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13 juin 2006 2 13 /06 /juin /2006 08:03
UN VIOLON SUR LE TOIT de NORMAN JEWISON
UN VIOLON SUR LE TOIT de NORMAN JEWISON

 

Voilà bien un film étonnant qui alterne cocasserie et émotion. L'action se situe au début du XXème siècle dans une bourgade d'Ukraine nommée Anatevka. Dans ce village, la vie est réglée selon la tradition établie depuis des lustres, comme si le temps avait suspendu son vol, entre la communauté chrétienne orthodoxe et la communauté juive, l'une et l'autre ayant eu la bonne intelligence de se côtoyer sans se mélanger. Chacun respecte chacun et la vie s'y écoule dans une relative harmonie. Le laitier du village - Tevye - est un homme bienveillant qui mène avec sa famille une existence modeste et apparemment heureuse. Son seul souci est de trouver d'honnêtes maris à ses cinq filles. Cela va l'obliger à concéder bien des choses à ses proches, autant qu'à sacrifier certaines de ses convictions religieuses. Jusqu'au moment où ses certitudes seront gravement ébranlées par sa fille cadette, qui lui apprend qu'elle désire épouser un non-juif, le jeune russe Fyedka. C'est alors qu'un décret, promulgué par le tsar, somme les juifs de quitter la région, obligeant Tevye à s'exiler avec sa famille. Ce synopsis a le mérite de donner vie à une quantité de personnages ukrainiens et juifs : la marieuse, le rabbin, le boucher, le tailleur, le brigadier, le bolchevique, hauts en couleur, et de les placer dans des situations singulières, ce qui occasionne des sketchs savoureux, empreints de cet humour juif pittoresque, dont la charge comique et émotionnelle se révèle d'une efficacité remarquable. Ce qui explique, sans doute, le succès que remporta d'abord la pièce, puis le film. En effet, la première adaptation eut lieu à Broadway en 1964 et ne nécessita pas moins de 3242 représentations à guichet fermé. A Londres, en 1967, le nombre de représentations s'éleva à 2030, et ainsi de suite dans le monde entier, sans oublier Paris, avec sur les planches le magnifique chanteur Yvan Rebroff qui disposait - chose rare - d'un registre vocal de quatre octaves et demie. Le film a repris fidèlement le livret de la pièce, en y ajoutant l'ampleur que ne permettait pas une scène de théâtre. La seule différence avec la comédie musicale, montée par Jérôme Robbins, est celle-ci : le cinéaste Norman Jewison se vit dans l'obligation de porter à l'écran un spectacle plus coloré, plus mouvementé, s'inspirant d'un univers chagallien et  reconstituant minutieusement l'environnement mélancolique et austère des communautés juives de l'époque, dans les villages de la Russie profonde, pour amplifier l'oeuvre et lui donner ainsi sa tonalité cinématographique. Le rôle principal du laitier fut confié à Chaïm Topol, qui l'avait déjà interprété sur la scène de Tel Aviv, et où il se montre, égal à lui-même, aussi convaincant qu'au théâtre, dans ce personnage fantasque et touchant.

 

L'intrigue se déroule dans le monde clos d'une communauté juive de la Russie du début du XXème siècle. On y sent le poids des traditions et la crainte permanente des persécutions dont la population était couramment victime de la part du gouvernement. Les pogroms évoqués rappellent l'intolérance qui fut le lot des juifs à travers les siècles, mais la légèreté des dialogues, l'ironie toujours présente, la fantaisie des personnages, la cocasserie de certaines situations, la musique entraînante font que ce long métrage de 2h30 reste une comédie musicale à part entière, jamais pesante, dont l'intérêt ne faiblit pas, pour la raison que le sujet extrapole de beaucoup la seule existence de quelques villageois perdus dans l'obscure campagne russe. Le livret, inspiré d'une nouvelle de l'écrivain Sholem Aleichem, connu jusqu'en Chine, a su anticiper les événements immédiats et percevoir la fureur naissante du XXème siècle, ainsi que les bouleversements qui se profilaient à l'horizon,  frémissements d'un monde à l'aube de mutations capitales. Les courants d'idées qui ne vont plus cesser de le parcourir sont déjà subtilement évoqués : perte des valeurs traditionnelles, émancipation de la femme,  naissance du bolchevisme et du sionisme, attraction irrésistible de la modernité, au point que la liberté de ton de ce livret, que certains peuvent considérer comme subversive, aurait peut-être donné lieu à des difficultés de réalisation de nos jours. Pour toutes ces raisons, et pour ses qualités artistiques et musicales,  Un violon sur le toit  (1971) prend place parmi les plus belles, et surtout les plus originales, comédies musicales jamais portées à l'écran. Dans les années 1960-1970, aux lendemains du nazisme et des camps de concentration, le succès était assuré mais, depuis, il n'a pas pris une ride et ce spectacle grave et joyeux ne peut manquer d'émouvoir. De même que nombre de ses mélodies restent indémodables et présentes dans nos mémoires. Salué avec enthousiasme par une critique à l'unisson, il fut couronné par trois Oscars.

                             

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UN VIOLON SUR LE TOIT de NORMAN JEWISON
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6 juin 2006 2 06 /06 /juin /2006 08:52

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L
a comédie musicale My fair lady est l'une des nombreuses adaptations du mythe de Pygmalion et de Galatée. Il  prit naissance chez Ovide, poète latin né en 43 av. J.C. et mort en 16, dont l'ouvrage Les métamorphoses traite du mystère de la création artistique et exalte le pouvoir de l'art. Celui de l'artiste qui modèle son oeuvre et découvre, avec émerveillement, qu'elle prend vie. La métaphore de la statue devient un idéal à atteindre, le vivant invité à imiter l'art. 
"De retour chez lui, l'artiste va vers la statue de la jeune fille. Penché sur le lit, il lui donne un baiser ; il croit sentir que ce corps est tiède. De nouveau, il en approche sa bouche, tandis que ses mains tâtent la poitrine ; à ce contact, l'ivoire s'attendrit ; il perd sa dureté, il fléchit sous les doigts, il cède. (...) L'amant reste saisi ; il hésite à se réjouir, il craint de se tromper ; sa main palpe et palpe encore l'objet de ses désirs ; c'était bien un corps vivant ; il sent des veines palpiter au contact de son pouce. Alors le héros de Pathos adresse à Vénus de longues actions de grâce ; sa bouche presse enfin une bouche véritable ; la jeune fille a senti les baisers qu'il lui donne et elle a rougi ; levant vers la lumière un timide regard, elle a vu en même temps le ciel et son amant."

 Les métamorphoses - Pygmalion - Livre X
 

 

Le mythe connut une fortune exceptionnelle tant picturale que littéraire. Bernard Shaw, le dramaturge irlandais, écrivit un Pygmalion en 1912 qui eut un grand succès et fut à l'origine de la comédie musicale créée à Broadway en 1954 et reprise à Londres en 1958. Le décalage est grand entre le mythe original et l'histoire d'un professeur de linguistique de réputation internationale, snob et misogyne, Henri Higgins qui, par amusement, parie avec l'un de ses amis le colonel Pickering, de faire d'une marchande de fleurs inculte, aux manières grossières et à l'épouvantable accent cockney, Eliza Doolittle, une dame de la haute bourgeoisie, capable de briller dans les mondanités. Il y parviendra, mais l'élève dépassera le maître et il perdra cette femme qu'il avait modelée à son goût et à sa convenance. A partir de ce scénario, Alan Jay Lerner et Frederick Loewe vont écrire un livret et une partition musicale pleins de charme et de fantaisie qui feront fureur sur les scènes américaines, puis anglaises. Ayant assisté à l'un des spectacles, George Cukor eut l'idée d'en faire un film à grand spectacle, avec une mise en scène fastueuse et des vedettes capables d'attirer les foules dans les salles obscures.  Rex Harrison, qui avait déjà joué sur la scène de Broadway, fut de nouveau choisi pour tenir le rôle du professeur Higgins et lui prêter sa distinction, son élégante désinvolture, sa coquette ironie. Il est parfait dans ce personnage qui lui va comme un gant. Par contre, Audrey Hepburn, sur laquelle George Cukor jeta son dévolu pour interpréter la petite marchande de fleurs Eliza, ne correspond pas du tout au modèle. Et c'est là où le bât blesse. En définitive, la performance demandée à l'actrice n'est pas celle de changer une fille des rues en aristocrate, mais de se changer, elle, la déesse, en souillon. Et  le contre-emploi est ici trop énorme. Le naturel revenant au galop, malgré le talent, la souveraine classe de l'actrice perce à chaque instant sous les haillons de la pauvrette.  Pour cette raison et pour d'autres encore, je n'ai pas totalement adhéré à ce film. Certes, il y a des scènes magnifiques et Audrey Hepburn, par la suite, nous enchante de sa grâce et de son charme ; la mise en scène est somptueuse mais souvent cède à l'exubérance, si bien que l'on a l'impression de se trouver dans l'arrière-salle d'un antiquaire ; les costumes sont eux aussi surchargés et la délicieuse Audrey - qui n'est jamais si belle que vêtue d'une simple robe noire de Givenchy  -  ploie sous les fanfreluches, rubans, babioles de tous genres, comme une icône orientale. Beaucoup ne seront pas de mon avis, mais je dis les choses comme je les pense.

 

La scène du bal reste pour moi le vrai moment inoubliable. Le professeur Higgins ( Rex Harrison ), découvrant son chef-d'oeuvre et éprouvant, pour la première fois, une réelle émotion - qui met à mal son cynique pari - est superbe. Mais il n'en reste pas moins que cette pâmoison de beauté finit par lasser au bout de 2h40. Le film fut néanmoins récompensé par 8 oscars et 3 golden globe. Il est vrai qu'il avait coûté très cher et que la quête de la beauté est toujours un argument valable. " Pour moi - affirmait Cukor - My Fair Lady est une pièce avec de la musique. Si j'avais pensé à My Fair Lady comme à une comédie musicale, je ne l'aurais pas adaptée." Il décide par conséquent de tourner le film en continuité, selon la montée dramatique de l'intrigue, afin de suivre au plus près l'évolution du personnage d'Eliza, déclarant à ce propos : " J'ai essayé de faire d'Audrey Hepburn une Eliza telle que l'a conçue Edgar Shaw ; la digne fille de son père, une force de la nature, déchaînée, et libérée de toute entrave, douée d'une intelligence encore en sommeil, et qui s'éveillera peu à peu. Elle comprend alors que son antagoniste cache sous une carapace rebutante une nature d'élite". Cukor déclare par ailleurs : " Je n'ai pas cherché à modifier My Fair Lady. C'était parfait à la scène. J'ai tenu à conserver l'aspect théâtral de certaines scènes, comme le numéro d'Ascot. Tout le film est naturellement très stylisé. Cela le devait, c'est un film musical. Gene Allen s'occupa des décors, laissant les costumes à Cecil Beaton qui est un spécialiste de l'époque edwardienne. La pièce était en fait inspirée non pas de l'oeuvre originale de Shaw mais du film de 1938. Ce qui m'a le plus intéressé est le fait que c'était moins une intrigue amoureuse et romantique qu'un affrontement de mentalités".  

 


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Effectivement, tout semble opposer le monde glauque qui hante le marché de Covent Garden et cette haute société post-victorienne qui se plaît aux courses d'Ascot et dans les bals à la mode. Le tournage ne sera pas pour autant idyllique, en raison de l'antagonisme qui existe également au sein de l'équipe, entre Cukor et Beaton. Cukor va très souvent succomber, comme nous, sous une avalanche de bibelots et de fanfreluches. Mais le film reste malgré tout une réalisation somptueuse, sinon pompeuse, et le charme d'Audrey opère, dès qu'elle est chargée d'illustrer la jeune femme, plus idéale encore que le rêve de son mentor. La musique est jolie, les voix agréables à entendre et, pour sûr, on n'a pas lésiné sur le luxe. Alors ne boudons pas notre plaisir et oublions, autant que faire se peut, le poids souvent exagéré de cette trop parfaite reconstitution d'époque, pour laquelle - ai-je lu quelque part - les tapis d'Orient de la demeure des Higgins furent reteints pour parfaire l'harmonie des couleurs.

 

                          

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Pour lire l'article consacré à Audrey Hepburn, cliquer sur son titre : 

 

AUDREY HEPBURN - PORTRAIT



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3 juin 2006 6 03 /06 /juin /2006 10:38
UN AMERICAIN A PARIS de VINCENTE MINNELLI

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Un américain à Paris se situe dans la lignée des comédies musicales qui ont fait le succès d'Hollywood et que les américains ont su élever au rang d'art complet, qui unit la danse, le chant, le music-hall, le tout enrobé dans des mises en scène sans faille et servi par des chorégraphes et danseurs au talent exceptionnel. Ainsi  en a-t-il été d'artistes comme Fred Astaire, Ginger Rogers, Cyd Charisse et Gene Kelly, que nous avions déjà remarqué dans l'euphorisant Chantons sous la pluie. Lors de ce tournage, le danseur choisit de prendre pour partenaire  la délicieuse Leslie Caron, qu'il imposa à Vincente Minelli, non seulement pour son minois mutin, mais pour ses qualités de danseuse qui ne lui avaient pas échappé, lors d'un voyage à Londres, où elle se produisait dans les ballets de Roland Petit. Quant au rôle du chanteur de music-hall, fiancé de Lise (Leslie Caron), Maurice Chevalier avait été pressenti dans un premier temps, mais, l'homme au canotier étant sous contrat, ce fut Georges Guétary, peu connu du public américain, que l'on engagea à sa place. Si ce film mérite notre intérêt et notre admiration à plus d'un titre, il a en outre un charme particulier, celui de nous promener dans le Paris des années folles et de nous le faire découvrir sous ses aspects les plus ludiques, avec ses voitures d'époque, ses rues encore villageoises, ses marchands des quatre-saisons, ses étals, ses quais, où l'on croisait les pêcheurs et les amoureux, un Paris d'une élégante désinvolture, où les femmes étaient toutes ravissantes et paraissaient sortir de la toile d'un peintre impressionniste ou du sonnet d'un poète. Réalisation d'autant plus surprenante que le film fut tourné aux Etats-Unis. La reconstitution est proprement fabuleuse.

 

Un américain à Paris est à part égale gai et nostalgique, enchanteur et romantique, teinté parfois d'une gravité à peine voilée, qui unit, en un mélange savoureux, l'imaginaire de son auteur Vincente Minelli et la fantaisie débridée de son héros principal  Gene Kelly. Cela semble plus marqué encore dans le ballet final qui dure plus de quinze minutes, prouesse technique et vision d'un monde qui ne se peut atteindre que de manière allégorique. Ayant obtenu de la soeur de George Gershwin les droits des chansons de son frère, Arthur Freed construisit le scénario du film à partir de cet élément majeur : la musique. Minnelli écrivit à ce propos dans sa biographie : " Le film représentait à mes yeux la synthèse de toutes les influences que j'avais essayé d'exprimer dans les années 40. Tout ce que je connaissais de Paris ou avait entendu dire de cette ville devait se matérialiser ici. Après avoir étudié des milliers de photos avec le décorateur de plateau Preston Ames, nous avons restitué ensemble un Paris si authentique que les Français furent très étonnés d'apprendre que le film fut tourné aux USA".



Arthur Freed et Vincente Minnelli avaient espéré travailler dans la capitale française, mais l'autorisation leur fut refusée par les producteurs, considérant que cela entraînerait des frais de déplacement considérables. Ce qui leur donna l'idée d'envisager les extérieurs selon une optique de peintre, en une symphonie de couleurs, et de créer les décors stylisés de Paris en s'inspirant des toiles impressionnistes. C'est ainsi que Un américain à Paris rend hommage à Dufy (la place de la Concorde), à Renoir (le marché aux fleurs), à Utrillo (les rues de Montmartre) et au douanier Rousseau (le jardin des Plantes), à Van Gogh (l'Opéra) ou à Toulouse-Lautrec (le Moulin-Rouge). Ce souci de mise en scène incita George Gibson, du département artistique, à organiser un concours de dessins et à sélectionner les tableaux qui évoquaient le mieux la facture de chacun de ces artistes, recréant en studio une capitale typique et pittoresque. Montmartre, les quais de la Seine, Notre-Dame apparaissent dès lors dans un mirage hollywoodien. Mais il restait à tourner le final que Minnelli, cédant à son imagination féconde, souhaitait à la fois audacieux sur le plan visuel et chorégraphique. Jamais, en effet, un ballet n'est apparu aussi artistique et intelligent, tourné en seulement quatre semaines pour un peu plus d'un million de dollars. Alors que le reste du film a parfois souffert d'influences contradictoires, le ballet final, éblouissant, parvient à réaliser une osmose parfaite entre le rêve de Minnelli et la volonté de Gene Kelly d'imposer sa marque personnelle. Si bien que cette comédie musicale est probablement celle qui recueillit le plus grand succès d'audience auprès d'un public enthousiaste et conquis et mérita, ô combien, d'être primée par l'Oscar du meilleur film, puis de la meilleure direction musicale, scénario, décors, photographie et costumes. Tous les meilleurs réunis en apothéose.

 

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UN AMERICAIN A PARIS de VINCENTE MINNELLIUN AMERICAIN A PARIS de VINCENTE MINNELLI
UN AMERICAIN A PARIS de VINCENTE MINNELLI
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26 mai 2006 5 26 /05 /mai /2006 16:27
WEST SIDE STORY

                                        

West side story est dans le genre "comédie musicale" le chef -d'oeuvre absolu.  Adaptation d'un spectacle créé à Broadway, il bénéficie de l'admirable chorégraphie de Jérome Robbins, de la musique de Léonard Bernstein et de la mise en scène originale de Robert Wise. Sans compter l'interprétation qui fut à la hauteur du challenge, dont celle de Natalie Wood, émouvante Maria et du magnifique danseur qu'était George Chakiris. Tout est donc réuni pour que cette romanesque transposition du Roméo et Juliette de William Shakespeare, dans l'Amérique des années 50, ne déçoive pas la critique la plus pointue. Il est vrai que, depuis lors, ce film, réalisé en 1961, n'a pas pris une ride et que les nouvelles générations l'adoptent avec le même enthousiasme. Le sujet est certes toujours actuel, puisque les Capulets et les Montaigus de l'époque de la Renaissance sont remplacés par les bandes rivales des Sharks et des Jets du quartier West Side de New-York. C'était la première fois qu'une comédie musicale osait aborder les affrontements ethniques (ceux entre Porto-Ricains, Italiens, Irlandais et Polonais) et la violence urbaine. Pour que l'on partage plus étroitement le sentiment d'étouffement qu'éprouvaient les jeunes protagonistes à être parqués dans des quartiers sinistres, le film s'ouvre sur une vue aérienne de Manhattan avec ses gratte-ciel gigantesques qui rendent les rues semblables à de minuscules artères pour lilliputiens. Pour le reste, le film fut tourné en studio et ne nécessita pas moins de 50 décors différents, la ville devenant un élément essentiel de l'action, avec ses terrains vagues, ses parkings déserts, ses éclairages inquiétants, ses graffitis qui exhalent l'atmosphère oppressante dans laquelle vivait quotidiennement la jeune population d'immigrés. Le film nous touche d'autant plus, que cette réalité est encore actuelle, qu'elle s'est même aggravée, si bien que l'on peut se demander à l'heure des " tournantes" si le tendre sourire de Maria ne s'est pas effacé à jamais...


 

Tout a été dit sur ce film, sa musique, ses acteurs, sa mise en scène. Rappelons-nous qu'il fut récompensé par dix Oscars et que des mélodies comme Maria, América, Cool, Somewhere, nous émeuvent autant que celles d'un Gershwin ou d'un Brahms, c'est dire à quel niveau se situe cette réalisation musicale et chorégraphique, servie par un livret en tous points réussi. Initialement la pièce devait opposer des Irlandais à des Juifs de New-York, mais les auteurs Arthur Laurents (le livret), Stephen Sondheim (les chansons), Leonard Bernstein (la musique) décidèrent finalement de porter leur choix sur des gangs de Blancs et de Portoricains qui correspondaient mieux aux tensions sociales de l'époque. Créée le 26 septembre 1957 au Winter Garden de New-York, West Side Story obtint immédiatement un succès immense. Lorsque le projet d'en faire un film prit de la consistance, les responsables cherchèrent aussitôt à obtenir la collaboration de Jérome Robbins, le créateur du spectacle et de sa chorégraphie et Robbins, à son tour, proposa de fixer le choix de la mise en scène cinématographique à Robert Wise. Dès sa sortie en salles, le film frappa par sa nouveauté, ouvrant à la comédie musicale de nouvelles perspectives. Mais il faut bien admettre aujourd'hui que celui-ci n'eut pas à proprement parler de descendance musicale, mais influença probablement des cinéastes comme Coppola ou Lars Von Trier.

 

L'ouverture demeure de nos jours encore un fabuleux moment de cinéma dans lequel l'intégration des danseurs au cadre new-yorkais est stupéfiante. L'entente entre le metteur en scène Robert Wise et le maître de ballet Jérome Robbins y est pour beaucoup 

"Notre collaboration s'est étendue à tous les niveaux du scénario, au choix des décors, des comédiens, bien que Robbins ne soit pas resté avec moi jusqu'à la fin du film - écrira Wise. Et savez-vous pourquoi ? - ajoutait-il. Parce que nous nous entendions trop bien. Notre complicité nous a mis terriblement en retard sur le plan du travail et le studio a jugé bon de nous séparer, surtout que nous avions longuement étudié et répété tous les numéros de danse et qu'il avait déjà tourné quatre ou cinq ballets."

Robert Wise a donc terminé seul la réalisation et ce film témoigne d'une parfaite osmose entre les deux metteurs en scène.


Pour lire l'article consacré à Natalie Wood, cliquer sur son titre :  


NATALIE WOOD - PORTRAIT

 

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WEST SIDE STORY
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13 mai 2006 6 13 /05 /mai /2006 20:30
CITIZEN KANE d'ORSON WELLES

    
Orson Welles,  né le 6 mai 1915 à Kenosha dans le Wisconsin, avait 25 ans lorsqu'il réalisa Citizen Kane. Formé, en tant qu'acteur de théâtre, à la Todd School de Woodstock, il commence par adapter et filmer des pièces pour la radio et le cinéma avec sa troupe, la " Mercury Théâtre ". Dès son jeune âge, il apparait comme un meneur, épris de nouveauté et doté du sens de la dérision, d'autant que la mort de ses parents l'oblige trop vite à se prendre en charge et à se débrouiller seul. La solitude va marquer sa vie et celle de ses héros. Citizen Kane  nous conte l'existence compliquée et conflictuelle d'un magnat de la presse ( il s'est inspiré de William Hearst ), sur laquelle pèse une énigme, que le cinéaste va amplifier et aggraver à plaisir, mais avec quel talent ! Que signifiait, en effet, ce mot "rosebud " que Kane avait prononcé juste avant de mourir ? La vie du personnage est  retracée d'après l'enquête conduite scrupuleusement par un journaliste, à l'aide de flashbacks, qui sont utilisés, pour l'occasion, de façon inhabituelle, autorisant le cinéaste à des variations qui s'appliquent toutes à déconstruire le temps. Chacun de ceux qui ont côtoyé Kane donne de lui une version différente, si bien que les récits s'entrecroisent, brouillent les pistes et accroissent le sentiment de mystère qui nimbe la personnalité du héros. Ainsi Welles introduisait-il, dans le jeune cinéma américain, des innovations que ses successeurs utiliseront avec plus ou moins de bonheur.  Mais, à moins de trente ans, il  venait de marquer d'une empreinte indélébile le cinéma international, son influence ayant  tôt fait de déborder les frontières de l'Amérique. Ainsi a-t-il  eu recours à la "profondeur du champ", comme si les scènes se superposaient ou s'entrechoquaient, dilatant l'espace, ainsi que le flashback avait déconstruit le temps, et offrant à l'art cinématographique des possibilités encore insoupçonnées.


 

Malgré les trouvailles techniques, esthétiques, narratives, le film fut un échec commercial. La firme RKO retira même à son auteur le droit de superviser ses films suivants. Ainsi en va-t-il trop souvent des novateurs, rarement reconnus de leur vivant. Le génie hors norme de Welles et son goût du subversif en faisaient un homme à part, qui ne parvenait pas à s'adapter à la cuisine des grands studios hollywoodiens. Il aimait trop l'outrance des personnages grandioses et monstrueux. En amour, il ne fut guère plus heureux, mais il laisse derrière lui une filmographie remarquable, où voisinent Othello et Macbeth, auxquels il devait s'identifier. Citizen Kane, son film de jeunesse, le place aux côtés d'un Eisenstein ou d'un Dreyer. Oeuvre personnelle s'il en est,  réflexion désabusée sur le sens de la vie et le tragique du destin humain, il y révèle son savoir-faire, son habileté et sa formidable originalité de créateur.

 


Pour lire l'article consacré à Orson Welles, cliquer sur son titre :

 

ORSON WELLES OU LA DEMESURE

 

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CITIZEN KANE d'ORSON WELLES
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30 avril 2006 7 30 /04 /avril /2006 10:53
ENTRONS DANS LA DANSE de CHARLES WALTERS

 
En ces temps de vacances, un peu de champagne, un peu de joie, un peu de fête. C'est ce que nous propose ce film qui n'a pas pris une ride et que je vous invite à visionner lors d'une douce soirée entre amis, avant de partir danser à votre tour. Entrons dans la danse est l'un de ceux qui ont contribué à assurer la renommée du couple Astaire/ Rogers, de même qu'il  nous révèle cet art de la danse qu'ils ont servi avec un talent inégalé. Danseurs-nés tous deux, leur rencontre à Hollywood en 1930 fut un merveilleux hasard. Elle leur permit, dès l'année suivante, de tourner leur premier film : La joyeuse divorcée. La firme RKO avait immédiatement deviné que leur association était vouée au succès et, en effet, celui-ci fut présent au rendez-vous. Ce premier galop d'essai réussi, ils vont enchaîner film sur film avec le même brio et cinq nominations aux Oscars les feront bientôt entrer dans la légende de Hollywood. Il est vrai qu'ils avaient tout pour séduire : la grâce, la légèreté, l'élégance et une technique, une virtuosité insurpassables. Alors ne boudons pas notre plaisir, vite à nos DVD si c'est possible. Le film de Charles Walters est entièrement consacré à  la danse et c'est tant mieux. Dans le genre, c'est une réussite parfaite, un enchantement pour l'oeil et l'oreille, une suite de ballets  étincelants, de duos inoubliables, où Fred et Ginger donnent le meilleur d'eux-mêmes et nous envoûtent. L'histoire est celle d'un couple de danseurs célèbres Josh et Dinah tenté un moment par une carrière d'acteurs dramatiques, mais qui s'empresse de revenir à ses premières amours - a été taillée à leurs mesures. Ils peuvent ainsi donner libre cours à leurs improvisations, à ces pas de deux époustouflants qui s'enchaînent au rythme des claquettes. Les toilettes de Ginger Rogers sont ravissantes, sa beauté et sa souplesse font merveille auprès d'un Fred Astaire d'une sobre élégance. Le film est joyeux, enlevé, les décors se succèdent comme les ballets, selon une synchronisation qui ne laisse rien au hasard. Il y a entre ces deux admirables danseurs  une magie qui nous atteint et nous subjugue. Comment faire mieux ? La perfection est réellement atteinte. On est là au sommet de ce que Hollywood a pu et su accomplir pour notre plus grand bonheur.

 

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ENTRONS DANS LA DANSE de CHARLES WALTERS
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Présentation

  • : LA PLUME ET L'IMAGE
  • : Ce blog n'a d'autre souhait que de partager avec vous les meilleurs moments du 7e Art et quelques-uns des bons moments de la vie.
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.

Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


Charlie Chaplin

 

"Innover, c'est aller de l'avant sans abandonner le passé."

 

Stanley Kubrick

 

 

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