde humain qui donnera à chacun l'occasion de travailler, qui apportera un avenir à la jeunesse et à la vieillesse la sécurité.

Ces brutes vous ont promis toutes ces choses pour que vous leur donniez le pouvoir : ils mentaient. Ils n'ont pas tenu leurs merveilleuses promesses : jamais ils ne le feront. Les dictateurs s'affranchissent en prenant le pouvoir mais ils font un esclave du peuple.

Alors, il faut nous battre pour accomplir toutes leurs promesses. Il faut nous battre pour libérer le monde, pour renverser les frontières et les barrières raciales, pour en finir avec l'avidité, avec la haine et l'intolérance. Il faut nous battre pour construire un monde de raison, un monde où la science et le progrès mèneront tous les hommes vers le bonheur. Soldats, au nom de la Démocratie, unissons-nous tous !"

 

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LISTE DES FILMS DU CINEMA AMERICAIN & CANADIEN

 

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Charlie Chaplie, le vagabond de génie

 

 

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LE DICTATEUR de CHARLIE CHAPLIN
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30 avril 2014 3 30 /04 /avril /2014 08:44

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Joe Ransom (Nicolas Cage)  descend les bouteilles aussi vite qu'il brûle sa vie. Joe est peut-être irresponsable, il n'en est pas moins un travailleur acharné. C'est dans une forêt, où il est employé à abattre les arbres, qu'il rencontre Gary (Tye Sheridan), un adolescent de 15 ans. Pour Gary, l'enfant malheureux maltraité par un père ivrogne et paresseux, tout n'est pas perdu, il est encore temps pour lui d'emprunter le droit chemin, à condition d'échapper à l'emprise néfaste de son père Wade qui n'hésite pas à tuer pour voler. Joe, touché par la volonté et le courage du jeune garçon qui souhaite s'en sortir et échapper à l'emprise malsaine de son père, ainsi que sauver sa mère et sa soeur de ses lâchetés et brutalités, l'engage et, contre toute attente, l'adolescent et l'ancien taulard finissent par sympathiser. Le chemin de la rédemption, dans une petite ville du Sud, sera jalonné de soirées en solitaire, de coups de gueule, de bagarres avec des fous de la gâchette épris de vengeance ou de revanche, ainsi que de visites au lupanar local. Un climat certes oppressant et une violence toujours omniprésente dans un opus conduit avec une certaine rigueur malgré des longueurs dans la première partie et des scènes gore dont on pourrait fort bien se passer. Inspiré d'un roman de Larry Brown, le film nous montre une Amérique malade de sa brutalité, de son matérialisme, de sa pauvreté latente, de son absence d'idéal,  sans nous priver toutefois  - et c'est là sa qualité première - d'une lueur d'optimisme. 

 

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D'autant que les acteurs sont parfaits, tous habités par leur personnage et que Nicolas Cage fait là un retour remarqué sur le grand écran. Il s'investit totalement dans ce rôle en demi teinte où il apparait comme un mauvais sujet repenti, touché par une sorte de grâce et devenant spontanément un père de substitution pour l'adolescent en quête d'un avenir respectable. Et celui qu'il lui propose est empreint d'une vraie humanité et d'un esprit d'abnégation qui sort l'histoire de son ornière de frénésie et de perdition. Pour ce final lumineux et sobre, le film mérite notre intérêt et se singularise au coeur d'une production américaine d'une violence quasi insupportable qui tourne sur elle-même comme l'animal qui se mord la queue. Ce qui justifie pleinement l'accueil excellent qu'il reçut au 39e Festival du film américain de Deauville, ce dernier profitant de l'occasion pour rendre un hommage appuyé et enthousiaste à l'acteur principal  Nicolas Cage.

 

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15 avril 2014 2 15 /04 /avril /2014 10:09
APPRENTI GIGOLO de JOHN TURTURRO

On connait l’admiration de John Turturro pour Woody Allen, si bien que son désir de collaboration avec le célèbre et incontournable réalisateur américain  nous vaut aujourd’hui une comédie douce-amère qui n’a certes pas l’envergure des comédies du maître mais nous fait passer un agréable moment avec des actrices en grande forme et deux comédiens qui se donnent la réplique avec une complicité évidente.


Certes le résultat n’est pas un chef-d’œuvre, il y manque un rythme plus soutenu et surtout des dialogues plus percutants, mais l’ensemble reste plaisant à regarder, d’autant que les femmes sont belles à damner les saints et que les deux compères Allen et Turturro jouent sur le registre des moeurs avec une retenue pleine de délicatesse et de bonne humeur. Pas de scènes salées, mais une vision de la sexualité nimbée d’une touche de pudeur qui rend l’approche autrement plus fine que l’acte en lui-même ; pour un peu, on se croirait revenu aux années 60. Et pour le même prix, on nous offre une Sharon Stone plus sculpturale que jamais et une Sofia Vergara délivrée de tous tabous et suffisamment sexy pour rester dans les starting-blocks.

 

Cependant  la surprise de cette histoire où un libraire propose à son ami fleuriste, afin d’arrondir leurs fins de mois difficiles, d’offrir ses bons services d’amant occasionnel à des femmes friquées et esseulées, l’un devenant le mac de l’autre, est la prestation de Vanessa Paradis absolument délicieuse en veuve d’un rabbin ultra orthodoxe qui s’affranchit enfin de ses peurs et de ses inhibitions auprès de cet homme doté de chaleur humaine et de tact. Il est vrai que John Turturro n’a rien d’une bête de sexe et c’est l’intelligence du film de pianoter sur les touches de la tendresse plutôt que du vice et de ne voir en ces partenaires d’un jour ou d’un soir que les victimes de la solitude. Comédie de mœurs qui délivre un message certes simpliste sur le droit de chacun à goûter au plaisir, elle n’en n’égratigne pas moins la religion juive avec l’humour de bon augure dont a toujours usé Woody Allen. A ce seul détail, nous savons que son influence ne fut pas négligeable.

 

Dans son rôle de gigolo doux et rassurant, John Turturro est parfaitement crédible, tandis que Woody Allen en marlou sans scrupules et toujours prêt à délivrer la bonne parole est égal à lui-même et nous amuse sans en faire trop et en restant  le partenaire des enfants qui l’entoure, comme si cette paternité complaisante le lavait d’une partie de sa faute. Il y a toujours de sa part un clin d’œil qui allie les contraires de façon comique. Un film sans prétention, que l’on oubliera vite, mais qui, flirtant avec le vice n'en garde pas moins un peu de vertu

 

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APPRENTI GIGOLO de JOHN TURTURRO
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24 mars 2014 1 24 /03 /mars /2014 09:46
UN ETE A OSAGE COUNTY de JOHN WELLS

En famille, il arrive que l’on se soutienne, il arrive aussi que l’on se déchire à belles dents et avec une voracité d’où le cynisme n’est pas exclu. Suite à la disparition de leur père, un professeur, poète à ses heures, qui a choisi de se suicider à bord d’une barque au milieu d’un lac, les trois filles Weston se retrouvent, après plusieurs années de séparation, dans leur maison familiale. C’est là qu’elles sont à nouveau réunies avec la mère paranoïaque et lunatique qui les a élevées. A cette occasion, des secrets et des rancœurs trop longtemps gardés vont brusquement refaire surface…et avec quelle violence !

 

Ce huis-clos tragique et loufoque inspiré de la pièce de Tracy Letts n’est pas sans nous évoquer des œuvres comme Cris et chuchotements ou Sonate d’automne du cinéaste Ingmar Bergman et, plus récemment,  Carnage de Roman Polanski où les affrontements donnaient lieu à des scènes quasi tragiques. Chacun des personnages s’avançait cuirassé de haines et de faiblesses et se livrait à des dialogues d’une rare virulence et à des scènes de détresse, dès lors que le dévoilement mettait chacun d’eux en danger.

 

Ici, il s’agit principalement d’une mère et de ses trois filles confrontées en même temps à leur passé et à leur présent dans une ambiance de deuil qui exaspère les sentiments, ce, sur fond de frictions générationnelles. Car les parents ont eu un départ difficile, ont  obtenu ce qu’ils possèdent à la force du poignet, tandis que leurs filles, élevées dans la facilité, ont reçu nécessaire et superflu sans avoir à combattre. D’où les rancoeurs accumulées chez la mère et l’inconscience et la débonnaire insouciance des filles dont les seuls soucis sont ceux qu’elles se créent elles-mêmes. Cette comédie dramatique, fort bien orchestrée par John Wells, est un véritable règlement de compte accentué par l’amertume d’une mère droguée, en proie à un cancer de la langue, ce qui est un clin d’œil à ce que la langue peut avoir de pervers et de redoutable. Cette femme aigrie en veut également à une société qui s’autodétruit, à un monde où les adultes n’ont plus aucune conscience morale, où les enfants sont trop livrés à eux-mêmes et où chacun, ne pensant qu’à soi, s’isole dans son égocentrisme. A travers cette famille, c’est l’Amérique qui nous livre ses tourments, une société déstructurée qui se flagelle avec une sorte de complaisance paranoïaque et une efficacité redoutable, faisant de nous des témoins consentants, car les problèmes de l’Amérique ne sont-ils pas les nôtres ?

 

Ce lavage de linge sale est également un grand moment de théâtre, plus encore que de cinéma – c’est décidément à la mode que le théâtre s’invite à l’écran – mettant en scène un quatuor d’actrices magnifiques  avec en tête Meryl Streep, admirable dans un rôle où elle ose tout, face à une Julie Roberts étonnante, loin des comédies sentimentales qui ont fait sa réputation, sans oublier Juliette Lewis en jeune femme évaporée et Julianne Nicholson en femme sans caractère, fragile et désarmée. Ces actrices portent l’opus avec panache et leurs rivalités, l’ordonnance ou la dés-ordonnance de leurs natures font tout l’intérêt de ces duels successifs où personne ne finit par l’emporter, sinon la désillusion et le cynisme. Famille, je vous hais est sous-jacent tout au long de la projection, d’autant que le secours ne viendra que du dehors, la beauté silencieuse de la nature pour  Alexandra, l’aînée des filles, et les bras secourables de l’employée de maison indienne, soit l’étrangère, pour Violet, la mère. Pour les autres ce sera la fuite et sans doute l’oubli. Un film grinçant où tout s’oppose, même l’amour. Mais il y a les oiseaux en escadrille dans le lointain et la lumière qui filtre à travers les rideaux. Il arrive que l'on fasse sa vie avec ce qui vous manque.

 

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UN ETE A OSAGE COUNTY de JOHN WELLSUN ETE A OSAGE COUNTY de JOHN WELLS
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11 mars 2014 2 11 /03 /mars /2014 10:51
L'HOMME DES HAUTES PLAINES de CLINT EASTWOOD

                  

Venu de nulle part, un cavalier taciturne surgit dans le petit village de Lago en plein désert et découvre une population terrorisée par la prochaine sortie de prison de trois hors-la-loi. L'étranger, qui a abattu dès son arrivée trois hommes qui l'avaient provoqué, est aussitôt engagé pour défendre la ville. En échange de cette collaboration, il pourra demander tout ce qu'il souhaite, rien ne lui sera refusé.

 

Avec L'homme des hautes plaines (1972), son second film, Clint Eastwood  payait sa dette envers Sergio Leone qui l'avait tiré de l'anonymat en le faisant tourner dans un chef-d'oeuvre : Le bon, la brute et le truand. En effet, cet homme, tireur d'élite, qui débarque à Lago sombre et mal rasé, ressemble au personnage, qu'en tant qu'acteur, Clint interpréta sous la direction du metteur en scène italien. Mais la ressemblance s'arrête là, car Eastwood, avec ce premier western, fait oeuvre d'auteur. Revisitant à sa manière un thème classique, celui d'une ville écrasée par la peur et la couardise (on pense bien sûr au film  Le train sifflera trois fois), il nous fait passer de l'autre côté du miroir. Chez lui point d'héroïsme et de bons sentiments, on ne tire pas son mouchoir face à une réalité aussi froide et cynique. L'homme est un loup pour l'homme, aussi dans la lutte pour le pouvoir est-ce toujours le plus habile et le plus cruel qui emporte la mise. Nous sommes en plein coeur d'un jeu terrifiant où il n'y a aucune place pour une quelconque mansuétude. Violent, et néanmoins captivant, le film est admirablement joué par un Clint Eastwood obsédant et impénétrable, mis en scène par le même Eastwood avec rigueur et concision, qualités qui ne lui feront jamais défaut dans ses autres réalisations.

 

Ne parvenant pas à pardonner la médiocrité ambiante qui règne dans cette ville, l'étranger force les habitants à repeindre leur cité en rouge et nomme shérif le nain dont ils avaient fait leur souffre-douleur, ce qui prête à ce long métrage une atmosphère à la fois crépusculaire et fantastique, avec une touche de surréalisme très envoûtante. D'autant que Eastwood se plaît à laisser planer le doute sur l'identité de son cavalier. Est-il le propre frère du shérif Duncan, qui avait été assassiné par les trois bandits sous les yeux complices et apeurés des habitants, et qui revient se venger d'eux ? Est-ce l'ange de la mort lui-même venu à Lago pour rappeler à chacun sa responsabilité dans le meurtre ? Le mystère demeure. Mais il est vrai que l'arrivée de l'étranger bouleverse les habitudes de cette cité dont la population n'est composée que d'adultes - on ne voit pas d'enfants - liés entre eux par le secret d'une responsabilité criminelle collective. Aussi l'étranger prend-t-il plaisir, à la façon de l'ange exterminateur, à les humilier en les méprisant, en les obligeant à reconnaître pour shérif un être disgracié et à leur faire repeindre en rouge leurs propres maisons, rebaptisant la ville du nom de " Hell " qui signifie " Enfer ". Puis, après avoir tué ses adversaires par le fouet, la corde ou l'arme à feu, il repart comme il était venu dans un anonymat troublant, non sans avoir donné au shérif Duncan une sépulture décente dans le cimetière de Lago.


                  

Jouant des atouts d'une mise en scène flamboyante ( entre autre l'incendie final d'une partie de la ville ), d'une photographie splendide due à l'objectif de Bruce Surtees et d'une musique inspirée de celle d'Ennio Morricone, Eastwood ne se prive pas de manier à l'envi l'humour et la dérision et nous conte avec virtuosité l'histoire de cet homme seul, trahi par une ville impuissante mais faisant face, à la façon d'une parabole inscrite en rouge sang.

 

Pour lire l'article consacré à Clint Eastwood, cliquer  sur son titre :   

 

CLINT EASTWOOD - PORTRAIT

 

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L'HOMME DES HAUTES PLAINES de CLINT EASTWOOD
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25 février 2014 2 25 /02 /février /2014 09:36
LIMELIGHT de CHARLIE CHAPLIN

Calvero est un vieux clown solitaire. Ses spectacles n'ont plus de succès depuis longtemps, si bien qu'il ne sait plus quel sens donner à sa vie, lui qui a fait des représentations dans les plus fameuses salles du pays. Sa vie change quand il rencontre une jeune danseuse (Claire Bloom) qui a tenté de se suicider parce qu'elle ne peut plus danser. Il lui redonnera goût à la vie et en tombera éperdument amoureux, enfin il l’aidera à reprendre la danse et les spectacles avant de se retirer dans l’ombre pour y mourir. Limelight (Les feux de la rampe) aurait pu être le dernier film de Charles Chaplin mais le réalisateur en a encore tourné deux autres ensuite. Néanmoins celui-ci, sorti en 1952, sonne comme son testament. "A la fin, ce n’est pas Cravero qui est en train de mourir, mais Chaplin" - remarquait Bernardo Bertolucci. Et triple testament si l’on considère celui du clown, Cravero, dont le nom suffisait jadis à remplir les salles et qui doit aujourd’hui en changer pour décrocher de maigres contrats, puis d’un réalisateur, Chaplin, blessé par l’échec public de son film précédent Monsieur Verdoux loin du temps de Cravero et de Charlot et, enfin, celui d’un homme qui reconstitue en studio le Londres de son enfance et fait jouer sa famille pour travailler dans un contexte plus affectif. Car l’époque était rude pour Chaplin, victime plus que jamais de l’anticommunisme des Etats-Unis. La première de Limelight aura lieu à Londres et l’artiste sera fêté en héros national. L’émotion que dégage ce film est immense, bien que le public d’alors ne lui ait pas fait l’accueil qu’il méritait, à l’exception des Londoniens, ayant sans doute de la difficulté à reconsidérer Charlot en tant qu’acteur du parlant et non plus en mime comme autrefois, bien que cet opus ne soit pas bavard et que Chaplin s’exprime toujours en homme du silence par l’intensité de ses expressions et de sa gestuelle. A ses côtés, Claire Bloom est délicieuse de fraîcheur, danseuse délicate que Cravero caresse de son regard émerveillé. Leur duo fonctionne parfaitement et il de dégage de leurs personnages une tristesse poignante : celle du vieux clown arrivé au bout de son parcours et celle de cette jeunesse danseuse qui ne croit pas en sa bonne étoile et redoute les impitoyables feux de la rampe.

 

En grande partie autobiographique (le personnage de la jeune danseuse que sauve Cravero est notamment inspiré par sa mère Hannah et son premier amour), le film porte en lui une vision douloureuse de l’art de la scène, de même qu’une grande tendresse. Chaplin émeut, bouleverse, en rajoute peut-être trop par moments dans les sanglots et la morale, fait rire aussi, comme Cravero qui revit le temps d’une soirée de gala, durant laquelle son cœur fatigué s’éteindra, un raccourci de sa vie de clown burlesque et romantique. L’acteur, qui lui fait face ce soir-là, a été lui aussi une vedette du spectacle et son nom a également disparu des affiches : Buster Keaton. Pas de doute, Les feux de la rampe est bien, comme le souligne Bertolucci, "la recherche du temps perdu de Charles Chaplin".

 

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LIMELIGHT de CHARLIE CHAPLIN
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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 10:07
LA FUREUR DE VIVRE de NICHOLAS RAY

Après avoir emménagé avec sa famille à Los Angeles, le jeune Jim Stark (James Dean), 17 ans, s'inscrit à Dawson High School. Un soir, il est amené au poste de police pour ivresse sur la voie publique. Lorsque ses parents arrivent pour le récupérer, la situation familiale de Jim se révèle extrêmement conflictuelle. Son père (Jim Backus) essaye de le défendre, alors que sa mère, une femme autoritaire, entend imposer à son fils une éducation basée sur ses principes. Jim se sent non seulement incompris mais souffre de l'absence de force morale de son père face à une épouse dominante, ce qui provoque en lui un profond mal-être. Tout en essayant de s'intégrer au mieux parmi les étudiants de son nouveau lycée, Jim est impliqué dans une dispute avec Buzz Gunderson, chef de la bande qui fait la loi au sein de l’établissement. Alors qu'il tente de faire face à Buzz  (Corey Allen), il devient ami avec un garçon de 15 ans, John, surnommé Platon (Sal Mineo), qui était également au poste de police lors de la première scène. Après une visite au Planétarium où les jeunes gens assistent à un discours sur la fin de l'univers, Buzz défie Jim dans un combat au couteau dans lequel ils sont blessés tous les deux. Jim obtient cependant la considération de Buzz, qui lui propose de se mesurer à lui dans une course de voiture durant laquelle Buzz perdra la vie. Jim, paniqué et menacé par les comparses de Buzz, tente de chercher de l'aide auprès de la police, sans succès. Trouvant du réconfort auprès de Judy ( Natalie Wood ), ex-petite amie de Buzz, ils s’enfuient ensemble et se réfugient dans une vieille maison abandonnée, où ils sont bientôt rejoints par Platon. Mais lorsque les amis de Buzz les retrouvent, Platon leur tire dessus avec une arme dérobée à sa mère et disparait.


 

Retranché dans l'Observatoire, Platon se laisse convaincre par Jim et Judy de se rendre à la police, qui l'attend à l'extérieur. C’est au moment où il sort enfin de l'observatoire, qu’il est abattu par un agent de police. Les parents de Jim croient d'abord qu'il s'agit de leur fils, puisque ce dernier a prêté sa veste à Platon, mais ils retrouvent finalement Jim sain et sauf, en compagnie de Judy. Le film s'achève sur la promesse du père de retrouver son autorité paternelle, et la présentation de Judy à la famille Stark. Il est certain que ce film a fait date. On voit traité à l’écran, pour la première fois, la révolte d’une jeunesse contre l’autorité et l’établissement, de même qu’une violence larvée qui explose au grand dam de familles maladroites complètement dépassées par les événements. La fureur de vivre, film sorti en 1955, établit une sorte de frontière entre le classicisme de l’âge d’or hollywoodien et la modernité. Avec Géant et A l’est d’Eden, James Dean s’impose une fois encore dans une oeuvre culte et prouve son incroyable présence à l’écran et son charisme qui ont fait de lui une icône du 7e Art, insufflant au personnage de Jim sa force et sa détresse, ayant eu lui-même une enfance difficile. A ses côtés, la ravissante Natalie Wood qui, à l’époque jouissait déjà d’une incontestable notoriété, reste trop effacée et ne parvient pas à imposer son personnage de jeune fille libérée avec suffisamment conviction.

 

Dans ce récit solidement construit, où l’on voit une jeunesse fauchée dans sa fleur et une maturité à jamais blessée, nous assistons aux efforts tragiques que déploie un être marginalisé pour renouer avec la communauté qui l’a exclu. Ce thème était cher au cinéaste Nicholas Ray qui l’a repris dans Derrière le miroir, mais en sens inverse, puisque le malaise n’est plus celui d’un fils mais d’un père, au cœur d’une même quiétude urbaine, quiétude envisagée dès lors comme un enfer. Dès la première scène, nous sommes dans l’ambiance métaphorique : nous découvrons un adolescent recroquevillé sur le bitume dans une position fœtale, tenant un jouet contre lui, image signifiante de son refus de grandir, alors que la musique sombre de Leonard Rosenman souligne cette mélancolie poignante. Cet opus reste l’une des grandes réussites de Nicholas Ray, cinéaste controversé et surtout inégal dans sa production, capable, néanmoins, comme c’est ici le cas, de fulgurances  bouleversantes.

 

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LA FUREUR DE VIVRE de NICHOLAS RAY
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29 décembre 2013 7 29 /12 /décembre /2013 10:02

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C’est à la suite d’un voyage autour du monde durant lequel il s’inquiète des effets de la crise économique de 1929 que Charlie Chaplin écrit le scénario des Temps modernes. Après avoir rédigé une version définitive de son scénario, d’abord intitulé "Les masses", Chaplin commence un tournage marathon le 11 octobre 1931 dont le dernier tour de manivelle aura lieu le 30 août 1935. La première projection mondiale est organisée au Rivoli Theater de New York le 5 février 1936. S’ensuivirent alors trois grandes projections, respectivement à Londres, Hollywood et Paris. Malheureusement, le film reçoit un accueil mitigé, une partie de la presse reprochant à Chaplin une tentative de propagande des idéologies communistes.

 

Dès le générique, Chaplin affiche ses ambitions, non pas de construire un film consacré uniquement à Charlot mais de réaliser une satire prenant pour cible le modèle social américain. Ainsi le personnage qu’il interprète est-il un « factory worker » (un ouvrier d’usine) autrement dit un rouage auquel on a retiré toute forme d’humanité. Chaplin filme les hommes allant chercher un travail à l’usine comme les vulgaires moutons d’un immense troupeau. Ces premières images plantent le décor : les nouvelles aventures de Charlot seront fortement ancrées socialement avec une ambition politique, résumée dès les premières images, évoquant "Un récit sur l’industrie, l’initiative individuelle et la croisade de l’humanité à la recherche du bonheur", ce qui ne sera pas du goût de tout le monde.

 

Chaplin montre également les conséquences du travail à la chaîne sur la santé des ouvriers. Devenu fou, Charlot ne cesse de vouloir serrer des boulons, que ce soit ceux des pièces qu’il fabrique ou les boutons de la « grosse femme » qu’il croise dans la rue. Il finit par être interné dans un hôpital psychiatrique. Chaplin aborde ensuite les thèmes du chômage et de la pauvreté. « Le chômage est la question vitale. L’humanité devrait profiter de la machine. La machine ne devrait pas signifier la tragédie et la mise au chômage » - confiera Chaplin à une journaliste. ( "Charlot entre rire et larmes"  de David Robinson.)

 

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En effet, Charlot ne garde jamais très longtemps son travail. Il enchaîne les petits boulots : ouvrier dans un chantier naval, gardien de nuit ou serveur. Il n’est pas le seul personnage à souffrir de la crise. Dans le magasin, où il a été engagé comme veilleur de nuit, Charlot retrouve Big Bill, son camarade de l’usine, devenu voleur après la perte de son emploi. De même, la Gamine, dont le père est au chômage, vole des bananes et du pain pour nourrir sa famille. Le père meurt d’ailleurs tragiquement lors d’une manifestation. Charlot et elle rêvent d’une vie bourgeoise et sécurisante où le mari partirait le matin au travail et où la femme s’occuperait de la maison. Dans leur masure, la Gamine tente de mettre en scène cette vie rêvée en préparant un « festin » composé d’un sandwich et d’une boîte de conserve.


Le monde extérieur est si hostile que Charlot, emprisonné à plusieurs reprises, préfère rester enfermé pour s’assurer le gîte et le couvert. L’omniprésence de la police est un autre thème récurrent. Charlot, avec ou sans la Gamine, se fait arrêter cinq fois. Ces arrestations, avec la sirène qui retentit et le véhicule de police qui emmène Charlot, ponctuent le film et marquent symboliquement la fin d’une étape. Après l’espoir d’une vie meilleure, tout doit être reconstruit. La police, qui représente l’état, ne se manifeste que par son caractère répressif. Mais l’espoir n’abandonne jamais les deux héros convaincus qu’un jour ils trouveront enfin la sérénité et surtout que leur amour est leur rempart contre le malheur.

 

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"Les temps modernes" est, selon moi, le chef-d’œuvre absolu, l’œuvre d’un génie unique dans l’histoire du 7e Art, ce que l’on a fait de mieux dans la critique d’une modernité qui parvient à déshumaniser l’homme. Le rire le dispute à l’émotion toujours présente d’un Charlot qui sait les manier comme nul autre. Son comique n’a jamais été surpassé et semble défier le temps parce qu’il touche chacun de nous en nos points les plus sensibles et que la dérision y est en permanence une soupape sécuritaire. A côté de Chaplin infiniment touchant, il y a Paulette Goddard, la gamine, belle comme le jour, pleine de charme et insubmersible tellement la vie en elle est ardente et fraîche. Le couple qu’elle forme avec Charlot est l’un des plus marquants du cinéma et leurs silhouettes, s’éloignant sur la route du destin, n’ont cessé d’habiter l'imaginaire depuis plus de 70 ans.

 

Pour consulter l'article que j'ai consacré à Charlie Chaplin, cliquer sur son titre :
 

 

CHARLIE CHAPLIN, LE VAGABOND DE GENIE
 

 

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LES TEMPS MODERNES de CHARLIE CHAPLIN
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19 décembre 2013 4 19 /12 /décembre /2013 09:43
TITANIC de JAMES CAMERON

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Le 19 décembre 1997, un vendredi,  "Titanic", le film le plus attendu de la décennie, sort enfin sur les écrans américains, après moult péripéties raillées par la presse depuis des mois. Ce week-end là, le film rapporte 28,6 millions de dollars au box-office: c'est encourageant, mais pas spectaculaire. "Jurassic park - le monde perdu" a empoché 72 millions en trois jours cette même année. Mais quelque chose de miraculeux se passe : la majorité des critiques est subjuguée par la vision de Cameron et les premiers spectateurs sortent bouleversés des projections. Le bouche à oreille fonctionne et Leonardo DiCaprio devient une idole du jour au lendemain. Balayant  les lugubres prophéties, "Titanic" prend la tête du box-office pendant quinze semaines consécutives, devient un phénomène de société, conquiert le monde entier et s'impose en 1998 comme le plus gros succès commercial de tous les temps, encaissant 1,8 milliard de dollars de recettes. À la fois romance épique dans la tradition établie par "Autant en emporte le vent", film-catastrophe qui métamorphose un naufrage réel en spectacle jamais vu et accomplissement technologique sans précédent, "Titanic" a acquis, dès son lancement, le statut de classique. 

 

 

La tragédie du navire anglais a inspiré plusieurs films, dont une curieuse production nazie en 1943, un mélo en 1953 avec Barbara Stanwyck et un très applaudi drame anglais en 1959. Mais James Cameron, obsédé par la catastrophe, tenait absolument à en donner sa propre version. "C'est très personnel, expliquait-il. J'ai fait ce film parce que je voulais aller visiter l'épave. En 1995, j'ai fait douze expéditions sous-marines sur les lieux avant de commencer à tourner. Au total, j'y suis allé trente-trois fois. Extérieurement, le bateau est très abîmé, mais quand on y pénètre, on en découvre l'incroyable élégance et la grandeur, qui ont été protégées. J'ai ainsi trouvé un miroir intact dans une chambre. De telles choses créent une connexion. Explorer cette épave reste mon plus beau souvenir du film."

 

 

Pour Cameron, "si le récit du naufrage n'en finit pas de fasciner, c'est qu'il contient de multiples paraboles qui résonnent dans nos existences contemporaines. Les métaphores liées au Titanic se répètent à travers l'histoire. Ce que le film a rajouté, c'est une histoire d'amour sur fond de mort qui a parlé à tout le monde, qui a transcendé les barrières linguistiques, culturelles, et sociales". Il n'a pas tort, l'amour fou qui, dans son scénario, unit l'héritière Rose (Kate Winslet) et l'émigrant, sans le sou, Jack (Leonardo DiCaprio), est le coeur battant du film, auquel se sont identifiés tant de spectateurs.  L'aventure commença néanmoins dans le doute, ainsi que le rappelle Jim Gianopulos, coprésident de la Fox, qui finança le film avec Paramount: "Tout le monde, au studio, était perplexe. Tout particulièrement quand ils nous ont dit qu'ils allaient reconstruire le Titanic, grandeur nature, sur un plateau et qu'ils allaient aussi avoir besoin d'un réservoir gigantesque pour les scènes d'eau. Et, comme aucun studio n'était assez grand pour le contenir, qu'il faudrait construire un studio, et comme nous n'avions pas le terrain pour ça, qu'il faudrait en acquérir un... Nous voilà donc à acheter un plateau, à bâtir un bateau de 274 mètres de long et un réservoir pour le remplir avec des millions de litres d'eau. De quoi avoir peur ! "Titanic" n'a pu voir le jour que grâce à l'incroyable énergie et à la passion de James Cameron." 

 

 

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Passion, ego ou folie ? Le tournage éreintant, qui passe de cent trente-huit jours à cent soixante, est à la hauteur de la personnalité un peu mégalo de Cameron. Des techniciens sont littéralement épuisés, certains sont victimes d'accidents, au point que leur syndicat mène une enquête. Le réalisateur est perçu comme un impitoyable tyran: "Par moments, j'avais vraiment peur de lui" - avoua ensuite Kate Winslet. Un membre de l'équipe se venge en empoisonnant la nourriture et cinquante personnes se retrouvent à l'hôpital. Le budget atteint la somme inimaginable de 200 millions de dollars. La sortie en août est annulée. La Fox panique et tente d'imposer des coupes. Tout cela, bien sûr, sous le regard narquois des médias. "Mon pire souvenir, c'est quand nous étions en postproduction - raconte le metteur en scène. Tout le monde était contre nous, nous passions pour les plus grands nigauds de l'histoire, nous ne savions pas encore ce que nous avions entre les mains. J'ai accroché un rasoir au-dessus de ma table de montage pour me rappeler quoi faire si le film était raté. Mais la pression m'a poussé à ne pas faire de compromis  et à rendre le meilleur film possible." 

 

Parmi les éléments les plus iconiques du film, il y a, bien sûr, le couple Leonardo DiCaprio/Kate Winslet. James Cameron se souvient du casting : - "Je voulais une Audrey Hepburn et on a regardé toutes les jeunes actrices du moment - dit-il. Kate était sur la liste. J'ai visionné certains de ses films. Elle était surnommée "corset Kate" car elle semblait spécialisée dans les films en costumes. Je me suis dit: c'est un peu paresseux de la prendre juste pour ça. Nous avons filmé une audition, à l'ancienne, en 35 mm, dans un décor conçu pour. Et elle nous a complètement soufflés. On l'a engagée quasi immédiatement : nous avions notre ancre. Maintenant, il fallait trouver Jack. DiCaprio était sur la liste des finalistes. Baz Luhrmann m'a envoyé des scènes de Roméo+Juliette, qui n'était pas encore sorti et je l'ai trouvé très impressionnant. J'ai rencontré Leo pour un entretien dans mes bureaux, j'étais entouré de personnel féminin. Ces femmes ne voulaient pas quitter la pièce, je me demandais ce qui se passait : c'était le début de la Leomania ! Kate est venue pour faire une lecture avec lui, mais lorsque j'ai donné des pages de script à Leo, il a dit qu'il ne travaillait pas comme ça. Quand je lui ai dit que c'était ça ou rien, il a rechigné mais il l'a fait et il a été sensationnel. J'ai pensé : il me le faut absolument. Lui a alors décidé qu'il n'avait plus envie de faire le film ! Il voulait incarner un personnage torturé, ce que Jack n'était pas. J'ai passé deux mois à le persuader. À la fin, je lui ai dit que s'il pouvait jouer comme l'aurait fait un James Stewart trompeusement simple, il serait un grand acteur: il a alors compris le défi que représentait le personnage." 

 

 

Le 23 mars 1998, Titanic remporte onze Oscars. James Cameron a gagné son pari. Quand il brandit son trophée et s'écrie, à l'instar de son héros : "Je suis le roi du monde ! » - il est taxé d'arrogance. Oui, Cameron est arrogant. Mais il est aussi, cette année-là, le vrai roi du monde. En tout cas d'Hollywood. Et son "Titanic", oeuvre démesurée, adorée des uns et détestée des autres, n’en demeure pas moins  un monumental témoignage. 

 

 

 

 

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TITANIC de JAMES CAMERON
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17 décembre 2013 2 17 /12 /décembre /2013 09:51

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Laura est l'adaptation sur grand écran du roman policier éponyme rédigé par Vera Caspary en 1942, c'est-à-dire deux ans avant son adaptation cinématographique. 

La genèse de Laura fut particulièrement mouvementée. Après une longue mise au ban d'Hollywood, conséquence d'un profond conflit avec le producteur Darryl F. ZanuckOtto Preminger décide d'adapter le roman de Vera Caspary. Le temps est venu pour lui de mettre en œuvre son projet : Zanuck parti à l'armée, il est en effet revenu à la Fox avec l'accord de William Goetz, l'assistant du producteur. Mais le retour de Zanuck change la donne : celui-ci accuse Goetz de trahison et n'autorise la production de Laura qu'à la condition que Preminger officie derrière la caméra.

Otto Preminger débute l'écriture du scénario de Laura qui, surprise, plaît énormément à Zanuck. Nanti d'un budget amélioré, le long métrage se cherche maintenant un réalisateur : John Brahm (Jack l'Eventreur) et Lewis Milestone (L'Inconnu de Las Vegas) refusent l'offre, et c'est finalement Rouben Mamoulian qui est choisi par Zanuck. Les rushes sont catastrophiques aux yeux de ce dernier. Au pied du mur, presque à contrecœur, il se résout à confier les rênes du projet à Preminger, qui impose ses idées, reprenant le tournage à zéro et éliminant tous les plans tournés par Mamoulian. Un scénario rocambolesque qui allait révéler un cinéaste et donner naissance à un chef d’œuvre du septième art...
 

Le conflit ouvert entre le producteur Darryl F. Zanuck et le réalisateur Otto Preminger faillit faire une victime : l'acteur Clifton WebbZanuck était en effet fortement opposé à sa présence au casting de Laura en raison de son homosexualité, connue de tous. Mais Preminger eut le dernier mot et donna l'occasion à Clifton Webb de faire sa première apparition parlée à l'écran après dix-neuf ans d'absence et un début de carrière dans le cinéma muet.

 

Le choix original d'Otto Preminger pour incarner le personnage de Laura était l'actrice Jennifer Jones. Celle-ci refusa l'offre, tout comme Hedy Lamarr un peu plus tard, et le rôle fut finalement dévolu à Gene Tierney qui s’y révéla absolument sublime.

 

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Le film s'ouvre sur la phrase : « I shall never forget the week-end Laura died » (« Je n'oublierai jamais le week-end où Laura est morte »). Laura, qui travaillait dans la publicité, a été découverte abattue d'une décharge de chevrotine en plein visage dans le hall de son appartement. Le lieutenant McPherson enquête auprès de ses proches, principalement Waldo Lydecker, un journaliste et critique à la plume acide, qui a fait de Laura une femme du monde, et Shelby, un Adonis sans le sou qu'elle devait épouser. Au fil de ses recherches, où il apprend à la connaître, au travers des témoignages, de la lecture de ses lettres et de son journal intime, et subjugué par un tableau qui la représente, l'inspecteur tombe sous le charme de la défunte Laura.

 

Laura se nourrit donc de deux traditions de littérature policière, très en vogue dans les années quarante. Cette confrontation se trouve d’emblée incarnée dans le duel qui oppose Waldo Lydecker à Mark McPherson. Dans sa rhétorique et ses manières distinguées, Waldo évoque un certain type de roman policier anglais, dans lequel le mystère est résolu en huis clos grâce à la perspicacité du détective. L’enquête de Laura se déroule presque exclusivement en intérieurs, dans de luxueux appartements décorés avec faste. Cette omniprésence des intérieurs, conjuguée à une concentration du temps et à un nombre limité de personnages, montre l’influence directe du théâtre dans lequel Otto Preminger a fait ses débuts à Vienne et aux Etats-Unis. Par ailleurs, Clifton Webb est un acteur qui a connu la gloire sur les planches de Broadway avant de commencer une carrière à Hollywood. C’est l’écrivain et poète Samuel Hoffenstein qui a façonné le personnage de Waldo Lydecker, dont les répliques savoureuses se heurtent à la rudesse de celles de Mark McPherson.

 

Ce policier dur à cuir, le chapeau vissé sur le crâne, la mâchoire serrée, la cigarette au bec et vêtu d’un long imper beige à la Humphrey Bogart se caractérise  par ses manières grossières et ses propos machistes. Cependant, le lieutenant se révèle bien plus complexe qu’il n’y parait : il passe d’une posture d’enquêteur à celui d’amant passionné. A l’inverse, Waldo cache ses pulsions meurtrières envers les femmes derrière une galanterie de façade. Le journaliste est d’ailleurs un personnage ambivalent à plus d’un titre. Sa jalousie dissimule une identité sexuelle ambigüe. S’il veut mettre hors-jeu les amants de Laura, c’est parce qu’ils sont « beaux » et « musclés ». Son manque de virilité, qui l’empêche de posséder totalement Laura, le conduit en définitive à la tuer. A la fin, il lui avoue qu’elle est la meilleure partie de lui-même. En appuyant sur la gâchette du fusil, il chercherait donc à prendre définitivement possession de celle qu’il considère comme sa création, en plus de s’affirmer en tant qu’homme. Troisième protagoniste masculin, Shelby Carpenter se distingue par sa faiblesse de caractère et ses mensonges à répétition. Ce personnage à la forte carrure sert avant tout à brouiller les cartes dans le triangle amoureux qui se forme autour de Laura et à rendre plus complexe l’intrigue policière.
 

 

A l’image de la personnalité ambivalente de Mark McPherson, tous  les codes  sont déréglés : les scènes attendues du genre - la course poursuite sous une pluie battante, l’interrogatoire musclé avec une lampe aveuglante - sont seulement esquissées, voire détournées. En fait, l’intrigue tient bien plus du huis clos policier cher à Agatha Christie. Otto Preminger se montre très habile dans l’utilisation d’espaces souvent surchargés d’objets. Comme dans les enquêtes d’Hercule Poirot, ceux-ci possèdent une signification particulière et aident à la résolution du crime. Dès le premier et impressionnant plan séquence, qui plante le décor avec brio, la voix off met l’accent sur la pendule. Celle-ci est mentionnée à deux autres reprises par Waldo qui, comme dans un jeu, aiguillonne le détective et le spectateur vers la solution de l’énigme. La pendule a d’ailleurs une symbolique intéressante. Elle met en valeur deux thématiques essentielles du film noir : le timing, donnée déterminante dans la réussite d’un meurtre, et la fatalité, centrale dans les tragédies mettant en scène des relations amoureuses à sens unique. Avec sa dernière tirade très théâtrale, Waldo Lydecker se transforme en effet en héros tragique qui a échoué dans sa quête d’amour éternel avec Laura. Quant à Mark McPherson, son attrait quasi-fétichiste pour les objets appartenant à la défunte est révélateur de son désir obsessionnel pour la jeune femme. Ceux-ci ne sont donc pas dotés d’une unique fonction explicative, mais permettent également de tisser des liens fort entre les diverses séquences narratives.
 

 

Les relations entre les êtres sont dominées par le mensonge et la manipulation. Journaliste de profession, Waldo Lydecker est un expert dans la déformation des faits. L’histoire est introduite à travers son point de vue au moyen d’une voix-off subjective. En tant que puissance omnisciente qui cherche à tout contrôler, Waldo apparaît comme un double fictif du cinéaste. Il bouge ses pions, modèle Laura comme une star, anticipe le déroulement des événements, met en scène les coups de théâtre, notamment celui à l’origine de la première rupture entre Laura et Carpenter. Le premier tiers du film nous est conté à travers son regard. Au cours du flashback relatant l’ascension de Laura dans la société, les rapports de force entre les personnages, signifiés à travers leur disposition précise dans chaque plan, permettent d’interpréter ce qui aurait pu pousser les deux principaux suspect à tuer Laura : la jalousie dévorante pour Waldo et la honte du rejet pour Shelby. Après le récit de Waldo à Mark, le point de vue glisse de l’un à l’autre grâce à un léger zoom sur le visage du lieutenant. Le spectateur suit alors Mark McPherson dans son enquête, qui se transforme en quête de la femme désirée. Se placer du point de vue des personnages permet au scénariste de ne pas révéler plus d’informations que ce que savent déjà Waldo Lydecker et le détective. Otto Preminger peut alors manipuler à sa guise le spectateur, en ménageant un coup de théâtre de taille : la résurrection de Laura, celle-là même dont on annonçait la mort dès la première phrase du film. 

 

Avant ce mystérieux retour, elle n’existait qu’à travers le regard des trois hommes qui la convoitaient. La beauté photographique du portrait qui orne le salon de son appartement et le charme romantique du thème musical qui lui est associé font d’elle une véritable icône cinématographique, toujours désirée après sa mort. Dans la manière de représenter le corps et le visage de la femme, le film noir a participé à forger la dimension iconique des actrices d’Hollywood. Ici, Laura Hunt n’est même pas encore apparue en chair et en os qu’elle est déjà une source de fantasmes pour les hommes. L’éternel leitmotiv d’Eros et Thanatos transperce alors irrémédiablement l’écran. Son appartement est comme un mausolée où viennent se recueillir ses anciens et futurs amants, qui ne trouvent pas meilleur endroit pour converser que sa chambre à coucher. Dès le début du film, Mark s’étend mine de rien sur le lit de Laura : il ne l’a encore jamais vue mais succombe déjà au vent de passion qui souffle autour de la jeune femme. Peu à peu, il pénètre son intimité en s’appropriant par le toucher et le regard les objets qui témoignent de sa beauté et de sa sensualité. La séquence où il entre de nuit dans l’appartement de la victime est matinée d’onirisme : la frontière entre le rêve éveillé et la réalité est mince lorsque Laura Hunt, fantomatique dans son imperméable gris pâle, le surprend en train de dormir. Cette fragile frontière est symbolisée par le portrait de Laura qui trône entre les deux personnages. De femme rêvée, elle devient une femme réelle et humaine.

 

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Laura est un pôle magnétique qui relègue les autres femmes au second plan. Dans sa carrière de publiciste, elle a connu l’ascension fulgurante, si bien que Laura est un film qui questionne sur la place de la femme dans une société traditionnellement dominée par les hommes. Dénigrée par Waldo au cours de leur première rencontre, elle parvient à inverser la situation et prend le dessus sur ce personnage hautain, qui en retour la façonne selon son bon goût, tel Pygmalion et sa Galatée. Admirée pour sa beauté mais aussi pour son intelligence, elle s’impose vite comme une figure indépendante et transgressive, qui n’hésite pas à désobéir. « Je n’aime pas qu’on me donne des ordres », rétorque-t-elle à Mark McPherson qui s’étonne qu’elle ne se soit pas pliée à sa volonté. Bien que séductrice et manipulatrice, Laura ne correspond pas totalement au prototype de la femme fatale. Si elle ment au lieutenant, c’est à des fins vertueuses, puisqu’elle croit Carpenter innocent. Mais pour la conquérir, le détective est obligé de l’amener sur son propre terrain, l’interrogeant dans une salle dont le dépouillement contraste avec le luxe de son appartement où les nombreux miroirs ne renvoient qu’une image édulcorée de la réalité. Lorsque le lieutenant consent à éteindre les projecteurs braqués sur son visage, aveuglé comme celui d’une femme qui n’assume plus son statut d’icône, la vérité peut enfin surgir et les masques tombent. Dans la manière de confronter ses personnages, Otto Preminger active certains leviers du huis clos. Très mobile, la caméra élimine progressivement dans chaque scène les distances entre les personnages, au fur et à mesure que la tension monte, à l’image des petites billes du jeu de Mark qui finissent par s’entrechoquer au moindre déséquilibre.

 

Laura est une pièce maîtresse dans l’œuvre d’Otto Preminger, non seulement parce que le film lance pour de bon sa carrière à Hollywood, mais aussi parce que le cinéaste réutilisera à plusieurs reprises le leitmotiv du crime passionnelPar son dispositif narratif innovant et la représentation de la femme qu’elle véhicule, Laura est une pierre angulaire du film noir. La manipulation des points de vue, l’onirisme et les nombreux coups de théâtre s’accompagnent d’une mise en scène dont toute l’intelligence se manifeste dès le plan-séquence introductif. Mais l’influence de Laura dépasse le simple cadre du film noir.  On en retrouve de nombreux motifs dans la filmographie de Joseph L. Mankiewicz  par exemple : l’utilisation du portrait dans L'Aventure de Mme Muir, la manière de dépeindre la femme dans Eve et  La comtesse aux pieds nus. A plus d’un titre, Laura est une œuvre incontournable dans le cinéma américain, car Otto Preminger a su dépasser les modèles dont il s’est inspiré pour réaliser un film d’une puissante modernité. 

 

 

 

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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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Texte Libre

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LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


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