C'est durant les années 1980 que l'Amérique inaugure l'ère du blockbuster. Et pour en assurer la rentabilité, les studios n'ont qu'une solution : l'expansion.
La guerre des étoiles provoque, dès sa sortie en 1977, un véritable raz-de-marée et bien que le film ait coûté 11,5 millions de dollars il en rapporte 215 rien que sur le territoire américain. Son succès est symtomatique des évolutions en cours, parmi lesquelles un rajeunissement du public. Selon une enquête de la MPAA réalisée en 1979, 90% des spectateurs américains ont entre 12 et 19 ans ! Les studios enregistrent la leçon et généralisent la politique des blockbusters : Superman (1978), L'Empire contre-attaque (1980), Les aventuriers de l'arche perdue (1981) etc. Le but affiché est de battre de nouveaux records au box-office, rien de plus. Dans ce nouveau contexte, la prise de risque devient difficile. Afin de la minimiser, les majors exploitent leurs succès jusqu'au bout, en misant sur des formules ou des suites qui s'enchaînent jusqu'à l'épuisement du filon. Ces productions donnent lieu à un marché intérieur florissant et les salles obscures sont assurées d'être constamment remplies. La tendance se renforce avec l'arrivée des multiplexes. Aujourd'hui, l'Amérique est l'une des nations qui se déplace le plus pour se rendre au cinéma avec un taux de fréquentation moyen de 5,3 films par personne et par an. Le développement de la vidéo dans les années 80 et du DVD, dans la décennie suivante, ouvre de nouvelles perspectives et devient une source de revenus substantiels. Autant de facteurs qui favorisent une reprise de la production. En 1980, 125 projets étaient réalisés aux Etats-Unis. En 2003, on en comptait plus de 600. En 1982, c'était l'année de tous les super-héros : Rambo d'un côté, Conan de l'autre ont fait exploser le box-office de la toute puissance de leur musculature. Cette dernière rassure manifestement une nation qui doute d'elle-même sur fond de traumatisme post-viêtnamien et de récession économique. Tout comme Conan le barbare, Rambo est un être solitaire, abandonné par les siens et qui lutte pour sa survie dans un monde hostile. Afin de rentabiliser les blockbusters, dont les coûts ne cessent d'augmenter, les studios planifient des sorties en salle massives, soutenues par des campagnes de promotions quasi agressives. Le but est d'attiser la curiosité du public et de faire de cette projection un incontournable dans la vie d'un citoyen normal. Avec une durée de vie de plus en plus courte, le destin des films est scellé dès le premier week-end d'exploitation. Dès lors, le marché intérieur ne suffit plus à amortir les frais engagés, l'expansion est une nécessité.
Aujourd'hui, le marché international représente 43% des revenus des studios. Les stratégies commerciales sont conçues de manière globale afin de valoriser au mieux le merchandising et les investissements promotionnels engagés. Les marchés extérieurs permettent également d'alimenter la machine hollywoodienne en fournissant des idées de remake. Les droits des films étrangers les plus créatifs sont achetés par les studios de manière à les adapter aux codes américains. Car au coeur de la puissance américaine se trouve une capacité de renouvellement permanente, nourrie par les talents étrangers. Aujourd'hui, comme hier, Hollywood continue d'attirer cinéastes et acteurs du monde entier. Le succès d'Antonio Banderas, de John Woo ou de Roberto Rodriguez en témoigne. Par leur présence, ces étrangers facilitent l'accès à certains marchés. Si cette politique assure la domination du cinéma d'Outre-Atlantique sur le reste du monde, il n'en reste pas moins des poches de résistance. L'Inde fait figure d'anomalie avec ses 95% de parts de marché au profit d'un cinéma national. Dans ce pays, les productions hollywoodiennes doivent faire l'objet de remakes indiens afin d'atteindre les cimes du box-office. Partout ailleurs, le cinéma américain s'arroge entre 50 et 83% du marché. Les territoires anglo-saxons sont évidemment les plus perméables à cette influence. En revanche, les pays qui résistent le mieux à la vague américaine sont ceux dotés d'un système d'aides et de subventions, comme c'est le cas en France qui parvient à maintenir, vaille que vaille, un marché national de 33% contre 23% en Italie et 12,5% en Espagne. En Asie, la Corée du Sud se distingue également de ses voisins par une production locale importante, protégée par les pouvoirs publics. Privées de soutien, la plupart des autres industries cinématographiques restent fragiles face au géant américain.
Sources : Laurent Delmas
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