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31 mai 2022 2 31 /05 /mai /2022 08:47

photo-La-Reine-Christine-Queen-Christina-1933-1.jpg 

 

Le roi de Suède vient de mourir sur le champ de bataille de Lutzen et sa fille Christine, qui lui succède, n'est encore qu'une enfant. Le fidèle Axel Oxenstierna sera son conseiller. Les années passent et la jeune reine manifeste très vite des qualités d'intelligence exceptionnelles, tout en devenant une femme d'une extrême beauté. Elle s'éprend de Lord Magnus et souhaite assurer la paix de son pays, principalement avec la Russie. Les gens de son royaume aspirent à ce qu'elle épouse le prince Charles Gustave, dont les victoires militaires ne se comptent plus. Mais Christine fait la connaissance de Don Antonio de La Prada, ambassadeur d'Espagne, venu demander sa main pour le compte du roi Philippe  II d'Espagne. En sa compagnie, et sans se dévoiler, elle passe  une nuit passionnée dans une auberge et, par la suite, la jeune femme est si vivement éprise qu'elle ose braver l'opinion et tente d'imposer Don Antonio comme prince consort. Malheureusement son peuple, dressé contre elle par Lord Magnus, manifeste son opposition. La reine, n'écoutant  alors que ses sentiments, préfère abdiquer plutôt que de renoncer à son amour. Les amants ont le projet de se retrouver sur un navire qui les emmènera loin de la Suède, cependant que Magnus, fou de jalousie,  provoque  Don Antonio en duel et le blesse mortellement. L'ambassadeur viendra mourir dans les bras de la souveraine qui quitte seule le pays. On sait que Christine de Suède finira son existence à Rome.

 

La reine Christine,  film magnifique, tourné en 1933, eut des débuts difficiles. Après avoir envisagé de confier la mise en scène à Ernst Lubitsch, puis à Sternberg,  Irving Thalberg choisit finalement  Rouben Mamoulian  qui venait de réaliser " Le Cantique des Cantiques " avec Marlène Dietrich. Pour interpréter le rôle de Don Antonio de la Prada, on avait d'abord choisi Laurence Olivier et celui-ci fut engagé ; mais, lors des premières prises de vue, le couple qu'il forme avec la vedette en titre Greta Garbo ne fonctionne pas et ne dégage pas l'aura nécessaire pour rendre crédible leur passion réciproque. Laurence Olivier était peut-être trop jeune, trop inexpérimenté pour jouer à jeu égal avec Greta Garbo, dont la personnalité en imposait d'emblée et galvanisait l'écran. Toujours est-il que, grâce à l'influence de l'actrice, John Gilbert, qui avait été son partenaire dans  La chair et le diable et dans Love, et avec lequel elle avait vécu une liaison amoureuse de plusieurs années, est choisi pour le remplacer. Il faut reconnaître que l'acteur hollywoodien sut composer le personnage de l'ambassadeur avec le panache, l'ironie, le charme et la fougue capables d'évincer n'importe quel rival et rendre compréhensible l'embrasement de la reine. Dès les premiers plans, la splendeur du film s'impose. En quelques images, Mamoulian évoque la bataille de Lutzen et le roi qui meurt résigné, disant au soldat qui l'interroge : Je suis roi de Suède. La scène suivante est celle du serment de fidélité de la jeune Christine. Ensuite le metteur en scène s'effacera devant la personnalité de sa vedette qui campe avec intelligence, élégance, classe et autorité une reine de Suède envoûtante. En effet, le film  nous présente une femme admirable de charme, de mystère, de passion, d'ambiguïté, se plaisant à parler de Vélasquez et de Molière, interrogeant les paysans sur l'avenir de leur pays, affrontant le Parlement et la Cour, se défiant à juste raison de Lord Magnus, contrant l'archevêque lui-même en lui déclarant : " Que faites-vous du Dieu de l'ennemi ? " Volontiers vêtue en homme, la reine crée un style qui va surprendre et choquer l'Europe du XVIIe. Le metteur en scène n'hésite pas à révéler sa bisexualité, ce qui prouve la liberté de ton et de franchise dont il use, faisant fi des réserves que risquaient d'émettre les censeurs d'Hollywood.
 

 

L'un des plus beaux moments du film se déroule dans l'auberge où la reine, qui ne s'est pas encore fait reconnaître, rencontre l'ambassadeur de Suède et partage avec lui  une nuit d'amour. Christine se lève au petit jour et commence à caresser les objets de la pièce, comme si elle voulait graver à jamais dans sa mémoire les moindres détails, de façon à pouvoir, par la suite, les réactualiser dans sa pensée. Mamoulian s'est lui-même expliqué au sujet de la réalisation de cette scène : "La séquence dans la chambre à coucher de l'auberge, où Christine se déplace tout autour de la pièce, touchant chaque chose, caressant chaque objet, gravant le lieu tout entier dans sa mémoire, est pour moi un véritable sonnet. La scène a d'ailleurs été tournée avec un métronome. J'ai expliqué à Garbo : cela doit être une pure poésie, une pure émotion. Le mouvement doit avoir la grâce d'une danse. Faites comme si c'était de la musique."  

 

La scène des adieux est également superbe. Ayant en quelques phrases retourné en sa faveur ceux mêmes qui lui refusaient l'union avec un homme qui n'était pas de sang royal, elle n'en décide pas moins de sacrifier son trône pour assurer son bonheur de femme. Elle rend le sceptre et le globe, enlève elle-même sa couronne, dégrafe son manteau d'hermine et part au milieu de ses sujets en larmes. Plus que jamais le romanesque l'emporte sur l'histoire, dans un style flamboyant qui magnifie la liaison tragique de Christine et de Don Antonio de la Prada. Quant à l'ultime scène, elle se passe sur le navire prêt à appareiller.  La dernière scène, a avoué Mamoulian - présentait plusieurs difficultés. J'avais dans l'idée d'aboutir à un gros plan de Garbo à la proue du navire ; mais, à cette époque, cela présentait des difficultés. Bill Daniels, le chef opérateur, déclara que c'était impossible sous peine de perdre le point et d'avoir une image floue. Je me souvins alors de la lanterne magique que j'avais eue, étant enfant, à Tiflis, avec quatre images sur la même plaque. Je suggérai d'appliquer ce principe devant l'objectif. Cela fonctionna parfaitement. Maintenant, naturellement, c'est une pratique courante. Garbo me demanda : Que dois-je faire dans cette scène ? - Je lui ai répondu : Avez-vous entendu parler de la tabula rasa ? Je veux que votre visage soit comme une feuille de papier immaculée. Je veux que ce soit chaque spectateur qui écrive. Je voudrais même que vous fermiez les yeux afin de n'être plus qu'un masque. En fait, il n'y a rien sur son visage mais chaque personne qui a vu le film vous dira qu'elle pense et est émue. Et c'est toujours quelque chose de différent. Chacun écrit sa propre fin du film. Il est intéressant de remarquer que c'est la scène dont on se souvient toujours le plus clairement.

 

De tous les films de  Greta Garbo,  il est vrai que La reine Christine est celui dont on se souvient le mieux. Le personnage correspondait à sa propre nature, son partenaire, John Gilbert, était l'homme qu'elle avait aimé, le metteur en scène, l'un des plus talentueux de sa génération. Aussi ce film, malgré son âge, exerce-t-il toujours son étrange fascination. Un chef-d'oeuvre.

 

      

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28 février 2021 7 28 /02 /février /2021 11:25
LE TEMPS DE L'INNOCENCE de MARTIN SCORSESE

     

Dans la lignée des très grands films dont  Martin Scorsese  reconnaît devoir des éléments d'inspiration et de réflexion, tels que Le Guépard, Senso ou Le portrait de Dorian Gray, Le Temps de l'innocence s'inspire d'une oeuvre littéraire, celle d'Edith Wharton, prix Pulitzer 1921 - dont le cinéaste va adopter fidèlement les thèmes, tout en proposant les siens propres, sans qu'il y ait une quelconque incompatibilité. On pouvait, à priori, être étonné de voir ce cinéaste s'égarer dans un film " à costumes ", dont on sait qu'ils ont en général mauvaise presse, mais Scorsese ne tombera dans aucun des pièges qui le guettaient : jeu théâtral des comédiens, ambiance convenue, dialogues emphatiques, il empoigne ces clichés pour n'en retenir aucun. Bien qu'il n'ait pas été facile d'adapter à l'écran ce roman-culte, le cinéaste d'origine italienne l'osera avec succès, franchissant les obstacles et signant là l'une de ses plus belles réalisations. 

 

Comme dans Les Affranchis et Casino, et à la manière d'un documentaire, il accompagne le déroulement de la pellicule d'une voix off (Joanne Woodward), qui donne au film un ton particulier et permet d'entrer plus aisément dans l'intimité des personnages. Le Temps de l'innocence (1993) est une fresque sensible sur une société en apparence paisible, mais qui s'avère être, derrière sa façade trompeuse, aussi perfide et cruelle que celle des mafieux que Scorcese nous présentait dans plusieurs de ses films précédents. Dans cette société américaine oubliée des années 1870, assez proche du monde proustien de La Recherche, les émotions, les sentiments se doivent d'être cachés, voire refoulés, comme le sont les amours insatisfaites et les désirs inavoués des deux héros du film. Ne nous y trompons pas ; sous ses dehors policés, Le Temps de l'innocence est une histoire violente, où quelques êtres isolés et en rupture s'opposent à la puissance d'une riche famille, selon  "un rituel tribal ", d'après les propres mots du cinéaste. " Si les victimes ne sont pas abattues d'un coup de pistolet, elles sont en revanche éliminées. La pire chose n'est pas la mort, mais l'éradication". Cette seule phrase explique le film et lui donne sens.  En effet, moins volontaire que les héros habituels de Scorcese, Newland Archer (Daniel Day-Lewissera vaincu par la force des traditions et des conventions qui est l'apanage de cette société new-yorkaise des dernières décennies du XIXe siècle. Il n'aura pas le courage de tout sacrifier à son amour pour la comtesse Ellen Olenska et l'homme vieilli, que nous voyons lors de la dernière scène, ne sera même pas assez résolu  pour rencontrer une dernière fois la femme qu'il a tant aimée...Curieusement, dans ce monde régi par les hommes, ce sont les femmes Ellen et May - la jeune fille que Newland finit par épouser - qui se révèlent être les véritables moteurs de l'intrigue, Newland subissant les événements davantage qu'il ne les provoque. S'il conteste les règles établies dans le privé, il n'ose s'insurger en public, par peur de se faire expulser.
 

 

L'histoire se déroule à New-York dans les années 1870. L'avocat Newland Archer doit épouser May, la fille d'une puissante famille, les Mingott, alors que de retour d'Europe, la belle comtesse Olenska, cousine de May, éveille chez lui une subite passion. La comtesse semble mener une vie assez libre, loin de son mari retenu en France, jusqu'à ce que celui-ci, craignant que son épouse ne finisse par demander le divorce, ne la rappelle à Paris. Redoutant le scandale, elle accepte, mais Newland vient chez elle pour lui avouer son amour et la supplier de rester. Parce qu'elle se refuse à blesser sa cousine fraîchement fiancée, Ellen décide de partir afin que le mariage ait lieu. Dix-huit mois plus tard, toujours obsédé par son souvenir, Archer apprend qu'elle se trouve en résidence à Boston. Il s'y rend et finalement lui et Ellen deviennent amants. Mais apprenant que May attend un heureux événement, Ellen va repartir en Europe rejoindre son mari. Des années plus tard, après la mort de May, Archer, âgé de cinquante-sept ans, accompagne son fils Ted en voyage d'affaires à Paris. Arrivé au bas de l'immeuble d'Ellen, et alors que plus rien ne s'oppose à leur rencontre, il prend la fuite, incapable de se retrouver confronté à une passion qu'il n'a ni su, ni pu assumer. 

 

Martin Scorsese a choisi de pousser à la perfection la reconstitution de la vie de l'époque et mis une attention pointilleuse à soigner les décors, les costumes, les objets, l'étiquette, en s'inspirant de la façon dont son maître Visconti avait usé avant lui. Michelle Pfeiffer déclara à ce propos : " J'ai appris que je ne pouvais pas toucher mon verre de vin blanc parce qu'il était frappé, mais, qu'en revanche, je pouvais caresser mon verre de vin rouge parce qu'il était chambré." 
Alors que le superviseur artistique Dante Ferretti cherche, tel un peintre, à donner une dominante aux décors et s'inspire des toiles de James Tissot, Scorsese veille à ne pas succomber sous le poids de l'exactitude historique et prend ses distances à bon escient. Ce, et en partie, grâce au montage audacieux de Thelma Schoonmaker qui saura apporter au  film une étincelante modernité, se refusant à des ralentis inopportuns et à toute complaisance esthétique.

 


Daniel Day-Lewis, en dandy brimé, se livre, quant à lui, à une époustouflante performance dans le rôle de l'avocat Newland Archer. D'une sensibilité à fleur de peau, il interprète l'un des personnages les plus complexes du cinéma de ces dernières années. A ses côtés, la délicieuse Michelle Pfeiffer - dont les toilettes s'accordent si bien à sa finesse et à sa grâce, qu'elle semble être née pour les porter - lui donne la réplique avec intelligence et sensibilité. C'est sûrement le rôle le plus intéressant qui lui ait été confié dans son encore jeune carrière. Rarement roman ne fut à l'origine d'un si beau film qui, comme Le Guépard,  ne se contente pas d'être une adaptation réussie, mais se veut une oeuvre à part entière. Et quelle oeuvre !
 


Pour lire les articles consacrés à Scorsese et Michelle Pfeiffer, cliquer sur leurs titres :


MARTIN SCORSESE - PORTRAIT            MICHELLE PFEIFFER - PORTRAIT

 

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LE TEMPS DE L'INNOCENCE de MARTIN SCORSESE
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28 août 2019 3 28 /08 /août /2019 13:22
Late  Night de Nisha Ganatra

Une célèbre présentatrice de « late show », en fin de carrière, est contrainte d’embaucher une femme d’origine indienne, Molly, au sein de son équipe d’auteurs. Ces deux femmes que tout oppose, leur culture et leur génération, vont faire des étincelles et revitaliser l’émission qui ne cesse de perdre de l’audience depuis plusieurs années. Manque d’inspiration, manque de discernement, la brillante présentatrice de ce talk show journalier, Katherine Neuwbury, ne cesse de passer à côté de l’essentiel, le sens de l’humain. C’est justement ce sens de l’humain que la fraîche jeune femme va lui apporter, contribuant ainsi à sauver sa carrière.

 

Car, on ne peut pas faire pire comme égocentrisme que cette présentatrice vedette interprétée avec humour et brio par une Emma Thompson au top de sa séduction et de son talent. Elle crève tout simplement l’écran par son naturel et son élégance, bien que son personnage n’ait rien de sympathique avec son moi surdimensionné et son mépris à l’égard de ses collaborateurs qu’elle met à la porte du jour au lendemain et désigne par un numéro, ce qui prouve son mépris d’autrui. Mais qu’à cela ne tienne, le personnage éclate de vitalité et nous ouvre une page inattendue sur les coulisses de la télévision américaine dans le bas de gamme le plus consternant.

 

Ainsi  Late Night est-il un formidable pamphlet contre l’univers cruel du petit écran. La réalisatrice connaît bien le milieu. Elle a acquis la légitimité pour raconter les coups bas et la terrible discrimination qui règne entre les collaborateurs quand il s’agit de produire des séries. La jeune Molly, pourtant sans expérience, parvient par le plus grand des hasards à entrer dans cet univers réservé à une élite, de préférence blanche et influente. Le fait que Nisha Ganatra ait choisi une femme pour incarner ce rôle de patronne de télévision, est particulièrement judicieux. Le film peut ainsi dénoncer la discrimination sexuelle et raciale qui règne dans ce monde feutré, cruel et réservé à quelques favoris new-yorkais. Mais Late Night n’est pas qu’un film politique. On rit. On est même ému par le destin de ces deux femmes à l’opposé l’une de l’autre mais fatalement complémentaires, Katherine et Molly. Le récit fonctionne bien et les comédiens s’immergent avec naturel dans cette histoire haute en couleur, menée d’une caméra vive et implacable sur les dérives d’un monde sans idéal, au ras d’une réalité sans espérance. C’est sans doute la vitalité de la mise en scène et les remarquables interprétations d’Emma Thomson et de la jeune et talentueuse Mindy Kaling qui procurent à ce film ce dynamisme et cette intrusion colorée dans un monde qui vit en permanence sur un volcan. Late Night est une agréable bonne surprise car l’opus est judicieusement construit. Bien sûr, il ne s’agit pas du chef-d’œuvre de l’année. Pour autant, le film a d’indéniables qualités : il plonge dans la réalité d’aujourd’hui sans la dénaturer mais sans l’avantager ou la magnifier. C’est donc son réalisme vigoureux  qui fait mouche et séduit le public.

 

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Late  Night de Nisha Ganatra
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5 février 2019 2 05 /02 /février /2019 10:21
La mule de Clint Eastwood

 

À plus de 80 ans, Earl Stone est aux abois. Il est non seulement fauché et seul, mais son entreprise d’horticulture  risque d’être saisie. Il accepte alors un boulot qui – en apparence – ne lui demande que de faire le chauffeur. Sauf que, sans le savoir, il s’est engagé à être passeur de drogue pour un cartel mexicain. Extrêmement performant, il transporte des cargaisons de plus en plus importantes. Ce qui pousse les chefs du cartel, toujours méfiants, à lui imposer un "supérieur" chargé de le surveiller. Mais ils ne sont pas les seuls à s’intéresser à lui : l’agent de la DEA Colin Bates est plus qu’intrigué par cette nouvelle "mule". Entre la police, les hommes de main du cartel et les fantômes du passé menaçant de le rattraper, Earl est désormais lancé dans une vertigineuse course contre la montre...

 

Ce scénario est signé Nick Schenk, déjà à l’œuvre dans « Gran Torino », et cela se ressent car il est bien ficelé, bien rythmé, et ne laisse aucun détail au hasard, assurant à l'opus une grande unité, celle de l'existence d’un homme à la fin de son parcours, affecté par l’éloignement de sa famille dont il n’a pas su être assez proche, tout particulièrement sa fille, qui sort d’une fête de famille lorsqu’il y entre, et dont Clint a chargé sa propre fille d’assumer le rôle. Mais c’est probablement la thématique du temps qui passe, de la vieillesse désormais bien présente, de la fragilité de la vie, qui touche le spectateur et donne à ce film, peut-être l’ultime de Eastwood, sa tonalité testamentaire, sa tendresse voilée et son humour toujours bien présent.

 

Et ce qui séduit également dans « La Mule » est le style si reconnaissable du réalisateur, ce mélange subtil de dérision et d’émotion, cette sensibilité à fleur d’image qui frappait tellement dans « Sur la route de Madison » ou dans « Million Dollar Baby », et la solitude qui étreint chacun de nous dans les moments décisifs de nos vies.  Ainsi retrouve-t-on,  dans chacun de ses opus,  cette gravité devant les faits et ce souci de précision face aux détails infimes qui ont charge de l’illustrer. Il y a là un bel équilibre entre action, tension, drame et humour. De même, que me semble remarquable, la manière dont l’acteur-réalisateur sait  être présent dans une suite de situations diverses, tout en assurant  une unité de sensibilité qui est toujours admirablement dosée. Avec « La Mule », Clint signe l’une de ses œuvres les plus accomplies et termine sa carrière devant et derrière la caméra sur un film et un rôle puissants, sans jamais être pesants. Sachant saisir l'instant, il implique ses personnages dans une réalité vigoureuse et nous propose une vision élargie de l’existence. Enfin, il tend vers une véritable rédemption et, en horticulteur qu’il a été, s'attache à poursuivre la culture des simples beautés de la vie, faisant vibrer ainsi la touche la plus sensible des spectateurs. Film témoignage mais probablement film testament.

 

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La mule de Clint Eastwood
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27 mars 2018 2 27 /03 /mars /2018 10:06
Blue de Keith Scholey

Blue, le nouveau film Disney Nature, est une plongée au cœur de l’Océan pour découvrir, comprendre, aimer un monde encore mystérieux et surprenant. Un monde où la nature invente des couleurs, des formes et des sons étonnants. L'Océan est unique, seuls les hommes le mettent au pluriel. Il est partout, recouvre  plus de 70% de la Terre et donne à notre maison sa couleur et son nom: la planète bleue. Dans cet environnement somptueux et fragile, les dauphins ont été choisis comme guides privilégiés afin de conter cette belle histoire de l'Océan qui est, ni plus, ni moins, celle de nos origines et de notre avenir, si, toutefois, nous lui en accordons un. Une histoire universelle qu’il est urgent de faire résonner en chacun de nous.

 

 

 

Comme les films précédents de Disney Nature, Blue a fait l’objet d’un scénario plausible mais voué à se transformer au fil du temps car avec les animaux, rien n’est joué d’avance. Le cinéaste est en permanence voué à l’improvisation. « J’ai l’expérience des fonds marins et cela n’a aucun intérêt d’écrire une histoire infaisable » - note Keith Scholey, coréalisateur anglais venu de la BBC. Il a fallu en permanence s’adapter aux conditions de tournage toujours aléatoires. Aussi le scénario a-t-il évolué selon les prises. Avec cette particularité que « tout est beaucoup plus compliqué dans l’océan parce que l’équipe doit d’abord réussir à rester en vie » - explique Keith Scholey. « Sous l’eau, les humains sont si lents et la visibilité si mauvaise qu’il faut constamment s’adapter aux circonstances. Si le dauphin que nous filmons s’en va, on ne peut pas le suivre ».

 

 

Dans le film, le personnage de Blue est en réalité incarné par plusieurs dauphins rencontrés au gré des séquences. Et une fois l’animal trouvé, rien n’est acquis. « Un dauphin qui voit un plongeur vient jouer, taper dans la caméra » - raconte Denis Lagrange. « Mais il faut des images où il ne s’occupe pas de l’objectif. Cela implique de rester longtemps, pour qu’il nous oublie, avec le risque que, tout à coup, il file. » Filmer la mer et ses habitants est donc un casse-tête. Pour Blue, les techniciens ont utilisé des jet-skis ou encore une caméra montée sur une perche et immergée sous la surface depuis un bateau. Les équipes ont posé des trépieds au fond de l’eau, pour les plans fixes, et un bras mécanique, pour des travellings. En Polynésie, Denis Lagrange plonge avec des caméras de cinéma enfermées dans des caissons étanches, construits sur mesure par une entreprise suisse. Un câble permet de faire la mise au point de l’image à distance : un deuxième plongeur, équipé d’un écran, s’en charge ou un assistant resté sur le bateau.  En revanche, pas d’inquiétude pour le son, il sera ajouté ensuite en post-production. Plutôt que des bouteilles, les techniciens utilisent des « recycleurs », qui permettent de plonger plusieurs heures et de ne pas rejeter de bulles, perçues comme une menace par la faune marine. Pour repérer les baleines, Denis Lagrange a compté sur ses amis installés à Tahiti et Moorea. Ils le préviennent quand ils en aperçoivent dans le lagon. Une fois sur place, il faut prendre des précautions. Un nageur avec un masque et un tuba va d’abord vérifier qu’elles sont calmes. Dans ce cas, Denis plonge avec sa caméra pour s’approcher au plus près de ces mastodontes gros comme des bus. Moins il y a d’eau entre l’objectif et la baleine, plus l’image est nette. Quant aux requins, ils ont été filmés près de l’atoll de Fakarava, à 300 kilomètres de Tahiti. Des centaines de requins gris chassent la nuit dans ce récif coralien, saturant l’eau de leurs corps massifs.
 


 

Voilà comment, après des mois de travail, s’est élaboré ce documentaire qui rend grâce à la beauté des profondeurs, aux océans que l’homme met en permanence en danger, univers d’une beauté et d’une intensité de vie stupéfiant. Le message n’a certes pas la force de celui d’ « Océans » qui, il y a quelques années, avait mis le doigt sur les monstruosités perpétrées avec une inconscience coupable et qui, d’ici une quarantaine d’années, auront pratiquement anéanti un tiers de la vie sous-marine, désastre écologique  irréversible. Ce film est une immersion dans un monde en voie de disparition avancée dont la beauté, la puissance, la diversité, la splendeur rendent d’autant plus tragiques les inconséquences de l’homme et tentent de lui faire prendre conscience de ce qu’il est en train de sacrifier, cela malgré un texte un peu faible à mon goût, étant donné la gravité  des faits.

 

Bien que ce narratif soit un peu faible, ne ratez pas le documentaire et la plongée dans ces eaux matricielles et initiatrices, là où la vie est sans doute la plus imaginative et la plus féconde, étant donné les couleurs, les formes, les comportements de cette multitude de vivants. Le spectacle ravit  les yeux et donne à méditer sur nos comportements de prédateurs aveugles, insoucieux et imprévoyants qui ne semblent pas avoir  pris la mesure ... du désastre programmé.

 

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Blue de Keith Scholey
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5 mars 2018 1 05 /03 /mars /2018 10:54
Lady Bird de Greta Gerwig

Sur les affiches françaises de Lady Bird, on peut lire que le film est nommé à l’Oscar du meilleur réalisateur. C’est pourtant bien une femme qui a dirigé ce portrait d’ado sensible et rebelle, incarnée par Saoirse Ronan. Greta Gerwig, 34 ans, icône du jeune cinéma indépendant américain a, pour ses débuts derrière la caméra, rejoint d’emblée le club très fermé des rares femmes à accéder à une reconnaissance immédiate grâce à un film personnel, à la fois drôle, fantasque et touchant. Si Lady Bird a fait l’unanimité de la critique, il n’a rien glané aux Oscars 2018 mais qu’importe ! ce long métrage bien maîtrisé révèle une jeune metteur en scène qui sait traiter les sujets difficiles d’une caméra légère et néanmoins très sure.  Mais également parce que Greta Gerwig symbolise, à elle seule, le combat des femmes pour s’imposer dans une industrie où elles étaient à peine 4% à diriger l’un des 100 plus gros succès au box-office l’an dernier. En janvier, son absence dans la liste des nommés au Golden Globe du meilleur réalisateur avait fait grincer des dents, tant cette toute jeune réalisatrice a déjà obtenu le plus difficile : l’adhésion du public et des médias.

 

Née comme son personnage à Sacramento, Greta Gerwig a écrit  et réalisé un film très personnel et a su confier le rôle principal à une jeune actrice épatante Saoirse Ronan qui crève l’écran dès les premières répliques  et prête à son personnage d’adolescente, en plein apprentissage de la vie et à cette croisée des chemins où se profile déjà son avenir, une incroyable aisance et un réalisme teinté d’une extrême sensibilité. Tout y est des nuances infinies  de cette jeunesse en quête de soi, de cette adolescente à la croisée de multiples chemins, ceux de l’amitié, de l’amour, des études, des relations familiales, autant de choix palpitants et d’adieux anticipés. Christine, qui se fait appeler Lady Bird, est une jeune fille douée, intelligente et rebelle, un peu honteuse de sa famille qui tire le diable par la queue, de son père qui ne s’affirme pas assez et souffre constamment de dépression et d’une mère aimante, certes, mais qui, dans le souci de son éducation, ne cesse de lui rappeler des obligations désuètes et de lui seriner les sacrifices  consentis pour son éducation. Car Lady Bird est ambitieuse  et rêve d’accéder à l’une des universités de la côte Est qui serait  fatalement plus prestigieuse que celles de la côte Ouest. En quelque sorte, l’adolescente ne rêve que d’ailleurs, si bien que ce désir, sans cesse réitéré, n’est ni plus ni moins qu’un reniement des origines. Mais les choses changeront bientôt car les lendemains qui déchantent se profilent et la jeune fille comprendra les valeurs de l’éducation parentale et celles de son collège catholique où se nouaient des amitiés si fortes, où  l’on s’initiait au chant et au théâtre, où l’on vivait en quelque sorte en famille.

 

Greta Gerwig a le grand mérite de renouveler un thème maintes fois traité au cinéma comme au théâtre et de lui insuffler une fraîcheur et une tendresse qui en font tout le charme. A cela s’ajoute une belle dimension comique nourrie par un réel sens de l’observation, une véracité jamais lourde ou excessive, l’ensemble étant à la fois réaliste mais ciselé avec tact et finesse. Greta ne juge aucun de ses personnages, pas plus le curé maître de chant que la religieuse chargée de l'orientation professionnelle, elle leur laisse la bride sur le cou et plonge l’ensemble dans une atmosphère de bienveillance sans céder jamais au pathos ou au à un quelconque souci de moralisme. Ainsi confère-t-elle à son récit intelligence du cœur et intelligence de l’esprit. Pour un coup d’essai, un coup de maître.

 

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Lady Bird de Greta Gerwig
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31 janvier 2018 3 31 /01 /janvier /2018 09:52
Pentagon Papers de Steven Spielberg

Première femme directrice de la publication d’un grand journal américain, le Washington Post, Katharine Graham (Meryl Streep) s’associe à son rédacteur en chef Ben Bradlee (Tom Hanks) pour dévoiler un scandale d’État monumental et combler son retard par rapport au New York Times qui mène ses propres investigations. Ces révélations concernent les manœuvres de quatre présidents américains, sur une trentaine d’années, destinées à étouffer des affaires très sensibles … Au péril de leur carrière et de leur liberté, Katharine et Ben vont devoir surmonter tout ce qui les sépare pour révéler au grand jour des secrets longtemps enfouis…

 

Le nouveau film  de Steven Spielberg, après celui sur Churchill « Les heures sombres »  de Joe Wright, tombe lui aussi à point nommé pour nous rappeler les vraies valeurs, celles de l’engagement moral et de la détermination face au découragement et au mensonge, un film qui revient sur une vérité historique qui, pendant  trois décennies, a conduit un pays à mener une guerre inutile et sanglante en Indochine. Cet opus nous remet en phase avec un épisode méconnu de l’histoire américaine où le premier amendement, garant de la liberté d’expression, notamment celle de la presse, était attaqué par une administration Nixon qui avait tout à perdre des révélations du New York Times sur l’ingérence américaine au Vietnam. Un dossier confidentiel qui confirmait que la guerre en Asie était considérée comme vouée à l’échec par les dirigeants américains depuis ses premiers jours, mais perpétuée néanmoins de façon irrationnelle, et ô combien meurtrière, pour les jeunes soldats.

 

Le New York Times, qui est en possession du dossier, sera muselé pendant quelques jours pour des raisons judiciaires, alors le moment est venu pour le Washington Post de prendre la relève et d’assumer le risque encouru par la publication de ces documents interdits. Se pose également la question du prix du scoop : tomber à son tour sous la pression judiciaire sans avoir la solidité financière du Times, mettre au chômage des dizaines d’employés, détruire l’accomplissement d’une famille et se retrouver en prison pour ses convictions ? Les interrogations de Katharine Graham sont d’autant plus légitimes que tout se passe quelques jours après l’entrée en Bourse du journal qui se doit de présenter des garanties à ses investisseurs.


Spielberg, bien inspiré, met en scène  la carrière de cette  femme Katharine Graham, fille et veuve des précédents dirigeants, prise soudain dans l’étau entre le copinage avec les politiques, les décisions déontologiques et l’avenir de sa société, choix cornélien où elle prouve sa détermination et son courage en bravant un aéropage d’hommes qui souhaiterait qu’elle se retire. Pour affronter le plus grand combat de sa vie, elle doit s’interroger sur ses raisons personnelles, ses engagements et l’avenir de ce journal familial. Question primordiale : pour qui l’exécutif  gouverne-t-il ? Lui-même ou le peuple, et pour qui les médias travaillent-ils ? Pour flatter et satisfaire les amis ou informer les citoyens des limites du système ? Et quelle est l’urgence : publier afin de sauver l’honneur et réhabiliter la vérité ou se taire et laisser perdurer le mensonge d’état ? Le personnage  joué par Meryl Streep est  celui de l’héroïne de ce bras de fer contre le pouvoir de la Maison Blanche à une époque – celle des années 60/70 - où la société patriarcale l’attend davantage comme épouse, mère et femme au foyer qu’à la tête d’une telle insubordination  qui vient rappeler aux hommes politiques leur devoir de vérité face à leur peuple.
 

Ce film tombe au bon moment pour deux raisons : primo, il rend compte du devoir de vérité d’une presse indépendante et courageuse ; secundo, il se glisse dans l’actuel débat féministe sur les inégalités de traitement faites aux femmes, les humiliations quotidiennes qu’elles subissent en affirmant leurs convictions, leur intelligence et leur perspicacité, y compris dans les décisions historiques de la nation. Les armes de Spielberg, afin de laver les femmes des affronts socio-culturels qu’elles subissent, est d’avoir recours à une actrice formidable Meryl Streep, qui confère à son personnage une force liée à une grâce merveilleuse et de la placer au cœur de ce combat d’idées tellement masculin qu’elle apparaît comme l’incontournable déesse de la sagesse et de la vérité. Un rôle idéal pour cette actrice rompue à toutes les disciplines du 7e Art. Face à elle tous les acteurs sont justes et convaincants et le film prend au final une ampleur wagnérienne en nous rappelant les mérites du bon droit et de la lucidité. Mais on sait aussi que ces vertus ont été vite oubliées et que la presse a suivi l’Amérique lors de  sa première ingérence en Irak et en bien d’autres encore … hélas ! Quant aux médias français, n’en parlons pas, chouchoutés par des présidents sans scrupules et des directeurs de presse sans honneur, ils ont trop souvent falsifié la vérité.

 

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Pentagon Papers de Steven Spielberg
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18 juin 2017 7 18 /06 /juin /2017 09:21
Shutter Island de Martin Scorsese

En 1954, une femme placée dans le centre de détention psychiatrique de Shutter Island disparaît. Elle s'appelle Rachel Solando et est une meurtrière extrêmement dangereuse. Deux officiers du corps fédéral des marshals, Teddy Daniels et Chuck Aule, quittent alors Seattle pour enquêter sur place. Ils découvrent l'île humide et brumeuse où se trouve cet hôpital-prison d'un genre très particulier. Très vite, Teddy Daniels comprend que le personnel de l'établissement cache quelque chose. Seul indice dont il dispose : un bout de papier sur lequel est griffonnée une suite de chiffres entrecoupée de lettres...

 

Un scénario qui met en cause d'emblée l’équilibre de l’enquêteur  (admirablement interprété par Léonardo DiCaprio) dans un labyrinthe de la folie et de la douleur où de misérables personnages achèvent leur existence au cœur d’un délire hallucinatoire habilement provoqué afin que ceux-ci disparaissent du monde des vivants et soient  à jamais irrécupérables. Inspiré du roman à succès de Dennis Lehane, cet opus brillant joue sur les nerfs en permanence grâce à un climat fort bien entretenu entre faux-semblants et réalités ténébreuses qui ne cessent de déstabiliser le spectateur. Du grand art développé par une mise en scène habilement élaborée où les rebondissements psychologiques sont à la fois crédibles et intelligents.

 

A défaut de faire jaillir la vérité dans son enquête, Teddy Daniels plonge dans ses propres abîmes et découvre l’ambiguïté des siennes. Servi par l’imagerie soignée de Robert Richardson où l’ombre et la lumière stimulent l’imaginaire et soulignent les symboles de cette fiction à plusieurs paliers, « Shutter Island » est un polar mental d’une efficacité redoutable qui brise les codes de l’espace et du temps, du vrai et du faux grâce à un scénario tendu qui repose sur une constante perte de repères. Un film, dont l’irréalité est devenue le noyau dur de la réalité. Etonnant mais oppressant. 

 

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Shutter Island de Martin Scorsese
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4 juin 2017 7 04 /06 /juin /2017 09:20
Erin Brockovich de Steven Soderbergh

Pour son dixième long-métrage, Steven Soderbergh est tombé par hasard sur un sujet en or. L’histoire réelle d’Erin Brockovich, une Américaine moyenne, élevant seule ses trois enfants, qui n’a jamais fait d’études en droit quand elle découvre par hasard, lors d’un accident de voiture, un énorme scandale environnemental et de santé publique. Son acharnement sur ce dossier condamnera finalement la société en cause à payer plus de 300 millions de dollars aux victimes, une histoire si incroyable qu’elle aurait été jugée peu crédible si elle n’était pas vraie. On découvre alors toutes les implications du scandale au fur et à mesure de son évolution. Il ne s’agit d’abord que d’une famille ou deux, puis une dizaine et finalement ce seront plus de 600 personnes qui porteront plainte, grâce à l’opiniâtreté d’Erin Brockovich. Le film ne s’intéresse pas vraiment au procès mais davantage aux longues préparations qui ont permis à cette jeune femme, sans qualification particulière, de mettre une ville à ses pieds et une multinationale à genoux, selon le slogan  choisi par l’affiche française qui résume les faits en quelques mots.

 

« Erin Brockovich, seule contre tous » commence avec un entretien d’embauche raté et c’est encore peu dire. Divorcée de fraîche date, elle a absolument besoin d’un travail, quitte à postuler n’importe où. En l’occurrence, un cabinet de médecins alors qu’elle n’a jamais fait d’étude de médecine : on comprend vite le malaise du praticien qu’elle rencontre. Avec cette première scène, Steven Soderbergh pose déjà son personnage principal : cette jolie blonde semble n’avoir jamais eu de chance dans sa vie et d’ailleurs elle ne sort de son entretien que pour avoir immédiatement un accident de voiture. Un modeste avocat est assigné automatiquement pour la défendre et c’est à cette occasion qu’elle pose un pied dans l’univers des avocats. Après avoir perdu son procès, elle parvient à obtenir un travail dans le cabinet. Au début, il ne s’agit que d’un petit boulot de tri et de rangement de papiers, mais c’est justement en rangeant un dossier qu’elle tombe par hasard sur une affaire étrange. En effet, Erin est étonnée de trouver dans un même dossier un bilan de santé et une proposition immobilière et c’est en allant vérifier sur place qu’elle découvre un énorme scandale. Une entreprise utilise depuis une trentaine d’années un produit toxique en le cachant aux habitants et ce produit a empoisonné les nappes phréatiques et les habitants à des kilomètres à la ronde, étant donné que les responsables sont parvenus jusque-là à cacher, puis à étouffer l’affaire. On suit ainsi au jour le jour la persévérance d’Erin à mettre tout en œuvre pour parvenir à dénoncer le scandale et à faire éclater la vérité.

 

Steven Soderbergh a eu la bonne idée de confier le rôle à Julia Roberts. Dix ans après «Pretty Woman », qui lui avait apporté la gloire, l’actrice est parfaitement convaincante dans ce personnage fort qu’elle porte sur ses épaules avec une formidable énergie et qui lui a valu un Oscar bien mérité. Belle et offensive, elle ne lâche rien et nous émeut par sa détermination sans faille. Un beau rôle pour une Julia Roberts au mieux de son talent et un film que l’on suit avec un intérêt qui ne se relâche pas. Une réalisation passionnante.

 

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Erin Brockovich de Steven Soderbergh
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30 janvier 2017 1 30 /01 /janvier /2017 09:42
La La Land de Damien Chazelle

Comme on aimerait que, soudain, dans les embouteillages quotidiens de Paris, les gens sortent spontanément de leurs voitures pour se mettre à chanter et danser sur les airs de jazz que diffuseraient leurs radios et que la cauchemar devienne rêve. C’est ainsi que débute le très plaisant film de Damien Chazelle « La La Land » qui est en train de rafler toutes les récompenses de ce début d’année 2017, dont 7 Golden Globes et déjà 14 citations pour les prochains Oscars. Après "Whiplash », le cinéaste nous propose aujourd’hui une comédie musicale pleine de fraîcheur, un brin nostalgique lorsqu’elle évoque les charmes d’antan et leurs sonorités auxquels l’opus fait abondamment référence et la réalité d’aujoud’hui liée davantage au spectaculaire et à l’éphémère. Sébastien (Ryan Gosling) et Mia (Emma Stone) habitent Los Angeles et attendent que leur vie prenne enfin une tournure professionnelle. Elle est serveuse dans la cafétéria d’un grand studio d’Hollywood et multiplie les auditions pour tenter de devenir comédienne ; lui est pianiste de jazz mais sa carrière stagne car on ne le trouve pas assez moderne, trop attaché à un jazz jugé classique et démodé. Ils se rencontrent et bientôt comprennent qu’ils sont faits l’un pour l’autre, que leurs dons et leurs aspirations ne peuvent que les mener à une réussite justifiée. Ce qu’ils feront aux dépens de leur bonheur.

 

Oui, ce film évoque avec subtilité la difficulté qu’il y a à mener de front  l’amour et la réussite professionnelle, l’art et la vie quotidienne, tant il est vrai que l’on sert difficilement deux maîtres et que le succès de l’un joue trop souvent de façon négative sur les aspirations de l’autre. Si cet opus n’est pas sans rappeler le « Café Society » de Woody Allen, film plein de charme lui aussi, il s’en démarque pour la simple raison que la façon de raconter de Damien Chazelle sait se faire personnelle et use d’une énergie positive qui marquait déjà son premier opus « Whiplash ». Oui, Chazelle a un ton, un narratif qui lui est personnel et enchante le spectateur car il s’exprime dans l’élégance des images, le jeu d’acteurs parfaitement dirigés, le savoureux mélange des genres entre fantaisie et réalité. Il y a là un tourbillon éloquent de sons, de couleurs, de sentiments, d’actualité et de retours vers le passé parfaitement dosé.  De plus, la bande sonore est de grande qualité et les acteurs époustouflants de grâce, de charme et de fantaisie. Emma Stone, que je n’appréciais guère à ses débuts, est ici transformée, délicieuse de spontanéité, d’émotion face à un Ryan Gosling délicat, élégant, tous deux chantant et dansant avec enthousiasme. On peut sans doute regretter qu’il  n’y ait  pas davantage de numéros de danse, mais je pense que cela n’aurait pas apporté grand-chose de plus au film et n’oublions pas que Emma Stone et Ryan Gosling ne sont ni Fred Astaire, ni Cyd Charisse. Mais ainsi conçu et réalisé, l’ouvrage est une réussite, ne serait-ce que parce qu’il est euphorisant, dénué de toute vulgarité, qu’il charme le spectateur par son contenu et ne cède jamais à la mièvrerie. Aussi, apprécie-t-on de passer deux heures aussi plaisantes à contempler autant d’images belles et à entendre autant de musique envoûtante.

 

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La La Land de Damien Chazelle
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Présentation

  • : LA PLUME ET L'IMAGE
  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.

Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


Charlie Chaplin

 

"Innover, c'est aller de l'avant sans abandonner le passé."

 

Stanley Kubrick

 

 

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