Mathias, la cinquantaine, un new-yorkais divorcé et sans ressources, débarque à Paris pour vendre la maison qu’il a héritée de son père. Il découvre alors que ce magnifique hôtel particulier du Marais est habité par une vieille dame de 92 ans, Mathilde et par sa fille Chloé. Un hôtel particulier que Mathilde avait cédé autrefois en viager à son père, coutume typiquement française que ne comprend évidemment pas cet Américain pragmatique, qui, non seulement se retrouve dans l’obligation de devoir payer une rente mais dans l’impossibilité de vendre son bien. L’argument de cette pièce du dramaturge Israël Horovitz est excellent mais le traduire ensuite, et pour son premier coup d’essai derrière une caméra, en film, est une autre affaire. Le résultat est un opus bavard et passablement ennuyeux que trois excellents comédiens ne parviennent pas à rendre vraiment ni attractif, ni émouvant.
Le Paris décrit est celui d’un touriste lambda sans grande imagination et surtout le scénario manque de rebondissements et se déroule selon une construction trop linéaire qui aurait mérité quelques flash-backs pour y gagner un sursaut d’animation. Là, il s’agit simplement d’une pièce filmée, d’un quasi huis clos où chacun des protagonistes dévoile ses douleurs secrètes, ses ratages, son mal de vivre et ses désillusions. Et cela est long, assez terne dans le narratif. On y voit, pour nous convaincre de sa douleur, un Kevin Kline monologuant une bouteille de vin rouge à la main pendant d'interminables tirades qui sont trop banales pour susciter une véritable adhésion. Cependant, les trois acteurs ne manquent pas de talent et sauvent le film du désastre grâce à la finesse de leurs expressions, à une sorte de dévoilement qui parfois se teinte d’une lichette d’ironie. Il y a Kristin Scott Thomas, coincée entre une enfance triste et une maturité bancale, sans éclat et sans passion, une Maggie Smith comme toujours merveilleuse de présence et d’expressivité, surtout lorsqu'elle laisse deviner qu'elle est en train de dire le contraire de ce qu'elle pense - et qui, nous lisant le code pénal, parviendrait encore à nous faire sourire et à nous séduire, et Kevin Kline, dans le rôle de Mathias, qui se débat dans une suite de situations où il prend simplement la mesure de lui-même et de ses échecs, résultat d’une enfance désastreuse où il a vu sa mère, délaissée par un mari volage, faire plusieurs tentatives de suicide jusqu’à ce que la dernière l’emporte définitivement ad patres. Mais ces longs monologues, bien que non dénués d’intérêt tant ils expriment la douleur des enfants face aux inconséquences de leurs parents, à leur inconscience et à leur égoïsme, méritaient d’être illustrés par des images, n’est-ce pas la vocation du cinéma d’imager un propos, et c’est bien pourquoi le bât blesse : Horovitz filme sa pièce sans l’adapter aux exigences du 7e Art.
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