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6 mars 2011 7 06 /03 /mars /2011 10:00
ORSON WELLES OU LA DEMESURE

 

Génie adulé dès l'âge de 26 ans, Orson Welles, acteur et réalisateur, a marqué le 7e Art d'une empreinte indélébile par ses innovations et le souffle dont il a su animer chacune de ses oeuvres. Cependant sa vie très remplie garde curieusement un goût d'inaccompli, car ses films, qui ont révolutionné le cinéma pour longtemps, furent le plus souvent  montés et coupés contre son avis, inachevés et présentés dans une version partielle et que nombre de ses projets ne purent aboutir, ce fut le cas pour "De l'autre côté du vent" et "Le roi Lear"Orphelin de père et de mère à l'âge de 13 ans, Orson Welles parcourt l'Europe en compagnie de son tuteur, se forgeant une immense culture et découvrant en Angleterre Shakespeare, qui restera à tout jamais son maître à penser et son inspirateur. Trichant sur son âge, il se fait engager au théâtre à l'âge de 16 ans et, peu de temps, après  fonde et dirige la troupe du Mercury Theatre qui compte des acteurs plus âgés que lui. Mais qu'importe ! l'individualité et l'audace de ses mises en scène, presque toutes au service de l'oeuvre shakespearienne, vont braquer sur lui les projecteurs et lui permettre de gagner Hollywood et de tourner, en 1941, "Citizen Kane" pour lequel il a financièrement carte blanche. Ce scénario original d'Herman Mankiewicz présente une structure en flash backs tout à fait exceptionnelle pour l'époque, le réalisateur revisitant le langage cinématographique par l'utilisation de la profondeur du champ, de la contre-plongée et du plan-séquence qui désoriente le public et contribue à son échec financier, si bien qu'il est dessaisi du montage de "La splendeur des Amberson" et que deux autres projets sont abandonnés. Il est certain qu'un génie tel que lui irrite et énerve, tant et si bien qu'il ne gardera  le contrôle, du début à la fin, que d'un seul de ses films Othello en 1952. " Je ne me suis jamais plaint d'Hollywood - dira-t-il, mais je ne suis guère l'un des grands bénéficiaires du système". Malgré les difficultés, qu'il ne cessera de rencontrer, les montages qu'on lui retire, les projets non aboutis, ses films sont d'une invention si fulgurante et d'une si grande richesse dans leur peinture de la nature humaine, que la patte de Welles se reconnait d'emblée et que François Truffaut écrira à ce propos : " Si le cinéma muet nous a apporté de grands tempéraments visuels : Murnau, Eisentein, Dreyer, le cinéma parlant n'en a amené qu'un seul, un seul cinéaste dont le style soit immédiatement reconnaissable sur trois minutes de film, et son nom est Orson Welles ".

 

Mais accepté comme acteur, Welles veut l'être d'abord et avant tout comme cinéaste. Et puisque Hollywood lui refuse des crédits, il traverse l'Atlantique pour rejoindre l'Europe. Chacun de ses films va être alors un coup de maître. Laissant derrière lui des oeuvres comme "Le criminel", "La splendeur des Amberson" et "La dame de Shanghaï", il se lance dans de nouveaux chefs-d'oeuvre comme "Othello", qui ne lui demandera pas moins de quatre années de travail, "Dossier secret" et "Falstaff". Mais nombreux sont ceux qu'il tourne sur plusieurs mois sans jamais y mettre un point final. Son retour à Hollywood, le temps d'y produire un thriller magistral La soif du mal en 1958, restera sans lendemain. C'est grâce à la télévision française qu'il va réaliser son ultime chef-d'oeuvre "Une histoire immortelle", où il aborde, pour la première fois, la couleur. Grâce à sa notoriété, il entraîne avec lui des collaborateurs qui acceptent de travailler à bas salaire, ce sera le cas de Jeanne Moreau, de Marlene Dietrich, de Lili Palmer et de bien d'autres, qui ne résisteront pas à l'appel d'un homme d'un tel talent et d'une telle inventivité. Auteur d'un oeuvre brillante qui fait la part belle à l'image, à la parole et au son, les films de Welles ont ceci de particulier qu'ils affirment la souveraineté et la plénitude de leur créateur, joyeux magicien qui a basé la plupart de ses opus sur la recherche de l'identité et la machination, selon le modèle initié par "Citizen Kane". Par ailleurs, si le mensonge favorise les plus monstrueuses machinations (La dame de Shanghaï, La soif du mal, Macbeth), il peut également déboucher sur la tragédie comme dans Othello, où Welles s'est si profondément impliqué en tant qu'acteur et metteur en scène, car Othello, n'était-ce pas lui dans sa puissance, sa passion et sa démesure ?

 

Pour lire les articles de la rubrique consacrée aux réalisateurs, cliquer sur son titre :


LISTE DES ARTICLES - REALISATEURS du 7e ART

 

Et pour consulter la liste complète des articles de la rubrique CINEMA AMERICAIN & CANADIEN, dont " Citizen Kane " et  "La dame de Shanghaï", cliquer sur le lien ci-dessous :  

 

LISTE DES FILMS DU CINEMA AMERICAIN ET CANADIEN

 

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commentaires

N
magnifique cet article armelle - de plus, il complète à la perfection le cycle de conférences que j'ai le plaisir de suivre en ce moment
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D
<br /> Pourquoi se souvient-on de Citizen Kane comme du film phare en matière de flash backs ? Le cinéma muet les utilisait déjà ("Histoire d'un crime", de Ferdinand Zecca) et bien avant lui, il y eut par<br /> exemple "The Power and the Glory" (1933) de William K. Howard et "Le jour se lève" (1939) de Carné... C'est sans doute le charisme de Welles qui aujourd'hui encore impressionne tant...<br /> <br /> <br />
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P
une sacrée stature en tous les cas. J'ai vu Jane EYRE et la Dame de SHANGAI. Un article intéressant : je comprends mieux pourquoi je le voyais si imposant... quelqu'un qui se passionne pour Shakespeare ne peut être qu'imposant
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T
Un des très grands, doté à la fois d'un charisme assez hors du commun en tant qu'acteur et d'un talent et d'une intelligence rare en tant que réalisateur. Une merveille comme Citizen Kane en premier film, c'est quand même assez redoutable...
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  • Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
  • Auteur de treize ouvrages, passionnée par les arts en général, aime écrire et voyager.
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Texte Libre

Un blog qui privilégie l'image sans renoncer à la plume car :

 

LES IMAGES, nous les aimons pour elles-mêmes. Alors que les mots racontent, les images montrent, désignent, parfois exhibent, plus sérieusement révèlent. Il arrive qu'elles ne se fixent que sur la rétine ou ne se déploient que dans l'imaginaire. Mais qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, elles ont l'art de  nous surprendre et de nous dérouter.
La raison en est qu'elles sont tour à tour réelles, virtuelles, en miroir, floues, brouillées, dessinées, gravées, peintes, projetées, fidèles, mensongères, magiciennes.
Comme les mots, elles savent s'effacer, s'estomper, disparaître, ré-apparaître, répliques probables de ce qui est, visions idéales auxquelles nous aspirons.
Erotiques, fantastiques, oniriques, elles n'oublient ni de nous déconcerter, ni de nous subjuguer. Ne sont-elles pas autant de mondes à concevoir, autant de rêves à initier ?

 

"Je crois au pouvoir du rire et des larmes comme contrepoison de la haine et de la terreur. Les bons films constituent un langage international, ils répondent au besoin qu'ont les hommes d'humour, de pitié, de compréhension."


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