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31 mars 2009 2 31 /03 /mars /2009 08:42
COUP DE TORCHON de BERTRAND TAVERNIER

      
L'AOF en 1938. Le petit village de Bourkassa (Oubangui) a pour unique fonctionnaire d'autorité Lucien Cordier ( Philippe Noiret ), qui passe, aux yeux de ses administrés et de la communauté européenne, pour un incapable et un parfait cocu. Mais le pleutre va se transformer  - sans que l'on sache très bien quelle en est la raison -  en ange exterminateur, persuadé qu'il est investi d'une mission divine. Il se met alors à abattre froidement plusieurs membres de son entourage, blanc et noir. Ce carnage colonial prélude en mineur, et sur le mode bouffon, à la sanglante hécatombe qui va bientôt ravager l'Europe.

 

Bertrand Tavernier a toujours travaillé au coup de coeur et, de ce fait, s'est attelé successivement à des registres divers, aussi bien à une intrigue policière, à une fresque historique, à un fait criminel du siècle dernier dont il a tiré une sorte de western à la française. Son domaine d'élection, par-delà la diversité des sujets abordés, paraît être la farce tragique ( comme Renoir parlait de "drame gai" ), à grand renfort d'effets baroques, alternant avec des plages de mélancolie ( Un dimanche à la campagne ). Quand on lui demandait de caractériser  Coup de torchon,  il s'en tirait par une boutade en parlant de comédie métaphysique ou bien en jouant avec les titres de ses films précédents -  c'est l'histoire du fils du Juge et de l'Assassin qui, à force de voir la mort en direct, décide de prendre une Semaine de vacances !  En souvenir de Prévert, dont l'ombre tutélaire plane, on pourrait sous-titrer cette murder party sur fond d'épopée africaine L'affaire est dans le sac.



Typiquement français par son cadre ( le monde colonial à la veille de la Seconde Guerre mondiale ), ses personnages et son esprit anarchisant, cet opus n'en témoigne pas moins de l'admiration de son auteur pour la littérature et le cinéma américain : le thème est d'ailleurs emprunté à un roman de Jim Thompson. Le cinéaste a transposé l'action et la typologie des Etats-Unis dans un milieu européen, comme il l'avait déjà fait pour Simenon dans son premier film  L'horloger de Saint-Paul  ( 1974 ). On y gagne une fable intemporelle sur la débilité humaine, la fragilité des esprits et des coeurs, les pulsions incontrôlées des êtres, tout cela empreint d'une féroce jubilation auquel le personnage, interprété par Philippe Noiret, stupéfiant d'ambiguïté, participe beaucoup. Le Bien et le Mal c'est pareil, ça sert pas beaucoup par ici, ça rouille, ça doit être le climat - soliloque le héros, mélange de Don Quichotte et d'Ubu roi. Tous les acteurs méritent d'ailleurs d'être cités - Stéphane Audran et Isabelle Huppert, Jean-Pierre Marielle et Guy Marchand, tant ils contribuent à créer l'atmosphère étouffante et poisseuse du film, mélange relevé et âcre d'humour noir et de farce cruelle, brûlot anachronique qui s'achève sur une pirouette et laisse entendre - selon Alexandre Trauner - que la justice divine est sans doute incompatible avec les idéaux humains.


Pour lire les articles sur Philippe Noiret, Stéphane Audran et Isabelle Huppert, cliquer sur leurs titres :



PHILIPPE NOIRET - PORTRAIT        

ISABELLE HUPPERT - PORTRAIT         

STEPHANE AUDRAN - PORTRAIT

 

Et pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA FRANCAIS, cliquer sur le lien ci-dessous :

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA FRANCAIS

 

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COUP DE TORCHON de BERTRAND TAVERNIER
COUP DE TORCHON de BERTRAND TAVERNIER
COUP DE TORCHON de BERTRAND TAVERNIER
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commentaires

L
Pour faire l'adaptation du chef d'oeuvre de Thompson, Tavernier a une idée de génie : transposer l'histoire originelle qui se passe dans le sud américain des années 50 à l'Afrique Coloniale française des années 30. D'un seul coup son film prend une connotation politique. L'autre coup de génie, le casting évidemment. Noiret est parfait, mais Eddy Mitchell dans le rôle de Nono est sublime.
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E
Je l'ai revu il y a peu à la télevision belge et le guettais, un régal donc!!!
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A
Je crois que les deux films dont vous parlez sont programmés non loin de chez moi et que je pourrai les voir. Quand le cinéma français nous donne d'agréables productions, il ne faut pas s'en<br /> priver. Pour les deux et dans l'ensemble la critique est unanime.
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A
Bonjour Armelle, je garde un bon souvenir de ce film et de l'ensemble des acteurs comme vous avez raison de le souligner. Avec le Grand Philippe Noiret. Cet homme reste, en ce qui me concerne, un<br /> des plus grands acteurs du cinéma français. Pour la programmation des Tudors sur Arte, ce sera difficile pour moi de regarder cette dernière partie. Je le regrette car je suis un fan absolu de<br /> cette série. Mais grande consolation avec les dvd. Si vous me permettez un conseil, j'ai vu Monsieur Lazhar et ce film mérite de s'y arrêter si vous en avez la possibilité. Quant à Camille redouble<br /> c'est vraiment un film qui fait du bien, qui nous emporte du rire aux larmes et surtout porté par un formidable casting, du rôle principal à la plus petite participation. Très belle journée à vous.<br /> Alain. P.S. j'ai imprimé vos articles sur Proust à Venise et vais tenter de vous expliquer mon ressenti, mais auparavant, je dois les relire. À très vite donc.
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P
TU VOISje l'avais vu ce film et il m'avait laissé un mauvais souvenir un peu "poisseux" effectivement car il faisait lourd et que les personnages étaient mauvais mais je ne me souvenais pas du tout de l'histoire
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


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