Sanglé dans son costume de hussard d’un rouge flamboyant, la moustache frétillante et le sourire narquois, on comprend vite que ce héros de pacotille va nous la jouer sur le ton du vaudeville truculent et que tout, dans sa nature, est fait pour la flagornerie et la filouterie les plus excentriques et les plus excessives. Dans la peau de ce capitaine Neuville, soldat en partance pour une guerre napoléonienne et laissant derrière lui une fiancée inconsolable, Jean Dujardin endosse une nouvelle fois les habits d’un de ces personnages qu’il affectionne et dont le second degré et le ridicule sont assumés dans l’emballage d’une forfaiture troussée de la façon la plus perfide. Sauf qu’on se trouve cette fois sous l’Empire, dans une comédie en costumes, dont le ton, le rythme et les dialogues ne sont pas sans évoquer ceux de Jean-Paul Rappeneau ou de Philippe de Broca, d’autant que ce personnage sans scrupules va devoir affronter une jeune femme (la délicieuse Mélanie Laurent) qui assume son indépendance d’esprit et son célibat avec une audace plus proche de notre XXIe siècle que de l'Empire, si bien que ce décalage entre le passé et le présent n’est pas sans donner un peu de sel à cette comédie qui, sans cela, aurait vite sombré dans le conventionnel et le banal.
Derrière les apparences du militaire sûr de lui et portant beau, Neuville est un homme lâche et hâbleur qui s’empresse d’oublier la promesse faite à sa fiancée de lui écrire tous les jours. Face au désarroi de celle-ci, Élisabeth, sa sœur aînée, n’a d’autre choix que d’inventer une fausse correspondance et de parer le militaire de faits d’arme et d’exploits admirables puis, la campagne d’Autriche étant achevée, de lui inventer un avenir vers des terres lointaines où elle suppose son existence menacée par toutes sortes de dangers rocambolesques.
De retour, le capitaine déserteur va jouer à qui perd gagne avec Elisabeth qui ne peut désormais plus détruire son savant montage épistolaire sans dénoncer sa propre imposture, aussi ce jeu de fléchette prête-t-il à cette comédie une joyeuse amoralité et assure-t-il ce divertissement d’un ton léger et plaisant. Certes on passe un moment agréable dans ce décor raffiné, au milieu d’une société aimable, mais il manque toutefois un grain de folie à ce marivaudage trop appliqué, trop peu subversif, où les situations s’enchevêtrent sans aller jusqu’au bout de leur ridicule malgré des acteurs excellents qui étaient disposés, sans nul doute, à oser davantage. En effet, Jean Dujardin a toujours assuré avec brio les rôles de fanfaron et Mélanie Laurent a toujours su s’imposer avec grâce et intelligence, de même que les seconds rôles sont eux aussi bien campés et donnent une impression très juste de la facilité avec laquelle une petite société conventionnelle peut facilement se laisser duper et arnaquer par un filou sans foi, ni loi. Se regarde sans déplaisir mais sans enthousiasme non plus. Est-ce un peu trop salé ou pas assez poivré ?
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